Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E...B...épouse D...a demandé au Tribunal administratif de Versailles l'annulation de l'arrêté du 20 décembre 2016 par lequel le préfet de l'Essonne a refusé de lui renouveler un titre de séjour en qualité d'étranger malade, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 1700456 du 2 mai 2017, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, une régularisation de requête et un mémoire, enregistrés les 2 juin,
29 juin et 31 juillet 2017, Mme B...épouseD..., représentée par Me Mouafo, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3° d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou, à défaut, de réexaminer sa situation administrative, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4° de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté attaqué, en tant qu'il porte refus d'admission au séjour, a été pris par une autorité incompétente ;
- cette décision est insuffisamment motivée dès lors, notamment, qu'elle n'indique pas la pathologie dont elle est atteinte ;
- le préfet était tenu de saisir la commission du titre de séjour ;
- le refus, par le préfet, de lui renouveler son titre de séjour en qualité d'étranger malade méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; en effet, le cancer du sein pour lequel elle a été opérée en France et est traitée médicalement nécessite un suivi constant ; alors qu'elle est prise en charge au sein de l'hôpital Paul Brousse, un tel suivi médical ne serait pas possible dans son pays d'origine, ainsi qu'en attestent les certificats délivrés par le chef de la division régionale de la santé du Centre Cameroun et le médecin de l'hôpital Paul Brousse ; l'absence de soins comporterait pour sa santé des conséquences d'une exceptionnelle gravité ;
- elle sollicite la communication de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé afin que le médecin chargé de son suivi médical puisse en prendre connaissance ;
- en lui opposant un refus de séjour, le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ;
- cette décision méconnaît enfin les articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant dès lors qu'elle réside sur le territoire français depuis trois ans, elle est divorcée et mère de trois enfants mineurs de père français ; en outre, ses enfants, qui ont été confiés à leurs grands parents pendant son traitement, lui rendent, ainsi qu'à leur père, régulièrement visite ; ils doivent être prochainement scolarisés en France ;
- l'arrêté attaqué, en tant qu'il lui fait obligation de quitter le territoire français, est irrégulier par voie de conséquence de l'illégalité du refus de séjour ;
- cette mesure d'éloignement est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît enfin les articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
..........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York le
26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Locatelli a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que Mme B...épouseD..., ressortissante camerounaise, née le 25 juin 1974, relève appel du jugement du 2 mai 2017 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Essonne du 20 décembre 2016 refusant de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et fixant le pays de renvoi ;
Sur la compétence de l'auteur de l'acte attaqué :
2. Considérant que, par un arrêté n° 2016-PREF-MCP-068 du 6 septembre 2016, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs de l'Etat dans le département, le préfet de l'Essonne a donné à Mme C...A..., directrice de l'immigration et de l'intégration de la préfecture, délégation à l'effet de signer, notamment, les décisions portant refus d'admission au séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que l'acte attaqué aurait été pris par une autorité incompétente ne peut qu'être écarté ;
Sur la légalité de la décision portant refus d'admission au séjour :
3. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué, qui vise ou mentionne le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment ses articles 3 et 8, indique que si la requérante s'est vu délivrer des titres de séjour en qualité d'étranger malade, il n'a pas été possible de satisfaire à sa demande de renouvellement déposée le 26 août 2016 compte tenu des informations portées à la connaissance de la préfecture ainsi que de l'avis du médecin inspecteur de santé publique par lequel celui-ci indiquait, en particulier, que le défaut de prise en charge médicale de Mme B...épouse D...n'était pas susceptible d'entraîner pour sa santé des conséquence d'une exceptionnelle gravité ; que cet arrêté précise également que Mme Mme B...épouse D...est sans charge de famille en France, qu'entrée sur le territoire national en 2012, alors âgée de vingt-sept ans, elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident son époux, ses parents et ses trois enfants mineurs, dont l'intérêt supérieur est de vivre aux côtés de leur mère et qu'ainsi, la présente décision ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de la requérante de mener une vie familiale normale conformément à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, et sans qu'importe à cet égard le
bien-fondé de ses motifs, cette décision quand bien même elle ne mentionne pas la pathologie dont est atteinte la requérante, comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; qu'elle est, dès lors, suffisamment motivée au regard des prescriptions de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 de ce code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 susvisé : " (...) le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; /- si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; /- la durée prévisible du traitement./ dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays (...) " ;
5. Considérant que Mme B...épouse D...soutient qu'elle a été opérée d'un cancer du sein nécessitant des soins spécialisés qui ne sont pas disponibles au Cameroun et qu'en tout état de cause, à les supposer même disponibles, un tel traitement ne lui serait pas accessible compte tenu de son absence de ressources et du défaut de prise en charge de son coût par les autorités publiques ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier que, dans son avis délivré le 20 octobre 2016, dont le préfet s'est approprié les motifs sans s'être estimé lié par lui, le médecin de l'agence régionale de santé d'Île-de-France indique que, si l'état de santé de Mme B...épouse D...nécessite une prise en charge médicale, le défaut de celle-ci n'est pas susceptible d'entraîner pour sa santé des conséquences d'une exceptionnelle gravité dès lors qu'un traitement approprié existe dans son pays d'origine ; que les certificats médicaux délivrés, entre le 24 décembre 2012 et le 29 août 2016, n'attestent que de la nécessité d'une surveillance régulière de la pathologie mammaire de la requérante, consistant dans la réalisation régulière d'examens cliniques, biologiques ou encore par imagerie médicale ; qu'en outre, si la note d'information stratégique produite par une unité de recherche camerounaise dépendant de l'Organisation mondiale de la santé fait état d'un accès inéquitable à la chimiothérapie, il ne résulte pas des pièces du dossier que de tels soins étaient encore nécessaires à Mme B...épouseD... à la date de la décision attaquée ; qu'enfin, en se bornant à soutenir, sans plus de précision, qu'il n'existe ni traitement approprié à la pathologie de Mme B...épouse D...- analyse qui entre d'ailleurs en contradiction avec les informations contenues dans la note précitée de l'OMS - ni plateau technique permettant une surveillance adéquate de ladite pathologie, le certificat délivré par le médecin du centre médical de la police de Yaoundé est insusceptible d'infirmer l'avis du médecin de l'agence régionale de santé d'Île-de-France ; qu'ainsi, et alors qu'il n'est, en tout état de cause, pas établi que la requérante serait dans l'impossibilité d'accéder aux examens qui lui sont nécessaire, dont elle n'indique ni le coût, ni ne justifie qu'il ne serait pas pris en charge, au moins en partie, par un système de soins publics au Cameroun, Mme B...épouse D...n'est pas fondée à soutenir que la décision par laquelle le préfet de l'Essonne a refusé de lui renouveler un titre de séjour en qualité d'étranger malade a méconnu les dispositions du 11° de l'article
L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
6. Considérant, en troisième lieu, que la requérante soutient également que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé d'Île-de-France, dont elle sollicite la communication, n'a pas été versé aux débats par le préfet de l'Essonne ; que, toutefois, en l'absence de dispositions législatives et réglementaires l'imposant, le préfet n'est pas tenu de le lui transmettre ;
7. Considérant, en quatrième lieu, que, pour les mêmes motifs de fait que ceux exposés au point 5., le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle et médicale de la requérante ;
8. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...épouseD..., divorcée et sans charge de famille en France, n'est pas dépourvue d'attaches familiales au Cameroun où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt-sept ans et où résident, notamment, ses trois enfants mineurs ainsi que ses parents ; qu'il ressort également des pièces du dossier que l'intéressée n'est entrée en France qu'en 2012, essentiellement pour s'y faire soigner et qu'elle ne justifie pas de la nature, ni de l'intensité de ses liens avec la France ; que, dès lors, quand bien même le père de ses enfants vivrait en France comme elle le soutient, Mme B...épouse D...ne saurait prétendre, compte tenu de la durée et de ses conditions de séjour en France, et de sa possibilité de poursuivre sa vie d'adulte dans son pays d'origine auprès de ses enfants mineurs, que le refus de séjour qui lui a été opposé par le préfet a porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cet acte a été pris ; que, par suite, cette décision ne méconnaît pas les stipulations précitées ;
10. Considérant, en sixième lieu, et ainsi qu'il vient d'être dit, que les enfants mineurs de la requérante vivent au Cameroun ; que, par suite, celle-ci ne peut sérieusement prétendre qu'en refusant de l'admettre au séjour, le préfet a méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relatives aux droits de l'enfant signé à New-York le 26 janvier 1990 ;
11. Considérant, en septième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatif à la commission du titre de séjour : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ;
12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas au nombre des étrangers pouvant se voir délivrer de plein droit une carte de séjour temporaire, notamment au titre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur le fondement desquelles Mme B...épouse D...avait sollicité un titre de séjour ; qu'elle n'établit pas, ni même n'allègue remplir effectivement les conditions de délivrance d'un titre de séjour fixées aux autres dispositions de l'article
L. 313-11 et des articles L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3 de ce code, que le préfet n'avait pas l'obligation d'examiner d'office ; que, par suite, le préfet de l'Essonne n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour avant de se prononcer sur la demande de la requérante ;
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
13. Considérant, en premier lieu, que, dès lors qu'il n'est pas établi que la décision portant refus d'admission au séjour serait entachée d'illégalité, Mme B...épouse D...n'est pas fondée à soutenir que celle portant obligation de quitter le territoire français dont ce refus est assorti, serait illégale par voie de conséquence de cette décision ;
14. Considérant que, pour les mêmes motifs de faits que ceux rappelées aux points 9. et 10., cette mesure d'éloignement ne méconnaît pas les articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relatives aux droits de l'enfant signé à New-York le 26 janvier 1990, ni n'est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'ensemble de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme B...épouseD... ;
15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...épouse D...est rejetée.
5
2
N° 17VE01751