Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par une ordonnance n° 2202253 du 14 août 2023, le juge des référés a, sur la requête présentée par la commune de Montauban, prescrit une expertise, confiée à M. A... B..., portant sur les désordres affectant la nouvelle médiathèque, dite " MéMo " à Montauban (Tarn-et-Garonne).
Par deux requêtes distinctes, la commune de Montauban d'une part et la société Lagarrigue et la SMABTP d'autre part, ont successivement demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse, sur le fondement des dispositions de l'article R. 532-3 du code de justice administrative, d'étendre l'expertise au contradictoire des entreprises ayant participé à la construction initiale et des entreprises ayant participé à des travaux réalisés depuis la réception, parmi lesquelles figure la société Ginger CEBTP.
Par une ordonnance n° 2202253 du 11 décembre 2024, il a été fait droit à ces demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 27 décembre 2024 et le 28 janvier 2025, la société Ginger CEBTP, représentée par Me Trouette, demande à la cour :
1°) de réformer l'ordonnance du 11 décembre 2024 du tribunal administratif de Toulouse en tant qu'elle lui déclare communes et contradictoires les opérations d'expertise prescrites par l'ordonnance du 14 août 2023 ;
2°) de la mettre hors cause ;
3°) de suspendre, à titre provisoire, l'exécution de l'ordonnance du 11 décembre 2024 du tribunal administratif de Toulouse à son égard ;
4°) de mettre solidairement à la charge des sociétés Lagarrigue et SMABTP la somme de 2 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est recevable ;
- elle doit être mise hors de cause de la mission d'expertise dès lors que, si elle a acquis le fonds de commerce de la société Fugro France relatif aux activités de conseil en géorisques terrestres, géotechnique terrestre et études géophysiques terrestres, elle ne vient pas aux droits de la société Fugro France elle-même venant aux droits de la société Fugro Consulting, laquelle aurait établi, le 6 avril 2006 une étude géotechnique dans le cadre de la construction de la médiathèque dite " MéMo " ;
- le caractère exécutoire de l'ordonnance de référé est de nature à préjudicier gravement à ses droits alors qu'elle n'est tenue à aucune obligation au titre de l'étude géotechnique réalisée le 6 avril 2006, de sorte qu'elle est en droit d'en demander la suspension provisoire.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 janvier 2025, la société Lagarrigue et la SMABTP concluent au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société Ginger CEBTP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles font valoir que les moyens ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de commerce ;
- le code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. Par une ordonnance du 14 août 2023, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a prescrit une expertise, confiée à M. A... B..., portant sur les désordres affectant la nouvelle médiathèque, dite " MéMo ", sise 2, rue Jean-Carmet à Montauban. Par deux requêtes distinctes, la commune de Montauban d'une part et la société Lagarrigue et la SMABTP d'autre part, ont successivement demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse, sur le fondement des dispositions de l'article R. 532-3 du code de justice administrative, d'étendre l'expertise au contradictoire des entreprises ayant participé à la construction initiale et des entreprises ayant participé à des travaux réalisés depuis la réception, parmi lesquelles figure la société Ginger CEBTP. Par une ordonnance du 11 décembre 2024, il a été fait droit à cette demande.
2. La société Ginger CEBTP conclut à la réformation de cette ordonnance et demande à titre provisoire sa suspension.
Sur l'utilité de l'extension de la mission d'expertise :
3. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction ". Aux termes de l'article R. 532-3 du même code : " Le juge des référés peut, à la demande de l'une des parties formées dans le délai de deux mois qui suit la première réunion d'expertise, ou à la demande de l'expert formée à tout moment, étendre l'expertise à des personnes autres que les parties initialement désignées par l'ordonnance, ou mettre hors de cause une ou plusieurs des parties ainsi désignées. / Il peut, dans les mêmes conditions, étendre la mission de l'expertise à l'examen de questions techniques qui se révélerait indispensable à la bonne exécution de cette mission, ou, à l'inverse, réduire l'étendue de la mission si certaines des recherches envisagées apparaissent inutiles ". Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'il est saisi d'une demande d'une partie ou de l'expert tendant à l'extension de la mission de l'expertise à des personnes autres que les parties initialement désignées par l'ordonnance ou à l'examen de questions techniques qui se révélerait indispensable à la bonne exécution de cette mission, le juge des référés ne peut ordonner cette extension qu'à la condition qu'elle présente un caractère utile. Cette utilité doit être appréciée, d'une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d'autres moyens et, d'autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l'intérêt que la mesure présente dans la perspective d'un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher. Peuvent être appelées à une expertise, ordonnée sur le fondement des dispositions de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, les personnes qui, en l'état de l'instruction, ne sont pas manifestement étrangères au litige susceptible d'être engagé devant le juge de l'action auquel se rattache l'expertise, ou dont la présence est de nature à éclairer les travaux de l'expert.
4. Il résulte de l'instruction que la société Fugro Geoconsulting a réalisé, dans le cadre des travaux de la médiathèque, une étude de sol, rendue le 6 avril 2006. Cette société a été absorbée par la société Fugro Holding France, qui a par la suite changé de dénomination pour devenir la société Fugro France. Cette dernière a cédé à la société Ginger CEBTP son fonds de commerce relatif aux activités de conseil en géorisques terrestres, géotechnique terrestre et études géophysiques terrestres. Pour demander à être mise hors de cause la société requérante fait valoir que cette cession de fonds de commerce n'emportait pas cession du passif des obligations de la société Fugro France et que sa responsabilité ne peut donc être recherchée par la commune de Montauban.
5. Il résulte de l'article L. 141-5 du code de commerce qu'en l'absence de clause expresse et sauf exceptions prévues par la loi, la cession d'un fonds de commerce n'emporte pas de plein droit celle des obligations dont le vendeur pouvait être tenu en vertu d'engagements initialement souscrits par lui ni celle des créances qu'il détenait antérieurement à la cession. Toutefois une convention de cession peut comporter une clause stipulant expressément la cession des obligations dont le vendeur pouvait être tenu en vertu d'engagements initialement souscrits par lui. Si la société Ginger CEBTP soutient qu'elle n'a pas par l'achat du fonds de commerce de la société Fugro France repris à son actif les éléments de passif de cette société notamment les obligations liées à l'étude du 6 avril 2006, elle se borne à produire l'attestation de cession du fonds de commerce et une note juridique établie par un avocat indiquant notamment que le contrat conclu entre la société Fugro Geoconsulting et la commune de Montauban n'apparaît pas dans la liste des contrats transférés de l'annexe 2.1 (iii) de la convention de cession de fonds de commerce. Ainsi que le font valoir les sociétés intimées, l'absence de production de la convention de cession du fonds de commerce ne permet pas de vérifier que les obligations liées au contrat conclu avec la commune ne lui ont pas été transférées et que sa responsabilité ne pourrait être engagée et ce sans qu'y fasse obstacle la circonstance invoquée que la société Fugro France, également mise en cause dans l'expertise, n'aurait pas fait état dans son mémoire en défense devant le tribunal de ce que seule la responsabilité de la société Ginger CEBTP pourrait être recherchée. Dans ces circonstances, même si l'étude de sol n'a pas été réalisée par elle et alors qu'il résulte de la note de l'expert du 19 octobre 2023 l'utilité pour la mission de la mise en cause des divers intervenants ayant participé au projet de construction de la médiathèque, la société requérante n'est pas manifestement étrangère au litige en l'état de l'instruction. La demande de mise hors de cause formée par cette société ne peut donc être accueillie.
6. Il résulte de ce qui précède que la société Ginger CEBTP n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par l'ordonnance attaquée la juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a étendu la mission d'expertise ordonnée le 14 août 2023 à son contradictoire.
Sur la demande aux fins de suspension de la mesure d'expertise :
7. Aux termes de l'article R. 533-2 du code de justice administrative " Lorsqu'appel est interjeté d'une ordonnance rendue par le président du tribunal administratif ou par son délégué en application de l'article R. 532-1, le président de la cour administrative d'appel, ou le magistrat désigné par lui, peut immédiatement et à titre provisoire suspendre l'exécution de cette ordonnance si celle-ci est de nature à préjudicier gravement à un intérêt public ou aux droits de l'appelant ".
8. La présente ordonnance statuant sur la demande d'annulation de l'ordonnance, les conclusions tendant à sa suspension ont perdu leur objet.
Sur les frais liés au litige :
9. Les conclusions présentées par la société Ginger CEBTP sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions des sociétés intimées présentées sur le même fondement.
ORDONNE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins de suspension.
Article 2 : Les surplus des conclusions de la requête susvisée de la société Ginger CEBT est rejeté.
Article 3 : Les conclusions de la société Lagarrigue et de la SMABTP tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Ginger CEBT, à la société Lagarrigue et la SMABTP, à la commune de Montauban et à M. A... B..., expert.
Fait à Toulouse, le 5 juin 2025
Le président,
signé
J-F. MOUTTE
La République mande et ordonne au préfet de Tarn-et-Garonne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.
Pour expédition conforme,
La greffière en chef
N°24TL03176 2