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12/09/2024 | FRANCE | N°23TL02323

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 1ère chambre, 12 septembre 2024, 23TL02323


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision par laquelle le préfet de la Haute-Garonne a implicitement refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " visiteur ".



Par un jugement n° 2205301 du 11 juillet 2023, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 14 septembre 2023,

Mme B..., représentée par Me Balg, demande à la cour :



1°) d'annuler ce jugement du 11 juillet 2023 du tribuna...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision par laquelle le préfet de la Haute-Garonne a implicitement refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " visiteur ".

Par un jugement n° 2205301 du 11 juillet 2023, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 septembre 2023, Mme B..., représentée par Me Balg, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 11 juillet 2023 du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler la décision implicite du préfet de la Haute-Garonne ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les motifs qui lui ont été communiqués de la décision implicite attaquée, en réponse à une demande qui n'était pas tardive, sont dépourvus de considérations de droit ;

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 novembre 2023, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 8 juillet 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 31 juillet 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lafon,

- et les observations de Me Balg pour Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., de nationalité marocaine, est entrée en France le 11 janvier 2021 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de type C " court séjour - circulation ", valable du 23 octobre 2019 au 22 octobre 2021. Elle a demandé, le 4 octobre 2021, au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " visiteur ". Elle fait appel du jugement du 11 juillet 2023 du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle le préfet de la Haute-Garonne a implicitement refusé cette délivrance.

2. D'une part, aux termes de l'article R. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le silence gardé par l'autorité administrative sur les demandes de titres de séjour vaut décision implicite de rejet ". L'article R. 432-2 du même code dispose que : " La décision implicite de rejet mentionnée à l'article R. 432-1 naît au terme d'un délai de quatre mois (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 112-3 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute demande adressée à l'administration fait l'objet d'un accusé de réception (...) ". L'article L. 112-6 du même code dispose que : " Les délais de recours ne sont pas opposables à l'auteur d'une demande lorsque l'accusé de réception ne lui a pas été transmis ou ne comporte pas les indications exigées par la réglementation (...) ". Aux termes de l'article R. 112-5 du même code : " L'accusé de réception prévu par l'article L. 112-3 comporte les mentions suivantes : / 1° La date de réception de la demande et la date à laquelle, à défaut d'une décision expresse, celle-ci sera réputée acceptée ou rejetée ; / (...) / Il indique si la demande est susceptible de donner lieu à une décision implicite de rejet ou à une décision implicite d'acceptation. Dans le premier cas, l'accusé de réception mentionne les délais et les voies de recours à l'encontre de la décision (...) ". Aux termes enfin de l'article R. 421-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, dans les cas où le silence gardé par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet, l'intéressé dispose, pour former un recours, d'un délai de deux mois à compter de la date à laquelle est née une décision implicite de rejet (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'en l'absence d'accusé de réception comportant les mentions prévues par ces dernières dispositions, les délais de recours contentieux contre une décision implicite de rejet ne sont, en principe, pas opposables à son destinataire.

4. Enfin, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". L'article L. 211-5 du même code dispose que : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". Aux termes enfin de l'article L. 232-4 du même code : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande (...) ".

5. En l'absence de réponse du préfet de la Haute-Garonne à la demande de carte de séjour temporaire portant la mention " visiteur " présentée par Mme B..., qui a été réceptionnée en préfecture le 4 octobre 2021, une décision implicite de rejet est née au terme d'un délai de quatre mois ainsi que le précise l'article R. 432-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme B... se serait vu délivrer un accusé de réception de sa demande. Il en résulte que les délais de recours contentieux contre la décision implicite n'étaient, en principe, pas opposables à l'intéressée et que la demande de communication des motifs de cette décision, qui a été reçue par les services de la préfecture le 5 mai 2022, a été formulée dans les délais du recours contentieux, conformément aux prescriptions de l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration. Le courrier du 28 juin 2022 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a entendu procéder à cette communication, qui ne vise ni ne cite aucun texte, ne comporte l'énoncé d'aucune considération de droit constituant le fondement de la décision contestée. Cette dernière doit être regardée, en conséquence, comme ne répondant pas à l'obligation de motivation prévue par les dispositions du code des relations entre public et l'administration citées au point 4 du présent arrêt.

6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête, que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État une somme à verser à Mme B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2205301 du 11 juillet 2023 du tribunal administratif de Toulouse et la décision implicite de rejet opposée par le préfet de la Haute-Garonne à la demande présentée le 4 octobre 2021 sont annulés.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 29 août 2024, où siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Lafon, président-assesseur,

Mme Chalbos, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 septembre 2024.

Le rapporteur,

N. Lafon

Le président,

É. Rey-Bèthbéder

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23TL02323 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23TL02323
Date de la décision : 12/09/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. Rey-Bèthbéder
Rapporteur ?: M. Nicolas Lafon
Rapporteur public ?: Mme Restino
Avocat(s) : BALG

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-09-12;23tl02323 ?
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