Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des suppléments de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2010 et 2011.
Par un jugement n° 1709433 du 9 juillet 2019, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 6 septembre 2019, Mme A..., représentée par Me Francin, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge des prélèvements sociaux, en principal, intérêts, majorations et accessoires, mis à sa charge ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle n'est tenue à aucune solidarité en matière de prélèvements sociaux, les dispositions de l'article 1691 bis du code général des impôts étant d'interprétation stricte ;
- il ne résulte pas des dispositions de l'article 6.1 du code général des impôts, lequel ne concerne que l'impôt sur le revenu, et de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale qu'elle serait soumise à une imposition commune en matière de prélèvements sociaux ;
- les prélèvements sociaux en litige sont assis sur des revenus de capitaux mobiliers distribués par la société dont son ex-époux était seul gérant et associé et de revenus fonciers issus de biens dont elle ne détenait qu'une partie du capital.
..........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bonfils,
- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. A la suite de la vérification de comptabilité de la SARL Recam et de la SCI
Brusa et co, l'administration fiscale a, par une proposition de rectification du 16 décembre 2013, notifié au foyer fiscal de M. et Mme C..., devenue Mme A... depuis son divorce le
7 janvier 2013, des rehaussements de contributions sociales au titre des années 2010 et 2011. Mme A... fait appel du jugement du 9 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant la décharge, en droits et pénalités, de ces suppléments d'imposition, pour un montant global de 34 916 euros.
Sur l'étendue du litige :
2. Par une décision du 2 juillet 2021, intervenue en cours d'instance, l'administration fiscale a prononcé le dégrèvement des suppléments de contributions sociales afférents à l'application de la majoration de 25 %, prévue par le 2° de l'article 158-7 du code général des impôts, aux revenus réputés distribués à Mme A... sur le fondement du 1° de l'article 109-1 du même code. Par suite, les conclusions de la requête aux fins de décharge sont, dans cette mesure, devenues sans objet de sorte qu'il n'y a plus lieu d'y statuer.
Sur le surplus des conclusions à fin de décharge :
3. Aux termes de l'article 6 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'espèce: " 1. Chaque contribuable est imposable à l'impôt sur le revenu, tant en raison de ses bénéfices et revenus personnels que de ceux de ses enfants (...) / Sauf application des dispositions des 4 et 5, les personnes mariées sont soumises à une imposition commune pour les revenus perçus par chacune d'elles (...) ; cette imposition est établie au nom de l'époux, précédé de la mention " Monsieur ou Madame " ". En application des dispositions des articles 1600-0 C, 1600-0 F bis et 1600-0 G du code général des impôts, des articles L. 136-1 L 136-6 et L. 245-14 du code de la sécurité sociale, de l'article 15 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 et des articles L. 14-10-4 et L. 262-24 du code de l'action sociale et des familles, certaines sommes soumises à l'impôt sur le revenu sont également passibles d'une contribution sociale généralisée, d'une contribution pour le remboursement de la dette sociale, d'un prélèvement social et de contributions additionnelles au prélèvement social. En instituant ces impositions, le législateur ne s'est pas borné à majorer un impôt existant, mais a créé des contributions nouvelles distinctes de l'impôt sur le revenu. Si en vertu de ces mêmes dispositions combinées, dans leur rédaction applicable, ces contributions sociales sont assises, contrôlées et recouvrées selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions qu'en matière d'impôt sur le revenu, le législateur n'a toutefois pas, par ce renvoi général, expressément étendu à ces contributions sociales les dispositions relatives à l'imposition commune des couples mariés, spécifiquement prévue pour l'impôt sur le revenu par le 2ème alinéa du 1 de l'article 6 du code général des impôts.
4. Par suite, et ainsi qu'elle le fait valoir, Mme A... ne pouvait être assujettie conjointement aux contributions sociales avec son époux, sans distinguer les revenus perçus par l'un ou l'autre des membres du foyer fiscal.
5. Toutefois, lorsque l'impôt est établi sur la base de l'ensemble des revenus perçus par le foyer fiscal alors que chacun des époux auraient dû faire l'objet d'une imposition séparée, l'erreur commise par le service ne saurait entraîner une décharge totale de l'imposition mais a pour seule conséquence de permettre à l'époux s'étant vu adjoindre par erreur les revenus de son conjoint, de demander la décharge de l'imposition correspondant aux revenus de ce dernier.
6. Mme A... soutient que les prélèvements sociaux qui lui ont été notifiés, au même titre qu'à son époux, correspondent à des revenus de capitaux mobiliers distribués par la société dont ce dernier était seul gérant et associé et à des revenus fonciers issus de biens dont elle n'est pas l'unique propriétaire et de SCI dont elle ne détenait qu'une partie du capital.
7. En premier lieu, s'agissant des revenus de capitaux mobiliers, s'il n'est pas contesté que Mme A... n'est pas associée de la SARL Recam et n'y dispose d'aucun pouvoir de gestion, il résulte toutefois de l'instruction, d'une part, que les sommes de 29 254,80 euros pour l'année 2010 et 19 719,20 euros au titre de l'année 2011, regardées comme distribuées, ont été créditées, par chèques sur des comptes " Kangourou " et " Club Med " exclusivement détenus par l'intéressée et, d'autre part, que cette dernière a bénéficié de paiements de la société Recam réalisés par chèque directement à son profit pour des montants totaux de 6 807,78 euros et 11 793,81 euros, respectivement au titre des mêmes années. Dès lors que Mme A..., salariée en qualité de comptable de la société, a personnellement et directement appréhendés l'ensemble de ces sommes, représentatives de revenus de capitaux mobiliers, et est, par suite, redevable des contributions sociales y afférentes.
8. En second lieu, s'agissant des revenus fonciers, il résulte de l'instruction, d'une part, que les loyers non déclarés réintégrés sont issus des deux biens immobiliers situés à Drancy, l'un situé au 20, rue des Poilus et l'autre au 37, rue Albert Sarrault et ont été réglés par chèques établis au nom de M. ou Mme C... et encaissés sur un compte joint. Si pour le premier bien immobilier, l'administration fait valoir que les sommes figurant sur compte bancaire joint sont présumés appartenir pour moitié aux deux époux, elle reconnaît toutefois que selon l'acte de vente notarié du 17 février 2012, et ainsi que le fait valoir l'appelante dans sa requête, celle-ci ne détient effectivement que 5 % de parts sur cet immeuble. Dans ces conditions, Mme A... n'est redevable des contributions sociales qu'à hauteur de 5 % des revenus fonciers y afférents. Pour le second bien immobilier, l'appelante reconnaît en être propriétaire à hauteur de 50 %, ce qui la rend redevable des impositions supplémentaires en cause de manière égale, soit pour moitié, avec son ex-époux, M. C.... Elle est, par suite, seulement fondée à demander la réduction de 50 % des bases d'imposition aux contributions sociales relatives aux revenus fonciers procurés par ce bien. Il en va de même s'agissant, d'autre part, des revenus fonciers issus de la SCI Brusa et co dont il est constant que Mme A... ne détient également que 50 % des parts, et dont l'administration reconnaît qu'elle n'est bénéficiaire en propre que de la moitié des revenus fonciers perçues par cette société, soit les sommes de 24 232 euros pour l'exercice 2010 et 642,50 euros respectivement pour les exercices 2010 et 2011.
9. Enfin, si Mme A... fait valoir que l'article 1691 bis du code général des impôts ne prévoit aucune solidarité de paiement en matière de prélèvements sociaux, elle ne saurait, en tout état de cause, se prévaloir de ces dispositions dans le cadre du présent litige d'assiette, dès lors que la contestation par le redevable solidaire de l'existence de l'obligation de payer ressortit au contentieux du recouvrement.
10. Il résulte de tout ce qui précède, que Mme A... est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant la décharge des suppléments de contributions sociales correspondant à 95 % des bases d'impositions relatives aux revenus fonciers procurés par l'immeuble sis 20, rue des Poilus à Drancy et à 50 % des bases d'imposition relatives aux autres revenus fonciers.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Il y a lieu, compte tenu des circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme A... d'une somme de 2 000 euros, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions présentées par Mme A... aux fins de décharge de la part des cotisations supplémentaires de contributions sociales ayant résulté de la majoration de 25 % de la base imposable au titre des années 2010 et 2011.
Article 2 : Les bases d'imposition aux contributions sociales relatives aux revenus fonciers assignées à Mme A... au titre des années 2010 et 2011 sont réduites respectivement de 95 % pour ce qui concerne l'immeuble sis 20, rue des Poilus à Drancy et de 50 % pour le surplus.
Article 3 : Mme A... est déchargée des suppléments cotisations sociales mises à sa charge, en conséquence de la réduction des bases prononcée à l'article précédent.
Article 4 : Le jugement n° 1709433 du 9 juillet 2019 du tribunal administratif de Montreuil est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 : L'Etat versera à Mme A... la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
3
N° 19VE03146