La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/05/2015 | FRANCE | N°14VE00794

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 28 mai 2015, 14VE00794


Vu, I°, sous le n° 14VE00794, la requête enregistrée le 17 mars 2014, présentée pour M. C... D..., demeurant..., par Me Michallon, avocat ; M. D...demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1208398 du 4 mars 2014 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté la demande qu'il avait présentée avec son épouse Mme A..., dont il est séparé, tendant à la décharge, à hauteur de 117 817 euros, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, ainsi que des intérêts et majorations y afférents, auxquelles ils ont été assujettis au titre des an

nées 2008 et 2009 ;

2° de prononcer la décharge de ces cotisations supplémen...

Vu, I°, sous le n° 14VE00794, la requête enregistrée le 17 mars 2014, présentée pour M. C... D..., demeurant..., par Me Michallon, avocat ; M. D...demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1208398 du 4 mars 2014 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté la demande qu'il avait présentée avec son épouse Mme A..., dont il est séparé, tendant à la décharge, à hauteur de 117 817 euros, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, ainsi que des intérêts et majorations y afférents, auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 et 2009 ;

2° de prononcer la décharge de ces cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des intérêts et majorations y afférents ;

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé dès lors qu'il a, à tort et à l'encontre du simple bon sens, retenu le postulat que tous les crédits constatés sur les sept comptes bancaires du foyer fiscal étaient à usage professionnel, alors que seul l'un d'entre eux était effectivement utilisé à titre professionnel ;

- l'évaluation d'office de son bénéfice non commercial sur les deux années a été considérablement surestimée, dès lors qu'elle repose sur le fait, erroné, que toutes les recettes figurant sur les sept comptes bancaires du foyer fiscal correspondent à des recettes de son activité libérale de consultant, imposables en tant que bénéfices non commerciaux ; tous les justificatifs seront produits de nature à établir que sur ces deux années, six de ces comptes étaient à usage non professionnel et n'accueillaient que des revenus fonciers ou des salaires, imposés par ailleurs, ou des virements de compte à compte, ou encore le produit d'une vente immobilière ; les bénéfices non commerciaux nets étaient de 21 472 euros en 2008 et 5 453 euros en 2009, pour des recettes de 76 384 et 25 565 euros hors taxe ;

- un expert comptable doit être requis pour examiner les comptes bancaires et valider le montant réel des recettes de son activité de consultant ;

..........................................................................................................

Vu, II°, sous le n° 14VE02166, la requête enregistrée le 17 mars 2014, et le mémoire ampliatif enregistré le 30 juin 2014, présentés pour Mme B...A..., élisant domicile..., par Me Guillerand, avocat ; Mme A... demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1208398 du 4 mars 2014 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté la demande qu'elle avait présentée avec son époux

M.D..., dont elle est séparée, tendant à la décharge, à hauteur de 117 817 euros, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, ainsi que des intérêts de retard et majorations y afférents, auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 et 2009 ;

2° de prononcer la décharge de ces cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des intérêts de retard et majorations y afférents ;

3° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- elle a été irrégulièrement privée des garanties de procédure attachées aux articles

L. 47, L. 54 B, L. 55 et L. 57 du livre des procédures fiscales ; en effet, d'une part, les rappels d'imposition ont été établis au vu des comptes bancaires du couple qu'elle formait avec

M.D..., ce qui requérait l'engagement d'un examen de situation fiscale personnelle avec notification d'un avis préalable en application de l'article L. 47 de ce livre, puis information de ce qu'elle pouvait se faire assister d'un conseil comme le prévoit l'article L. 54 B ; d'autre part, dès lors que des déclarations de revenus avaient été dûment déposées, elle aurait dû recevoir une proposition de rectification au titre des crédits des comptes joints conformément aux articles L. 55 et L. 57 du même livre alors que le service a taxé d'office les crédits de ces comptes sans que l'exposante soit destinataire d'une proposition de rectification, laquelle a été adressée à l'adresse professionnelle de son époux et non à leur domicile commun ;

- alors que la personne tenue solidairement au paiement d'un impôt doit bénéficier d'un débat loyal de sorte que l'administration est tenue de l'informer des actes de procédure notifiés au débiteur principal, en l'espèce les lettres de notification ont seulement été adressées à son époux dans le cadre d'une procédure d'évaluation d'office de ses bénéfices non commerciaux, sans qu'une information préalable la mettant à même de présenter des observations ait été notifiée à l'exposante, alors pourtant qu'elle était susceptible d'être recherchée en paiement des impôts et des pénalités au titre de la solidarité entre époux prévue par l'article 1691 bis du code général des impôts ;

- l'évaluation d'office du bénéfice non commercial de M. D... sur les deux années a été considérablement surestimée, dès lors qu'elle inclut dans les bases redressées toutes les recettes figurant sur les sept comptes bancaires du foyer fiscal, en les considérant à tort comme des recettes de l'activité libérale de consultant, imposables en tant que bénéfices non commerciaux, alors qu'un seul de ces comptes était à usage professionnel ;

- il y a lieu, au vu des justificatifs présentés, d'exclure de la base imposable redressée une somme de 98 038,47 euros correspondant au produit net d'une vente immobilière en 2008, les sommes de 29 258 euros pour 2008 et 11 360 euros pour 2009 correspondant à des revenus fonciers, et les sommes de 8 235 euros pour 2008 et 3 445 euros pour 2009, correspondant à des virements entre deux comptes de M.D... ;

- les sommes de 54 000 euros sur 2008 et 10 000 euros sur 2009 doivent également être déduites des bases rappelées, dès lors qu'elles avaient été régulièrement déclarées ;

- la sanction représentée par la pénalité de 100 % dont a été assorti le rappel d'impôt sur le revenu du fait de l'opposition à contrôle fiscal constatée à l'encontre de son époux ne peut être mise à sa charge dès lors qu'elle n'a, pour sa part, commis aucune faute passible de cette sanction, sauf à caractériser une violation du principe de personnalité des peines résultant de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 121-1 du code pénal ; la mise en recouvrement à son nom, à titre solidaire, d'une sanction qui relève de la responsabilité d'un tiers entraîne également une violation de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention ; enfin, et à titre subsidiaire, si l'administration entend appeler en solidarité une personne physique, elle doit lui accorder la garantie attachée à l'exigence d'un débat loyal ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales son premier protocole additionnel ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mai 2015 :

- le rapport de M. Bergeret, président assesseur,

- et les conclusions de M. Coudert, rapporteur public ;

1. Considérant qu'à l'issue de deux vérifications de comptabilité portant sur l'activité de conseil en informatique alors exercée par M.D..., celui-ci et son épouse,

MmeA..., se sont vu notifier, au titre des années 2008 et 2009, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des majorations afférentes, établies après évaluation d'office des bénéfices non commerciaux procurés par l'activité professionnelle de

M. D...; que les époux étant séparés, M. D..., d'une part, et MmeA..., d'autre part, relèvent appel du jugement du 4 mars 2014 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des majorations afférentes ; qu'il y a lieu de joindre ces deux requêtes qui sont relatives à l'impôt frappant le foyer fiscal alors constitué par les requérants et qui ont fait l'objet d'une instruction commune ;

Sur l'étendue du litige :

2. Considérant que, par décisions du 26 janvier 2015 et du 2 mars 2015, postérieures à l'introduction des requêtes, le directeur départemental des finances publiques des Hauts-de-Seine a prononcé le dégrèvement des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des intérêts de retard et majoration correspondants, réclamés à M. D... et Mme A...au titre de l'année 2008, à hauteur des sommes respectives de 93 432 euros et 4 438 euros ; que, dans cette mesure, les conclusions des requêtes de M. D... et de Mme A...sont ainsi devenues sans objet ; que, dès lors, il n'y a pas lieu pour la Cour d'y statuer ;

Sur le surplus des conclusions des requêtes tendant à la décharge des impositions en litige :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative :

" Les jugements sont motivés " ; que le jugement attaqué relève, d'une part, que les rappels d'impôt sur le revenu contestés ayant été établis à l'issue d'une procédure d'évaluation d'office, il incombe aux contribuables, en vertu des articles L. 193 et R. 193-1 du livre des procédures fiscales, d'apporter la preuve de l'exagération des bases imposables retenues, et expose, d'autre part, les motifs pour lesquels cette preuve n'a pas été apportée en l'espèce par les écritures et pièces produites par les requérants ; qu'il est ainsi suffisamment motivé sans qu'importe à cet égard la circonstance, qui relève du bien-fondé de ce jugement, que le tribunal administratif aurait considéré à tort que les sept comptes bancaires des requérants étaient à usage professionnel ;

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 12 du des procédures fiscales : " Dans les conditions prévues au présent livre, l'administration des impôts peut procéder à l'examen contradictoire de la situation fiscale des personnes physiques au regard de l'impôt sur le revenu (...). A l'occasion de cet examen, l'administration peut contrôler la cohérence entre, d'une part les revenus déclarés et, d'autre part, la situation patrimoniale, la situation de trésorerie et les éléments du train de vie des membres du foyer fiscal (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 47 du même livre : " Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. / Cet avis doit (...) mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix (...) " ; que l'article L. 54 du même livre dispose que : " Les procédures de fixation des bases d'imposition ou de rectification des déclarations relatives aux revenus provenant d'une activité dont les produits relèvent de la catégorie (...) des bénéfices non commerciaux (...), sont suivies entre l'administration des impôts et celui des époux titulaire des revenus. Ces procédures produisent directement effet pour la détermination du revenu global " ; que l'article L. 54 A du même livre dispose que : " Sous réserve des dispositions des articles L. 9 et L. 54, chacun des époux a qualité pour suivre les procédures relatives à l'impôt dû à raison de l'ensemble des revenus du foyer. Les déclarations, les réponses, les actes de procédure faits par l'un des conjoints ou notifiés à l'un d'eux sont opposables de plein droit à l'autre " ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 54 B du même livre : " La notification d'une proposition de rectification doit mentionner, sous peine de nullité, que le contribuable a la faculté de se faire assister d'un conseil de son choix pour discuter la proposition de rectification ou pour y répondre " ;

5. Considérant que MmeA..., qui ne conteste pas qu'un avis de vérification de l'activité non commerciale de son époux a été régulièrement notifié à celui-ci, soutient, d'une part, que cette procédure de vérification n'a pas été régulièrement engagée dès lors qu'elle n'a pas été personnellement avisée de l'engagement de ce contrôle, qui aurait au surplus, selon elle, dû donner lieu à l'envoi d'un avis d'examen contradictoire de la situation du foyer fiscal et qu'elle a ainsi été privée de la garantie constituée par l'information prévue par les dispositions précitées de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, d'autre part, qu'elle aurait dû être personnellement destinataire d'une proposition de rectification, respectant les garanties prévues par les articles L. 55 et L. 57 du même livre, et, enfin, qu'elle a été privée des garanties attachées à l'exigence du débat loyal auquel l'administration est tenue vis-à-vis du débiteur solidaire de l'impôt ;

6. Considérant, en premier lieu, que, d'une part, il résulte de l'instruction que la vérification de comptabilité engagée par l'administration n'a pas donné lieu à une confrontation approfondie des déclarations, des revenus et du train de vie des contribuables, qui caractérise un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, tel que prévu par les dispositions précitées de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales ; qu'ainsi, alors même qu'elle a examiné les comptes joints du couple, l'administration s'est bornée à procéder à une vérification de comptabilité de l'activité professionnelle de M. D... ; qu'il en résulte que Mme A... ne peut en tout état de cause utilement soutenir qu'elle aurait été privée de l'une des garanties attachées à l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle du contribuable en vertu de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales ; que, d'autre part, en application des dispositions précitées de l'article L. 54 du même livre, qui habilitaient l'administration à mener les opérations de vérification auprès de M. D..., seul titulaire des bénéfices non commerciaux visés par cette procédure, Mme A...ne peut davantage utilement soutenir que la procédure aurait été viciée du fait que l'avis de vérification ne lui aurait pas été personnellement notifié ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'en application des dispositions précitées de l'article L. 54 du livre des procédures fiscales, en vertu desquelles la procédure de fixation des bases d'imposition des revenus provenant de l'activité non commerciale de M. D... a produit directement effet pour la détermination du revenu global du couple, et, au surplus, de celles précitées de l'article L. 54 A du même livre, Mme A...ne peut davantage soutenir que la procédure a été viciée par la circonstance qu'elle n'a pas été personnellement destinataire de la proposition de rectification établie le 19 juillet 2010 à l'issue de la procédure de vérification de comptabilité de M. D... et qu'elle aurait ainsi été privée de la garantie constituée par l'information, prescrite par les dispositions précitées de l'article L. 54 B du livre des procédures fiscales, que le contribuable dispose de la faculté de se faire assister par un conseil de son choix pour discuter la proposition de rectification ou pour y répondre ; que, par ailleurs, si Mme A... évoque une méconnaissance des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, ces dispositions relatives à la procédure de rectification contradictoire sont en toute hypothèse sans application en l'espèce, dès lors que les rappels d'imposition en litige ont été établis à l'issue d'une procédure d'évaluation d'office, dont la régularité de la mise en oeuvre, en conséquence d'une opposition à contrôle fiscal constatée à l'encontre de M. D..., n'est pas autrement contestée ;

8. Considérant, enfin, que Mme A...ne peut utilement, dans le présent contentieux d'assiette, faire valoir que les rappels d'imposition établis d'office, sur les seuls bénéfices non commerciaux de M. D..., ne pourraient donner lieu à une recherche de paiement de l'épouse solidaire sans qu'une information préalable lui soit notifiée la mettant à même de présenter des observations, sauf à caractériser une violation de la garantie tenant à l'exigence d'un débat loyal ; que, dans la mesure où elle aurait ainsi entendu contester la procédure d'imposition elle-même, un tel moyen ne pourrait qu'être écarté, dès lors qu'en application des dispositions précitées de l'article L. 54 A du livre des procédures fiscales, la procédure régulièrement suivie à l'égard de l'un des conjoints est opposable de plein droit à l'autre conjoint ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions restant en litige :

9. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les rappels d'imposition litigieux, mis en recouvrement le 31 octobre 2010, conformément aux termes de la proposition de rectification adressée le 19 juillet 2010 à M. D..., ont été établis en application des dispositions de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales, aux termes desquelles : " Les bases d'imposition sont évaluées d'office lorsque le contrôle fiscal ne peut avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers (...) " ; que les appelants ne contestent ni la régularité ni le bien-fondé du procès-verbal d'opposition à contrôle fiscal dressé le 7 juillet 2010 du fait du comportement de M. D... ; qu'ainsi, et en vertu des dispositions des articles L. 193 et R. 193-1 du livre des procédures fiscales, il leur incombe de démontrer le caractère exagéré des bases des impositions contestées, pour celles qui restent en litige ;

10. Considérant que, pour procéder à l'évaluation du chiffre d'affaires de l'activité indépendante de M.D..., le service a pris en compte l'intégralité des recettes figurant sur les sept comptes bancaires détenus par l'intéressé lui-même ou par le couple qu'il formait alors avec MmeA..., pour des montants de 261 374 euros en 2008 et 45 468 euros en 2009 ; que les appelants soutiennent que la base imposable a ainsi été exagérée dès lors que six de ces comptes étaient à usage non professionnel et n'avaient accueilli, outre la somme de 98 038 euros correspondant au produit net d'une vente immobilière, ce que le ministre a admis en cours d'instance, que des revenus fonciers ou des salaires, imposés par ailleurs, ou des virements de compte à compte, les recettes professionnelles ne s'élevant selon eux qu'à 92 183 euros TTC en 2008 et 30 683 euros TTC en 2009, sommes correspondant aux seuls encaissements constatés sur le compte déclaré à usage professionnel ;

11. Considérant, d'une part, que les formulaires de déclaration de bénéfices non commerciaux, établis tardivement par M. D...au cours de la vérification de comptabilité au titre des années 2008 et 2009, faisant état de montants de recettes de

76 384 euros HT en 2008 et 25 565 euros HT en 2009 et de bénéfices de 21 472 euros en 2008 et 5 453 euros en 2009, ne présentent en eux-mêmes aucun caractère probant ; que son allégation selon laquelle les recettes professionnelles retenues par l'administration à hauteur des montants précités de 261 374 euros en 2008 et 45 468 euros en 2009 incluraient à tort des salaires n'est assortie d'aucun élément probant ; qu'en se bornant à faire valoir, en reprenant une partie des tableaux récapitulatifs des encaissements constatés par l'administration sur chacun de ces comptes bancaires pour reconstituer le chiffre d'affaires de son activité, que certains de ces encaissements correspondraient à des virements de compte à compte, M. D...et Mme A..., qui ne produisent pas les relevés de comptes bancaires correspondant à la provenance de ces encaissements, n'établissent pas l'exagération ainsi alléguée ; que toutefois, cette preuve peut être regardée comme apportée, à hauteur d'une somme de 615 euros TTC, soit 514,20 euros hors taxe, qui, au vu de l'unique relevé de compte bancaire versé aux dossiers, provient en avril 2009 d'un virement opéré sur le compte professionnel de M. D...à destination de l'un de ses comptes personnels, dès lors qu'il est par ailleurs établi, au vu de l'annexe 4 de la proposition de rectification du 19 juillet 2010, qu'elle a été prise en compte à tort pour reconstituer le chiffre d'affaires de l'année 2009 ; que, dans ces conditions, la demande en décharge des appelants peut être accueillie à concurrence de la prise en compte de la somme de 514, 20 euros ;

12. Considérant, d'autre part, que si M. D...verse au dossier des demandes de règlement de loyer pour des montants de 655,50 euros au titre des mois de mai 2006 à février 2007, ou pour un montant de 815 euros pour le mois de juillet 2008, afférentes à un logement sis à Puteaux, et des demandes de règlement de loyer pour un montant mensuel de 1 150 euros au titre des mois d'août à décembre 2007, afférentes à un logement sis à

Saint-Germain-en-Laye, il n'établit pas ainsi, en l'absence de production de toute pièce probante, telle qu'un contrat de bail, ou, à tout le moins, des relevés de compte bancaire retraçant l'encaissement de ces sommes sur les périodes considérées, qu'elles correspondent effectivement à des loyers qui auraient à tort été pris en compte par l'administration pour reconstituer le chiffre d'affaires de son activité de consultant ; qu'il en est de même des montants mensuels de

1 265 euros encaissés sur l'un des comptes bancaires de M. D...au cours des années 2008 et 2009, que ce dernier présente, sans produire aucune pièce probante pour l'établir, comme des loyers versés pour un logement sis à Champigny-sur-Marne et qui aurait été donné en location à M.E... ; que, de même, si Mme A...verse au dossier des tableaux récapitulant, sur chacun des comptes évoqués, les sommes correspondant selon elle à des loyers encaissés pour trois logements sis à Puteaux, Saint-Germain-en-Laye et Champigny-sur-Marne, ces pièces, en l'absence de production des relevés de compte correspondants ou de toute autre document probant, tel que des contrats de bail, n'apportent pas la preuve requise d'une exagération des bases d'imposition ;

13. Considérant, enfin, que Mme A...soutient que les sommes de 54 000 euros sur 2008 et 10 000 euros sur 2009 doivent par ailleurs être déduites des bases des impositions supplémentaires en litige, dès lors qu'elles auraient été régulièrement déclarées en temps utile, à titre de bénéfices non commerciaux de l'année 2008, d'une part, et à titre de salaire versé à M. D..., d'autre part, et que ces sommes, qui seraient afférentes toutes deux à l'activité de ce dernier, ont été prises en compte par l'administration pour reconstituer le bénéfice non commercial imposable, occasionnant ainsi une double imposition ; que, toutefois, dès lors que Mme A...n'apporte aucun élément pour établir que les bases reconstituées de l'activité non commerciale professionnelle de M. D...recouvraient, en tout ou en partie, celles afférentes aux sommes précitées de 54 000 et 10 000 euros, déclarées en tant que revenus non commerciaux non professionnels ou en tant que salaire, et non en tant que bénéfices non commerciaux, sa demande ne peut en l'état être accueillie ;

En ce qui concerne la majoration de l'article 1732 du code général des impôts :

14. Considérant que les rappels d'impôt sur le revenu objet du présent litige ont été assortis, à la suite de l'opposition à contrôle fiscal constatée à l'encontre de M.D..., de la majoration de 100 % prévue dans ce cas par l'article 1732 du code général des impôts, qui dispose que : " La mise en oeuvre de la procédure d'évaluation d'office prévue à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales entraîne : a. L'application d'une majoration de 100 % aux droits

rappelés (...) " ; que Mme A...fait valoir, d'une part, que, n'ayant aucune responsabilité dans le comportement de son époux lors de la vérification de comptabilité de son activité professionnelle, elle ne peut se voir appliquer la sanction de nature pénale représentée par cette majoration, sauf à caractériser à son égard une méconnaissance du principe de personnalité des peines, résultant notamment de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et soutient, d'autre part, que la mise en recouvrement de cette majoration au titre de sa solidarité méconnaît l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, qui garantit le droit au respect des biens, ainsi que les garanties attachées à l'exigence d'un débat loyal ;

15. Considérant, en premier lieu, que tant le principe de responsabilité personnelle que le principe de personnalité des peines s'opposent à ce que des pénalités fiscales, qui présentent le caractère d'une punition tendant à empêcher la réitération des agissements qu'elles visent, puissent être prononcées à l'encontre de contribuables, personnes physiques, lorsque ceux-ci n'ont pas participé aux agissements que ces pénalités répriment ; que, dès lors, les dispositions de l'article 1732 du code général des impôts selon lesquelles, en cas d'évaluation d'office des bases d'imposition résultant de la mise en oeuvre de la procédure prévue à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales, les suppléments de droits mis à la charge du contribuable peuvent être assortis d'une majoration, ne sauraient être interprétées comme autorisant l'administration à mettre cette pénalité, qui vise à sanctionner l'opposition à contrôle fiscal, à la charge du contribuable lorsque celui-ci n'a pas pris personnellement part à l'opposition au contrôle ;

16. Considérant qu'en l'espèce, il résulte de l'instruction, et n'est d'ailleurs nullement contesté en défense, que Mme A...n'a pris aucune part aux faits constitutifs de l'opposition au contrôle fiscal constatée à l'encontre de son seul époux ; que, toutefois, en décidant d'appliquer la majoration prévue par l'article 1732 du code général des impôts, par une proposition de rectification du 19 juillet 2010 adressée au seul M. D...en raison de son propre comportement, l'administration, alors même qu'elle a ensuite procédé à la mise en recouvrement de cette majoration à l'encontre du foyer fiscal formé par les deux époux, ne peut être regardée comme ayant entendu infliger à Mme A...ladite majoration, qui n'est réclamée à celle-ci que par l'effet du principe d'imposition commune des personnes mariées, édicté à l'article 6 du code général des impôts, et de la solidarité des époux pour le paiement des impositions communes de leur foyer fiscal prévue par les dispositions de l'article 1691 bis du même code ; qu'il suit de là que, la pénalité en litige n'ayant pas été prononcée à l'encontre de Mme A... et la solidarité à laquelle elle est tenue ne revêtant pas le caractère d'une punition, le moyen tiré par la requérante d'une méconnaissance du principe de personnalité des peines garanti notamment par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 121- 1 du code pénal, est inopérant ;

17. Considérant, en second lieu, que si Mme A...soutient également que la mise en recouvrement de la pénalité en litige au titre de sa solidarité méconnaitrait les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, qui garantit le droit au respect des biens, ainsi que les garanties attachées à l'exigence d'un débat loyal, une telle contestation relève du contentieux du recouvrement dès lors qu'elle concerne le principe et les modalités de mise en oeuvre de la solidarité prévue par les dispositions de l'article 1691 bis du code général des impôts ; que, par suite, les moyens ainsi soulevés sont inopérants dans le présent litige d'assiette ;

18. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...et Mme A... sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté le surplus de leur demande dans la mesure précisée au point 11. ci-dessus ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

19. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme A...et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions des requêtes de M. D... et de Mme A...tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, intérêts de retard et majoration afférents qui leur ont été réclamées au titre de l'année 2008, à hauteur des sommes de 93 432 euros et 4 438 euros.

Article 2 : Les bénéfices non commerciaux assignés à M. D... et à Mme A...au titre de l'année 2009 sont réduits à concurrence de la somme de 514, 20 euros.

Article 3 : M. D...et Mme A...sont déchargés des rappels d'impôt sur le revenu, intérêts de retard et majoration y afférents, auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2009, à concurrence de la réduction en base prononcée à l'article 2 ci-dessus.

Article 4 : Le jugement n° 1208398 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 4 mars 2014 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : L'Etat versera à Mme A...une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions des requêtes de M. D...et de Mme A...est rejeté.

''

''

''

''

5

2

Nos 14VE00794...


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE00794
Date de la décision : 28/05/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-04-015 Contributions et taxes. Généralités. Amendes, pénalités, majorations.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Yves BERGERET
Rapporteur public ?: M. COUDERT
Avocat(s) : MICHALLON ; MICHALLON ; GUILLERAND

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-05-28;14ve00794 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award