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14/11/2017 | FRANCE | N°17VE02069

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 14 novembre 2017, 17VE02069


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du

3 avril 2017 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1703127 du 30 mai 2017, le magistrat désigné par la présidente du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :



Par une requête, enregistrée le 30 juin 2017, M.B..., représenté par Me Ostier, avocat, demande...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du

3 avril 2017 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1703127 du 30 mai 2017, le magistrat désigné par la présidente du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 30 juin 2017, M.B..., représenté par Me Ostier, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet territorialement compétent de lui délivrer un carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4° subsidiairement, d'enjoindre au préfet territorialement compétent de procéder au réexamen de sa situation et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'un vice de procédure, dans la mesure où elle est intervenue sans qu'il ait été mis en mesure de présenter des observations écrites sur la perspective de son éloignement, en méconnaissance de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- cette décision est également entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- elle est intervenue en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'erreur de droit dans l'application du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en ce que le préfet n'a fondé sa décision que sur l'existence d'une précédente mesure d'éloignement non exécutée, sans examiner la nature des liens qu'il a tissés sur le territoire français et s'il représentait une menace pour l'ordre public ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le traité sur l'Union européenne ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la directive 2008/115 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne C-166/13 du 5 novembre et

C-249/13 du 11 décembre 2014 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Livenais a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.C..., ressortissant pakistanais né le 27 août 1987, relève appel du jugement du 30 mai 2017 par lequel le magistrat désigné par la présidente du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 avril 2017 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. Considérant, en premier lieu, que l'intéressé, en se prévalant de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, peut être regardé comme soulevant le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu préalablement à toute décision qui affecte sensiblement et défavorablement les intérêts de son destinataire, qui constitue l'une des composantes du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union européenne, invocable à l'encontre de la décision attaquée ; qu'ainsi que la Cour de justice de l'Union européenne l'a jugé dans ses arrêts Mukarubega C-166/13 et Boudjlida C-249/13 des

5 novembre et 11 décembre 2014, le droit d'être entendu préalablement à l'adoption d'une décision de retour, qui est un principe général du droit de l'Union européenne, implique que l'autorité administrative mette le ressortissant étranger en situation irrégulière à même de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité du séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour ; qu'il n'implique, toutefois, pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français ou sur la décision le plaçant en rétention dans l'attente de l'exécution de la mesure d'éloignement, dès lors qu'il a pu être entendu sur l'irrégularité du séjour ou la perspective de l'éloignement ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et, notamment, du procès-verbal de son audition le 3 avril 2017 par les services de police de Bois-Colombes (92) et dont le préfet des Hauts-de-Seine a nécessairement eu connaissance, que M.C..., qui était assisté d'un interprète et a déclaré être conscient du caractère irrégulier de son séjour en France, a été mis à même de présenter, de manière utile et effective, ses observations non seulement sur les conditions de son séjour, mais encore sur la perspective de son éloignement à destination de son pays d'origine ; qu'au demeurant, il n'a pas fait mention, à cette occasion de sa situation, de concubinage avec une compatriote ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que la décision contestée, après avoir relevé que

M. C...s'était maintenu irrégulièrement sur le territoire français à compter du rejet définitif de sa demande d'asile prononcé par la Cour nationale du droit d'asile le 26 mars 2014 et qu'il n'établissait pas l'existence de liens personnels et familiaux intenses et stables en France, ni être dépourvu d'attaches familiales au Pakistan, pays dont il est originaire, indique que son éloignement ne porte pas, ainsi, une atteinte disproportionnée à ses droits au respect de sa vie privée et familiale ; que, si le requérant soutient que le préfet des Hauts-de-Seine n'avait pas pris en compte, sur ce point, l'existence de son concubinage allégué avec MmeD..., il ressort néanmoins des pièces produites au dossier, et notamment du procès-verbal d'audition du

3 avril 2017 précité, que M.C..., à qui il a été expressément demandé l'identité de son conjoint ou concubin éventuel, n'en a déclaré aucun, et que ce n'est que devant le premier juge qu'il a, pour la première fois, fait mention de cette circonstance ; que la décision attaquée précise également, en l'absence de toute précision complémentaire de M. C...sur les risques éventuels qu'il encourrait en cas de retour au Pakistan, que l'éloignement de ce dernier ne contrevient pas aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, dans ces conditions, et eu égard aux informations dont disposait le préfet des Hauts-de-Seine à la date à laquelle il a pris sa décision, ce dernier doit être regardé comme ayant effectivement procédé à l'examen de la situation personnelle de M. C...avant de prendre à l'encontre de ce dernier la décision d'éloignement contestée ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

6. Considérant que M.C..., qui est entré en France, selon ses déclarations, au cours de l'année 2011, s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français après le rejet définitif de sa demande d'asile ; qu'il s'est, en outre, abstenu de déférer à une obligation de quitter le territoire français prononcée à son égard par arrêté du préfet de police de Paris du

12 janvier 2015 ; qu'il fait valoir qu'il aurait noué une relation de concubinage avec une compatriote, MmeD..., qui séjourne en France en qualité de bénéficiaire de la protection subsidiaire et qui l'hébergerait, selon ses propres déclarations, depuis le 3 janvier 2017 ; que, cependant, il ressort des pièces du dossier, et notamment de la déclaration de revenus souscrite par M. C...au titre de l'année 2016, que celui-ci a déclaré avoir établi, à compter du

1er avril 2017, sa résidence principale à Saint-Denis (93), alors même que Mme D...demeure à Evry (91), que cette circonstance est de nature à mettre en doute la réalité du concubinage allégué ; que ce dernier, à le supposer suffisamment établi, ne serait toutefois caractérisé qu'à compter du 8 août 2016, date à laquelle Mme D...a souscrit une demande de logement social en son nom et en celui de M.C... ; qu'eu égard à l'existence insuffisamment caractérisée et, en tout état de cause, à la brièveté de cette relation de concubinage, le requérant ne saurait soutenir qu'elle établirait l'existence de liens personnels et familiaux le rattachant à la France ; que M. C...ne fait, en outre, état d'aucune autre circonstance justifiant d'une insertion personnelle ou professionnelle particulière sur le territoire français ; qu'enfin, il ne se prévaut pas davantage d'une quelconque circonstance faisant obstacle à la poursuite de son existence dans son pays d'origine, où il ne soutient pas ne plus disposer d'attaches familiales ; que, dans ces conditions, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut pas être regardée comme ayant porté au droit de M. C...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été édictée ; qu'elle n'a donc pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, elle n'est pas entachée d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant ;

Sur la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du premier et du deuxième alinéa du III du l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. " ; qu'aux termes du huitième alinéa du même article : " La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français " ;

8. Considérant qu'il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux ; que la décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs ; que si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère ;

9. Considérant qu'il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger ; qu'elle doit, par ailleurs, faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet ; qu'elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace ; qu'en revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément ;

10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué fait mention des dispositions du huitième alinéa du III de l'article L. 511-1 précité et indique que M.C..., qui serait entré en France en 2010, ne justifie d'aucune circonstance particulière, notamment familiale, de nature à expliquer qu'il se soit maintenu irrégulièrement sur le territoire français et qu'il ne se soit pas conformé à l'obligation de quitter le territoire français prise à son égard le

12 janvier 2015 ; que, si le préfet des Hauts-de-Seine n'a pas fait référence, dans sa décision, au critère relatif à la menace à l'ordre public que représenterait la présence de l'intéressé sur le territoire français, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. C...représenterait une telle menace et que l'autorité préfectorale aurait retenu une telle circonstance à l'encontre de l'intéressé ; qu'ainsi, dans la mesure où les termes de l'ensemble de l'arrêt litigieux établissent que la situation du requérant a été appréciée au regard de sa durée de présence en France, de ses conditions de son séjour et de l'existence d'une précédente mesure d'éloignement, le préfet des Hauts-de-Seine a suffisamment motivé la décision portant interdiction de retour sur le territoire français ;

11. Considérant, en deuxième lieu, que dès lors que le préfet des Hauts-de-Seine, ainsi qu'il est dit au point précédent, a procédé à l'examen de la situation de M. C...au regard de l'ensemble des critères énoncés au huitième alinéa du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il n'a pas davantage entaché sa décision d'erreur de droit au regard des dispositions de cet article ;

12. Considérant, en troisième et dernier lieu, que, pour les mêmes motifs de fait que ceux exposés au point 6., la décision portant interdiction à M. C...de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans ne contrevient pas aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, doivent être également rejetées ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

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N° 17VE02069


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE02069
Date de la décision : 14/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: M. Yann LIVENAIS
Rapporteur public ?: M. SKZRYERBAK
Avocat(s) : OSTIER

Origine de la décision
Date de l'import : 21/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2017-11-14;17ve02069 ?
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