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08/04/2025 | FRANCE | N°23TL01475

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 2ème chambre, 08 avril 2025, 23TL01475


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner l'Etat à lui verser une somme de 14 292,95 euros en réparation des préjudices subis du fait de l'illégalité de saisies sur ses comptes bancaires et auprès de son employeur avec intérêts à compter de la réception de la demande préalable et leur capitalisation et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Par un jugement n° 2103105 du 14 avril 2023, le tribunal administratif de Montpellie...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner l'Etat à lui verser une somme de 14 292,95 euros en réparation des préjudices subis du fait de l'illégalité de saisies sur ses comptes bancaires et auprès de son employeur avec intérêts à compter de la réception de la demande préalable et leur capitalisation et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2103105 du 14 avril 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 juin 2023, M. A... B..., représenté par Me Cacciapaglia, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 14 avril 2023 ;

2°) d'annuler la décision du 12 février 2021 par laquelle la direction régionale des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande de mainlevée des saisies administratives pratiquées sur ses comptes bancaires et son employeur notifiées le 6 novembre 2020 ;

3°) d'ordonner la mainlevée des saisies à tiers détenteur pratiquées, respectivement, sur son compte bancaire auprès du crédit agricole Sud Méditerranée à Bompas le 29 octobre 2020, sur ses comptes bancaires auprès du Crédit Lyonnais à Perpignan le 30 octobre 2020, et auprès de son employeur, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à venir sur le fondement des articles L. 911-1 et suivant du code de justice administrative ;

4°) de prononcer la décharge totale des sommes réclamées sur le fondement du titre de perception du 23 mars 2019 ;

5°) de condamner la direction régionale des finances publiques de Provence-Alpes-Côte-d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône à lui reverser la somme de 4 106,06 euros en remboursement de son préjudice matériel constitué par des saisies injustifiées sur ses comptes bancaires du Crédit Lyonnais à Perpignan et du Crédit Agricole Sud-Méditerranée à Bompas et auprès de son employeur public qui l'ont mis dans une situation financière précaire ;

6°) de condamner la direction régionale des finances publiques Provence-Alpes-Côte-d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral subi, constitué par la diligence des procédures de poursuite en exécution pour une créance indue ;

7°) de mettre à la charge de la direction régionale des finances publiques Provence-Alpes-Côte-d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal a commis une erreur de fait en retenant que sa requête avait été introduite le 15 juin 2021 et non le 22 mars 2021 ; il a à tort accueilli la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de son recours contentieux ;

- la décision attaquée était illégale en l'absence d'exigibilité de la créance et d'obligation au paiement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er novembre 2023, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- les conclusions d'appel, qui se rapportent au jugement n° 2101535 du tribunal administratif de Montpellier, sont dépourvues de lien avec le litige ayant fait l'objet du jugement attaqué et doivent être regardées comme des conclusions nouvelles ; elles doivent donc être rejetées comme irrecevables ;

- la requête est irrecevable, en application de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, dès lors qu'elle se borne à reproduire le texte du mémoire de première instance ;

- le moyen tiré de l'erreur de fait qu'aurait commise le tribunal est inopérant ;

- les autres moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 30 avril 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 29 mai 2024.

Un mémoire présenté pour le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, représenté par le directeur régional des finances publiques d'Occitanie et du département de la Haute-Garonne, a été enregistré le 7 juin 2024 et n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Virginie Dumez-Fauchille, première conseillère,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- et les observations de Me Akel, substituant Me Cacciapaglia, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., gardien de la paix, en fonction à la circonscription de sécurité publique de Perpignan (Pyrénées-Orientales) a été placé en congé de maladie ordinaire du 1er septembre 2017 au 31 août 2018. Il a demandé son placement en congé de longue durée le 10 octobre 2018 et a été placé par arrêté du préfet de la zone de défense et de sécurité Sud du 7 novembre 2018 en disponibilité d'office avec bénéfice d'une allocation de 6 mois à compter du 1er septembre 2018. Par arrêtés du 17 septembre 2019, cette même autorité a retiré cet arrêté, placé M. B... en congé de longue durée à plein traitement du 1er septembre 2017 au 31 août 2018, et prolongé ce congé jusqu'au 28 février 2020.

2. Par courrier du 13 septembre 2019, la direction régionale des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône a mis M. B... en demeure de payer la somme de 5 787,98 euros mise à sa charge par un titre de perception émis le 27 mars 2019, majorée de 579 euros. Le 29 octobre 2020, le comptable public a notifié à M. B... trois saisies à tiers détenteurs auprès de son employeur et de ses établissements bancaires en vue du recouvrement de ces sommes. Par courrier du 24 novembre 2020, reçu par l'administration le 3 décembre 2020, M. B... a contesté ces mesures de saisie et formé un recours indemnitaire préalable tendant à la réparation du préjudice matériel et moral qu'il estimait avoir subi du fait de l'illégalité des saisies. Par jugement du 14 avril 2023, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 14 292,95 euros en réparation des préjudices subis. M. B... relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement :

3. En premier lieu, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels les juges de première instance se sont prononcés sur les moyens qui leur étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Dès lors, le moyen tiré de l'erreur de fait qu'auraient commise les premiers juges quant à la date d'enregistrement de la requête, qui se rapporte au bien-fondé du jugement et non à sa régularité, ne peut être utilement invoqué.

4. En second lieu, aux termes de l'article R. 421-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, dans les cas où le silence gardé par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet, l'intéressé dispose, pour former un recours, d'un délai de deux mois à compter de la date à laquelle est née une décision implicite de rejet. (...) ". Aux termes de l'article L. 231-4 du même code : " Par dérogation à l'article L. 231-1, le silence gardé par l'administration pendant deux mois vaut décision de rejet : 2° Lorsque la demande ne s'inscrit pas dans une procédure prévue par un texte législatif ou réglementaire ou présente le caractère d'une réclamation ou d'un recours administratif ". Aux termes de l'article L. 112-3 de ce code : " Toute demande adressée à l'administration fait l'objet d'un accusé de réception. ". Aux termes de l'article L. 112-6 du même code : " Les délais de recours ne sont pas opposables à l'auteur d'une demande lorsque l'accusé de réception ne lui a pas été transmis ou ne comporte pas les indications exigées par la réglementation. ". Toutefois, suivant les termes de l'article L. 112-2 dudit code : " Les dispositions de la présente sous-section ne sont pas applicables aux relations entre l'administration et ses agents. ".

5. Il résulte de l'instruction que la demande indemnitaire préalable de M. B... a été reçue par la direction régionale des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône le 3 décembre 2020. L'administration n'a pas répondu à cette réclamation indemnitaire, le courrier de la direction régionale des finances publiques du 12 février 2021 se limitant à répondre à la contestation, par M. B..., des mesures de saisie à tiers détenteur. En l'absence de réponse de l'administration, une décision implicite de rejet de la demande indemnitaire est née à l'issue d'un délai de deux mois, susceptible d'un recours contentieux dans un nouveau délai de deux mois courant donc jusqu'au 4 avril 2021. Or, contrairement à ce que soutient M. B..., sa requête de plein contentieux tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis, enregistrée sous le n° 2103105 au greffe du tribunal administratif de Montpellier, a été introduite le 15 juin 2021. La décision implicite de rejet de la demande indemnitaire de M. B... est donc devenue définitive. Dès lors, les conclusions indemnitaires de M. B... tendant à la réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité, qu'il allègue, des mesures de saisie à tiers détenteur, doivent être rejetées comme irrecevables en raison de leur tardiveté.

6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'intérieur et des outre-mer, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

7. L'annulation de la décision du 12 février 2021 par laquelle la direction régionale des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande de mainlevée des saisies administratives pratiquées sur les comptes bancaires et son employeur notifiées le 6 novembre 2020 n'était pas demandée dans l'instance n° 2103105 enregistrée au greffe du tribunal administratif de Montpellier et, sollicitée pour la première fois en cause d'appel, présente le caractère de conclusion nouvelle. Dès lors, la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'intérieur et des outre-mer à ces conclusions aux fins d'annulation doit être accueillie. Par suite, les conclusions aux fins d'annulation de la décision du 12 février 2021 doivent être rejetées comme irrecevables.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution au titre des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'intérieur, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction présentées par l'appelant.

Sur les frais exposés à l'occasion du litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par M. B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et au ministre de l'économie, des finances, de l'industrie et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques de Provence-Alpes-Côte-d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 25 mars 2025, à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Teuly-Desportes, présidente assesseure,

Mme Dumez-Fauchille, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 avril 2025.

La rapporteure,

V. Dumez-Fauchille

La présidente,

A. Geslan-DemaretLa greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 23TL01475


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL01475
Date de la décision : 08/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Comptabilité publique et budget - Règles de procédure contentieuse spéciales à la comptabilité publique - Recouvrement des créances.

Fonctionnaires et agents publics - Rémunération.


Composition du Tribunal
Président : Mme Geslan-Demaret
Rapporteur ?: Mme Virginie Dumez-Fauchille
Rapporteur public ?: Mme Torelli
Avocat(s) : CACCIAPAGLIA MARIE

Origine de la décision
Date de l'import : 13/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-08;23tl01475 ?
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