La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/02/2025 | FRANCE | N°23TL00751

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 2ème chambre, 04 février 2025, 23TL00751


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de désigner avant-dire droit un expert afin de rendre un avis sur l'imputabilité au service de sa pathologie, d'annuler la décision du 31 mai 2021 par laquelle la rectrice de l'académie de Montpellier a rejeté la demande d'imputabilité au service de sa pathologie, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entie

rs dépens, y compris ceux de l'expertise.



Par un jugement n° 2104061 du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de désigner avant-dire droit un expert afin de rendre un avis sur l'imputabilité au service de sa pathologie, d'annuler la décision du 31 mai 2021 par laquelle la rectrice de l'académie de Montpellier a rejeté la demande d'imputabilité au service de sa pathologie, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens, y compris ceux de l'expertise.

Par un jugement n° 2104061 du 27 janvier 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 30 mars 2023, M. D... B..., représenté par Me Mazas, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 27 janvier 2023 ;

2°) d'annuler la décision du 31 mai 2021 par laquelle la rectrice de l'académie de Montpellier a rejeté sa demande d'imputabilité au service de sa pathologie ;

3°) avant-dire droit, de désigner un expert afin de rendre un avis sur l'imputabilité au service de sa pathologie ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les frais et dépens de l'expertise.

Il soutient que :

- le jugement n'est pas suffisamment motivé, en méconnaissance de l'article 9 du code de justice administrative ;

- il a été rendu à l'issue d'une procédure méconnaissant le principe du contradictoire, dès lors qu'il se fonde sur des éléments non soumis au débat et donne aux expertises une signification allant au-delà des conclusions ;

- la décision attaquée a été prise en méconnaissance de l'autorité de la chose jugée ;

- elle est insuffisamment motivée en fait, en méconnaissance de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;

- elle est entachée d'erreur de fait dès lors que seule une partie de la pathologie a été prise en compte ;

- la rectrice n'a pas procédé à un examen réel et complet de sa situation ; une nouvelle saisine de la commission de réforme était nécessaire ;

- la décision attaquée est attachée d'erreur d'appréciation au regard de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat et de l'article 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 décembre 2023, la rectrice de l'académie de Montpellier conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 15 janvier 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 6 février 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Virginie Dumez-Fauchille, première conseillère,

- et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... est enseignant certifié en mathématiques, affecté au collège ... à Saint-André-de-Sangonis (Hérault). Par une décision du 23 juillet 2014, le recteur de l'académie de Montpellier a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie dont souffre M. B... à l'épaule droite. Par un arrêt du 29 janvier 2019, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement du tribunal administratif de Montpellier rejetant la demande tendant à l'annulation de cette décision et de la décision portant rejet du recours gracieux de M. B..., a annulé ces décisions et a enjoint à la rectrice de l'académie de Montpellier de réexaminer la demande de M. B.... Par une décision du 12 février 2019, la rectrice de l'académie de Montpellier a refusé la reconnaissance de l'imputabilité au service de la pathologie de M. B.... Par un jugement du 7 mai 2021, le tribunal administratif de Montpellier a annulé cette décision et enjoint à la rectrice de l'académie de Montpellier de réexaminer la demande de M. B.... Par une décision du 31 mai 2021, la rectrice de l'académie de Montpellier a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie dont souffre M. B.... Par un jugement du 27 janvier 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. B... tendant à l'annulation de cette décision. M. B... relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. Il ressort des termes du jugement attaqué que les premiers juges, en relevant que la rectrice mentionnait, dans la décision attaquée, les textes applicables et les termes de la demande de reconnaissance d'imputabilité et faisait état de ce que l'imputabilité n'était pas reconnue au motif que cette pathologie était en lien avec une arthropathie dégénérative banale sans lien avec l'activité professionnelle de l'intéressé, ont suffisamment motivé leur examen du moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision attaquée. Par suite le moyen tiré de ce que le jugement attaqué n'est pas suffisamment motivé doit être écarté comme manquant en fait.

4. En second lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que les premiers juges se seraient fondés sur des éléments non soumis au débat. A cet égard, l'appelant ne peut utilement invoquer la circonstance que le tribunal aurait donné aux expertises une signification allant au-delà des conclusions des experts, cet argument se rapportant non à la régularité du jugement mais au bien-fondé des motifs par lesquels les juges de première instance se sont prononcés sur les moyens qui leur étaient soumis et qu'il n'appartient pas au juge d'appel d'apprécier. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe du respect du caractère contradictoire de la procédure doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; (...). ".

6. La décision du 31 mai 2021 par laquelle la rectrice de l'académie de Montpellier a refusé de reconnaître l'imputabilité au service des pathologies affectant M. B... à l'épaule droite, fait état de ce que les lésions constatées dont souffre M. B... ne peuvent être induites par l'exercice de sa profession d'enseignant en mathématiques, et de ce que l'arthrose acromio-claviculaire dont il souffre entre dans le cadre d'une arthropathie dégénérative banale sans lien avec son activité. La décision mentionne donc les considérations de fait sur lesquelles est fondé le refus de reconnaissance de l'imputabilité au service demandée par M. B.... Par suite, la décision attaquée satisfait à l'exigence de motivation en fait prescrite par les dispositions rappelées au point précédent de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration.

7. En deuxième lieu, comme le soulignent les rapports du docteur A... du 6 mai 2014 et du docteur C... du 25 novembre 2014, élaborés sur demande du rectorat pour l'instruction de la demande de M. B... tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service des pathologies affectant son épaule droite, l'intéressé a subi le 9 juillet 2013 un arthroscanner de son épaule droite dont il est ressorti, notamment, une fissuration supérieure transfixiante du tendon de son muscle sub-scapulaire. La seule circonstance que les avis de la commission de la réforme du 24 juin 2014 et du 24 mars 2015, qui mentionnent seulement en commentaire une tendinopathie du sus-épineux de l'épaule droite, ne soient pas exhaustifs quant aux affections dont souffre M. B... à l'épaule droite, ne suffit pas à démontrer que la commission ne se serait pas prononcée au regard de l'ensemble de ces affections, dont la fissuration supérieure transfixiante du tendon subscapulaire. D'ailleurs, ces avis se réfèrent au 19 décembre 2013, qui est la date de la demande de reconnaissance d'imputabilité au service, laquelle mentionnait la fissuration. M. B... n'est en conséquence pas fondé à soutenir que les avis de la commission de réforme ne prendraient en compte qu'une partie des pathologies affectant son épaule droite. Par suite, ce dernier n'est pas fondé à soutenir que la rectrice de l'académie de Montpellier aurait dû saisir à nouveau la commission de réforme avant de prendre la décision litigieuse.

8. En troisième lieu, la décision de la rectrice de l'académie de Montpellier du 31 mai 2021, si elle mentionne expressément l'absence de lien entre l'arthrose acromio-claviculaire et l'activité de M. B..., porte sur " les lésions constatées " et mentionne avoir été prise " au vu de l'ensemble des pièces constituant le dossier et des conclusions de l'expertise médicale réalisée le 6 mai 2014 par le docteur E... ". M. B... n'est en conséquence pas fondé à soutenir cette décision ne prendrait en compte qu'une partie des pathologies affectant son épaule droite. Par suite, les moyens tirés de l'erreur de fait quant à l'étendue des pathologies dont souffre M. B... et du défaut d'examen réel et complet de la situation de ce dernier doivent être écartés.

9. En quatrième lieu, il résulte de son jugement du 7 mai 2021 que, pour annuler la décision du 12 février 2019 par laquelle la rectrice de l'académie de Montpellier a rejeté la demande d'imputabilité au service de la pathologie de M. B..., le tribunal administratif de Montpellier a estimé que l'autorité administrative s'était uniquement fondée sur la circonstance que la pathologie qu'il a développée ne rentre pas dans la liste des maladies désignées par les tableaux des maladies professionnelles mentionnées à l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale. Or il résulte de la teneur de la décision en litige que, pour rejeter la demande de reconnaissance d'imputabilité au service de la pathologie de M. B..., la rectrice de l'académie de Montpellier s'est fondée, dans la décision attaquée dans la présente instance, sur l'absence de lien de causalité entre la survenance de la pathologie et les conditions d'exercice des fonctions de l'intéressé. Par suite, en l'absence d'identité de motifs entre les deux décisions précitées, celle du 31 mai 2021 ne méconnaît pas l'autorité de la chose jugée par le tribunal administratif de Montpellier dans son jugement du 7 mai 2021.

10. En dernier lieu, aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, alors applicable, codifié à l'article L. 351-4 du code de la fonction publique : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévues en application de l'article 35. Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) ". Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.

11. M. B... soutient que la pathologie à l'épaule droite dont il souffre est liée à la position de son bras droit dans l'exercice de ses fonctions, en particulier lors de l'écriture au tableau pendant les heures d'enseignements. Si M. B..., enseignant en mathématiques, effectue, dans l'exercice de ses fonctions, des mouvements exposant son bras droit, qui est son bras scripteur, à une position présentant un angle supérieur à 90°, liée à l'écriture au tableau mural, il ressort du rapport du médecin de prévention du 6 février 2015, sollicité par la commission de réforme préalablement à son avis du 24 mars 2015, que la durée cumulée d'écriture au tableau, par heure d'enseignement en mathématiques, ne dépasse pas 15 minutes. A supposer que l'emploi du temps que produit M. B... pour l'année 2012-2013 soit représentatif de la quotité d'heures de cours qu'il a dispensées dans la période précédant la demande, à savoir 16 heures hebdomadaires d'enseignement en mathématiques et 3 heures d'accompagnement personnel, et compte tenu, au demeurant, de ce que le bras scripteur ne présente un angle supérieur à 90° que pour l'écriture dans la partie supérieure du tableau, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la durée d'exposition de son bras à un angle supérieur à 90°, avant l'aménagement de son poste de travail, aurait dépassé une heure quotidienne. Par ailleurs, M. B... ne démontre pas avoir effectué, comme il l'allègue, des heures supplémentaires, dont il ne chiffre d'ailleurs pas la quotité, tandis qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'utilisation de l'outil informatique présente un lien de causalité avec la pathologie dont souffre M. B... à l'épaule droite, compte tenu, comme le souligne le docteur F..., nommé par la commission de réforme, dans son rapport du 25 novembre 2014, de ce que la main droite est alors soutenue par la souris, le plan de travail ou le clavier. Enfin, bien que cet expert ait relevé que M. B... ne présentait pas d'état antérieur, il fait état de lésions dégénératives en raison de l'âge de l'intéressé. Dans ces conditions, la rectrice de l'académie de Montpellier n'a pas, en refusant de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie dont souffre M. B... à l'épaule droite, entaché la décision contestée d'une erreur d'appréciation.

12. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin avant-dire droit d'ordonner une expertise qui ne présente aucun caractère utile, M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.

Sur les frais exposés à l'occasion du litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par M. B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Par ailleurs, en l'absence de dépens au sens de l'article R. 761-1 du même code, les conclusions tendant à l'attribution de leur charge doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Copie en sera adressée à la rectrice de l'académie de Montpellier.

Délibéré après l'audience du 21 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Dumez-Fauchille, première conseillère,

Mme Bentolila, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 février 2025.

La rapporteure,

V. Dumez-Fauchille

La présidente,

A. Geslan-Demaret La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°23TL00751 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL00751
Date de la décision : 04/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05 Fonctionnaires et agents publics. - Positions.


Composition du Tribunal
Président : Mme Geslan-Demaret
Rapporteur ?: Mme Virginie Dumez-Fauchille
Rapporteur public ?: Mme Torelli
Avocat(s) : CABINET D'AVOCAT MAZAS

Origine de la décision
Date de l'import : 09/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-04;23tl00751 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award