Vu la requête, enregistrée le 7 février 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Mamadou A, demeurant ..., par Me Rochefort ; M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0806981 en date du 21 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er juillet 2008 par lequel le préfet des Yvelines lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il sera renvoyé ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté attaqué ;
3°) d'enjoindre au préfet des Yvelines de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à défaut, une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation administrative à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve, pour Me Rochefort, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;
Il soutient que le Tribunal a omis de statuer sur le moyen tiré du défaut de saisine de la commission départementale du travail et de l'emploi ; que l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ; que l'arrêté attaqué méconnaît le principe de non-discrimination résultant des stipulations combinées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention ; qu'en effet, et dès lors que le salaire escompté par M. A de son travail en France constitue un bien au sens de ces stipulations, le préfet ne pouvait lui opposer, pour lui refuser un titre de séjour, en tant que travailleur étranger non ressortissant de l'Union européenne, la situation de l'emploi et l'absence de son métier sur la liste des métiers retenus par l'arrêté du 18 janvier 2008 ; que, dès lors que M. A justifiait être titulaire d'une promesse d'embauche et d'un contrat de travail à durée déterminée en tant que manoeuvre saisonnier agricole, le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, M. A pouvant prétendre à un titre pour motif exceptionnel ; qu'il vit en France depuis 2006, y a tissé des liens familiaux et privés et que, par suite, l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble le premier protocole additionnel à ladite convention ;
Vu le décret n° 2009-1073 du 26 août 2009 portant publication de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal relatif à la gestion concertée des flux migratoires, signé à Dakar le 23 septembre 2006, et l'avenant à cet accord signé à Dakar le 25 février 2008 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000, notamment son article 24 ;
Vu la loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007 ;
Vu l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la confédération suisse ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 janvier 2010 :
- le rapport de M. Locatelli, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Brunelli, rapporteur public ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que M. A a notamment invoqué, à l'encontre de l'arrêté attaqué, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions pertinentes des articles L. 313-14 et R. 314-4-1 du code du travail et de toute autre disposition subséquente impliquant, selon le requérant, que le préfet du Val-d'Oise saisisse, pour avis, la direction du travail et de l'emploi avant de prendre sa décision ; que, toutefois, il résulte des termes mêmes du jugement attaqué que le Tribunal administratif de Versailles a jugé que les moyens tirés de la méconnaissance, notamment, des articles L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article R. 314-4-1 du code du travail n'étaient pas assortis de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé ; que, par suite, le Tribunal administratif de Versailles n'a pas entaché son jugement d'une omission à statuer ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté attaqué du préfet des Yvelines :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet des Yvelines ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de l'article 41 de la loi susvisée du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile : I. - L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour (...) peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation ;
Considérant que l'arrêté par lequel le préfet des Yvelines a refusé de délivrer à M. A un titre de séjour comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui le fondent ; que, par suite, il est suffisamment motivé au regard des prescriptions de la loi du 11 juillet 1979 modifiée, sans qu'il soit besoin, en application de l'article L. 511-1 précité, que l'obligation de quitter le territoire dont il est assorti doive, pour être régulière, être également motivée ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes ; qu'aux termes de l'article 14 de la même convention : La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ;
Considérant que les salaires constituent des créances qui doivent être regardées comme des biens au sens de l'article 1er du premier protocole précité ; que, toutefois, d'une part, le droit au respect des biens protégé par ces stipulations ne s'oppose pas à la mise en place, par les Etats parties à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, d'une réglementation d'intérêt général destinée à assurer la régulation des flux migratoires ; que, la réglementation française, en tant qu'elle prévoit qu'à l'exception des métiers connaissant des difficultés de recrutement et inscrits sur une liste prévue à l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la situation de l'emploi demeure opposable aux étrangers non ressortissants de l'Union Européenne, de l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, n'est pas disproportionnée à l'objectif d'intérêt général de régulation des flux migratoires consistant notamment dans l'accès réglementé au marché du travail ; que, d'autre part, les traités d'adhésion à l'Union européenne, en tant qu'ils prévoient que les Etats membres doivent instaurer un régime préférentiel pour les travailleurs ressortissants de l'Union européenne par rapport aux travailleurs ressortissants d'Etats tiers, ont pour but de rendre effective la liberté de circulation des travailleurs à l'intérieur des Etats membres de l'Union européenne ; que M. A n'est donc pas fondé à soutenir que la différence de traitement entre ressortissants des Etats tiers et ressortissants de l'Union européenne ne reposerait, en ce qui concerne l'accès au marché du travail, sur aucune justification objective et raisonnable et méconnaîtrait, par suite, l'article 1er du premier protocole combiné avec l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) ; qu'aux termes de l'article L. 313-10 du même code : La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2. La carte porte la mention salarié lorsque l'activité est exercée pour une durée supérieure ou égale à douze mois. Elle porte la mention travailleur temporaire lorsque l'activité est exercée pour une durée déterminée inférieure à douze mois (...) ; qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse : La situation de l'emploi ou l'absence de recherche préalable de candidats déjà présents sur le marché du travail n'est pas opposable à une demande d'autorisation de travail présentée pour un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse souhaitant exercer une activité professionnelle dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur la liste annexée au présent arrêté ;
Considérant que, pour refuser de délivrer la carte de séjour temporaire que M. A avait sollicitée le 18 juin 2008 en qualité de salarié, le préfet des Yvelines s'est fondé à bon droit sur les dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que, si l'intéressé était titulaire d'une promesse d'embauche et d'un contrat de travail à durée déterminée en qualité de cueilleur de fruits, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que M. A ait été titulaire d'un visa de long séjour et que le contrat de travail dont il se prévaut ait été visé dans les conditions fixées à l'article L. 341-2 du code du travail, alors qu'au surplus, la profession d'ouvrier cueilleur ne figure pas sur la liste des professions, annexée à l'arrêté du 18 janvier 2008, pour lesquelles la situation de l'emploi ou l'absence de recherche préalable de candidats déjà présents sur le marché du travail n'est pas opposable ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé ait adressé une demande de titre de séjour en faisant valoir des motifs exceptionnels sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi, le préfet des Yvelines n'avait nulle obligation d'examiner d'office une telle demande, dès lors qu'il n'y était tenu par aucune disposition législative ou réglementaire ; qu'en admettant même qu'une telle demande ait été présentée sur ce fondement, ces motifs exceptionnels ne sauraient, en tout état de cause, uniquement résulter, contrairement à ce que soutient M. A, de ce qu'il était titulaire du contrat de travail à durée déterminée et de la promesse d'embauche susmentionnés, dès lors notamment que le contrat de travail dont s'agit ne respectait pas, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les conditions prévues à l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, M. A n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté litigieux a été pris en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 313-14 dudit code ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, ressortissant sénégalais, né le 3 janvier 1976, est entré en France au cours de l'année 2006, alors âgé de 30 ans ; que, sans charge de famille en France, il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où vivent notamment son épouse et ses trois enfants ; qu'ainsi, compte tenu de la durée et des conditions de séjour en France de M. A, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'il méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être accueilli ; que, pour les mêmes motifs, le préfet des Yvelines n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de son arrêté sur la situation personnelle du requérant ;
Considérant, en cinquième lieu, que M. A ne peut utilement invoquer les stipulations du 321 de l'article 3 de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal relatif à la gestion concertée des flux migratoires, tel qu'il résulte de l'avenant signé à Dakar le 25 février 2008, dès lors que le décret n° 2009-1073 du 26 août 2009 portant publication de cet accord est entré en vigueur postérieurement à l'arrêté attaqué du 1er juillet 2008 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 21 octobre 2008, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que, par suite, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
D E C I D E
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
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N° 09VE00347 2