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08/04/2025 | FRANCE | N°23TL01194

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 2ème chambre, 08 avril 2025, 23TL01194


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler, à titre principal, la décision du 16 octobre 2020 par laquelle la commission de recours de l'invalidité a rejeté son recours administratif préalable obligatoire dirigé contre la décision du 10 décembre 2019 par laquelle la ministre des armées a refusé de lui accorder le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité pour les infirmités d'hypoacousie bilatérale et d'acouphènes permanents bilatéraux, d

e surseoir à statuer sur la liquidation de ses droits à pension militaire d'invalidité et d'o...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler, à titre principal, la décision du 16 octobre 2020 par laquelle la commission de recours de l'invalidité a rejeté son recours administratif préalable obligatoire dirigé contre la décision du 10 décembre 2019 par laquelle la ministre des armées a refusé de lui accorder le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité pour les infirmités d'hypoacousie bilatérale et d'acouphènes permanents bilatéraux, de surseoir à statuer sur la liquidation de ses droits à pension militaire d'invalidité et d'ordonner avant dire-droit une expertise médicale confiée à un médecin oto-rhino-laryngologiste à des fins d'évaluation de son taux d'invalidité en lien avec ses acouphènes et d'enjoindre, à titre subsidiaire, à l'administration de procéder au versement d'une pension militaire d'invalidité à son profit pour ses deux infirmités à un taux global de 45% et, en tout état de cause, de mettre les entiers dépens de l'instance à la charge de la sous-direction des pensions du ministère des armées et de mettre à la charge de la sous-direction des pensions du ministère des armées la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n°2003889 du 30 mars 2023, le tribunal administratif de Nîmes a annulé la décision du 16 octobre 2020 par laquelle la commission de recours de l'invalidité avait rejeté la demande de M. A... tendant à l'attribution d'une pension militaire d'invalidité, a enjoint au ministre des armées d'accorder une pension militaire d'invalidité à M. A... au taux de 45% à compter du 19 juillet 2018 pour les infirmités d'hypoacousie bilatérale et d'acouphènes permanents bilatéraux dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par un recours et un mémoire, enregistrés le 23 mai 2023 et le 9 octobre 2024, le ministre des armées demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement rendu le 30 mars 2023 ;

2°) de réformer ce jugement en ce qu'il a accordé un taux d'invalidité de 30% pour l'infirmité " hypoacousie bilatérale " et un taux d'invalidité de 10% pour l'infirmité " acouphènes bilatéraux permanents " portant ainsi le taux d'invalidité global à 45% ;

3°) de dire et juger que l'infirmité " hypoacousie bilatérale " et l'infirmité " acouphènes bilatéraux permanents " ne sont pas imputables au service.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'insuffisance de motivation notamment sur le moyen de défense tiré de l'erreur de droit qu'aurait commise la commission de recours de l'invalidité en appliquant au litige l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, dans sa rédaction résultant de la loi n°2018-607 du 13 juillet 2018 ;

- il est entaché d'une erreur dans l'application des dispositions sur la présomption d'imputabilité, qui, contrairement à ce qui a été retenu au point 4, relève des dispositions de l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et non de l'article L. 121-1 du même code ;

- il est entaché d'une erreur de droit dans la mesure où le 3° de l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, dans sa rédaction résultant de la loi n°2018-607 du 13 juillet 2018, n'était pas applicable au litige ;

- il est entaché d'une erreur d'appréciation ;

- le lien avec le service pour l'infirmité " hypoacousie bilatérale " n'est pas établi, dans la cadre d'un régime de preuve, sans présomption, M. A... se bornant à faire état, sans autre précision, d'une exposition au bruit lésionnel depuis 1987 ;

- c'est à tort que le tribunal a retenu, s'agissant de l'infirmité " hypoacousie bilatérale ", que l'exclusion de l'aggravation de la maladie professionnelle, en l'occurrence celle du tableau n°42, ne pouvait concerner qu'une pathologie préalablement retenue ;

- c'est à tort que le tribunal a retenu l'infirmité " acouphènes bilatéraux permanents ", constatée le 1er avril 2019, et donc postérieurement à sa demande de pension, présentée le 18 juillet 2018 ; au surplus, aucune preuve de l'imputabilité au service de cette infirmité n'est rapportée ; au surplus, la condition relative au délai de prise en charge d'une année figurant dans le tableau n°42 n'est pas remplie ;

- il est demandé à la cour de substituer le motif tiré du défaut d'imputabilité au service de chacune des deux infirmités à celui, retenu à tort par ses services puis par la commission de recours de l'invalidité.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 février 2024, M. B... A..., représenté par Me Anav-Arlaud, de la société d'exercice libéral à responsabilité limitée Bénédicte Anav-Arlaud, conclut au rejet de la requête, à la confirmation du jugement attaqué, dans l'hypothèse d'une annulation du jugement, à la confirmation d'une pension militaire d'invalidité à un taux de 45% et demande à la cour de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens, ainsi qu'une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif est parfaitement fondé ;

- d'autres moyens d'annulation peuvent, à titre subsidiaire, être accueillis, à savoir l'incompétence du signataire de la décision de la commission de recours de l'invalidité, l'erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, ainsi que l'erreur de droit et l'erreur de fait commises dans l'appréciation du bruit lésionnel ;

- dans l'hypothèse d'une annulation du jugement contesté, il y aura lieu de retenir que le ministre doit lui accorder une pension militaire d'invalidité au taux de 45% ;

- dans l'hypothèse d'une annulation du jugement contesté, il y aura lieu d'ordonner une expertise afin de déterminer le taux d'invalidité lié à ses acouphènes, infirmité qui a été sous-évaluée.

Par une ordonnance du 11 octobre 2024, la date de clôture d'instruction a été fixée au 12 novembre 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Delphine Teuly-Desportes, présidente-assesseure,

- et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... s'est engagé dans l'armée de l'air, le 6 janvier 1986, y a exercé des fonctions de mécanicien aéronautique et a obtenu, en dernier lieu, le grade d'adjudant-chef, avant d'être radié des contrôles, le 1er décembre 2020. Par une demande, enregistrée le 19 juillet 2018, l'intéressé a sollicité le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité pour les infirmités d'hypoacousie bilatérale et d'acouphènes permanents bilatéraux. Par une décision du 10 décembre 2019, la ministre des armées a rejeté sa demande. L'intéressé a alors formé, le 28 mai 2020, le recours administratif préalable obligatoire, que la commission de recours de l'invalidité a, par une décision du 16 octobre 2020, également rejeté. Par un jugement, rendu le 30 mars 2023, le tribunal administratif de Nîmes a, d'une part, annulé la décision du 16 octobre 2020 par laquelle la commission de recours de l'invalidité avait rejeté la demande de pension de M. A... et a, d'autre part, enjoint au ministre des armées d'accorder une pension militaire d'invalidité à M. A... au taux de 45% à compter du 19 juillet 2018 pour les infirmités d'hypoacousie bilatérale et d'acouphènes permanents bilatéraux dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement. Le ministre des armées relève appel de ce jugement.

Sur l'office du juge :

2. Lorsqu'il est saisi d'un litige en matière de pensions militaires d'invalidité, il appartient au juge administratif, en sa qualité de juge de plein contentieux, de se prononcer sur les droits de l'intéressé en tenant compte de l'ensemble des circonstances de fait qui résultent de l'instruction, et aussi, le cas échéant, d'apprécier, s'il est saisi de moyens en ce sens ou au vu de moyens d'ordre public, la régularité de la décision en litige.

Sur la régularité du jugement :

3. Le tribunal administratif de Nîmes a, d'une part, annulé la décision de la commission de recours d'invalidité au motif qu'en opposant l'aggravation d'une surdité professionnelle dans le cadre de l'instruction d'une première demande de pension militaire d'invalidité présentée par un militaire, cette autorité administrative avait entaché la décision contestée d'une erreur de droit et s'est, d'autre part, prononcé sur le droit à pension de M. A....

4. D'une part, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. "

5. Si le ministre des armées soutient que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé en l'absence de réponse, par les premiers juges, au moyen de défense tiré de l'erreur de droit qui aurait été également commise par la commission de recours de l'invalidité en déclarant applicable au litige la présomption prévue à l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, issu de l'article 54 de la loi du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense, les premiers juges, qui, ainsi qu'il a été dit au point 3, ont annulé la décision de la commission en retenant une autre erreur de droit et, avant de se statuer sur le droit à pension, dans le respect de l'office du juge des pensions militaires d'invalidité, rappelé au point 2, ont retenu l'application de ces dispositions en indiquant que M. A... en remplissait toutes les conditions, et ont ainsi suffisamment motivé leur décision. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement pour défaut de motivation doit être écarté.

6. D'autre part, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels les juges de première instance se sont prononcés sur les moyens qui leur étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Le ministre des armées ne peut donc utilement soutenir que le tribunal administratif de Nîmes aurait commis une erreur de droit ou une erreur d'appréciation en appliquant au litige la présomption prévue à l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre.

Sur le bien-fondé du jugement :

7. Le ministre des armées, dans son recours, ne conteste pas le motif d'illégalité retenu par le tribunal administratif de Nîmes et tiré de ce que la commission de recours de l'invalidité, en excluant l'aggravation de la surdité professionnelle dans le cadre d'une première demande de pension, a entaché sa décision d'une erreur de droit. Toutefois, en soutenant que l'imputabilité au service de la maladie professionnelle invoquée n'est pas établie, il sollicite, d'une part, une substitution de motif et soutient, d'autre part, que la présomption prévue à l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre n'était pas entrée en vigueur et n'était donc pas applicable.

En ce qui concerne l'applicabilité de la présomption d'imputabilité d'une maladie professionnelle à la demande de M. A... :

8. S'il appartient au juge administratif, saisi d'un litige en matière de pensions, de rechercher si des dispositions législatives ou réglementaires intervenues postérieurement au fait générateur à la date duquel les droits à pension de l'intéressé doivent être normalement appréciés sont susceptibles d'affecter ces droits, c'est à la condition que le législateur ait entendu leur donner une telle portée.

9. Aux termes de l'article L. 121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Ouvrent droit à pension : (...) 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; ". Aux termes de l'article L. 121-2 du même code, issu du II de l'article 54 de la loi du loi du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense : " Est présumée imputable au service : (...) 3° Toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1, L. 461-2 et L. 461-3 du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le militaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ces tableaux ; ". Selon l'article L. 121-2-3 de ce code : " La recherche d'imputabilité est effectuée au vu du dossier médical constitué pour chaque militaire lors de son examen de sélection et d'incorporation. Dans tous les cas, la filiation médicale doit être établie entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée ".

10. Eu égard à l'objet des dispositions du 3° de l'article L. 121-2 code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, qui est de faire bénéficier les militaires des mêmes droits que ceux dont disposent les agents publics en application de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 relative aux droits et obligations des fonctionnaires et en l'absence de dispositions prévoyant une application différée, contrairement à celles prévues au 1° de l'article L. 121-2, qui a trait aux pensions militaires d'invalidité en matière de blessures, le législateur a eu pour volonté, ainsi, au demeurant, que les travaux préparatoires de la loi le confirment, que la présomption d'imputabilité au service des maladies contractées dans ou à l'occasion du service qu'elles prévoient soit d'application immédiate. En conséquence et conformément au principe rappelé au point 8, il y a lieu d'appliquer au présent litige le 3° de l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre dans sa version issue de la loi du 13 juillet 2018 précitée.

11. Si les conditions sont réunies pour que l'intéressé puisse bénéficier du régime de présomption légale d'imputabilité, cette présomption ne peut être écartée que lorsque l'administration apporte une preuve contraire établissant qu'une cause étrangère au service est à l'origine de façon directe et certaine de l'infirmité invoquée ou de son aggravation. Une telle preuve contraire ne saurait également résulter d'une simple hypothèse médicale, ni d'une vraisemblance, ni d'une probabilité, aussi forte soit-elle.

En ce qui concerne l'imputabilité au service des infirmités :

S'agissant l'infirmité " hypoacousie bilatérale " :

12. D'une part, si le fait générateur du droit à pension de M. A... a eu lieu, le 25 février 2002, date à laquelle sa surdité neurosensorielle a été diagnostiquée, il résulte de ce qui a été dit au point précédent, qu'il peut bénéficier de la présomption d'imputabilité prévue par le 3° de l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et qui renvoient au code de la sécurité sociale.

13. D'autre part, selon l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale : " Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau. ". Aux termes du tableau n°42 annexé au livre IV du code de la sécurité sociale : " Désignation des maladies : Déficit audiométrique bilatéral par lésion cochléaire irréversible. Ce déficit est évalué par une audiométrie effectuée de trois semaines à un an après cessation de l'exposition aux bruits lésionnels, en cabine insonorisée avec un audiomètre calibré. (...). Aucune aggravation de cette surdité professionnelle ne peut être prise en compte, sauf en cas de nouvelle exposition au bruit lésionnel ".

14. Il résulte de l'instruction que M. A..., qui disposait d'une audition normale avant son engagement dans l'armée de l'air, justifie avoir exercé, et ce, y compris après 2012, les fonctions de mécanicien aux équipements de sécurité sur Mirage 4 et Mirage 2000 de 1987 à 2001, puis celles de mécanicien cellule piste sur Mirage 2000 de 2001 à 2013 impliquant la mise en route de réacteurs, puis de responsable de maintenance vecteur et moteur pour la période de 2014 à 2015, et de chef de ligne avec des fonctions de mécanicien de cellule hydraulique, et donc avoir effectué des travaux mentionnés dans le tableau n°42 des maladies professionnelles précité et notamment les travaux liés à la mise au point, aux essais et à la propulsion des moteurs thermiques ou encore ceux qui ont lieu à proximité des aéronefs. En conséquence, au regard d'une exposition sonore prolongée, compte tenu des travaux exercés, l'imputabilité au service de l'hypoacousie dont souffre M. A... est établie, contrairement à ce que soutient le ministre, qui ne peut utilement soutenir, pour renverser la présomption ainsi instituée, que l'exposition au brut lésionnel n'aurait été qu'exceptionnelle à compter de 2014.

S'agissant de l'infirmité " acouphènes permanents bilatéraux " :

15. Compte tenu de ce qui a été dit au point 10, M. A... peut également bénéficier de la présomption prévue à l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre pour les acouphènes permanents, visés également par sa demande de pension, le 19 juillet 2018, qui mentionnait, de façon très large, ses déficiences auditives, et diagnostiquées dans le rapport de l'expertise médicale, ordonnée par la sous-direction des pensions et dont les conclusions ont été remises le 1er avril 2019. En outre, ce même rapport relève la présence d'acouphènes permanents quotidiens sans retenir explicitement une forme bilatérale mais en indiquant que cette déficience est en lien avec l'infirmité auditive principale et doit donner lieu à une majoration du taux d'invalidité de 10%. Il suit de là que l'imputabilité au service doit également être retenue sans que le ministre des armées puisse utilement invoquer la condition tenant au délai d'un an de prise en charge en lien avec une durée d'exposition minimale d'un an, la circonstance que les acouphènes n'ayant été diagnostiqués que dans le rapport remis le 1er avril 2019 n'y faisant pas obstacle dès lors que le lien avec la surdité neurosensorielle, constatée le 25 février 2002, est établi.

16. Il résulte de tout ce qui précède qu'il ne peut être fait droit à la substitution de motif sollicitée en défense tirée de l'absence d'imputabilité au service des infirmités dont est atteint M. A....

En ce qui concerne le taux d'invalidité global :

17. Aux termes de l'article L. 121-5 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " La pension est concédée : (...) 2° Au titre d'infirmités résultant de maladies associées à des infirmités résultant de blessures, si le taux global d'invalidité atteint ou dépasse 30 % ; 3° Au titre d'infirmités résultant exclusivement de maladie, si le taux d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : a) 30 % en cas d'infirmité unique ; b) 40 % en cas d'infirmités multiples. ". Aux termes de l'article L. 125-8 de ce code : " Sous réserve des dispositions de l'article L. 125-9, dans le cas d'infirmités multiples dont aucune n'entraîne une invalidité de 100 %, le taux d'invalidité est calculé ainsi qu'il suit : (...) 4° Quand l'infirmité principale entraîne une invalidité d'au moins 20 %, le taux d'invalidité de chacune des infirmités supplémentaires est majoré de 5, 10, 15 %, et ainsi de suite, suivant qu'elles occupent les deuxième, troisième, quatrième rangs dans la série décroissante de leur gravité. ".

18. D'une part, il est constant, ainsi qu'il a été dit au point 7, que l'aggravation de la surdité professionnelle à partir de 2012 a été exclue à tort. En outre, ainsi qu'il a été dit au point 14, M. A... a continué d'être soumis au bruit lésionnel pour la période postérieure à 2012, contrairement à ce qu'a retenu le médecin-expert chargé des pensions militaires d'invalidité, dans son avis émis du 22 mai 2019.

19. D'autre part, il résulte de l'instruction et notamment du rapport remis le 1er avril 2019 que les taux d'invalidité relatifs à chacune des deux infirmités de M. A... ont été respectivement évalués à 30% et 10%. Ainsi, après application du seuil de droit commun de 40% en cas d'infirmités multiples et des modalités de calcul du taux d'invalidité globale de M. A..., telles que fixées aux articles L. 125-3 et L. 125-8 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, les droits à pension militaire d'invalidité de M. A..., qui n'est pas fondé à soutenir que ses acouphènes, qui ont donné lieu à deux expertises médicales retenant un taux d'invalidité identique, auraient été sous-évalués, doivent être fixés au taux global de 45%.

20. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise relative au taux d'invalidité retenu en ce qui concerne l'infirmité liée aux acouphènes permanents sollicitée, à titre subsidiaire, par l'appelant que le ministre des armées n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a annulé la décision du 16 octobre 2020 par laquelle la commission de recours de l'invalidité avait rejeté la demande de M. A... tendant à l'attribution d'une pension militaire d'invalidité et a fixé son taux d'invalidité au taux global de 45%.

Sur les frais liés au litige :

21. D'une part, en l'absence, dans la présente instance, de dépens au sens de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, M. A... n'est pas fondé, en tout état de cause, à en solliciter le remboursement.

22. D'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Le recours du ministre des armées est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à M. A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des armées et à M. B... A....

Délibéré après l'audience du 25 mars 2025, à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Teuly-Desportes, présidente-assesseure,

Mme Bentolila, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 avril 2025.

La rapporteure,

D. Teuly-Desportes

La présidente,

A. Geslan-DemaretLa greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°23TL01194 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL01194
Date de la décision : 08/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Pensions - Pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre - Conditions d'octroi d'une pension - Fait générateur - Fait de service.

Pensions - Pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre - Caractère des pensions concédées - Révision des pensions concédées - Révision pour aggravation.


Composition du Tribunal
Président : Mme Geslan-Demaret
Rapporteur ?: Mme Delphine Teuly-Desportes
Rapporteur public ?: Mme Torelli
Avocat(s) : ANAV-ARLAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 13/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-08;23tl01194 ?
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