Vu la requête, enregistrée le 7 mars 2011, présentée pour M. Elnabawy A, demeurant ..., par la SCP Mc. Granjon - Y. Billet ; M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°1100360 du 27 janvier 2011 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 janvier 2011 par lequel le préfet de l'Essonne a décidé sa reconduite à la frontière et a fixé le pays de destination ;
2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire, sous astreinte de 100 euros par jour de retard dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, à défaut, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte et dans cette attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que l'arrêté est insuffisamment motivé ; qu'il méconnaît la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 dès lors qu'il ne prévoit pas un délai d'au moins sept jours pour un départ volontaire ; qu'il méconnaît également le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience :
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 juin 2011 :
- le rapport de M. Delage, magistrat désigné,
- les conclusions de M. Soyez, rapporteur public,
- et les observations de Me Boamah, substituant la SCP Me. Granjon - Y. Billet ;
Considérant que M. A, de nationalité égyptienne, relève appel du jugement du 27 janvier 2011 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 janvier 2011 du préfet de l'Essonne décidant sa reconduite à la frontière et fixant le pays de destination de la reconduite ;
Sur les conclusions à fin d'annulation, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article 7 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 susvisée relatif au départ volontaire : 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. Les Etats membres peuvent prévoir dans leur législation nationale que ce délai n'est accordé qu'à la suite d'une demande du ressortissant concerné d'un pays tiers. Dans ce cas, les Etats membres informent les ressortissants concernés de pays tiers de la possibilité de présenter une telle demande. / Le délai prévu au premier alinéa n'exclut pas la possibilité, pour les ressortissants concernés de pays tiers, de partir plus tôt. / 2. Si nécessaire, les Etats membres prolongent le délai de départ volontaire d'une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée de séjour, l'existence d'enfants scolarisés et d'autres liens familiaux et sociaux. / 3. Certaines obligations visant à éviter le risque de fuite, comme les obligations de se présenter régulièrement aux autorités, de déposer une garantie financière adéquate, de remettre des documents ou de demeurer en un lieu déterminé, peuvent être imposées pendant le délai de départ volontaire. / 4. S'il existe un risque de fuite, ou si une demande de séjour régulier a été rejetée comme étant manifestement non fondée ou frauduleuse, ou si la personne concernée constitue un danger pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale, les Etats membres peuvent s'abstenir d'accorder un délai de départ volontaire ou peuvent accorder un délai inférieur à sept jours ; que le 7) de l'article 3 de la même directive définit ce risque de fuite comme le fait qu'il existe des raisons, dans un cas particulier et sur la base de critères objectifs définis par la loi, de penser qu'un ressortissant d'un pays tiers faisant l'objet de procédures de retour peut prendre la fuite ; qu'aux termes de l'article 8 de la même directive, intitulé éloignement : 1. Les Etats membres prennent toutes les mesures nécessaires pour exécuter la décision de retour si aucun délai n'a été accordé pour un départ volontaire conformément à l'article 7, paragraphe 4, ou si l'obligation de retour n'a pas été respectée dans le délai accordé pour le départ volontaire conformément à l'article 7. / 2. Si un Etat membre a accordé un délai de départ volontaire conformément à l'article 7, la décision de retour ne peut être exécutée qu'après expiration de ce délai, à moins que, au cours de celui-ci, un risque visé à l'article 7, paragraphe 4, apparaisse. / 3. Les Etats membres peuvent adopter une décision ou un acte distinct de nature administrative ou judiciaire ordonnant l'éloignement (...) ; que le délai imparti aux Etats membres pour transposer ladite directive expirait, en vertu du paragraphe 1 de son article 20, le 24 décembre 2010 ;
Considérant que les articles 7 et 8 de la directive cités ci-dessus énoncent des obligations en termes non équivoques, qui ne sont assorties d'aucune condition et ne sont subordonnées dans leur exécution ou dans leurs effets à aucun acte des institutions de l'Union européenne ou des Etats membres ;
Considérant que les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en ce qu'elles n'imposent pas qu'une mesure de reconduite à la frontière soit assortie d'un délai approprié pour le départ volontaire d'un ressortissant de pays tiers dans des cas autres que ceux prévus à l'article 7, paragraphe 4, de la directive, sont incompatibles avec les objectifs de ses articles 7 et 8 ; que les dispositions de ladite directive ne font toutefois pas obstacle à ce qu'une mesure de reconduite à la frontière soit prise à l'encontre d'un ressortissant de pays tiers dans les cas prévus aux 1°, 2° et 4° du II de l'article L. 511-1, dès lors que cette mesure est assortie d'un délai de retour approprié à la situation de l'intéressé et supérieur à sept jours ;
Considérant que l'arrêté contesté du 20 janvier 2011 décidant la reconduite à la frontière de M. A a été pris sur le fondement des dispositions du 1° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et séjour des étrangers et du droit d'asile et n'est pas assorti d'un délai de retour approprié à la situation de l'intéressé et supérieur à sept jours ; que, par suite, M. A est fondé à soutenir qu'il méconnaît les dispositions de l'article 7 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ; que ses conclusions à fin d'annulation doivent donc être accueillies, sans qu'il soit besoin de se fonder sur les éléments figurant dans le mémoire présenté pour le requérant et enregistré le 17 juin 2011 et qui d'ailleurs, pour ce motif, n'a pas été communiqué ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin de régularisation de la situation administrative de l'intéressé :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé ; que le III de l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 dispose que : Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé,(...) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que le préfet ait à nouveau statué sur son cas ;
Considérant que le présent arrêt n'implique pas nécessairement, eu égard à ses motifs, qu'il soit enjoint de délivrer à M. A le titre de séjour qu'il sollicite ; qu'il y a donc lieu seulement de prescrire au préfet de l'Essonne de se prononcer sur la situation de M. A dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision et dans cette attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros que M. A demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D E C I D E
Article 1er : Le jugement du 27 janvier 2011 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles et l'arrêté du préfet de l'Essonne en date du 20 janvier 2011 décidant la reconduite à la frontière de M. A sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Essonne de délivrer à M. A une autorisation provisoire de séjour et de se prononcer sur sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision
Article 3 : L'Etat versera à M. A une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.
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N° 11VE00845 2