Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Versailles l'annulation de l'arrêté du 19 octobre 2016 du préfet des Yvelines refusant de renouveler son titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.
Par un jugement n° 1607768 du 21 mars 2017, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 6 avril 2017, M.B..., représenté par
Me Le Gloan, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3° d'enjoindre au préfet des Yvelines de lui délivrer une carte de séjour dans les meilleurs délais ;
4° de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du dernier aliéna de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 et a ainsi entaché son jugement d'insuffisance de motivation ;
- en outre, il a commis une erreur d'appréciation de sa situation au regard des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il a apporté des éléments relatifs à sa situation personnelle impliquant que le préfet saisisse le directeur général de l'agence régionale de santé en application de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 ;
- en l'absence de production de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, la procédure est irrégulière ;
- cet avis est lui-même irrégulier en la forme ;
- c'est à tort que le préfet s'est crû lié par cet avis et ne s'est pas livré à un examen approfondi de sa situation, laquelle répond à des considérations humanitaires ;
- la décision de refus de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; en effet, il souffre d'une pathologie nécessitant une prise en charge dont le défaut entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; par ailleurs, si un traitement existe dans son pays d'origine, il ne pourrait, en raison de son handicap et de son absence de ressources, y avoir effectivement accès, ce qui constitue une circonstance humanitaire au sens de ces dispositions ;
- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité du refus séjour ;
- ladite décision méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Huon a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.B..., de nationalité tunisienne, relève appel du jugement du 21 mars 2017 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Yvelines du 19 octobre 2016 refusant de renouveler son titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai d'un mois jours et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions du 11° de l'article
L. 313-11 et de celles de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que seul l'étranger dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité peut utilement se prévaloir d'une circonstance humanitaire exceptionnelle susceptible d'être prise en compte pour l'examen de sa demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade alors même que le traitement requis serait disponible dans son pays d'origine ;
3. Considérant que le tribunal administratif a estimé que les certificats médicaux versés au dossier n'étaient pas de nature à démontrer que le défaut de prise en charge médicale de M. B...entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; qu'ainsi, il n'était pas tenu de se prononcer sur le moyen, par suite inopérant, tiré de ce que l'intéressé justifiait de circonstances humanitaires exceptionnelles au sens des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le jugement attaqué n'est donc pas entaché d'omission à statuer de ce chef ;
4. Considérant, en second lieu, que si M. B...soutient que le tribunal aurait inexactement apprécié sa situation au regard de ces dispositions, ce moyen, qui se rattache au bien-fondé du raisonnement suivi par les premiers juges, est sans incidence sur la régularité du jugement attaqué ;
Sur le bien-fondé de l'arrêté préfectoral du 19 octobre 2016 :
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 susvisé : " (...) Par ailleurs, dès lors que l'intéressé porterait à la connaissance du préfet des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, le préfet saisit pour avis le directeur général de l'agence régionale de santé, qui lui communique son avis motivé dans un délai d'un mois " ;
6. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la décision contestée a été édictée au vu d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé d'Ile-de-France en date du 21 juillet 2016, lequel a d'ailleurs été produit devant le tribunal ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'en l'absence d'un tel avis, la procédure serait entachée d'irrégularité manque en fait ;
7. Considérant, en deuxième lieu, qu'il y a lieu de rejeter par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges et, au demeurant, non critiqués en appel, le moyen tiré de ce que cet avis serait irrégulier en la forme ;
8. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet, qui a procédé à un examen particulier de la situation personnelle du requérant, se serait cru lié par l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé et aurait ainsi méconnu l'étendue de sa propre compétence ;
9. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte des dispositions précitées que le préfet n'est tenu de saisir le directeur général de l'agence régionale de santé des éléments pouvant constituer une circonstance humanitaire exceptionnelle susceptible de justifier une admission au séjour que dans le cas où l'état de santé du demandeur nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et nonobstant la disponibilité du traitement dans son pays d'origine ; que, par suite, si, en l'espèce, le préfet des Yvelines a cru devoir relever que M. B...ne justifiait " d'aucune circonstance humanitaire exceptionnelle ", il n'était, en tout état de cause, pas tenu de solliciter l'avis du directeur général de l'agence régionale de santé sur ce point dès lors qu'il a estimé, par ailleurs, que le défaut de prise en charge médicale de M. B...ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ;
10. Considérant, enfin, que, si M. B...soutient qu'il est resté gravement handicapé à la suite d'un accident du travail survenu en 2003, il ne ressort pas des documents médicaux versés au dossier, qui se bornent à mentionner la pathologie et les médicaments prescrits à l'intéressé, que son état de santé, compte tenu notamment des soins qu'il a déjà reçus en France, nécessiterait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, s'il fait valoir que sa situation répond à des considérations humanitaires, un tel moyen est, en tout état de cause, inopérant pour le motif de droit énoncé au point 2. ; que, par suite, M. B...n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de renouveler son titre de séjour, le préfet des Yvelines aurait fait une inexacte application des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
11. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et des libertés d'autrui " ;
12. Considérant qu'il n'est pas contesté, ainsi que l'a relevé le préfet, que l'épouse, les cinq enfants ainsi que les parents de M.B..., âgé de cinquante-et-un ans, résident en Tunisie, où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de quarante-six ans ; que s'il fait valoir qu'en retournant dans son pays, il perdrait le bénéfice des allocations qu'il perçoit en France, cette seule circonstance ne saurait impliquer, comme il l'allègue, qu'il s'y trouverait totalement privé de moyens de subsistance, alors, en particulier, qu'il y dispose de toute sa famille proche ; que, dans ces conditions, la décision attaquée ne peut être regardée comme ayant porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs de fait, cette décision n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de M.B... ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
13. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'établit pas que la décision de refus de séjour qui lui a été opposée serait entachée d'illégalité ; qu'il n'est donc pas fondé à soutenir que cette prétendue illégalité entraînerait, par voie de conséquence, celle de la mesure d'éloignement en litige ;
14. Considérant, en deuxième lieu, qu'indépendamment de l'énumération faite par l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'un arrêté de reconduite à la frontière, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure d'éloignement à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que, lorsque la loi prévoit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure d'éloignement ;
15. Considérant, ainsi qu'il a été dit au point 9. que M. B...n'est pas au nombre des étrangers devant se voir renouveler son titre de séjour de plein droit en application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet ne pouvait, pour ce motif, édicter la mesure d'éloignement contestée ;
16. Considérant, enfin, qu'il y a lieu d'écarter les moyens tirés de ce que cette mesure méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation par les mêmes motifs de fait que ceux retenus au point 11. ci-dessus ;
17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, les conclusions présentées par le requérant à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent également qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
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N° 17VE01116