La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/07/2024 | FRANCE | N°23TL01393

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 3ème chambre, 18 juillet 2024, 23TL01393


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 21 avril 2023 par lequel la préfète de Vaucluse a pris à son encontre une obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.



Par un jugement n° 2301468 du 17 mai 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.



Procédure devant la

cour :



Par une requête, enregistrée le 15 juin 2023, M. A..., représenté par Me Hequet, demande à la cour ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 21 avril 2023 par lequel la préfète de Vaucluse a pris à son encontre une obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2301468 du 17 mai 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 juin 2023, M. A..., représenté par Me Hequet, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 17 mai 2023 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 21 avril 2023 de la préfète de Vaucluse portant obligation de quitter le territoire et interdiction de retour sur le territoire français ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les décisions attaquées sont entachées d'une incompétence de l'auteur de l'acte dès lors qu'il n'est pas justifié de l'empêchement du secrétaire général ;

- la motivation de l'obligation de quitter le territoire est insuffisante et la décision est entachée de contradiction de motifs quant au fait qu'il aurait ou non fait l'objet d'une interdiction de retour sur le territoire ;

- la notification de l'obligation de quitter le territoire est irrégulière, dans la mesure où elle est intervenue en langue française qu'il comprend difficilement, et non en langue arabe, ce qui constitue une violation des droits de la défense, qui constituent un principe à valeur constitutionnelle ;

- l'obligation de quitter le territoire est entachée d'illégalité au regard du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile compte tenu de l'ancienneté et de l'intensité des liens l'unissant à son épouse, de nationalité française, avec laquelle il était en concubinage avant leur mariage le 14 janvier 2023 et qui est en état de grossesse ;

- il est porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'obligation de quitter le territoire est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle compte tenu de ses attaches familiales et privées en France où il se trouve depuis plus de trois ans, et où il s'est marié et a fondé un foyer ;

- l'obligation de quitter le territoire sans délai est entachée d'illégalité au regard du 1° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile .

Par une décision du 1er mars 2024, le bureau d'aide juridictionnelle auprès du tribunal judiciaire de Toulouse a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. A....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Bentolila, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant algérien né le 12 mai 1995, a demandé au tribunal administratif de Nîmes l'annulation de l'arrêté du 21 avril 2023 par lequel la préfète de Vaucluse lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

2. M. A... relève appel du jugement du 17 mai 2023 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne l'ensemble des décisions attaquées :

3. En premier lieu, l'arrêté en litige a été signé par M. C... B... en sa qualité de directeur de cabinet en vertu d'un arrêté de délégation de signature du 9 décembre 2022 régulièrement publié au recueil spécial des actes administratifs n° 84-2022-127 du 14 décembre 2022, laquelle dans son article 2, indique qu'en cas d'absence ou d'empêchement de M. Christian Guyard, secrétaire général de la préfecture, M. C... B... est habilité à signer l'ensemble des actes mentionnés à l'article 1er de cet arrêté, au nombre desquels figurent notamment, les actes relatifs à l'éloignement des étrangers en situation irrégulière. Dès lors qu'il n'est pas établi et qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que M. Guyard, secrétaire général de la préfecture, n'ait pas été absent ou empêché, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des arrêtés en litige manque en fait et doit, dès lors, être écarté.

4. En deuxième lieu, ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, l'arrêté du 21 avril 2023 alors même qu'il comporte la mention, dans son titre, d'une interdiction de retour, n'a pas entendu prononcer une telle interdiction ainsi qu'il est indiqué dans le corps de cet arrêté, alors que, par ailleurs, le dispositif de cet arrêté n'édicte dans ses articles 1 et 2, que des décisions d'obligation de quitter le territoire et de fixation du pays de destination de la mesure d'éloignement. Il suit de là que le moyen tiré d'une contradiction affectant l'arrêté en cause , laquelle ne constitue qu'une erreur de plume, ne peut être qu'écarté.

5. En troisième lieu, les conditions dans lesquelles un acte est notifié renvoient à des circonstances postérieures à cet acte et se trouvent en conséquence sans incidence sur sa légalité. Dès lors, le moyen tiré de ce que la notification de l'obligation de quitter le territoire serait irrégulière dès lors qu'elle est intervenue en langue française, est, en tout état de cause, inopérant.

6. En quatrième lieu, le moyen invoqué sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au demeurant abrogé, est inopérant à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français, alors qu'il est en tout état de cause constant que M. A... n'a pas présenté de demande de titre de séjour.

7. En cinquième lieu, en vertu des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. M. A... se prévaut de son mariage, le 14 janvier 2023, avec une ressortissante française, se trouvant en état de grossesse à une date pouvant être estimée au 27 mars 2023. Toutefois, compte tenu de ce que l'entrée en France de l'appelant est récente, ce dernier ne justifiant pas au demeurant être entré en France comme il l'allègue, au début de l'année 2020, l'obligation de quitter le territoire, qui ne fait pas obstacle, en l'absence d'interdiction du territoire, à son retour en France dans des conditions régulières, ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, alors qu'il est par ailleurs constant que les parents et les frères et sœurs de M. A... se trouvent en Algérie. Pour les mêmes motifs, et alors que l'intéressé ne justifie pas d'une intégration particulière en France, l'obligation de quitter le territoire n'est pas entachée d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de sa situation personnelle.

9. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicable à la date de la décision attaquée : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". L'article L. 612-3 du même code dispose que : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : 1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité (...)".

10. En l'espèce, dès lors que l'appelant ne justifie pas d'une entrée régulière en France, qu'il n'a pas présenté de demande de certificat de résidence et qu'il avait manifesté la volonté de se maintenir en France malgré l'obligation de quitter le territoire, la décision le privant de délai de départ volontaire pouvait être légalement prise sur le fondement des 1° et 8° des articles L. 612-2 et L 612-3 précités du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de Vaucluse.

Délibéré après l'audience du 4 juillet 2024, à laquelle siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Bentolila, président-assesseur,

Mme Beltrami, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 juillet 2024.

Le rapporteur,

P. Bentolila

Le président,

É. Rey-Bèthbéder

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23TL01393 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL01393
Date de la décision : 18/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Rey-Bèthbéder
Rapporteur ?: M. Pierre Bentolila
Rapporteur public ?: Mme Perrin
Avocat(s) : HEQUET

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-18;23tl01393 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award