Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... A... a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté en date du 6 avril 2016 par lequel le garde des sceaux, ministre de la justice a prononcé à son encontre la sanction disciplinaire de déplacement d'office du centre pénitentiaire de Rémire-Montjoly vers la maison d'arrêt de Fleury-Mérogis.
Par un jugement n° 1603052 du 4 juin 2018, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 6 septembre 2018, Mme A..., représentée par Me Lobeau, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 300 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme A... soutient que :
- le principe du contradictoire et les droits de la défense ont été méconnus dès lors que le rapport d'inspection versé à son dossier individuel qui lui a été communiqué ne comportait que 41 pages sur 57, alors que les éléments tronqués étaient utiles à sa défense ;
- le rapport de saisine du conseil de discipline ne figurait pas à son dossier lors de sa consultation ;
- le procès-verbal du conseil de discipline ne lui a pas été communiqué, ce qui l'a empêché de vérifier le bon déroulement de la procédure suivie et la réalité d'un vote à bulletins secrets des membres de cette instance ;
- l'avis du conseil de discipline et l'arrêté litigieux ne sont pas suffisamment motivés ;
- l'arrêté litigieux repose sur des faits erronés dans la mesure où elle n'a été présente sur le barrage que par intermittence et où son action s'inscrivait dans le cadre d'une contestation syndicale légitime ;
- elle n'a pas cautionné des banderoles à caractère raciste ni une mise en scène à caractère raciste ;
- elle n'a pas porté atteinte au bon fonctionnement du centre pénitentiaire pendant la durée du conflit social qui s'est déroulé du 11 au 16 juin 2015 ;
- la décision litigieuse est entachée d'une erreur d'appréciation au regard de son comportement professionnel passé et de sa situation familiale ;
- la sanction litigieuse est entachée d'un détournement de pouvoir.
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 portant fixation du budget des dépenses et des recettes de l'exercice 1905 ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;
- le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- et les conclusions de M. Bouzar, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., surveillante principale de l'administration pénitentiaire, a été affectée au centre pénitentiaire de Rémire-Montjoly en Guyane en janvier 2009. A la suite d'un mouvement social auquel elle a pris une part active et au cours duquel son administration a estimé qu'elle avait commis de graves manquements, Mme A... a fait l'objet d'une sanction de déplacement d'office à la maison centrale de Poissy par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice en date du 6 avril 2016. Mme A... relève appel du jugement en date du 4 juin 2018 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette sanction.
Sur la légalité externe de la sanction litigieuse :
2. L'article 65 de la loi du 22 avril 1905 susvisée dispose que " Tous les fonctionnaires civils et militaires, tous les employés et ouvriers de toutes administrations publiques ont droit à la communication personnelle et confidentielle de toutes les notes, feuilles signalétiques et tous autres documents composant leur dossier, soit avant d'être l'objet d'une mesure disciplinaire ou d'un déplacement d'office, soit avant d'être retardé dans leur avancement à l'ancienneté ".
3. Il ressort des pièces du dossier qu'à la suite du mouvement social des personnels de l'administration pénitentiaire du centre pénitentiaire de Rémire-Montjoly, qui a eu lieu du 11 au 16 juin 2015, et de la mutinerie qui a suivi, l'inspection générale des services judiciaires a établi un rapport concernant le fonctionnement de ce centre pénitentiaire et les événements qui s'y sont déroulés au mois de juin 2015. Si Mme A... soutient que seules 47 des 51 pages que comporte ce rapport, qui ne fait pas partie de son dossier individuel, lui ont été communiquées, il ressort des pièces du dossier que les pages 48 à 51 ne concernaient pas les actes reprochés à Mme A... et étaient sans incidence sur sa capacité à présenter sa défense. Il ressort en outre des pièces du dossier que les membres du conseil de discipline appelés à rendre un avis sur la sanction de Mme A... ont reçu le même extrait qu'elle dudit rapport. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la procédure suivie à son encontre aurait méconnu le droit à communication de son dossier ou le principe des droits de la défense.
4. Il ne ressort d'aucune des pièces du dossier et il n'est d'ailleurs pas soutenu que Mme A... aurait demandé que le témoignage recueilli auprès du directeur du centre pénitentiaire fût joint à son dossier et lui fût communiqué. Faute d'une telle demande, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que le défaut de communication de cette pièce constituerait une irrégularité viciant la procédure disciplinaire menée à son encontre.
5. Ni le décret du 25 octobre 1984 susvisé, ni aucune autre disposition, législative ou réglementaire, ni aucun principe général ne prévoit la communication préalable au fonctionnaire du rapport établi par l'autorité investie du pouvoir disciplinaire sur les faits reprochés à cet agent, par lequel le conseil de discipline est saisi et qui est lu en séance. Dès lors qu'elle a pu consulter son dossier et qu'elle connaissait les faits qui ont motivé la convocation du conseil de discipline et alors qu'il n'est pas démontré que le rapport de saisine aurait contenu des éléments nouveaux qui n'auraient pas été portés à sa connaissance, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que les principes du contradictoire ou des droits de la défense auraient été méconnus.
6. Il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire que le procès-verbal du conseil de discipline doive être communiqué à l'agent intéressé avant le prononcé de la sanction. Par suite, le moyen tiré de ce que c'est irrégulièrement que le procès-verbal du conseil de discipline réuni le 10 février 2016 n'a pas été transmis à Mme A... doit être écarté.
7. Il ressort des pièces du dossier que l'avis du conseil de discipline rendu le 10 février 2016 précise les éléments de fait retenus à l'encontre de Mme A... ainsi que les textes dont il fait application. De même, la décision litigieuse en date du 6 avril 2016, après avoir visé les textes applicables et les pièces du dossier de Mme A..., précise les considérations de fait et de droit qui motivent le prononcé de la sanction de déplacement d'office permettant d'en contester utilement le bien-fondé. Par suite, le moyen tiré de ce que l'avis du conseil de discipline et l'arrêté litigieux sont insuffisamment motivés manque en fait.
Sur la légalité interne :
8. Il ressort des pièces du dossier qu'à l'occasion d'un conflit social survenu en juin 2015 au centre pénitentiaire de Rémire-Montjoly, un barrage bloquant a été installé du 11 au 16 juin 2015 devant l'accès au centre pénitentiaire. Il ressort également des pièces du dossier que Mme A... a pris une part active à l'installation et au maintien de ce barrage dont le but était de bloquer l'accès au centre pénitentiaire et pas seulement de filtrer les véhicules. Il n'est pas contesté que les membres du personnel du centre pénitentiaire ont dû laisser leurs véhicules le long d'une voie rapide pour prendre leur service, que les extractions de détenus pour raisons médicales ont dû être suspendues, que l'approvisionnement régulier du centre en médicaments et en produits de " cantinage " a été interrompu et que ces circonstances ont conduit à une mutinerie au sein du centre pénitentiaire le 16 juin 2015.
9. Il ressort également des pièces du dossier que Mme A... a donné des conférences de presse devant des banderoles sur lesquelles étaient inscrites des mentions à caractère injurieux à l'encontre du chef d'établissement du centre pénitentiaire.
10. Il ressort de ce qui été dit aux points 8 et 9 du présent arrêt que l'erreur de fait dont serait entachée la sanction litigieuse n'est pas démontrée.
11. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
12. Les faits énumérés aux points 8 et 9 du présent arrêt constituent, eu égard aux menaces qu'ils ont fait peser sur la sécurité et l'approvisionnement du centre pénitentiaire de Rémire-Montjoly et à la circonstance que les graves mises en cause de la direction du centre, relayées par l'utilisation des réseaux sociaux, ont outrepassé le droit d'expression des agents de l'administration pénitentiaires et de leurs représentants syndicaux, doivent être regardés comme des fautes commises par Mme A... de nature à justifier une sanction disciplinaire. Il ressort des pièces du dossier que, compte tenu du contexte dans lequel ont été commis ces graves manquements, la sanction du déplacement d'office appliquée à Mme A... n'apparait pas, dans les circonstances de l'espèce, disproportionnée. La situation familiale de Mme A... est en tout état de cause sans influence sur cette appréciation.
13. Le détournement de pouvoir allégué, tiré de la volonté supposée de l'administration de porter atteinte à la liberté syndicale et au fonctionnement du syndicat FO pénitentiaire en Guyane, n'est pas établi.
14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
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N° 18VE03143