La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/11/2016 | FRANCE | N°16VE01168

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 29 novembre 2016, 16VE01168


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au Tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010.

Par un jugement n° 1306226 du 8 mars 2016, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 avril 2016, M.B..., représenté par Me Madrid, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;
<

br>2° de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3° de mettre à la charge de l'État les dépens et...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au Tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010.

Par un jugement n° 1306226 du 8 mars 2016, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 avril 2016, M.B..., représenté par Me Madrid, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3° de mettre à la charge de l'État les dépens et le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal administratif, en faisant une appréciation inexacte des faits, a commis des erreurs de droits ; premièrement il a estimé, à tort, que des sommes avaient été réintégrées dans les résultats imposables et en a déduit qu'il s'agissait de revenus distribués ; deuxièmement, les premiers juges l'ont qualifié à tort de gérant de fait alors qu'il a démissionné de la gérance le

28 juillet 2010 ;

- la proposition de rectification du 17 avril 2012 est insuffisamment motivée ;

- le fait que la procédure de redressement n'ait été suivie qu'avec le nouveau dirigeant a porté atteinte à ses droits ;

- la présomption de distribution du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts ne joue pas pour des revenus taxés d'office et qui sont intégralement reconstitués par l'administration fiscale ;

- l'administration ne démontre pas que les revenus réputés distribués auraient été désinvestis de la société P-Espace Placard ;

- la société P-Espace Placard présentait un résultat déficitaire à la clôture de l'exercice clos en 2009 et il ne peut donc pas exister de bénéfices au titre de cette année ;

- l'administration ne démontre pas qu'il aurait appréhendé les sommes en litige lors de l'exercice clos au 31 décembre 2010 puisqu'il n'était plus associé et gérant de la société P-Espace Placard à compter du 28 juillet 2010, ce qui est d'ailleurs confirmé ;

- l'administration ne démontre pas qu'il était maître de l'affaire.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Moulin-Zys,

- et les conclusions de M. Coudert, rapporteur public.

1. Considérant qu'à la suite de la vérification de comptabilité de la société P-Espace Placard, dont il était le gérant et associé à 50%, l'administration fiscale a, selon la procédure contradictoire, imposé entre les mains de M.B..., les sommes correspondant aux rehaussements de bénéfices résultant de la reconstitution du chiffre d'affaires de la société pour les exercices clos les 31 décembre 2009 et 2010 ; que M. B...demande l'annulation du jugement du 8 mars 2016 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a, en conséquence, été assujetti au titre des années 2009 et 2010 ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (... ) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile ; qu'en revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs ; qu'en outre, est suffisamment motivée la proposition de rectification adressée au bénéficiaire de revenus présumés distribués par une société à responsabilité limitée qui, pour ses motifs, se réfère expressément à la proposition de rectification adressée précédemment à la société et dont la copie est annexée ;

3. Considérant que la proposition de rectification du 17 avril 2012 désigne l'imposition concernée, les années et la base d'imposition, constituée pour les deux années 2009 et 2010, par les bénéfices reconstitués et distribués résultant de la vérification de comptabilité de la SARL P-Espace Placard ; qu'elle se réfère à la proposition de rectification datée du même jour le 17 avril 2012, adressée au gérant de ladite société, dont elle joint en annexe la copie complète comportant dix feuillets ; que cette dernière proposition de rectification, indique notamment, au chapitre " VI.C - Conséquences " les montants retenus au titre des bénéfices reconstitués et distribués au titre des exercices clos en 2009 et 2010, lesquels correspondent à ceux figurant dans la partie " II.B.1 - Faits " de la proposition de rectification de l'appelant ; que, par ailleurs, la proposition de rectification adressée à M. B... indique également que le " bénéfice reconstitué pour les exercices clos en 2009 et 2010 est imposable à votre nom dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en application de l'article 109-1-1° du code général des impôts " et comporte aussi les éléments de fait et de droit au vu desquels ce dernier doit être regardé comme ayant appréhendé ces revenus distribués, en qualité de maître de l'affaire ; qu'ainsi, la proposition de rectification adressée au requérant, dès lors qu'elle était accompagnée d'une copie de celle de la SARL P-Espace Placard, était suffisamment motivée au regard de l'article L. 57 précité du livre des procédures fiscales, contrairement à ce qu'il soutient ;

4. Considérant, en second lieu, que si le requérant soutient qu'il a été porté atteinte à ses droits dès lors que la procédure de redressement de la SARL P-Espace Placard n'a été suivie qu'avec le nouveau dirigeant, ce moyen, inopérant en raison de la règle de l'indépendance des procédures, ne peut qu'être écarté ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

5. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. ( ...) " ; que M. B..., qui n'a pas retiré au bureau de poste le pli recommandé contenant la proposition de rectification du 17 avril 2012, lequel a ensuite été retourné au service, doit être regardé comme l'ayant réceptionné à la date de première présentation à son adresse personnelle ; que, n'ayant pas contesté les rectifications ainsi proposées dans le délai de trente jours, il supporte la charge de la preuve de l'absence d'appréhension par ses soins des sommes réputées distribuées par la personne morale ainsi que du caractère exagéré des impositions en litige au titre des deux années ;

6. Considérant, d'autre part, que selon l'article 109 du code général des impôts :

" 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital " ; qu'aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés. " ; qu'aux termes de l'article 47 de l'annexe II au même code : " Toute rectification du bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés au titre d'une période sera prise en compte au titre de la même période pour le calcul des sommes distribuées. " ; qu'il résulte de ces dispositions que les sommes réintégrées par l'administration dans le résultat imposable d'une société ayant fait l'objet d'un redressement ne peuvent être regardées comme des revenus distribués au sens de ces dispositions que dans la mesure où elles ont été effectivement appréhendées par leur bénéficiaire ; que, toutefois, le contribuable maître d'une affaire est réputé avoir appréhendé les distributions réalisées par la société qu'il contrôle ;

En ce qui concerne le montant des revenus distribués par la Sarl P-Espace Placard :

7. Considérant, en premier lieu, que le service, après avoir mis la Sarl P-Espace Placard en demeure de produire sa comptabilité et de déposer ses déclarations de résultats pour les exercices clos en 2009 et 2010, sans rien obtenir, a ensuite déterminé d'office les bénéfices de cette société en soustrayant une quote-part de 60% au titre des charges, du montant des encaissements bancaires ; que M. B... ne conteste pas sérieusement le montant des bénéfices ainsi calculés en se bornant à produire un extrait de balance partielle de comptes de charges de l'exercice clos en 2009, édité le 4 mars 2013 et sans aucun justificatif susceptible d'en corroborer le contenu ; qu'il suit de là que le requérant n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, que les bénéfices ainsi reconstitués par l'administration au titre des exercices clos les 31 décembre 2009 et 2010, seraient exagérés ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que si l'intéressé fait encore valoir que l'administration ne démontre pas que les revenus réputés distribués auraient été désinvestis de la société P-Espace Placard, il n'établit toutefois pas ni même n'allègue, que ces bénéfices supplémentaires auraient été mis en réserve ; que dès lors ce moyen doit être écarté ;

9. Considérant enfin que, M. B...soutient que les dispositions du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts ne trouvent à s'appliquer que lorsque l'administration fiscale rehausse le résultat déclaré du contribuable soit en augmentant ses recettes, soit en diminuant ses charges alors qu'en l'espèce elle s'est bornée à évaluer forfaitairement un résultat reconstitué ; que, toutefois, la présomption de distribution édictée par les dispositions du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts trouve à s'appliquer même lorsque le résultat assigné à l'entreprise découle de la mise en oeuvre d'une reconstitution de son chiffre d'affaires et est " retenu pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés " au sens de l'article 110 du code général des impôts ; qu'il suit de là que, dès lors qu'il n'a pas été mis en réserve ainsi qu'il a été dit précédemment, ce bénéfice a bien été désinvesti et, par suite, il constitue un revenu distribué imposable entre les mains de celui qui l'a appréhendé ;

En ce qui concerne la preuve de l'appréhension, par M. B..., des bénéfices distribués :

10. Considérant d'une part, qu'il résulte de l'instruction que M. B... détenait 50% du capital social de la société du 1er janvier 2009 au 28 juillet 2010 et en était également gérant de droit jusqu'au 28 juillet 2010, date où il a démissionné de la gérance et a vendu ses parts ; que l'administration fait valoir que l'analyse des comptes bancaires de la société indique que l'activité de la SARL a perduré jusqu'au 27 octobre 2010 et que M. B... disposait de la signature sociale pendant l'intégralité de la période comprise entre le 1er janvier 2009 et le 27 octobre 2010 ; que le service apporte ainsi des éléments de preuve du fait que l'appelant était gérant de droit puis de fait et maître de l'affaire entre le 1er janvier 2009 et le 27 octobre 2010 ; que M. B... ne conteste pas sérieusement ces éléments en se bornant à produire un extrait K-Bis de la Sarl P-Espace Placard édité au 28 juin 2011, duquel il ressort qu'à cette date il n'était pas le gérant de droit, ou encore, en cause d'appel, une ordonnance du 1er mars 2011 par laquelle le juge des référés du Tribunal de commerce de Nanterre constate que l'acte du 28 juillet 2010 n'a pas encore fait l'objet des formalités légales d'enregistrement ;

11. Considérant d'autre part, que la circonstance que M. B...n'était plus, ni associé ni gérant de droit de la Sarl P-Espace Placard à compter du 28 juillet 2010, n'empêche pas qu'il soit regardé comme étant le bénéficiaire de revenus réputés distribués sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts, précité, dont l'application n'est pas subordonnée à la qualité d'associé du bénéficiaire ; que, dans ces conditions, l'appelant, qui n'apporte aucun commencement de preuve de l'absence d'appréhension desdits revenus distribués, ni, en tout état de cause, ainsi qu'il a été dit ci-dessus que les bénéfices seraient restés investis dans la Sarl, doit être regardé comme en ayant été le bénéficiaire ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 8 mars 2016, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

N° 16VE01168 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE01168
Date de la décision : 29/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Marie-Cécile MOULIN-ZYS
Rapporteur public ?: M. COUDERT
Avocat(s) : SELARL ANDRE MADRID

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-11-29;16ve01168 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award