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14/03/2017 | FRANCE | N°15VE03575

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 14 mars 2017, 15VE03575


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...B...ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2008 et 2009 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1300492 du 24 septembre 2015, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les

26 novembre 2015 et 13 septembre 2016, M. et MmeB..., représentés par Me Frenkel, avocat, demand...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...B...ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2008 et 2009 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1300492 du 24 septembre 2015, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 26 novembre 2015 et 13 septembre 2016, M. et MmeB..., représentés par Me Frenkel, avocat, demandent à la Cour :

1° d'annuler ce jugement, en tant qu'il s'est prononcé, d'une part, sur les revenus d'origine indéterminée de l'année 2008 et, d'autre part, sur les pénalités pour manquement délibéré ;

2° de prononcer la décharge des impositions afférentes aux revenus d'origine indéterminée de l'année 2008 et des pénalités pour manquement délibéré qui leur ont été assignées au titre des années 2008 et 2009 ;

3° de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. et Mme B...soutiennent que :

- l'administration ne pouvait régulièrement leur adresser des demandes de justifications en vertu des dispositions de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales au titre de l'année 2008, dès lors qu'au titre de ladite année, la règle du double n'était pas respectée ; en effet, c'est à tort que, dans la mise en oeuvre de cette règle, le service n'a pas extourné de la base de calcul des crédits à prendre en compte, d'une part, les chèques impayés ou les chèques de compte à compte, pour un montant total de 7 511,32 euros, et, d'autre part, la somme de 30 000 euros apparaissant au compte n° 457 " associés - dividendes à payer " de la SARL AMCH, dont l'administration ne pouvait exiger la production, et qui, contrairement aux sommes portées à un compte courant, ne correspond pas à un revenu disponible ;

- qu'en se bornant à souligner le montant des rehaussements, l'administration ne fait état d'aucun élément concret propre à démontrer le caractère intentionnel des manquements constatés et, par suite, à justifier l'application de la majoration de 40 % prévue par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts.

...........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Huon,

- les conclusions de M. Coudert, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., subsitituant Me Frenkel, avocat de M. et MmeB....

1. Considérant qu'à la suite d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle de M. et Mme B...au titre des années 2008 et 2009, le service vérificateur, aux termes d'une proposition de rectification du 20 décembre 2011, a rapporté au revenu imposable des intéressés des traitements et salaires (année 2008), des revenus fonciers (année 2009), des revenus de capitaux mobiliers (années 2008 et 2009) et des revenus d'origine indéterminée (années 2008 et 2009) ; que, par ailleurs, l'administration a assorti les rappels de revenus de capitaux mobiliers et de revenus d'origine indéterminée de la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue à l'article 1729 du code général des impôts ; que M. et Mme B...relèvent appel du jugement du 24 septembre 2015 en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande en ce qu'elle tendait, d'une part, à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales qui leur ont été assignées au titre de l'année 2008 à raison des revenus d'origine indéterminée et, d'autre part, à la décharge des pénalités pour manquement délibéré qui leur ont été infligées au titre des années 2008 et 2009 ;

Sur la taxation des revenus d'origine indéterminée de l'année 2008 :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens ;

2. Considérant, d'une part qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. Elle peut, en outre, lui demander des justifications au sujet de sa situation et de ses charges de famille, des charges retranchées du revenu net global ou ouvrant droit à une réduction d'impôt sur le revenu en application des articles 156 et 199 septies du code général des impôts, ainsi que des avoirs ou revenus d'avoirs à l'étranger. / L'administration peut (...) également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 69 de ce livre : " Sous réserve des dispositions particulières au mode de détermination des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux, sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16. " ; qu'en vertu de ces dispositions, l'administration peut, lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir qu'un contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés, lui demander des justifications et, s'il s'abstient de répondre à cette demande ou n'apporte pas de justifications suffisantes, le taxer d'office à l'impôt sur le revenu ; que l'administration peut comparer les crédits figurant sur les comptes bancaires ou les comptes courants d'un contribuable au montant brut de ses revenus déclarés pour établir l'existence d'indices de revenus dissimulés l'autorisant à demander à l'intéressé des justifications sans procéder à un examen critique préalable de ces crédits ni, quand elle l'a fait, à se référer comme terme de comparaison aux seuls crédits dont l'origine n'est pas justifiée après le premier examen ; que, toutefois, elle n'est en droit d'user de cette procédure à l'égard de ce contribuable qu'à la condition que les sommes ainsi portées au crédit de ses comptes équivalent au moins au double de ses revenus connus ; qu'il en résulte que la possibilité de recourir à une demande de justification s'apprécie indépendamment de l'établissement ultérieur du caractère imposable des sommes en cause ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 12 du code général des impôts : " L'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année " ; que, selon le 3 de l'article 158 du même code, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige : " 1° Les revenus de capitaux mobiliers comprennent tous les revenus visés au VII de la 1ère sous-section de la présente section, à l'exception des revenus expressément affranchis de l'impôt en vertu de l'article 157 et des revenus ayant supporté les prélèvements visés aux articles 117 quater et 125 A. / Lorsqu'ils sont payables en espèces les revenus visés au premier alinéa sont soumis à l'impôt sur le revenu au titre de l'année soit de leur paiement en espèces ou par chèques, soit de leur inscription au crédit d'un compte (...) " ;

4. Considérant que l'administration a constaté une discordance entre, d'une part, les revenus déclarés par M. et Mme B... au titre de l'année 2008, d'un montant de 161 298 euros, et, d'autre part, les sommes à leur disposition au titre de la même année, d'un montant de 325 977,64 euros ; qu'eu égard à la circonstance que cette dernière somme était plus de deux fois supérieure à celle qui avait été déclarée, le service a, le 21 juillet 2011, adressé aux contribuables une demande de justifications, sur le fondement de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales puis a taxé d'office en tant que revenus d'origine indéterminée, en vertu de l'article L. 69 du même livre, les crédits demeurés injustifiés s'établissant à 105 501 euros ;

5. Considérant qu'il ressort de la proposition de la rectification du 20 décembre 2011 que la somme de 325 977,64 euros précitée inclut une somme de 30 000 euros figurant sur le compte 457 " associés - dividendes à payer " de la société AMCH dont les requérants étaient les seuls associés ; que, toutefois, l'inscription de dividendes dans un compte collectif d'actionnaires " dividendes à payer " ne peut être regardée comme entraînant la distribution effective des sommes concernées, dès lors qu'une telle écriture comptable n'a pas, par elle-même, pour effet d'autoriser les bénéficiaires des distributions à prélever la part des dividendes qui leur revient ; qu'ainsi, l'inscription d'une somme sur un compte courant collectif d'associés ne vaut pas par elle-même paiement effectif et ne peut être regardée comme procédant à la répartition de cette somme entre leurs différents bénéficiaires, fussent-ils aisément identifiables, de sorte que, contrairement à ce que soutient le ministre, un compte de cette nature ne saurait être assimilé à un compte courant d'associé dont les crédits, réputés à la disposition du contribuable, peuvent être pris en compte pour établir l'existence d'indices de revenus dissimulés ; que, par suite, et alors qu'il n'est pas allégué que l'administration disposait, antérieurement à la date d'envoi de la demande de justifications, d'éléments de nature à établir l'appréhension, au cours de l'année 2008, de la somme de 30 000 euros litigieuse, elle n'était pas fondée à inclure cette somme dans les revenus disponibles de M. et Mme B...au titre de ladite année ; que ces revenus s'élevaient ainsi tout au plus à 295 977,64 euros ; que le rapport de 1,83 avec les revenus déclarés par les contribuables ne constituant pas un indice suffisant de revenus dissimulés, le service n'était pas en droit de leur adresser une demande de justifications, sur le fondement des dispositions de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales ; que, par suite, M. et Mme B...sont fondés à soutenir que la procédure de taxation d'office conduite au titre de l'année 2008 est entachée d'irrégularité et, pour ce motif, à demander la décharge des impositions établies à l'issue de cette procédure ainsi, par voie de conséquence, que des majorations correspondantes ;

Sur la majoration pour manquement délibéré afférente aux revenus d'origine indéterminée de l'année 2009 et aux revenus de capitaux mobiliers des années 2008 et 2009 :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; "

7. Considérant que le ministre fait valoir que pour justifier de l'application de la pénalité pour manquement délibéré aux rectifications opérées en matière de revenus de capitaux mobiliers et de revenus d'origine indéterminée, le vérificateur a relevé le caractère répétitif des infractions constatées ayant conduit à une minoration du revenu imposable de M. et Mme B...de 50,27 % et de 34,44 % respectivement au titre de l'année 2008 et 2009 ; que, toutefois, il ressort de la réponse aux observations du contribuable du 3 avril 2012 ainsi que de la décision d'admission partielle de la réclamation que, si les crédits taxés dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ont été finalement arrêtés à 29 899 euros pour l'année 2009, aucune imposition supplémentaire n'a été opérée dans cette catégorie de revenus au titre de l'année 2008, où il a même été constaté un excédent de déclaration ; que, par ailleurs et eu égard à la décharge prononcée par le présent arrêt pour le motif énoncé au point 5, seule demeure régulièrement taxée, en tant que revenus d'origine indéterminée, une somme de 9 069 euros au titre de l'année 2009 ; que l'administration, qui ne saurait ainsi sérieusement persister à invoquer l'importance et le caractère récurrent des omissions constatées, ne fait précisément état d'aucune autre circonstance de nature à établir, ainsi qu'il lui incombe, le caractère délibéré de ces omissions ; que, dans ces conditions, c'est à tort qu'elle a appliqué aux rectifications susmentionnées la pénalité prévue par les dispositions du a. de l'article 1729 du code général des impôts ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B...sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande en ce qu'elle tendait, d'une part, à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales, outre majorations correspondantes, qui leur ont été assignées au titre de l'année 2008 à raison des revenus d'origine indéterminée et, d'autre part, à la décharge des pénalités pour manquement délibéré qui leur ont été infligées au titre des années 2008 et 2009 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

10. Considérant qu'en application de ces dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État une somme 2 000 euros au titre des frais exposés par M. et Mme B...et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : M. et Mme B...sont déchargés, d'une part, des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2008 à raison de la taxation des revenus d'origine indéterminée, outre majorations correspondantes, et, d'autre part, de l'ensemble des pénalités pour manquement délibéré établies à leur encontre au titre des années 2008 et 2009.

Article 2 : Le jugement n° 1300492 du 24 septembre 2015 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er.

Article 3 : L'État versera à M. et Mme B...une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par M. et Mme B...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.

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N° 15VE03575


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 15VE03575
Date de la décision : 14/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-03-01-003 Contributions et taxes. Généralités. Règles générales d'établissement de l'impôt. Contrôle fiscal.


Composition du Tribunal
Président : M. BERGERET
Rapporteur ?: M. Christophe HUON
Rapporteur public ?: M. COUDERT
Avocat(s) : CABINET FRENKEL ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2017-03-14;15ve03575 ?
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