Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La FEDERATION DEPARTEMENTALE DES CHASSEURS DU GARD a demandé au Tribunal administratif de Nîmes d'annuler la lettre du 21 juillet 2015 par laquelle le président de la Fédération nationale des chasseurs a transmis aux fédérations départementales la grille tarifaire de référence, arrêtée par délibération de la Commission nationale d'indemnisation des dégâts de gibier (CNIDG) du 10 mars 2015, fixant les motifs et les taux applicables à la procédure de réduction du montant des indemnisations susceptibles d'être servies au titre des dégâts aux cultures occasionnés par le grand gibier.
Par une ordonnance n° 1502971 du 30 septembre 2015, le président du Tribunal administratif de Nîmes, sur le fondement de l'article R. 351-3 du code de justice administrative, a transmis la demande au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise.
Par une ordonnance n° 1508468 du 12 juillet 2017, le président de la 1ère chambre du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, sur le fondement du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, a prononcé le rejet de cette demande comme manifestement irrecevable.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 12 septembre 2017, et un mémoire, enregistré le
23 novembre 2018, la FEDERATION DEPARTEMENTALE DES CHASSEURS DU GARD, représentée par Me Blanc, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler cette ordonnance ;
2° d'annuler, pour excès de pouvoir, la lettre du président de la Fédération nationale des chasseurs du 21 juillet 2015 ainsi que, par " voie d'exception d'illégalité ", la délibération du
10 mars 2015 par laquelle la CNIDG a approuvé la grille tarifaire précitée ;
3° de mettre à la charge de la Fédération nationale des chasseurs une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 1ère chambre du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande au motif qu'elle était dirigée contre une décision ne faisant pas grief, le courrier du président de la Fédération nationale des chasseurs du 21 juillet 2015 ayant la nature d'une décision lui faisant grief en ce qu'elle lui impose des modalités de mise en oeuvre de la grille tarifaire arrêtée par la CNIDG ;
- l'ordonnance attaquée est irrégulière en ce que le tribunal ne l'a pas mis en mesure de régulariser sa demande préalablement à l'intervention de l'ordonnance litigieuse ;
- le courrier du président de la Fédération nationale des chasseurs attaqué est illégal, en ce qu'il détermine les modalités d'indemnisation des dégâts causés par le grand gibier alors que la compétence en cette matière revient exclusivement à la CNIDG ;
- ce courrier est également illégal, en ce qu'il prévoit l'application rétroactive de la grille tarifaire arrêtée par la CNIDG à compter du 10 mars 2015 ;
- ce courrier est également entaché d'irrégularité à raison de l'illégalité, invoquée par la voie de l'exception, de la grille tarifaire arrêtée par la CNIDG : cette grille tarifaire, en ce qu'elle repose notamment sur l'existence d'une obligation de prévention par les fédérations départementales des chasseurs des dégâts faits aux cultures, notamment par l'entretien des fonds, méconnaît le principe d'indépendance de ces fédérations, y compris en matière d'indemnisation des dégâts causés par le grand gibier, ainsi que l'objet statutaire de ces fédérations ; elle méconnaît également les dispositions, tant du code du travail que du code rural et de la pêche maritime ; elle fait peser enfin une charge budgétaire disproportionnée sur les fédérations départementales.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Livenais,
- les conclusions de Mme Ribeiro-Mengoli, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., substituant Me Blanc, avocat de la FEDERATION DEPARTEMENTALE DES CHASSEURS DU GARD.
1. La FEDERATION DEPARTEMENTALE DES CHASSEURS DU GARD a demandé l'annulation de la lettre du président de la Fédération nationale des chasseurs du 21 juillet 2015 ayant accompagné la communication aux fédérations départementales de chasseurs de la grille tarifaire nationale approuvée par délibération de la Commission nationale d'indemnisation du grand gibier (CNIDG) du 10 mars 2015 et arrêtant, en vertu des dispositions des articles L. 624-3, L. 624-5 et R. 624-5 du code de l'environnement, les motifs et les taux applicables à la procédure de réduction des indemnisation des dégâts commis aux cultures par le grand gibier lorsque la victime des dégâts a une part de responsabilité dans la commission de ceux-ci. Elle fait appel de l'ordonnance n° 1508468 du 12 juillet 2017 par laquelle le président de la 1ère chambre du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, sur le fondement du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, a prononcé le rejet de cette demande comme manifestement irrecevable.
2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable : " Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, les premiers vice-présidents des tribunaux et des cours, le vice-président du tribunal administratif de Paris, les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours et les magistrats ayant une ancienneté minimale de deux ans et ayant atteint au moins le grade de premier conseiller désignés à cet effet par le président de leur juridiction peuvent, par ordonnance (...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens... ".
3. Pour rejeter comme manifestement irrecevable la demande de la FEDERATION DEPARTEMENTALE DES CHASSEURS DU GARD, le président de la 1ère chambre du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise s'est fondé sur la circonstance que le courrier du président de la Fédération nationale des chasseurs du 21 juillet 2015 attaqué, ayant pour seul objet de notifier aux fédérations départementales de chasseurs la grille tarifaire arrêtée par la CNIDG, n'avait pas, ainsi, la nature d'une décision faisant grief susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir.
4. Il ressort toutefois des pièces du dossier, et notamment des termes du courrier du 21 juillet 2015, que si cette lettre a, en effet, pour objet principal de porter à la connaissance des fédérations départementales la grille tarifaire précitée et d'appeler l'attention des destinataires sur un certain nombre des principes d'action énoncés par cette nouvelle grille tarifaire, sans modifier, compléter ou préciser les énonciations de cette grille, elle indique également que " cette grille est susceptible de s'appliquer à partir de sa date d'adoption, c'est-à-dire pour les dossiers dont la dernière déclaration de dégâts est postérieure au 10 mars 2015".
5. D'une part, il n'est pas établi que la grille tarifaire arrêtée par la CNIDG en vertu des dispositions précitées du code de l'environnement aurait fait l'objet des mesures de publicité garantissant son entrée en vigueur à compter du 10 mars 2015.
6. D'autre part, l'article L. 421-14 du code de l'environnement, qui dispose :
" L'association dénommée Fédération nationale des chasseurs regroupe l'ensemble des fédérations départementales, interdépartementales et régionales des chasseurs dont l'adhésion est constatée par le paiement d'une cotisation obligatoire. Elle assure la représentation des fédérations départementales, interdépartementales et régionales des chasseurs à l'échelon national (...) Elle coordonne l'action des fédérations départementales, interdépartementales et régionales des chasseurs (...) " confère à la Fédération nationale des chasseurs une compétence générale en termes d'organisation de l'activité des fédérations départementales de chasseurs, qui comptent au nombre de leurs missions l'indemnisation des dégâts commis aux cultures par le grand gibier.
7. Il suit de là qu'en fixant au 10 mars 2015 la date à compter de laquelle les dossiers d'indemnisation déposés auprès des fédérations départementales de chasseurs devaient faire l'objet d'une instruction tenant compte, le cas échéant, de la nouvelle grille tarifaire arrêtée par la CNIDG, alors même qu'il n'est pas établi que cette grille aurait été en vigueur à cette date, et en conférant ainsi une portée rétroactive à l'application de cette grille, le président de la Fédération nationale des chasseurs a pris à l'encontre des destinataires de sa lettre du 21 juillet 2015, dans cette mesure au moins, une décision faisant grief contrairement à ce qu'a estimé le premier juge. Dans ces conditions et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens tenant à la régularité de l'ordonnance attaquée, la FEDERATION DEPARTEMENTALE DES CHASSEURS DU GARD est fondée à soutenir que c'est à tort que, par cette ordonnance, le président de la 1ère chambre du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande comme manifestement irrecevable, en ce qu'elle était dirigée contre une décision ne lui faisant pas grief..
8. En outre, aux termes de l'article R. 311-1 du code de justice administrative :
" Le Conseil d'Etat est compétent pour connaître en premier et dernier ressort (...) 2° Des recours dirigés contre les actes règlementaires des ministres et des autres autorités à compétence nationale... ". Et l'article R. 351-2 du même code dispose : " Lorsqu'une cour administrative d'appel ou un tribunal administratif est saisi de conclusions qu'il estime relever de la compétence du Conseil d'Etat, son président transmet sans délai le dossier au Conseil d'Etat qui poursuit l'instruction de l'affaire(...) ".
9. D'une part, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la lettre du 21 juillet 2015 définit de manière générale et impersonnelle la date à partir de laquelle les fédérations départementales des chasseurs doivent faire application de la grille tarifaire nationale arrêtée le 10 mars 2015 par la CNIDG qui y est jointe. Elle revêt ainsi, dans cette mesure, un caractère réglementaire.
10. D'autre part, eu égard aux compétences particulières que confèrent les dispositions précitées de l'article L. 421-14 du code de l'environnement à la Fédération nationale des chasseurs en matière de coordination de l'action des fédérations départementales, interdépartementales et régionales de chasseurs, cette association doit être regardée comme une autorité à compétence nationale au sens du 2° de l'article R. 311-1 du code de justice administrative.
11. Il résulte de ce qui précède qu'en application de ces dernières dispositions, la demande dirigée contre la décision du 21 juillet 2015 attaquée ressortit à la compétence en premier et dernier ressort du Conseil d'État. Par suite, le président de la 1ère chambre du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise s'est donc reconnu à tort compétent pour statuer sur la demande présentée par la FEDERATION DEPARTEMENTALE DES CHASSEURS DU GARD. Il y a lieu, ainsi, d'annuler l'ordonnance attaquée, d'évoquer et de transmettre au Conseil d'État, en application des dispositions de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, cette demande ainsi que la présente requête.
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance n° 1508468 du président de la 1ère chambre du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 12 juillet 2017 est annulée.
Article 2 : La demande présentée devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise par la FEDERATION DEPARTEMENTALE DES CHASSEURS DU GARD ainsi que sa requête devant la Cour sont transmises au Conseil d'État.
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N° 17VE02941