Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SCI Sicam a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis en date du 15 avril 2013 " portant déclaration d'insalubrité " d'un local à usage de logement appartenant à la société, situé 34 avenue du Président Salvador Allende à Montreuil (93), et mettant en demeure la société de faire cesser définitivement l'occupation aux fins d'habitation du logement, de reloger les occupants actuels, de supprimer les équipements sanitaires et la cuisine et d'empêcher tout accès au local.
Par un jugement n° 1305764 du 3 juillet 2014, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté la requête.
Par un arrêt n° 14VE02649 du 9 février 2016, la Cour a, sur requête de la SCI Sicam, annulé le jugement du Tribunal administratif de Montreuil et l'arrêté du 15 avril 2013 du préfet de la Seine-Saint-Denis.
Par une décision n° 398677 du 8 juin 2017, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt de la Cour et lui a renvoyé l'affaire.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 1er septembre 2014, la SCI Sicam, représentée par
Me Demeure, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement du 3 juillet 2014 du Tribunal administratif de Montreuil ;
2° d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 15 avril 2013 du préfet de la
Seine-Saint-Denis ;
3° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La SCI Sicam soutient que :
- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;
- il a été pris à la suite d'une consultation irrégulière du Coderst dont la composition était insuffisante et l'avis incomplet ;
- le Coderst s'est cru lié par le rapport de saisine ;
- l'arrêté contesté a été édicté en méconnaissance du principe du contradictoire ;
- cet arrêté est affecté d'une erreur d'appréciation sur l'existence d'un danger pour la santé et la sécurité des occupants justifiant une interdiction définitive d'occupation ;
- il est entaché d'une erreur de droit dès lors qu'il est fondé sur l'article L.1331-24 du code de la santé publique, alors que le préfet n'a édicté aucune prescription préalable et a principalement entendu déclarer l'insalubrité irrémédiable du bien immobilier qui relève des dispositions de l'article L.1331-26 du code de la santé publique ;
- il est entaché de détournement de procédure, l'arrêté contesté étant inspiré par des considérations d'urbanisme.
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Guével, rapporteur,
- et les conclusions de Mme Ribeiro-Mengoli, rapporteur public.
1. Considérant que la SCI Sicam a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis en date du 15 avril 2013 " portant déclaration d'insalubrité " d'un local à usage de logement appartenant à la société, situé 34 avenue du Président-Salvador-Allende à Montreuil (93), et mettant en demeure la société de faire cesser définitivement l'occupation aux fins d'habitation du logement, de reloger les occupants actuels, de supprimer les équipements sanitaires et la cuisine et d'empêcher tout accès au local ; que, par le jugement n° 1305764 du 3 juillet 2014, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa requête ; que la SCI Sicam relève appel de ce jugement ;
2. Considérant, d'une part, qu'aux termes des premier et troisième alinéas de l'article L. 1331-24 du code de la santé publique : " Lorsque l'utilisation qui est faite de locaux ou installations présente un danger pour la santé ou la sécurité de leurs occupants, le représentant de l'Etat dans le département, après avis de la commission départementale compétente en matière d'environnement, de risques sanitaires ou technologiques, peut enjoindre à la personne qui a mis ces locaux ou installations à disposition ou à celle qui en a l'usage de rendre leur utilisation conforme aux prescriptions qu'il édicte dans le délai qu'il fixe. (...) Si l'injonction est assortie d'une interdiction temporaire ou définitive d'habiter, la personne ayant mis ces locaux à disposition est tenue d'assurer l'hébergement ou le relogement des occupants " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 1331-26 du même code : " Lorsqu'un immeuble, bâti ou non, vacant ou non, attenant ou non à la voie publique, un groupe d'immeubles, un îlot ou un groupe d'îlots constitue, soit par lui-même, soit par les conditions dans lesquelles il est occupé ou exploité, un danger pour la santé des occupants ou des voisins, le représentant de l'Etat dans le département, saisi d'un rapport motivé du directeur général de l'agence régionale de santé ou, par application du troisième alinéa de l'article L. 1422-1, du directeur du service communal d'hygiène et de santé concluant à l'insalubrité de l'immeuble concerné, invite la commission départementale compétente en matière d'environnement, de risques sanitaires et technologiques à donner son avis dans le délai de deux mois : / 1° Sur la réalité et les causes de l'insalubrité ; / 2° Sur les mesures propres à y remédier " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 1331-26-1 du même code : " Lorsque le rapport prévu par l'article L. 1331-26 fait apparaître un danger imminent pour la santé ou la sécurité des occupants lié à la situation d'insalubrité de l'immeuble, le représentant de l'Etat dans le département met en demeure le propriétaire, ou l'exploitant s'il s'agit de locaux d'hébergement, de prendre les mesures propres à faire cesser ce danger dans un délai qu'il fixe. Il peut prononcer une interdiction temporaire d'habiter " ; qu'il résulte de l'instruction que l'arrêté du 15 avril 2013 du préfet de la Seine-Saint-Denis, qui est fondé sur l'existence d'un danger pour la santé des occupants résultant, selon le préfet, de l'utilisation qui était faite du local, non conforme à sa destination, et est assorti de prescriptions tendant à la cessation de l'utilisation à des fins d'habitation du local litigieux et à la suppression des équipements sanitaires et de la cuisine, a été pris sur le fondement de l'article L. 1331-24 du code de la santé publique ;
3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article R. 1416-5 du code de la santé publique : " Lorsqu'il est consulté sur les déclarations d'insalubrité, le conseil [conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques] peut se réunir en formation spécialisée, présidée par le préfet et comprenant : 1° Deux représentants des services de l'Etat et le directeur général de l'agence régionale de santé ou son représentant ; 2° Deux représentants des collectivités territoriales ; 3° Trois représentants d'associations et d'organismes, dont un représentant d'associations d'usagers et un représentant de la profession du bâtiment ; 4° Deux personnalités qualifiées dont un médecin. " ; qu'aux termes de l'article 11 du décret n° 2006-672 du 8 juin 2006 relatif à la création, à la composition et au fonctionnement de commissions administratives à caractère consultatif, alors applicable, dont les dispositions sont désormais reprises à l'article R. 133-10 du code des relations entre le public et l'administration, relatif à la création, à la composition et au fonctionnement de commissions administratives à caractère consultatif : " Le quorum est atteint lorsque la moitié au moins des membres composant la commission sont présents (...). Lorsque le quorum n'est pas atteint, la commission délibère valablement sans condition de quorum après une nouvelle convocation portant sur le même ordre du jour et spécifiant qu'aucun quorum ne sera exigé. " ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que lors de la réunion de la formation spécialisée du conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques (Coderst) du 7 mars 2013, présidée par le préfet de la Seine-Saint-Denis, ont siégé le représentant de la délégation territoriale de l'agence régionale de santé de la
Seine-Saint-Denis, la représentante de la direction régionale et interdépartementale de l'hébergement et du logement, ainsi qu'un médecin et un architecte en qualité de personnalités qualifiées, soit au total cinq personnes sur onze membres ; qu'en revanche, étaient absents de cette réunion les deux représentants de la caisse régionale d'assurance maladie d'Ile-de-France, le représentant de l'agence départementale d'information sur le logement (ADIL), le représentant de l'union fédérale des consommateurs (UFC) et le représentant de l'association
Habitat-santé-développement ; que, dès lors, la SCI Sicam est fondée à soutenir que le quorum requis par l'article 11 du décret du 8 juin 2006 n'était pas atteint ; que, par suite, l'avis émis par le Coderst, réuni en formation spécialisée lors de cette séance, est entaché d'irrégularité ;
5. Considérant que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et les règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou s'il a privé les intéressés d'une garantie ;
6. Considérant que le vice précédemment relevé, affectant le déroulement de la consultation de la formation spécialisée du Coderst, a conduit à ce que ce conseil se prononce, sans que la condition de quorum ne soit remplie, alors que les dispositions réglementaires mentionnées au point 3 prévoient dans une telle hypothèse qu'une nouvelle réunion soit convoquée ; que ce vice doit être regardé, dans les circonstances de l'espèce, comme ayant privé la SCI Sicam de la garantie que constitue la consultation de cette commission dans les conditions désormais prévues par l'article R. 133-10 du code des relations entre le public et l'administration ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens, la décision attaquée, prise à la suite d'une procédure irrégulière, doit donc être annulée ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SCI Sicam est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la SCI Sicam présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1305764 du 3 juillet 2014 du Tribunal administratif de Montreuil et l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis en date du 15 avril 2013 " portant déclaration d'insalubrité " d'un local sont annulés.
Article 2 : Les conclusions de la SCI Sicam présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 17VE01878