Vu la procédure suivante :
Procédures contentieuses antérieures :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes condamner l'Etat à lui verser la somme de 13 000 euros en réparation des préjudices qu'il estimait avoir subis et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n°2100681 du 21 avril 2023, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 20 juin 2023, M. A... B..., représenté par Me Lemoine, de la société civile professionnelle Lemoine-Clabeaut, demande à la cour :
1°) d'infirmer ce jugement, rendu le 21 avril 2023 ;
2°) en conséquence, d'annuler la décision implicite de rejet du 2 janvier 2021 rejetant sa réclamation indemnitaire préalable ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 13 000 euros en réparation des préjudices subis du fait des informations erronées données par l'administration ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les services de l'inspection académique du département du Gard lui ont donné en 2003 une information erronée sur la possibilité pour les instituteurs d'un départ à la retraite à cinquante-cinq ans, après quinze ans de service ; le service de retraite de l'Etat a procédé, en 2018, à un nouveau calcul attestant par là même du caractère erroné des informations ainsi délivrées et donc de l'illégalité fautive ;
- il a subi une perte de chance sérieuse de bénéficier d'un âge de départ à la retraite plus favorable qu'il convient de fixer à la somme de 10 000 euros ;
- il a subi un préjudice moral qui sera fixé à la somme de 3 000 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 février 2024, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- les informations données en 2004 par les services de l'inspection académique du Gard n'étaient pas erronées de sorte qu'aucun agissement fautif ne peut être retenu ;
- en optant pour le corps des professeurs certifiés en 2007, M. B... ne pouvait plus prétendre au bénéfice de la limite d'âge du corps des instituteurs de sorte que le lien de causalité entre les informations transmises et les préjudices allégués n'est pas établi ;
- en admettant même qu'il ait entendu invoquer qu'un service lui aurait affirmé la possibilité d'un maintien de ses droits acquis dans le corps des instituteurs, M. B... n'en apporte pas la preuve.
Par une ordonnance du 10 septembre 2024, la date de clôture d'instruction a été fixée au 10 octobre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n°84-834 du 13 septembre 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Delphine Teuly-Desportes, présidente-assesseure,
- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,
- et les observations de Me Lemoine, représentant M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., instituteur depuis le 10 mars 1991, dont la carrière était alors gérée par les services départementaux de l'éducation nationale du Gard, est devenu professeur certifié le 1er septembre 2007. Estimant que des informations erronées lui auraient été communiquées par ces services, en 2003, sur l'âge de départ et la limite d'âge et le maintien d'un droit acquis à ce titre dans le corps des instituteurs, il a présenté, le 23 septembre 2020, une réclamation indemnitaire préalable qui a été implicitement rejetée. M. B... relève appel du jugement, rendu le 21 avril 2023, par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande d'indemnisation et demande l'annulation de la décision implicite rejetant sa réclamation indemnitaire préalable, ainsi que l'indemnisation de ses préjudices.
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision implicite rejetant la réclamation préalable d'indemnisation de M. B... :
2. La décision implicite ou expresse par laquelle l'administration rejette la réclamation préalable indemnitaire dont elle est saisie, qui a pour seul objet de lier le contentieux en application de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, ne peut faire l'objet de conclusions distinctes tendant à son annulation.
3. Eu égard à ce qui a été rappelé au point précédent, la décision implicite par laquelle le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse a rejeté la demande indemnitaire préalable de M. B... a eu pour seul effet de lier le contentieux à l'égard de l'objet de la demande de ce dernier qui, en formulant les conclusions analysées ci-dessus, a donné à l'ensemble de sa requête le caractère d'un recours de plein contentieux. Au regard de l'objet d'une telle demande, qui conduit le juge à se prononcer sur le droit de l'intéressé à percevoir la somme qu'il réclame, les vices propres dont serait, le cas échéant, entachée la décision qui a ainsi lié le contentieux sont sans incidence sur la solution du litige et il n'y a lieu pas d'examiner de tels moyens, ni de statuer sur les conclusions d'annulation de cette décision.
Sur le bien-fondé du jugement :
4. Aux termes de l'article 1-2 de la loi du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public, applicable à la date de la réponse à la demande d'information : " Les fonctionnaires intégrés, à la suite d'une réforme statutaire, dans un corps dont la limite d'âge est fixée à soixante-cinq ans, après avoir accompli au moins quinze ans de services dans un emploi classé dans la catégorie active, conservent sur leur demande et à titre individuel le bénéfice de la limite d'âge de cet emploi. ".
5. Si la faute commise par une administration publique consistant à fournir des informations erronées est sans influence sur la décision refusant le bénéfice de droits à pension, de tels renseignements erronés peuvent en revanche avoir des conséquences indemnitaires. Il appartient au juge administratif d'analyser si ces renseignements erronés ont incité l'intéressé à adopter un comportement qui l'a privé d'un droit auquel il pouvait prétendre.
6. D'une part, si M. B... soutient qu'après l'obtention du statut de professeur certifié le 1er septembre 2007, il lui aurait été indiqué par son employeur qu'il conserverait ses droits acquis en qualité d'instituteur, soit un départ à la retraite à 55 ans et une limite d'âge à 62 ans, il ne l'établit pas, alors, au contraire, qu'il résulte de l'instruction que l'administration lui a délivré à plusieurs reprises des informations sur l'ouverture de son droit à pension en fonction de sa situation et qu'elle lui a notamment indiqué, en réponse à sa demande du 8 octobre 2003, qui ne portait pas sur le statut de professeur certifié, dans un courrier du directeur des services départementaux de l'éducation nationale du Gard du 4 juin 2004, la possibilité d'être intégré, par voie de liste d'aptitude, dans le corps des professeurs des écoles à compter du mois de septembre 2006. Dans ces conditions, il n'établit pas qu'une information erronée quant aux conséquences de son changement de statut lui aurait été délivrée, à cette date, son employeur ayant, au contraire, satisfait à l'obligation d'information de son agent sur une réforme statutaire.
7. D'autre part, en admettant même qu'une information erronée lui aurait été délivrée par son administration, en 2018, ce qui est contesté par le ministre, sur le maintien de bénéfice de la date de départ et de l'âge limite acquis grâce aux services effectués dans le cadre du corps des instituteurs, elle n'a pu inciter l'agent à adopter un comportement de nature à le priver d'un droit auquel il pouvait prétendre. En effet, il résulte de l'instruction et il n'est d'ailleurs pas contesté que M. B..., a entrepris, antérieurement à cette date, des démarches pour accéder au corps des professeurs certifiés et y a été nommé stagiaire à compter du 1er septembre 2007, date à compter de laquelle il ne pouvait bénéficier d'un quelconque droit acquis notamment sur la limite d'âge en raison de ce changement de statut, qui ne s'inscrivait pas dans le cadre d'une réforme statutaire. Dans ces conditions, faute d'établir un lien de causalité direct et certain entre, d'une part, les informations ainsi données au cours de l'année 2018 y compris par le service des retraites de l'Etat et, d'autre part, le préjudice financier invoqué lié à la décote de sa pension, ainsi que ses troubles dans les conditions d'existence, M. B... n'est pas fondé à rechercher la responsabilité de l'Etat.
8. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande d'indemnisation.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, dans la présente instance, la somme que sollicite M. B... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Délibéré après l'audience du 20 mai 2025, à laquelle siégeaient :
Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,
Mme Teuly-Desportes, présidente-assesseure,
Mme Dumez-Fauchille, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 juin 2025.
La rapporteure,
D. Teuly-Desportes
La présidente,
A. Geslan-DemaretLa greffière,
M-M. Maillat
La République mande et ordonne à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N°23TL01440 2