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08/04/2025 | FRANCE | N°23TL01418

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 2ème chambre, 08 avril 2025, 23TL01418


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 3 juin 2021 par lequel la rectrice de l'académie de Montpellier a refusé de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Par un jugement n°2104020 du 31 mars 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

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Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 18 juin 2023, Mme A... B....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 3 juin 2021 par lequel la rectrice de l'académie de Montpellier a refusé de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n°2104020 du 31 mars 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 juin 2023, Mme A... B..., représentée par Me Cacciapaglia, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 31 mars 2023 ;

2°) d'annuler la décision du 3 juin 2021 par laquelle la rectrice de l'académie de Montpellier a refusé de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une violation de la loi et d'une erreur d'appréciation ;

- la décision litigieuse est insuffisamment motivée, en méconnaissance des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;

- elle méconnaît l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ; le 12 février 2021, elle a été victime d'une agression verbale de la part de parents d'élèves dans l'enceinte de l'école ... et la directrice de l'école n'a à aucun moment essayé de prendre sa défense ; le caractère intentionnel de cette attaque verbale est caractérisé ; cette attaque lui a causé un préjudice, dès lors qu'à la suite de cet évènement, elle a fait l'objet d'une mesure de suspension de fonctions à titre conservatoire et d'une sanction disciplinaire de blâme ; cet évènement est également à l'origine d'un syndrome anxio-dépressif réactionnel sévère ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 juin 2024, la rectrice de l'académie de Montpellier conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que :

- le jugement attaqué n'est pas entaché d'irrégularité ;

- la décision litigieuse était suffisamment motivée en fait et en droit, dès lors qu'en particulier, la circulaire B8 n°2158 du 5 mai 2008 avait été régulièrement publiée et était donc applicable ;

- elle ne méconnaît pas l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que Mme B... n'établit pas avoir été victime d'une agression verbale de la part de parents d'élèves.

Par une ordonnance du 14 janvier 2025, la clôture d'instruction a été fixée au 13 février 2025 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hélène Bentolila, conseillère,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- et les observations de Me Akel, substituant Me Cacciapaglia, représentant Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., professeure des écoles, a été affectée pour l'année scolaire 2020-2021 dans les écoles maternelles publiques ... et ..., situées à Perpignan (Pyrénées-Orientales). Par un courrier du 23 avril 2021, elle a sollicité l'octroi de la protection fonctionnelle en raison d'une agression verbale dont elle estimait avoir été victime de la part de parents d'élèves de l'école ... le 12 février 2021 et de l'attitude de la directrice de cet établissement. Par une décision du 3 juin 2021, la rectrice de l'académie de Montpellier a refusé de faire droit à cette demande. Mme B... relève appel du jugement du 31 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur la régularité du jugement :

2. Il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels les juges de première instance se sont prononcés sur les moyens qui leur étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Dès lors, les moyens tirés de l'erreur d'appréciation et de la " violation de la loi " qu'auraient commises les premiers juges, qui se rapportent au bien-fondé du jugement et non à sa régularité, ne peuvent être utilement invoqués par Mme B....

Sur le bien-fondé du jugement :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / (...) 6° refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; (...) ". En second lieu, aux termes de l'article L. 211-5 de ce même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". Le bénéfice de la protection fonctionnelle constitue un droit pour les agents en remplissant les conditions.

4. En l'espèce, la décision litigieuse mentionne les dispositions dont la rectrice de l'académie de Montpellier a entendu faire application, en particulier l'article 11 de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983, ainsi que les circonstances de fait ayant conduit cette autorité à refuser de faire droit à la demande de protection fonctionnelle de Mme B..., à savoir que cette dernière ne faisait état d'aucun des propos tenus à son encontre, qu'elle qualifiait d'agression verbale et que la directrice de l'école ..., où l'agression verbale invoquée s'était déroulée, n'avait relevé aucune animosité, mépris ou invective de la part des parents d'élèves à son égard. Dès lors, cette décision comporte les circonstances de fait et de droit qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de son insuffisante motivation doit être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, alors applicable : " Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions et conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales, d'une protection organisée par la collectivité publique qui les emploie à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire au fonctionnaire. (...) / La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. (...) ".

6. Les dispositions précitées établissent à la charge de l'administration une obligation de protection de ses agents dans l'exercice de leurs fonctions, à laquelle il ne peut être dérogé que pour des motifs d'intérêt général. Cette obligation de protection a pour objet, non seulement de faire cesser les attaques auxquelles l'agent est exposé, mais aussi d'assurer à celui-ci une réparation adéquate des torts qu'il a subis. La mise en œuvre de cette obligation peut notamment conduire l'administration à assister son agent dans l'exercice des poursuites judiciaires qu'il entreprendrait pour se défendre. Il appartient dans chaque cas à l'autorité administrative compétente de prendre les mesures lui permettant de remplir son obligation vis-à-vis de son agent, sous le contrôle du juge et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce.

7. Il ressort des pièces du dossier que par un courrier du 23 avril 2021, Mme B... a sollicité l'octroi de la protection fonctionnelle en raison d'une agression verbale dont elle estimait avoir été victime de la part de parents d'élèves au sein de l'école maternelle ... le 12 février 2021, face à laquelle la directrice de cet établissement ne l'aurait pas défendue. Toutefois, s'il ressort des pièces du dossier que des parents d'élèves sont effectivement venus se plaindre du comportement de l'intéressée vis-à-vis de leurs enfants le 12 février 2021, d'abord auprès de Mme B..., puis auprès de la directrice de l'école, l'appelante n'apporte pas plus qu'en première instance de précision quant aux termes injurieux, outrageants ou agressifs qui auraient été employés à son égard et seraient ainsi susceptibles de caractériser l'existence d'une agression verbale. De plus, si Mme B... se prévaut du comportement de la directrice de cet établissement, qui ne l'aurait pas soutenue face à ces parents d'élèves, cette attitude ne saurait caractériser l'existence d'une attaque au sens des dispositions précitées de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de ces dispositions et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

En ce qui concerne les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Copie en sera adressée à la rectrice de l'académie de Montpellier.

Délibéré après l'audience du 25 mars 2025, à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Dumez-Fauchille, première conseillère,

Mme Bentolila, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 avril 2025.

La rapporteure,

H. Bentolila

La présidente,

A. Geslan-DemaretLa greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N°23TL01418


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL01418
Date de la décision : 08/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-07-10-005 Fonctionnaires et agents publics. - Statuts, droits, obligations et garanties. - Garanties et avantages divers. - Protection contre les attaques.


Composition du Tribunal
Président : Mme Geslan-Demaret
Rapporteur ?: Mme Helene Bentolila
Rapporteur public ?: Mme Torelli
Avocat(s) : CACCIAPAGLIA MARIE

Origine de la décision
Date de l'import : 25/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-08;23tl01418 ?
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