La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/07/2024 | FRANCE | N°22TL21159

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 4ème chambre, 22 juillet 2024, 22TL21159


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... C... et Mme D... B... épouse C... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler le certificat d'urbanisme opérationnel délivré au nom de l'Etat par le maire de Sainte-Croix-Volvestre le 20 mai 2019 déclarant non réalisable le projet de construction d'une maison d'habitation avec garage sur un terrain situé lieu-dit Pont d'Apert ainsi que la décision du 14 août 2019 du préfet de l'Ariège rejetant le recours gracieux formé contre ce certificat d'urbanis

me.



Par un jugement n° 1905826 du 18 mars 2022, le tribunal administratif de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... et Mme D... B... épouse C... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler le certificat d'urbanisme opérationnel délivré au nom de l'Etat par le maire de Sainte-Croix-Volvestre le 20 mai 2019 déclarant non réalisable le projet de construction d'une maison d'habitation avec garage sur un terrain situé lieu-dit Pont d'Apert ainsi que la décision du 14 août 2019 du préfet de l'Ariège rejetant le recours gracieux formé contre ce certificat d'urbanisme.

Par un jugement n° 1905826 du 18 mars 2022, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, et un mémoires, enregistrés le 16 mai 2022 et le 16 octobre 2023, M. et Mme C..., représentés par Me Chatry-Lafforgue, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler le certificat d'urbanisme opérationnel du 20 mai 2019 et la décision du 14 août 2019 rejetant leur recours gracieux ;

3°) d'ordonner la délivrance d'un certificat d'urbanisme opérationnel déclarant réalisable leur projet ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Sainte-Croix-Volvestre et de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- leur demande devant le tribunal administratif n'avait pas à être notifiée en application de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- le certificat d'urbanisme opérationnel en litige ainsi que la décision rejetant leur recours gracieux ne sont pas suffisamment motivés ;

- le projet se situe en continuité des espaces urbanisés de la commune de Sainte-Croix-Volvestre et les parcelles formant le terrain d'assiette sont comprises dans les parties actuellement urbanisées de la commune ;

- un certificat d'urbanisme opérationnel déclarant réalisable une opération de construction avait été délivré lors de l'acquisition du terrain en cause et des parcelles situées au-delà des leurs ont été construites ;

- la commune ayant toujours souhaité le développement de cette partie de son territoire, les parcelles en cause sont desservies par les réseaux d'eau et d'électricité.

Par un mémoire, enregistré le 9 janvier 2023, la commune de Sainte-Croix-Volvestre, représentée par Me Faure-Tronche, conclut à l'annulation du certificat d'urbanisme opérationnel du 20 mai 2019 et de la décision du 14 août 2019 rejetant le recours gracieux formé contre ce certificat d'urbanisme.

Elle soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont examiné la continuité de l'urbanisation au regard de la notion de hameau, sans regarder si cette continuité pouvait être établie par rapport à des groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants en application de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme ;

- les premiers juges ont commis une erreur manifeste d'appréciation en relevant qu'il n'existait pas de continuité entre le projet de M. et Mme C... et le centre bourg dès lors que les parcelles sont desservies et qu'il y a des constructions existantes le long de la route départementale ;

- le certificat d'urbanisme en litige est entaché d'une erreur d'appréciation dès lors que les parcelles de M. et Mme C... sont desservies par des voies et réseaux et que des constructions sont présentes à proximité ;

- le certificat d'urbanisme est entaché d'une erreur d'appréciation dès lors que la parcelle n° 2350, assiette du projet, est située en zone blanche du plan de prévention des risques d'inondation.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 septembre 2023, le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens d'appel n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code d'urbanisme ;

-l'arrêté du 20 septembre 1983 portant classement en zone de montagne de la commune de Sainte-Croix-Volvestre ;

-le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Chabert, président ;

- les conclusions de Mme Marie-Odile Meunier-Garner, rapporteure publique,

- les observations de Me Chatry-Lafforgue, représentant les appelants,

- et les observations de Me Faure-Tronche, représentant la commune de Sainte-Croix-Volvestre.

Considérant ce qui suit :

1. Le 15 décembre 2018, M. et Mme C... ont déposé auprès des services de la commune de Sainte-Croix-Volvestre (Ariège) une demande de certificat d'urbanisme opérationnel pour la réalisation d'une maison individuelle avec garage sur la parcelle cadastrée (ANO)section B ...(/ANO) comprise dans une unité foncière constituée également des parcelles nos 913, 2346 et 2348 situées lieu-dit Pont d'Apert. Le 20 mai 2019, le maire de Sainte-Croix-Volvestre a délivré au nom de l'Etat un certificat d'urbanisme déclarant non réalisable cette opération. Le recours gracieux formé contre ce certificat d'urbanisme a été rejeté par la préfète de l'Ariège par une décision du 14 août 2019. Par la présente requête, M. et Mme C... relèvent appel du jugement du 18 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ce certificat d'urbanisme opérationnel et de la décision rejetant leur recours gracieux.

Sur l'intervention de la commune de Sainte-Croix-Volvestre :

2. La commune de Sainte-Croix-Volvestre a intérêt à l'annulation du jugement attaqué qui rejette la demande d'annulation du certificat d'urbanisme par lequel son maire, agissant au nom de l'Etat, a déclaré non réalisable le projet de construction d'une maison d'habitation avec garage sur un terrain situé sur son territoire. Par suite, l'intervention en demande de la commune doit être admise.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme : " Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée : / (...) b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus. (...) ". Aux termes de l'article R. 410-14 du même code : " Dans les cas prévus au b de l'article L. 410-1, lorsque la décision indique que le terrain ne peut être utilisé pour la réalisation de l'opération mentionnée dans la demande, ou lorsqu'elle est assortie de prescriptions, elle doit être motivée. ".

4. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le certificat d'urbanisme contesté vise les dispositions du code de l'urbanisme dont il a été fait application et précise les raisons pour lesquelles le projet de M. et Mme C... est déclaré non réalisable au regard de l'article L. 122-5 du même code. En relevant que le terrain " est dissocié du village " et que le projet " accentuerait la notion d'habitat dispersé que présente ce secteur ", le maire de Sainte-Croix-Volvestre, statuant au nom de l'Etat, a ainsi suffisamment motivé en droit et en fait le caractère non réalisable de l'opération projetée par les appelants.

5. D'autre part, il est toujours loisible à la personne intéressée, sauf à ce que des dispositions spéciales en disposent autrement, de former à l'encontre d'une décision administrative un recours gracieux devant l'auteur de cet acte et de ne former un recours contentieux que lorsque le recours gracieux a été rejeté. L'exercice du recours gracieux n'ayant d'autre objet que d'inviter l'auteur de la décision à reconsidérer sa position, un recours contentieux consécutif au rejet d'un recours gracieux doit nécessairement être regardé comme étant dirigé, non pas tant contre le rejet du recours gracieux dont les vices propres ne peuvent être utilement contestés, que contre la décision initialement prise par l'autorité administrative. Il résulte de ce qui vient d'être exposé que M. et Mme C... ne peuvent utilement invoquer les vices propres dont serait entachée la décision du 14 août 2019 rejetant leur recours gracieux. Par suite, le moyen tiré du caractère insuffisant de la motivation des décisions contestées ne peut qu'être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme : " L'urbanisation est réalisée en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants, sous réserve de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension limitée des constructions existantes, ainsi que de la construction d'annexes, de taille limitée, à ces constructions, et de la réalisation d'installations ou d'équipements publics incompatibles avec le voisinage des zones habitées ". L'article L. 122-5-1 du même code dispose que : " Le principe de continuité s'apprécie au regard des caractéristiques locales de l'habitat traditionnel, des constructions implantées et de l'existence de voies et réseaux. ". Enfin, aux termes de l'article L. 122-6 du même code : " Les critères mentionnés à l'article L. 122-5-1 sont pris en compte : / (...) b) Pour l'interprétation des notions de hameaux et de groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants, lorsque la commune n'est pas dotée d'un plan local d'urbanisme ou d'une carte communale. ".

7. Il résulte des dispositions précitées que l'urbanisation en zone de montagne, sans être autorisée en zone d'urbanisation diffuse, peut être réalisée non seulement en continuité avec les bourgs, villages et hameaux existants, mais également en continuité avec les " groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants " et qu'est ainsi possible l'édification de constructions nouvelles en continuité d'un groupe de constructions traditionnelles ou d'un groupe d'habitations qui, ne s'inscrivant pas dans les traditions locales, ne pourrait être regardé comme un hameau. L'existence d'un tel groupe suppose plusieurs constructions qui, eu égard notamment à leurs caractéristiques, à leur implantation les unes par rapport aux autres et à l'existence de voies et de réseaux, peuvent être perçues comme appartenant à un même ensemble. Pour déterminer si un projet de construction réalise une urbanisation en continuité par rapport à un tel groupe, il convient de rechercher si, par les modalités de son implantation, notamment en termes de distance par rapport aux constructions existantes, ce projet sera perçu comme s'insérant dans l'ensemble existant.

8. Il ressort des pièces du dossier que le terrain dont M. et Mme C... sont propriétaires est constitué de quatre parcelles cadastrées section B nos 913, 2346, 2348 et 2350 et que l'opération pour laquelle le certificat d'urbanisme a été sollicité consiste à édifier une maison individuelle avec garage accolé sur la seule parcelle ... située en bordure de la route départementale n° 627. Si cette parcelle bénéficie d'une desserte par les réseaux d'eau et d'électricité, il ressort également des pièces du dossier qu'elle n'est bordée par aucune autre parcelle supportant déjà une construction. Par ailleurs, la parcelle ..., située également en bordure de la même voie publique, jouxte un cours d'eau et se trouve ainsi séparée des constructions existantes de l'autre côté de ce même cours d'eau. Enfin, la présence d'une seule maison en face de la parcelle ... de l'autre côté de la route ne permet pas de considérer que le projet de M. et Mme C... d'édifier sur leur terrain une maison individuelle constitue une urbanisation en continuité avec les " groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants " au sens et pour l'application de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme. Par suite, le certificat d'urbanisme opérationnel déclarant non réalisable cette opération n'a pas été délivré en méconnaissance des dispositions et principes mentionnés aux deux points précédents.

9. En troisième lieu, s'il est vrai qu'un certificat d'urbanisme opérationnel déclarant réalisable la construction d'une maison individuelle a été délivré le 11 octobre 2002 pour les mêmes parcelles préalablement à leur cession au bénéfice des appelants, ce certificat d'urbanisme a, en tout état de cause, cessé de produire ses effets à la date du certificat d'urbanisme en litige. Dans ces conditions, M. et Mme C... ne peuvent se prévaloir de la délivrance antérieure d'un tel certificat d'urbanisme à l'appui de leur requête.

10. En dernier lieu, il ressort des termes du certificat d'urbanisme en litige que le caractère non réalisable de l'opération projetée par M. et Mme C... est fondé sur la situation du terrain au regard des dispositions de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme. Si les appelants soulignent que la parcelle ... est susceptible d'accueillir une construction à usage d'habitation en raison de son classement en zone blanche par le plan de prévention des risques d'inondation de la commune de Sainte-Croix-Volvestre, cette circonstance est, par elle-même, sans incidence sur la légalité de la décision en litige. Dans ces conditions, le maire de Sainte-Croix-Volvestre pouvait, sans commettre d'erreur d'appréciation, mentionner que les parcelles nos 913, 2340 et 2348 sont situées en zone rouge du plan de prévention des risques naturels et que la parcelle ... est située pour partie en zone rouge et pour partie en zone blanche de ce même plan, la circonstance que des parcelles alentours soient construites étant à cet égard indifférente.

11. Il résulte de tout ce qui précède que les appelants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

12. Le présent arrêté, qui rejette l'appel formé par M. et Mme C..., n'implique aucune mesure d'exécution au sens des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative. Par suite, les conclusions à fin d'injonction des appelants ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge de l'Etat, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, une somme quelconque au titre des frais exposés par M. et Mme C... et non compris dans les dépens. Les mêmes dispositions s'opposent à ce que soit mise à la charge de la commune de Sainte-Croix-Volvestre, intervenante en demande et qui n'a pas la qualité de partie à l'instance, une somme sur le même fondement.

D E C I D E :

Article 1er : L'intervention de la commune de Sainte-Croix-Volvestre est admise.

Article 2 : La requête de M. et Mme C... est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et Mme D..., B... épouse C..., au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à la commune de Sainte-Croix-Volvestre.

Copie en sera adressée pour information au préfet de l'Ariège.

Délibéré après l'audience du 8 juillet 2024, où siégeaient :

- M. Chabert, président de chambre,

- M. Jazeron, premier conseiller,

- Mme Lasserre, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juillet 2024.

Le président-rapporteur,

D. Chabert

L'assesseur le plus ancien,

F. Jazeron La greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 22TL21159


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL21159
Date de la décision : 22/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Chabert
Rapporteur ?: M. Denis Chabert
Rapporteur public ?: Mme Meunier-Garner
Avocat(s) : FAURE-TRONCHE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-22;22tl21159 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award