Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme A... D... ont demandé au tribunal administratif de Montreuil de les décharger, en droits, pénalités et intérêts de retard, des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2013, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1802095 du 18 novembre 2019, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 18 janvier et 27 novembre 2020, M. et Mme D..., représentés par Me Mattéi, avocat, demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement attaqué ;
2°) de prononcer, à titre principal, la décharge des impositions contestées en droits, intérêts de retard, majorations, amendes et pénalités ou, à titre subsidiaire, la décharge des amendes, majorations et pénalités appliquées, à l'exception des seuls intérêts de retard visés à l'article 1727 du code général des impôts ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 400 euros à raison des frais engagés en première instance et la somme de 1 600 euros à raison de ceux engagés en appel.
Ils soutiennent que :
- le jugement contesté est entaché d'irrégularité, faute pour le tribunal d'avoir communiqué à l'administration fiscale le mémoire en réplique et les pièces déposées le 24 février 2019 ; le tribunal aurait pu, à cette fin, reporter l'audience, laquelle l'avait déjà été ;
- il est également entaché d'irrégularité, les premiers juges ayant nécessairement statué ultra petita en l'absence de réponse de l'administration au mémoire et aux pièces déposés le 24 février 2019 et les ayant privés de la possibilité de voir l'administration fiscale faire droit, en cours d'instance, à leurs nouvelles demandes ;
- ils ont également statué ultra petita, en se prononçant sur des moyens qu'ils avaient pourtant abandonnés expressément dans leur mémoire du 24 février 2019 ;
- ils ont entaché le point 10. de leur jugement d'erreurs de droit et de dénaturation des faits et pièces produites, notamment dans l'appréhension de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales et des propositions de rectification en cause ;
- ils ont également, aux points 5. et 6. de leur jugement, dénaturé les faits et pièces de l'espèce et commis des erreurs de droit en déclarant " régulier " l'exercice du droit de communication par l'administration, alors que les pièces requises n'avaient pas été produites par l'administration, et en ne diligentant aucune mesure d'instruction pour obtenir de l'administration l'ensemble des éléments manquants ;
- ils ont omis, au point 4., de répondre à l'ensemble des moyens développés sur ce point dans leur mémoire du 24 février 2019 ;
- ils ont, au point 11., dénaturé les faits et pièces de l'espèce, et commis des erreurs de droit, en inversant la charge de la preuve au profit de l'administration ;
- les impositions contestées ont été établies à l'issue d'une procédure irrégulière, la proposition de rectification du 5 avril 2016 étant insuffisamment motivée, en méconnaissance des articles L. 57 et R.*57-1 du livre des procédures fiscales ; le droit de communication a été irrégulièrement mis en œuvre, l'administration n'ayant pas produit les documents manquants et le ministre n'ayant pas produit, en défense, les éléments permettant à l'administration d'obtenir les pièces figurant en annexes A de la proposition de rectification ; les articles L. 11, L. 57 et R.*57-1 du même livre ont été méconnus du fait du non-respect du délai légal de soixante jours pour présenter des observations et demandes à la proposition de rectification ;
- ils n'ont pas encaissé, par chèques et virements, sur leurs comptes bancaires personnels et/ou appréhendé, par écritures comptables, des sommes autres que celles déclarées par leurs soins au titre de l'année 2013 (67 334 euros) ; le service n'apporte pas la preuve qui lui incombe en la matière, par la production de documents illisibles, de simples documents issus du logiciel " Word " n'attestant pas de leur nature, ni de leur auteur donc sans valeur probante ; ainsi que l'indique le bordereau de pièces produit devant le tribunal, le droit de communication n'ayant consisté qu'en une demande de copies de chèques, les copies d'ordres portant virement sont sans valeur probante faute de savoir comment et dans quelles conditions elles ont été obtenues ; l'administration, compte tenu des exigences de licéité et de loyauté de la preuve, ne peut se prévaloir des fichiers des écritures comptables de la SARL Comet Sécurité Privée qui auraient dû être détruits au plus tard le 29 janvier 2016 ; dès lors, il n'est pas justifié de l'existence de distributions, d'un désinvestissement, ni de leur appréhension ;
- le montant des distributions ne peut être déterminé dans la mesure où la proposition de rectification du 5 avril 2016 ne permet pas de comprendre le détail et les modalités de calcul de la somme de 139 881 euros, laquelle ne correspond pas aux montants figurant dans le corps du document ;
- les amendes, majorations et pénalités doivent être déchargées, à tout le moins, sur le fondement de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales.
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 11 août 2020 et 22 mars 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. et Mme D... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Comet Sécurité Privée, société dont M. D... est le gérant et l'associé à 50 % et dont Mme D... est l'associée à 50 %, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité en 2015 au titre des exercices clos les 31 décembre 2012 et 2013. Tirant notamment les conséquences des constats opérés lors de ces opérations de contrôle, l'administration a, à l'issue d'un contrôle sur pièces et par proposition de rectification du 5 avril 2016, rehaussé les revenus de l'année 2013 de M. et Mme D..., sur le fondement du c. de l'article 111 du code général des impôts, à raison de revenus occultes distribués par cette société. Elle a, en effet, constaté que des paiements avaient été émis par la société pour rémunérer l'un de ses
sous-traitants et, à la suite de l'exercice de son droit de communication auprès de l'établissement bancaire de la société, que ces paiements avaient en réalité été effectués en direction des requérants. Ces derniers font appel du jugement du 18 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires auxquelles ils ont, en conséquence, été assujettis pour un montant total, en droits, majorations et intérêts de retard, restant en litige de 35 444 euros.
Sur la régularité du jugement contesté :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ". Il résulte de ces dispositions, destinées à garantir le caractère contradictoire de l'instruction, que la méconnaissance de l'obligation de communiquer un mémoire ou une pièce contenant des éléments nouveaux est en principe de nature à entacher la procédure d'irrégularité. Il n'en va autrement que dans le cas où il ressort des pièces du dossier que, dans les circonstances de l'espèce, cette méconnaissance n'a pu préjudicier aux droits des parties.
3. M. et Mme D... font valoir l'irrégularité du jugement contesté, faute pour le tribunal d'avoir communiqué à l'administration fiscale le mémoire en réplique et les pièces qu'ils ont déposés le 24 février 2019, alors qu'il aurait notamment pu, à cette fin, reporter l'audience ainsi qu'il l'avait fait une première fois. Toutefois, l'absence de communication d'un mémoire des contribuables à l'administration n'affecte pas le respect du caractère contradictoire de la procédure à l'égard des contribuables, et ce, alors même qu'ils y soulevaient un moyen nouveau et ne saurait, dès lors, être utilement invoquée par eux. Le moyen ainsi soulevé ne peut dès lors qu'être écarté.
4. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme D..., en écartant les moyens nouveaux soulevés dans leur mémoire en réplique, les premiers juges n'ont pas statué ultra petita, " au-delà des moyens et des demandes de l'administration fiscale " mais simplement exercé leur office en se prononçant sur le bien-fondé de ces moyens et ce, alors même qu'ils se seraient appuyés sur des arguments qui n'étaient pas invoqués en défense. L'obligation de ne pas statuer ultra petita s'apprécie d'ailleurs au regard des conclusions et non des moyens des parties. Par ailleurs, les intéressés ne sauraient utilement soutenir que cette absence de communication de leur mémoire en réplique les aurait " privés de la possibilité de voir l'administration fiscale faire droit, en cours d'instance, à leurs nouvelles demandes " dès lors que les premiers juges étaient en mesure de statuer valablement sur les moyens et pièces contenus dans ce mémoire sans qu'il soit nécessaire de le communiquer. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement contesté, à cet égard, ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.
5. En troisième lieu, le tribunal n'a pas davantage statué ultra petita en se prononçant sur des moyens soulevés par M. et Mme D... dans leur requête qu'ils ont abandonnés expressément dans leurs écritures en réplique, pour les écarter, dès lors qu'il s'agit de moyens et non de conclusions.
6. En quatrième lieu, le tribunal administratif a répondu, au point 4. de son jugement, de façon suffisamment circonstanciée, au moyen tiré de ce que l'administration aurait entaché d'irrégularité la procédure d'imposition en répondant, avant l'expiration du délai imparti aux requérants, par une réponse aux observations du contribuable du 9 mai 2016, aux observations qu'ils avaient formées le 2 mai 2016. Il n'était, à cet égard, pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments invoqués par les intéressés, notamment à ceux relatifs à la durée de ce délai, qui n'était d'ailleurs pas en cause, ou encore à celui relatif à l'absence de bénéfice d'une quelconque garantie supplémentaire non prévue dans le cadre du contrôle fiscal des intéressés venant compenser le non-respect du délai imparti. Le moyen tiré d'une omission partielle à statuer ne peut donc qu'être écarté.
7. En cinquième lieu, M. et Mme D... font valoir que les premiers juges ont entaché le point 10. de leur jugement d'erreurs de droit et de dénaturation des faits et pièces produites, notamment dans l'appréhension de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales et des propositions de rectification en cause, ont, aux points 5. et 6. de leur jugement, dénaturé les faits et pièces de l'espèce et commis des erreurs de droit en déclarant " régulier " l'exercice du droit de communication par l'administration, alors que les pièces requises n'avaient pas été produites par l'administration, et ont enfin, au point 11., dénaturé les faits et pièces de l'espèce et commis des erreurs de droit, en inversant la charge de la preuve au profit de l'administration. Toutefois, l'ensemble de ces arguments, qui ont trait au raisonnement tenu par les premiers juges et notamment à la dévolution de la charge de la preuve, procède d'une critique du bien-fondé du jugement et non de sa régularité. Par suite, le jugement n'est, à cet égard, pas entaché d'irrégularité.
8. En huitième lieu, la circonstance que le tribunal n'a pas estimé utile de solliciter de l'administration la production des " pièces manquantes ", n'est pas de nature à entacher d'irrégularité le jugement attaqué, dès lors que les premiers juges ont estimé que celles produites au dossier leur permettaient de statuer en toute connaissance de cause sur le litige qui leur était soumis, ce qu'ils ont d'ailleurs fait, sans qu'il apparaisse que les pièces invoquées par les requérants étaient indispensables à la solution du litige. Est sans incidence à cet égard, la circonstance, qui se rattache au bien-fondé du raisonnement des premiers juges, que ces derniers se seraient mépris sur la portée ou la valeur probante des documents en cause.
Sur la procédure d'imposition :
9. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. Sur demande du contribuable reçue par l'administration avant l'expiration du délai mentionné à l'article L. 11, ce délai est prorogé de trente jours (...) ". L'article R.*57-1 du même livre dispose que " la proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de cet article ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter, outre la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base des redressements, ceux des motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés qui sont nécessaires pour permettre au contribuable de formuler ses observations de manière entièrement utile.
10. La proposition de rectification du 5 avril 2016 adressée à M. et Mme D... mentionne l'année d'imposition, la nature et le montant en base des rehaussements envisagés, ainsi que les motifs les justifiant à savoir, d'une part, que les requérants ont un trop déclaré de traitements et salaires de 376 euros et, d'autre part, que le droit de communication exercé à l'encontre de l'établissement bancaire qui gère le compte de la société dont ils sont associés a révélé que des chèques et virements bancaires correspondant dans la comptabilité de cette société à des paiements auprès d'un sous-traitant avaient été, en réalité, appréhendés à hauteur d'une somme de 60 700 euros par eux, ces chèques et écritures bancaires étant annexés. Si le montant des " revenus bruts après contrôle " de 139 881 euros figurant au sein des conséquences financières annexées à la proposition de rectification est supérieur de 38 euros à celui de 139 844 euros pouvant être déduit des indications chiffrées, cette seule discordance, très mineure, n'a pu induire en erreur les contribuables sur les motifs et la portée des redressements et ne les a pas empêchés d'en contester utilement, comme ils l'ont d'ailleurs fait, le bien-fondé dans leur principe et leur montant. Ainsi, la motivation de cette proposition de rectification satisfaisait aux exigences de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, en dépit de cette discordance qui, comme l'a révélé la procédure ultérieure, notamment la décision du 3 novembre 2016, correspondait à la réintégration d'un abattement de 10 % afférent au trop-versé initialement appliqué en matière de traitements et salaires, le montant des revenus de capitaux mobiliers, soit 75 875 euros figurant tant dans le corps de la proposition de rectification que dans la partie consacrée aux conséquences financières.
11. En deuxième lieu, M. et Mme D... soutiennent que l'administration aurait entaché la procédure de redressement d'irrégularité en répondant à leurs observations avant même l'expiration du délai de soixante jours dont ils disposaient après la réception de la proposition de rectification du 5 avril 2016, conformément aux dispositions précitées. Toutefois, les dispositions de l'article R.*57-1 du livre des procédures fiscales relatives au délai dans lequel le contribuable doit faire parvenir sa réponse à la notification de redressement, n'en fixent pas à l'administration pour répondre aux observations du contribuable. Par ailleurs, il est constant qu'aucune mise en recouvrement n'a eu lieu avant le terme du délai de soixante jours susmentionné. Par suite, la circonstance que l'administration ait rejeté dès le 13 mai 2016 les observations de M. et Mme D... datées du 9 mai précédent est sans incidence sur la régularité de la procédure, les requérants ayant conservé la possibilité de présenter de nouvelles observations complémentaires dans le délai de soixante jours octroyé.
12. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 81 du livre des procédures fiscales : " Le droit de communication permet aux agents de l'administration, pour l'établissement de l'assiette et le contrôle des impôts, d'avoir connaissance des documents et des renseignements mentionnés aux articles du présent chapitre dans les conditions qui y sont précisées. / Le droit prévu au premier alinéa s'exerce quel que soit le support utilisé pour la conservation des documents. / Le droit de communication est étendu, en ce qui concerne les documents mentionnés aux articles L. 83 à L. 95, au profit des agents des administrations chargés du recouvrement des impôts, droits et taxes prévus par le code général des impôts. (...) ".
13. Il résulte de l'instruction, notamment de la page 3 de la proposition de rectification que, pour établir les impositions contestées, le service s'est fondé sur des copies de chèques et de virements obtenus dans le cadre de la vérification de comptabilité de la SARL Comet Sécurité privée au moyen d'un droit de communication effectué en direction de la banque CIC le 21 septembre 2015. Si les requérants contestent la régularité de ce droit de communication ainsi effectué, le ministre produit en défense des copies des demandes effectuées ainsi que des réponses apportées les 10 novembre 2015 et 5 janvier 2016 et des copies des dix pièces demandées lesquelles ont été annexées à la proposition de rectification et ont, pour quatre d'entre elles, à savoir les pièces 3, 4, 5 et 8, servi à fonder les rehaussements en matière de revenus de capitaux mobiliers (annexes B et C). Ainsi que l'ont relevé les premiers juges, ces demandes ont été effectuées par M. C..., contrôleur des impôts affecté à la direction nationale d'enquêtes fiscales compétente sur l'ensemble du territoire. Dans ces conditions, en l'absence de tout autre point de contestation relatif aux droits de communication à l'origine de ces quatre pièces, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 81 et des articles R.*81 et suivants du livre des procédures fiscales ne peut qu'être écarté. Est sans incidence à cet égard la circonstance que le ministre ne justifierait pas des conditions d'obtention des autres pièces présentées comme dans le cadre de son droit de communication dès lors qu'elles n'ont pas servi à fonder les rehaussements figurant dans la proposition de rectification.
Sur le bien-fondé des impositions :
14. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués / (...) c) Les rémunérations et avantages occultes ".
15. En application de ces dispositions, il appartient à l'administration d'apporter la preuve de l'existence et du montant des revenus qui auraient été distribués par une société à un contribuable ayant régulièrement exprimé son désaccord sur les rectifications qui lui ont été proposées selon la procédure contradictoire, ainsi que de l'appréhension des distributions par ce contribuable.
16. Lors de la vérification de comptabilité de la SARL Comet Sécurité Privée, l'administration a constaté que cette société avait comptabilisé des charges présentées comme devant rémunérer l'un de ses sous-traitants, la SASU SSIA. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus, mettant en œuvre son droit de communication auprès de l'établissement financier détenteur du compte bancaire de la société afin d'obtenir copie des chèques et virements réalisés par celle-ci, elle a constaté que certains règlements avaient été effectués à l'ordre de M. et Mme D... en 2013. Le service a relevé, en ce sens, un chèque de 15 310 euros daté du 1er juillet 2013, un virement de 15 000 euros daté du 26 juillet 2013 et un virement de 14 690 euros daté du 6 septembre 2013, adressés à Mme D... et un chèque de 15 700 euros du 1er juillet 2013 libellé à l'ordre de M. D....
17. D'une part, contrairement à ce que font valoir les requérants, les copies des chèques et ordres de virements annexés à la proposition de rectification et de nouveau produits devant le juge d'appel ne sont pas illisibles. La circonstance que les copies d'ordres de virements ne comporteraient pas d'intitulé, ni de mention tel un cachet ou un logo permettant d'identifier l'établissement bancaire n'est pas de nature à ôter toute valeur probante à ces documents produits par la banque CIC de Noisy-le-Grand elle-même en réponse au droit de communication qui lui a été adressé et dont les mentions sont d'ailleurs concordantes avec les relevés bancaires annexés au courrier de demande de copies de pièces. Si M. et Mme D... font valoir que le bordereau de pièces de l'administration produit devant les premiers juges comporte la mention " 6. Droit de communication - demande de copies de chèques " de sorte qu'elle ne justifie pas de l'obtention régulière de copies d'ordres portant virement et que ceux produits n'ont donc aucune valeur probante faute de savoir comment et dans quelles conditions ils ont été obtenus par le service, le ministre de l'action et des comptes publics produit, ainsi qu'il a été indiqué au point 12., des copies des demandes effectuées en direction de la banque CIC visant les " documents bancaires justifiant des opérations mentionnées (chèques, effets de commerce, ordres ...) ". Dès lors, les intéressés ne peuvent, pour ce seul motif, remettre en cause la valeur probante de ces copies ou la régularité de l'obtention de ces pièces.
18. D'autre part, M. et Mme D... font valoir que les données comptables de la SARL Comet Sécurité Privée ne lui seraient pas opposables dès lors que ses fichiers des écritures comptables auraient dû être détruits avant le 29 janvier 2016 en vertu des dispositions de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales selon lesquelles " (...) L'administration détruit, avant la mise en recouvrement, la copie des fichiers (...) ". En effet, compte tenu des exigences de loyauté et licéité de la preuve, ils ne pourraient fonder les rectifications de leurs revenus auxquelles le service a procédé par une proposition du 5 avril 2016. Toutefois, il résulte de l'instruction, notamment de la chronologie des faits, que le service avait connaissance par l'exercice de son droit de communication, avant la date à laquelle il avait l'obligation de détruire les fichiers d'écritures comptables, de l'existence de paiements effectués par chèques et par virement au profit de M. et Mme D..., le droit de communication en direction de la banque CIC ayant été effectué le 21 septembre 2015 et les réponses obtenues les 11 novembre 2015 et 5 janvier 2016. Dès lors, les requérants ne peuvent en tout état de cause sérieusement soutenir que les rehaussements notifiés par proposition de rectification du 5 avril 2016 seraient nécessairement fondés sur les fichiers d'écritures comptables de la SARL Comet Sécurité Privée, irrégulièrement conservés et exploités au-delà de la date à laquelle ils auraient dû être détruits. Au surplus, ainsi que le relève le ministre, l'obligation de détruire les fichiers des écritures comptables remis sous format dématérialisé avant la mise en recouvrement des impositions supplémentaires ne s'oppose pas à ce que le vérificateur établisse un relevé des écritures nécessitant des investigations, à partir des fichiers des écritures comptables et, en outre, l'omission de restitution des copies des fichiers en cause à la société vérifiée, en méconnaissance de l'article L. 47 A, si elle est susceptible d'entacher la régularité des impositions qui viendraient à être ultérieurement établies sur la base des données qu'ils contiennent, est, en revanche, sans influence sur les impositions mises en recouvrement après la consultation et l'exploitation des fichiers. Dans ces conditions, les intéressés ne sont pas fondés à remettre en cause l'opposabilité des éléments tirés de la comptabilité de la société, eu égard à des impératifs de loyauté et licéité de la preuve. Enfin, les exigences découlant de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 impliquent seulement que l'administration fiscale ne peut se prévaloir, pour établir une imposition, de pièces ou documents obtenus par une autorité administrative ou judiciaire dans des conditions déclarées ultérieurement illégales par le juge, ce qui n'est pas le cas en l'espèce dès lors notamment que la procédure prévue à l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales n'a pas été mise en œuvre.
19. Enfin, M. et Mme D... contestent le montant des revenus distribués ainsi mis à leur charge en faisant valoir, en premier lieu, que ces sommes correspondraient à celles déclarées dans la catégorie des traitements et salaires et, en second lieu, que le service n'apporte pas la preuve du bien-fondé de ce montant, la proposition de rectification ne permettant d'ailleurs pas de comprendre le calcul de la somme de 139 881 euros qui leur est opposée. Toutefois, il résulte de l'instruction que les paiements rappelés au point 15. et appréhendés par le service au titre des revenus de capitaux mobiliers sont distincts des treize virements d'un montant total de 43 000 euros à destination de M. D..., des quatre virements d'un montant total de 8 757,91 euros à destination de Mme D... et de la somme de 15 200 euros inscrite au crédit du compte " Associés compte courant ", imposés en tant que traitements et salaires, de sorte que la double imposition alléguée manque en fait. Par ailleurs, en faisant état de ces paiements et en produisant, en ce sens, les copies des chèques et ordres de virement afférents, le ministre de l'action et des comptes publics justifie le montant des sommes regardées comme des revenus distribués et la circonstance que la proposition de rectification comporte une très légère discordance entre les montants figurant en son sein et le total porté au titre des conséquences financières est sans incidence sur le bien-fondé des redressements alors surtout que cette discordance ne concerne pas les revenus de capitaux mobiliers taxés.
20. Dès lors, le ministre de l'action et des comptes doit être regardé comme apportant la preuve qui lui incombe tant de la réalité des distributions occultes, de leur montant et du désinvestissement corrélatif, que de leur appréhension par les intéressés du fait de l'encaissement des sommes sur leurs comptes privés.
Sur les pénalités :
21. Aux termes de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales : " La juridiction saisie peut, lorsqu'une erreur non substantielle a été commise dans la procédure d'imposition, prononcer, sur ce seul motif, la décharge des majorations et amendes, à l'exclusion des droits dus en principal et des intérêts de retard. (...) ". Toutefois, en l'absence d'erreur commise par l'administration dans la procédure suivie, M. et Mme D... ne sont pas fondés à se prévaloir des dispositions de l'article L. 80 CA précité à l'appui de leur demande de décharge des amendes, pénalités et majorations fiscales qui ont été mises à sa charge.
22. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande. Leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être écartées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... D... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 10 mai 2022, à laquelle siégeaient :
M. Bresse, président de chambre,
Mme Bonfils, première conseillère,
Mme Deroc, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 31 mai 2022.
La rapporteure,
M. DerocLe président,
P. BresseLa greffière,
C. Fourteau
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
Le greffier,
2
N° 20VE00189