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26/12/2024 | FRANCE | N°24TL00281

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 2ème chambre, 26 décembre 2024, 24TL00281


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire, d'annuler l'arrêté du 29 novembre 2023 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a prononcé à son encontre une obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi, et a assorti ces mesures d'une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans, d'enjoindre au préfet de la Haute-Garo

nne de supprimer, sans délai, son signalement aux fins de non-admission dans le système d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire, d'annuler l'arrêté du 29 novembre 2023 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a prononcé à son encontre une obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi, et a assorti ces mesures d'une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans, d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de supprimer, sans délai, son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen et de mettre à la charge de l'Etat le paiement des entiers dépens et le versement d'une somme de 2 000 euros à son conseil sur le fondement des dispositions combinées du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n°2307341 du 5 décembre 2023, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a admis M. A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 31 janvier 2024, M. B... A..., représenté par Me Laspalles, de la société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) Laspalles, demande à la cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler ce jugement rendu le 5 décembre 2023 ;

3°) d'annuler l'arrêté du 29 novembre 2023 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a prononcé à son encontre une obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et a assorti ces mesures d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de supprimer son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens et le paiement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées du 2ème alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal a commis une erreur d'appréciation.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

- elle a été prise par une autorité incompétente pour la signer faute pour l'administration de justifier d'une délégation régulièrement publiée établie au profit de son signataire ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît la procédure contradictoire prévue à l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur de fait ;

- elle est entachée d'une erreur dans l'appréciation de la menace que constituerait sa présence sur le territoire français ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure sur sa situation personnelle ;

Sur la décision lui refusant un délai de départ volontaire :

- compte tenu de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français, cette décision est dépourvue de fondement juridique ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur de droit ;

Sur l'interdiction de retour :

- compte tenu de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision refusant le délai de départ volontaire, cette décision est dépourvue de fondement juridique ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît la procédure contradictoire prévue à l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur de droit ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mars 2024, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 20 août 2024, la date de clôture d'instruction a été fixée au 18 septembre 2024.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 mai 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Delphine Teuly-Desportes, présidente-assesseure, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant marocain, né le 15 février 2003, entré en France au cours de l'année 2017, selon ses déclarations, incarcéré depuis le 21 octobre 2023, s'est vu notifier, le 30 novembre 2023, lors de sa levée d'écrou, un arrêté du 29 novembre 2023 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays vers lequel il est susceptible d'être éloigné et a assorti ces mesures d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans. M. A... relève appel du jugement du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse, rendu le 5 décembre 2023, rejetant sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

2. Par une décision du 17 mai 2024, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé l'aide juridictionnelle totale à M. A.... Ses conclusions tendant à l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle sont ainsi devenues sans objet.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) / 5° Le comportement de l'étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois constitue une menace pour l'ordre public ; (...). ".

4. Pour caractériser la menace à l'ordre public et prononcer l'obligation de quitter le territoire français, le préfet de la Haute-Garonne s'est fondé sur la seule condamnation de M. A... pour des faits de vol par escalade dans un local d'habitation, en récidive, refus par le conducteur d'un véhicule d'obtempérer à une sommation de s'arrêter et conduite sans permis, recel de bien provenant d'un vol et vol aggravé par deux circonstances à une peine de quatre mois d'emprisonnement, qui aurait été prononcée par le tribunal correctionnel de Toulouse, le 21 octobre 2023. Pour autant, c'est par un jugement rendu le 13 janvier 2021 que M. A... a été condamné à une peine de quatre mois d'emprisonnement avec sursis et un sursis probatoire d'une durée de deux années pour des faits de vol par escalade dans un local d'habitation, refus par le conducteur d'un véhicule d'obtempérer à une sommation de s'arrêter et conduite sans permis, recel de bien provenant d'un vol et vol aggravé par deux circonstances. En effet, ce n'est que, par un jugement rendu le 7 avril 2022 que le juge d'application des peines a prononcé la révocation du sursis probatoire à hauteur d'une durée de quatre mois, M. A... ayant été écroué le 21 octobre 2023 au centre pénitentiaire de Seysses (Haute-Garonne) et ayant bénéficié d'une libération conditionnelle dès le 30 novembre suivant. Dans ces conditions, au regard de l'erreur de fait ainsi commise et de la nature des faits, qui n'ont pas été commis, contrairement à ce qui a été retenu, en récidive, les éléments sur lesquels s'est fondé le préfet de la Haute-Garonne ne suffisent pas à établir la réalité d'une menace à l'ordre public au sens des dispositions du 5° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête et sur la régularité du jugement attaqué, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Il y a lieu, par suite, d'annuler l'obligation de quitter le territoire français sans délai ainsi que, par voie de conséquence, les décisions du même jour par lesquelles le préfet de la Haute-Garonne a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être renvoyé et l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Le présent arrêt, qui annule l'arrêté préfectoral contesté, et notamment l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans, implique nécessairement qu'il soit procédé à l'effacement du signalement de M. A... aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen. Il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne d'y procéder sans délai à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les frais liés au litige :

7. D'une part, en l'absence de dépens au sens de l'article R. 761-1 du code de justice administrative dans la présente instance, M. A... n'est pas fondé, en tout état de cause, à en solliciter le remboursement.

8. D'autre part, M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'alinéa 2 de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Laspalles, avocat de M. A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à ce dernier de la somme de 1 000 euros.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur la demande de M. A... tendant à son admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 2 : Le jugement n°2307341 du 5 décembre 2023 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse est annulé.

Article 3 : L'arrêté du 29 novembre 2023 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a prononcé à l'encontre de M. A... une obligation de quitter le territoire français sans délai à destination du pays dont il a la nationalité assortie d'une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans est annulé.

Article 4 : Il est enjoint au préfet de la Haute-Garonne de procéder sans délai à l'effacement des informations concernant l'interdiction de retour sur le territoire français de M. A... dans le système d'information Schengen à compter de la notification du présent arrêt.

Article 5 : L'Etat versera une somme de 1 000 euros en application de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 à Me Laspalles, sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Laspalles, au préfet de la Haute-Garonne et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 10 décembre 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Teuly-Desportes, présidente-assesseure,

Mme Dumez-Fauchille, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 décembre 2024.

La rapporteure,

D. Teuly-Desportes

La présidente,

A. Geslan-DemaretLa greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24TL00281
Date de la décision : 26/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme Geslan-Demaret
Rapporteur ?: Mme Delphine Teuly-Desportes
Rapporteur public ?: Mme Torelli
Avocat(s) : SELARL Sylvain LASPALLES

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-26;24tl00281 ?
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