Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R. 221-3, R. 221-4, R. 221-7 et R. 221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour le DEPARTEMENT DES YVELINES, par Me X... ;
Vu la requête, enregistrée le 10 avril 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par laquelle le DEPARTEMENT DES YVELINES demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°9404883 du Tribunal administratif de Versailles en date du 24 janvier 2003 en ce qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre la SCPA Laroche-Morel-Thoreau, la société des établissements Rouvet et la société Alphagroup tendant à la réparation des vices affectant les assemblages métalliques de la charpente du collège les Nénuphars à Bréval et a laissé à sa charge la somme de 4 573,47 euros sur les frais des expertises judiciaires ;
2°) de condamner conjointement et solidairement la SCPA Laroche-Morel-Thoreau, la société des établissements Rouvet et la société Alphagroup à lui payer à ce titre la somme en principal de 108 980,34 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 17 octobre 1994, et des intérêts capitalisés annuellement à compter du 18 octobre 1995, ainsi que de condamner conjointement et solidairement les mêmes parties et la société Meniger à lui rembourser l'intégralité des frais des expertises judiciaires, pour la somme de 44 204,62 euros en principal, majorée des intérêts à taux légal à compter des dates et dans la mesure des paiements effectués, et des intérêts capitalisés à compter du 28 août 2002 ;
3°) de condamner sous la même solidarité la SCPA Laroche-Morel-Thoreau, la société des établissements Rouvet et la société Alphagroup à lui payer la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que le désordre relève de la garantie décennale ; que le Tribunal a commis une erreur de droit en jugeant que des désordres ne permettant pas que soit assurée la protection incendie d'un ouvrage public correspondent à un dommage éventuel, n'engageant pas la responsabilité décennale des constructeurs ; que le moyen tiré du caractère apparent des désordres n'est pas d'ordre public et ne peut pas être soulevé d'office ; qu'en tout état de cause, ce moyen n'est pas fondé ; qu'à titre subsidiaire, la responsabilité contractuelle de l'architecte peut être engagée à raison de son manquement à l'obligation de conseil ; que la responsabilité est imputable aux trois sociétés précitées ; que la circonstance que la SA établissements Rouvet et la société Alphagroup soient en liquidation judiciaire ne fait pas obstacle à leur condamnation ; qu'à tout le moins la responsabilité de l'architecte pourrait être retenue à titre subsidiaire ; que le préjudice s'élève à 108 980,34 euros TTC et les frais d'expertise à 4 573,47 euros ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 juillet 2006 :
- le rapport de M. Gipoulon, président-rapporteur ;
- les observations de Me Y... pour le DEPARTEMENT DES YVELINES ;
- et les conclusions de Mme Colrat, commissaire du gouvernement ;
Considérant que le DEPARTEMENT DES YVELINES relève appel du jugement du Tribunal administratif de Versailles en tant qu'il a rejeté sa demande d'indemnisation des désordres affectant le collège les Nénuphars à Bréval en tant qu'ils concernaient à l'assemblage métallique de la charpente et qu'il a laissé une partie des frais d'expertise, soit la somme de 4 573,47 €, à sa charge ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que les premiers juges ont écarté la responsabilité décennale pour les désordres relatifs à la charpente au motif que ces désordres n'étaient pas de nature à relever de cette responsabilité et au surplus qu'ils étaient apparents lors de la réception définitive ; qu'il résulte de l'instruction que ce dernier motif a été soulevé d'office à tort par les premiers juges ; que compte tenu de son caractère déterminant, il y a lieu d'annuler le jugement en tant qu'il statue sur les conclusions relatives à ce chef de désordres et sur celles, indissociables, relatives aux frais d'expertise laissés à la charge du maître de l'ouvrage ; qu'il y a lieu de statuer sur ces conclusions dans le cadre de l'évocation ;
Sur les conclusions relatives aux désordres concernant la charpente :
En ce qui concerne le principe de la responsabilité décennale :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert que l'épaisseur insuffisante de l'assemblage métallique était de nature à compromettre la stabilité de la charpente en cas d'incendie ; que, dans ces conditions, alors même que le risque d'incendie était éventuel, le désordre était de nature à rendre l'immeuble impropre à sa destination au sens des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ;
En ce qui concerne la responsabilité des constructeurs :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert que la malfaçon est imputable : à une défaillance dans la direction et la surveillance des travaux du maître d'oeuvre, la SCPA Laroche-Morel-Thoreau, à un manquement du contrôleur technique, la société Alphagroup et à de nombreuses malfaçons de mise en oeuvre de la charpente ainsi qu'au non respect des règles de l'art en matière d'incendie de l'entreprise chargée des travaux de charpente, la société des établissements Rouvet ; que les fautes communes de l'architecte, du bureau de contrôle et de l'entrepreneur sont de nature à justifier leur condamnation solidaire ; que le département est, dès lors, fondé à demander la condamnation solidaire de la SCPA Laroche-Morel-Thoreau, de l'entreprise Rouvet et de la société Alphagroup ;
En ce qui concerne le préjudice :
Considérant qu'il ressort de l'instruction, et notamment du dernier rapport d'expertise, que le coût de remplacement des assemblages métalliques des pièces de charpente non conformes aux normes d'incendie s'élève à 99 073,03 euros, somme à laquelle il convient d'ajouter le coût estimé des imprévus de chantier, évalué à 10% du montant des travaux, ainsi que les honoraires de maîtrise d'oeuvre également évalués à 10% du montant des travaux, soit une somme totale de 108 980,34 euros TTC ; qu'il y a lieu de mettre cette somme à la charge solidaire de la SCPA Laroche-Morel-Thoreau, de l'entreprise Rouvet et de la société Alphagroup ;
En ce qui concerne les intérêts et les intérêts d'intérêts :
Considérant qu'il y a lieu de fixer le point de départ des intérêts au taux légal dus au DEPARTEMENT DES YVELINES à la date d'enregistrement de la demande, le 17 octobre 1994 ;
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée le 18 octobre 1995 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que par application de l'article 1154 du code civil, les intérêts échus le 18 octobre 1995 seront capitalisés chaque année à compter du 18 octobre 1995 pour produire eux-mêmes des intérêts ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant que compte tenu de la condamnation des constructeurs à réparer aussi les désordres relatifs à la charpente, le DEPARTEMENT DES YVELINES est fondé à demander la condamnation de la SCPA Laroche-Morel-Thoreau, l'entreprise Rouvet et la société Alphagroup à lui payer le reliquat des frais d'expertise laissé à sa charge d'un montant de 4 573,47 euros ;
En ce qui concerne les intérêts et les intérêts d'intérêts :
Considérant que le DEPARTEMENT DES YVELINES a droit aux intérêts sur le reliquat des frais d'expertise à compter de leur paiement à l'expert le 26 novembre 1996 ; que la capitalisation a été demandée le 28 août 2002 ; qu'à cette date, il était dû plus d'une année d'intérêts ; qu'il y a donc lieu de faire droit à ces conclusions ; que la SCPA Laroche-Morel-Thoreau, l'entreprise Rouvet et la société Alphagroup prendront en charge solidairement ces intérêts ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que le DEPARTEMENT DES YVELINES, qui n'est pas la partie perdante, soit condamné à verser aux sociétés Méniger, Ruberoïd, STEPC et Qualiconsult les sommes qu'elles demandent au titre des frais exposées par elles et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la SCPA Laroche-Morel-Thoreau, l'entreprise Rouvet et la société Alphagroup, prises ensemble, à payer une somme de 3 000 euros au DEPARTEMENT DES YVELINES au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Versailles en date du 24 janvier 2003 est annulé en ce que qu'il a rejeté les conclusions du DEPARTEMENT DES YVELINES tendant à la réparation des vices affectant les assemblages métalliques de la charpente du collège « les Nénuphars » à Bréval et en ce qu'il a laissé à sa charge la somme de 4 573,47 euros au titre des frais d'expertise.
Article 2 : La SCPA Laroche-Morel-Thoreau, l'entreprise Rouvet et la société Alphagroup sont condamnées solidairement à verser au DEPARTEMENT DES YVELINES la somme de 108 980,34 euros TTC au titre des désordres affectant les assemblages métalliques de cette charpente.
Article 3 : La somme mentionnée à l'article 2 portera intérêts au taux légal à compter du 17 octobre 1994. Les intérêts échus le 18 octobre 1995 seront capitalisés chaque année à compter de cette date pour porter eux-mêmes des intérêts.
Article 4 : Le reliquat des frais d'expertise d'un montant de 4 573,47 euros est mis à la charge solidaire de la SCPA Laroche-Morel-Thoreau, l'entreprise Rouvet et la société Alphagroup.
Article 5 : La somme mentionnée à l'article 4 portera intérêts au taux légal à compter du 26 novembre 1996. Les intérêts échus le 28 août 2002 seront capitalisés chaque année à compter de cette date pour porter eux-mêmes des intérêts.
Article 6 : La SCPA Laroche-Morel-Thoreau, l'entreprise Rouvet et la société Alphagroup, prises ensemble, verseront au DEPARTEMENT DES YVELINES la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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