COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT N BAP/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 01738.
Jugement Conseil de Prud'hommes du MANS, du 23 Juin 2010, enregistrée sous le no 10/ 00170
ARRÊT DU 08 Novembre 2011
APPELANTE :
Madame Marie-José X...... 72190 COULAINES
représentée par Monsieur Michel Y..., délégué syndical, muni d'un pouvoir
INTIMEE :
S. A. R. L. 2 A E 16 rue du Bosquet 72190 COULAINES
représentée par Monsieur Emmanuel Z..., gérant, assisté de Maître Philippe GRUNBERG, avocat au barreau du MANS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Septembre 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne DUFAU, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président Madame Brigitte Z...- PETIT, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller
Greffier lors des débats : Madame LE GALL,
ARRÊT : prononcé le 08 Novembre 2011, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE
Mme Marie-José X... a été engagée par la société KFC France, le 26 octobre 2007, en qualité d'employée polyvalente, selon contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel, à hauteur de 86, 67 heures de travail mensuelles.
Le 1er mai 2008, elle a été promue responsable de service et son temps de travail a été porté à 130 heures mensuelles.
Par avenant, applicable à compter du 1er août 2008, elle est passée à temps plein.
L'établissement du Mans où elle travaillait a été repris par la société 2AE, sous franchise de la société KFC France.
Son contrat de travail a été transféré le 1er octobre 2008, par avenant, à la société 2AE, aux mêmes conditions, avec une reprise de son ancienneté.
La convention collective applicable est celle, nationale, de la restauration rapide.
Mme Marie-José X... a été en arrêt de travail, pour maladie, du 29 décembre 2008 au 6 janvier 2009 inclus.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 janvier 2009, la société 2AE a demandé à Mme Marie-José X... de justifier de son absence à son poste de travail depuis le 7 janvier 2009.
Par une nouvelle lettre recommandée avec accusé de réception du 20 janvier 2009, Mme Marie-José X... a été convoquée à un entretien préalable en vue d'un licenciement.
L'entretien avait été fixé au 29 janvier 2009 ; Mme Marie-José X... ne s'y est pas présentée.
Mme Marie-José X... a été licenciée, pour faute grave, par la société 2AE, par courrier recommandé avec accusé de réception du 2 février 2009.
Mme Marie-José X... a saisi le conseil de prud'hommes du Mans le 10 février 2009.
L'affaire a été radiée le 10 mars 2010, puis rétablie deux jours plus tard.
Mme Marie-José X... a demandé que :
- la société 2AE soit condamnée à lui verser :. 15 000 euros de dommages et intérêts pour harcèlement moral,. 2 906 euros d'indemnité compensatrice de préavis, outre 290, 60 euros de congés payés afférents,. 15 000 euros de dommages et intérêts pour rupture abusive,. 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,- il soit ordonné à la société 2AE de lui remettre :. l'attestation Assedic rectifiée, sous astreinte de 150 euros par jour,. le certificat de travail rectifié, sous astreinte de 150 euros par jour,- les intérêts au taux légal soient fixés à compter de la saisine de la juridiction,- l'exécution provisoire de la décision à intervenir soit ordonnée,- la société 2AE soit condamnée aux entiers dépens.
Par jugement du 23 juin 2010 auquel l'on se reportera pour l'exposé des motifs, le conseil de prud'hommes du Mans a :
- dit que les faits de harcèlement moral n'étaient pas avérés,- dit que le licenciement reposait bien sur une faute grave,- débouté, en conséquence, Mme Marie-José X... de l'intégralité de ses demandes,- débouté, également, la société 2AE de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- condamné Mme Marie-José X... aux entiers dépens.
Mme Marie-José X... a formé régulièrement appel de cette décision, par lettre recommandée avec accusé de réception du 5 juillet 2010.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par conclusions du 18 juillet 2011, reprises oralement à l'audience, Mme Marie-José X... sollicite l'infirmation du jugement déféré et que la cour :
- condamne la société 2AE à lui verser :. 15 000 euros de dommages et intérêts pour harcèlement moral,. 2 906 euros d'indemnité compensatrice de préavis, outre 290, 60 euros de congés payés afférents,. 15 000 euros de dommages et intérêts pour rupture abusive,. 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,- ordonne à la société 2AE de lui remettre. l'attestation Assedic rectifiée, sous astreinte de 150 euros par jour,. le certificat de travail rectifié, sous astreinte de 150 euros par jour,- dise qu'il y a lieu à intérêts au taux légal à compter de la saisine de la juridiction de première instance,- condamne la société 2AE aux entiers dépens.
Elle affirme que le harcèlement moral qu'elle a subi de la part du responsable de la société 2AE est démontré et, d'ailleurs, non contesté par ce dernier. Elle renvoie notamment à ce propos : o au mémoire qu'elle a établi, o au témoignage d'une de ses collègues, o aux vingt et une sanctions, de toute nature, envoyées par la société 2AE à ses salariés entre le 21 octobre et le 15 décembre 2008. Elle ajoute que c'est pour cela, qu'à bout, aussi bien moralement que physiquement, elle n'a pu, ni regagner son poste, ni croiser à nouveau son employeur, ne serait-ce qu'à l'occasion de l'entretien préalable auquel il l'a convoquée et que, dans ces conditions, le licenciement dont elle a été l'objet est abusif. Elle dénie, enfin, tout crédit aux attestations de salariés fournies par la société 2AE.
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Par conclusions du 29 août 2011, reprises oralement à l'audience, la société 2AE sollicite la confirmation du jugement déféré et, y ajoutant, que Mme Marie-José X... soit condamnée à lui verser 2 000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel ainsi qu'en tous les dépens de l'instance.
Elle réplique que le licenciement de Mme Marie-José X... pour faute grave est plus que justifié, alors que : oMme Marie-José X..., invitée à faire connaître les raisons de son absence de l'entreprise et à reprendre son poste, n'a tenu aucun compte de cette mise en demeure, o pourtant, Mme Marie-José X... connaît le règlement intérieur, qui fixe un délai pour justifier d'une absence sur le lieu de travail, o Mme Marie-José X... ne s'est pas plus rendue à l'entretien préalable auquel elle avait été convoquée, laissant entendre qu'elle ne souhaitait plus travailler dans l'entreprise et ne donnant, toujours, aucun élément d'explication qui aurait permis une autre décision à son égard, o en tant qu'employeur, elle a quand même fait preuve de patience avant d'en arriver à ce licenciement, malgré la gêne qu'une telle absence a causée au bon fonctionnement du restaurant. Elle précise qu'il n'y a pas eu harcèlement moral de sa part : o Mme Marie-José X... est dans l'obligation légale d'établir des faits qui laissent présumer un tel harcèlement, o or, Mme Marie-José X... se contente de rédiger un mémoire, dans lequel elle relate des faits dont se serait rendu coupable son employeur à son encontre, ne versant par ailleurs qu'un témoignage qui, au surplus, ne répond pas aux prescriptions de l'article 202 du code de procédure civile, o de son côté. contrairement à ce que déclare Mme Marie-José X..., elle a toujours nié les faits qui lui sont reprochés et qui sont nés de l'imagination de cette dernière,. elle verse, afin de le démontrer, deux attestations de salariés ainsi que des échanges de textos qu'elle a eus avec Mme Marie-José X...,. à l'inverse de ce qu'indique Mme Marie-José X..., elle a été parfaitement attentive à sa situation,. s'il est possible qu'elle ait fait à Mme Marie-José X..., un jour, une remarque quant à sa tenue, cette remarque était strictement en lien avec le travail que cette dernière avait à remplir, absolument pas faite dans les termes évoqués.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur le harcèlement moral
" Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ", pose en principe l'article L. 1152-1 du code du travail.
En cas de litige, les règles de preuve sont aménagées par l'article L. 1154-1 du code du travail, qui précise : "... le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ".
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Mme Marie-José X... décrit les faits de harcèlement moral dont elle se plaint dans un mémoire en huit points, établi par ses soins.
Pour corroborer ses dires, Mme Marie-José X... produit l'attestation de Mme A..., ex-collègue de travail.
Cet écrit ne répond pas aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile, en ce que n'y est pas joint, " en original ou en photocopie ", le " document officiel justifiant de son identité de son auteur et comportant sa signature ".
Ces dispositions de l'article 202 ne sont pas, cependant, prescrites à peine de nullité et une attestation ne peut être rejetée, pour non-conformité aux exigences de ce texte, sans qu'il soit précisé en quoi l'irrégularité constatée constitue l'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public faisant grief à la partie qui l'attaque.
A défaut pour la société 2AE de justifier d'un tel grief, l'attestation contestée sera examinée, est-elle ou non suffisante afin d'emporter la conviction.
Mme A... a écrit :
"... Les faits se sont déroulés un lundi de la fin du mois d'octobre. J'étais d'ouverture sur le restaurant KFC Saint-Saturnin (S. A. R. L 2ae). Madame X... Marie-José était également sur le terrain. Il était environ 14 h, quand Mr Z... Emmanuel s'est dirigé vers le pack (préparation des burgers) X... Marie-José s'y trouver déjà, je suis arrivée à mon tour quelques instants plus tard (= 3 min). Ils étaient au niveau de l'emballage des sandiwchs, je me trouver à quelques mètres, au niveau du lave-mains. Mr Z... Emmanuel lui a dit je cite : " la prochaine fois, tu m'enlèveras ton haut rouge (sous sa chemise de travail) car ici on n'est pas sur les quais de la Seine ". Mr Z... lui a dit également je cite : " mon fils de deux ans et demi est plus intelligent que toi ". Ces propos choquants ne sont pas digne d'un employeur, je me suis sentie mal pour elle ".
Selon ce témoignage, les deux réflexions du responsable de la société 2AE à Mme Marie-José X... seraient faites le même jour, à l'occasion d'une scène unique. Or, il résulte du mémoire de Mme Marie-José X... que les deux réflexions en question sont, au contraire, séparées dans le temps, prononcées lors de scènes différentes. Dès lors, aucune crédibilité ne peut être accordée à l'attestation de Mme A..., en ce qu'elle est purement référendaire, le témoin n'apparaissant pas avoir assisté ou personnellement constaté aux/ les faits qu'elle relate (cf article 202 du code de procédure civile).
Cette attestation n'" établit " donc pas " des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ", au sens de l'article L. 1154-1 du code du travail.
Mme Marie-José X... verse par ailleurs, afin d'illustrer le stress qu'elle dénonce de la part de la nouvelle direction entrée en fonction en septembre 2008, une série de sanctions délivrées par la société 2AE à des salariés de l'entreprise, sur la période allant du 21 octobre au15 décembre 2008. Il y a là des lettres d'observation (sept pour sept salariés différents), des avertissements (six pour cinq salariés différents), des mises à pied (deux pour deux salariés ayant déjà eu, l'un une lettre d'observation, l'autre deux avertissements), une rétrogradation (une pour un salarié ayant déjà eu un avertissement).
Toutefois, l'employeur dispose d'un pouvoir disciplinaire, qui trouve son contrepoids dans le recours judiciaire ouvert au salarié, en cas de sanction irrégulière, non fondée, ou disproportionnée à la faute commise.
Or, Mme Marie-José X... n'amène aucun élément relatif à une éventuelle contestation des dites sanctions, alors même que M. B... et Mme C... qui ont été l'objet, pour le premier d'un avertissement puis d'une rétrogradation, pour la seconde d'une lettre d'observation, sont toujours présents au sein de la société 2AE, pour laquelle ils ont attesté.
Mme Marie-José X... n'a, pour ce qui la concerne, subi qu'un unique avertissement de la part de la société 2AE, le 28 octobre 2008.
Cette série de sanctions n'" établit " donc pas plus " des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ", au sens de l'article L. 1154-1.
Au surplus, la réalité d'autres faits visés dans le mémoire de Mme Marie-José X..., et non des moindres, se trouve battue en brèche par les pièces fournies par la société 2AE.
Ainsi, Mme Marie-José X... écrit, point 6b de son mémoire :
" Continuant la discussion, toujours à l'extérieur devant le restaurant, je dis à M. Z... que j'ai besoin d'une demi-journée le lendemain pour emmener mon fis faire une radio car il a eu un grave accident de voirie. M. Z... lève sa main vers moi en me hurlant " NON, NON, NON, CA SUFFIT TOI. C'ETAIT LA MORT DE TON PERE, MAINTENANT C'EST L'ACCIDENT DE TON FILS. TU ARRÊTES AVEC TES HISTOIRES A DORMIR DEBOUT. QUAND VAS-TU PRENDRE TES RESPONSABILITES ? MON FILS QUI A 2 ANS EST PLUS MATURE QUE TOI. COMME SI JE NE SAVAIS PAS QUE TU ETAIS PARTIE EN VACANCES EN MARTINIQUE ET TU VEUX ME FAIRE CROIRE QUE C'EST POUR TON PERE QUE TU ES PARTIE. TU AS 47 ANS, QUAND VAS-TU GRANDIR, TU N'AS TOUJOURS PAS COMPRIS QUE C'EST MOI LE PATRON ICI ET C'EST MOI QUI DECIDE ! ". Il ne se posait même pas la question de savoir si j'allais bien ou pas, il hurlait encore. M. Z... avait dépassé les limites, il n'avait aucun droit de me parler comme cela, encore une fois, il était arrivé à ses fins. L'humiliation, c'est son point fort et il adore faire du mal et il y était parvenu cette fois-ci. C'était là vraiment le coup de grâce... ".
Outre que le responsable de la société 2AE nie avoir prononcé ces phrases, il faut reprendre l'ensemble des événements dont il s'agit.
Le père de Mme Marie-José X... vit à la Martinique et est décédé le 20 décembre 2008, à 7 heures 20, comme le mentionne l'acte d'état civil qui figure aux débats. Mme Marie-José X... s'est rendue à ses obsèques, quittant Le Mans le 21 décembre 2008 à 9 heures 29, pour y revenir le 25 suivant à 11 heures 59 (cf ses billets de train et d'avion).
La convention collective applicable, de la restauration rapide, prévoit en son article 39 " Congés spéciaux " que :
" Les salariés peuvent, sur justificatif, bénéficier pour événements personnels d'autorisations d'absence exceptionnelles payées... décès de la mère ou du père (2 jours)... Les jours d'absence devront être pris au moment des événements en cause. Ils seront assimilés à des jours de travail effectif pour la détermination de la durée des congés payés ".
La société 2AE a, de fait, accordé à Mme Marie-José X... les droits auxquels elle pouvait prétendre en une telle circonstance.
Le problème vient que Mme Marie-José X... était allée précédemment en Martinique, du 30 novembre au 16 décembre 2008 inclus, la réservation ayant été faite depuis une agence de voyages de Fort de France le 27 novembre 2008 (cf sa réservation et ses billets d'avion) et qu'elle a argué, alors, du décès de son père pour justifier son absence. Ceci ressort tant de l'attestation de Mme C..., assistant manager au sein de la société 2AE, que de la copie de ses propres textos au responsable de la société 2AE :
- attestation C..., " Le 29 novembre 2008, Marie José X... a appelé le restaurant KFC 2AE pour me prévenir qu'elle serait absente. En effet, celle-ci m'a expliqué que son père venait de décéder et qu'elle devait se rendre à l'aéroport d'urgence " (pièce no20 sté),- texto du 29 novembre 2008, 18 : 35, " Je vous en remercie beaucoup. Ca me touche énormément " (pièce no11 sté),- texto du 4 décembre 2008, 17 : 54, "... ma mère ne veut pas de fleurs la famille vous remercie pour la bonne intention a bientot " (pièce no12 sté)- texto du 5 décembre 2008, 11 : 13, " Bjr Emmanuel je pense etre la vers le 17 ou le 18. On doit aller voir le notaire la semaine prochaine mais ne vs inquiétez pas je serai là avant les fetes. Bonne journée " (pièce no13 sté).
Il a bien fallu, à un moment, que Mme Marie-José X... rétablisse les choses, mais ce n'est pas pour cela, non plus, que le ton s'est durci avec le responsable de la société 2AE, ainsi que le prouve la copie ci-après de ses textos au dit responsable :
- texto du 20 décembre 2008, 10 : 44, " Bjr Emmanuel je suis rentrée comme prévu le 18 mais a peine arrivé que g des mauvaises nouvelles de ma mere je ne peux pa parlé sans pleuré c pr ça que je vs ai pas encore appellé. J'atten pr savoir koi faire. Merci " (pièce no14 sté),- texto du 20 décembre 2008, 11 : 14, " Je vs appelle tt a lh je suis en communication avec ma soeur en Martinique " (pièce no13 sté),- texto du 22 décembre 2008, 1 : 39, " Bsr Emmanuel je viens d'arriver en Martinique pour l'enterrement de demain je repars le mardi soir pr arrivé le 24 apremidi je serai à mon poste le 25 merci de votre compréhension. Pouvez vs mettre tt ça en cp Svp car les billets d'avion sont cher merci encor " (pièce no16 sté).
De nouveau, Mme Marie-José X... n'" établit " pas de " faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ", au sens de l'article L. 1154-1.
Sinon, Mme Marie-José X... parle de l'un de ses fils, victime d'un accident de la route et auquel elle a eu besoin d'apporter son aide, ce que son employeur n'aurait pas permis. Hormis cette affirmation, il n'existe au dossier aucun élément confirmatif de ses dires, ne serait-ce que de l'accident, alors qu'il lui était aisé d'en obtenir, puisque pompiers et gendarmerie étaient, toujours selon elle, intervenus. Mme Marie-José X... manque, encore, à son obligation d'établir " des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ", au sens de l'article L. 1154-1. En tout cas, ce n'est pas un arrêt de travail de dix jours, sans autre mention du médecin, qui peut, à soi seul, être considéré comme un fait permettant " de présumer l'existence d'un harcèlement ", au sens de l'article L. 1154-1. Il peut exister, en effet, bien d'autres causes à une telle prescription, parfaitement étrangères à un harcèlement moral.
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Par conséquent, Mme Marie-José X... n'établissant, ainsi que le requiert l'article L. 1154-1 du code du travail, aucun fait de la part de la société 2AE permettant de présumer l'existence du harcèlement moral qu'elle dit avoir subi, le jugement déféré devra être confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts de ce chef.
Sur le licenciement
Le juge, devant lequel un licenciement est contesté, doit, conformément à l'article L. 1235-1 du code du travail, apprécier le caractère réel et sérieux des motifs énoncés dans le courrier qui le notifie.
Les termes de cette missive fixant les limites du litige, celle-ci sera reprise ci-après :
" J'ai eu à déplorer de votre part un agissement constitutif d'une faute grave. En effet, vous étiez en arrêt maladie jusqu'au 6 janvier 2009 inclus. Par conséquent, vous auriez dû reprendre le travail le 7 janvier ; or vous ne vous êtes pas présentée. N'ayant aucun justificatif de votre part, j'ai pris la décision de vous licencier pour faute grave en raison de votre absence prolongée injustifiée. Dans la mesure où vous ne vous êtes pas présentée à l'entretien prévue le 29 janvier 2009, mon appréciation des faits fautifs reprochés n'a pu être modifiée. Vous cesserez de faire partie de nos effectifs dès la première présentation de cette lettre... ".
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La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.
Il incombe à l'employeur de l'établir.
Il est acquis aux débats que Mme Marie-José X... :
- était en arrêt de travail jusqu'au 6 janvier 2009 inclus,- n'a pas regagné son poste à l'issue du dit arrêt de travail,- n'a pas répondu à la sommation de la société 2AE, faite par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 janvier 2009, qui lui a été distribuée le 14 suivant, d'avoir à justifier son absence.
La société 2AE a écrit, ce 10 janvier 2009 :
" Objet : demande de justificatif d'absence prolongée... Vous êtes absente de votre poste de travail depuis le 07/ 01/ 09. Sauf erreur de notre part, vous ne nous avez fait parvenir à ce jour aucun justificatif concernant votre absence. Nous vous rappelons que, conformément au Règlement intérieur affiché dans le restaurant et dont vous avez eu connaissance lors de votre embauche, toute absence pour maladie ou accident doit être justifiée dans les 48 heures par l'envoi d'un certificat médical et toute absence doit être justifiée dans les 3 jours maximum. Votre absence nuit au bon fonctionnement du restaurant et ne saurait être tolérée compte tenu de la gêne qu'elle occasionne pour notre service à la clientèle. En conséquence de quoi, nous vous demandons de bien vouloir justifier votre absence sous 48 heures, faute de quoi nous serions contraints d'envisager à votre égard une procédure de licenciement... ".
Le règlement intérieur auquel se réfère la société 2AE n'est que la traduction de l'article 19 de la convention collective applicable, qui stipule :
"... 1. Une absence résultant d'une maladie ou d'un accident dans la vie privée dont sauf cas de force majeure, l'employeur est averti dans les 48 heures et dont la justification doit lui être fournie par l'intéressé dans les 3 jours (le cachet de la poste faisant foi) ne constitue pas une rupture du contrat de travail... ".
Le seul élément qu'ait reçu la société 2AE de Mme Marie-José X... est le texto suivant, qu'elle a envoyé après avoir été convoquée à l'entretien préalable en vue d'un licenciement :
" Bsr Mr le directeur g reçu votre lettre mais je suis dsl je ne pourrai pa me libérè pouvez vs me faire parvenir mes documents svp ou alors 1 de mes enfants viendra les chercher. Je vs en remercie ".
Mme Marie-José X... occupait un poste de responsable de service, à temps complet, dans l'établissement tenu par la société 2AE.
En étant absente de l'entreprise, tout en refusant délibérément d'informer son employeur de sa situation relative à cette absence, Mme Marie-José X... a bien commis une faute grave et, comme l'ont exactement retenu les premiers juges, son licenciement de ce fait par la société 2AE est légitime.
Sur les frais et dépens
Les dispositions de la décision déférée, relatives aux frais et aux dépens, seront confirmées.
La demande de Mme Marie-José X... formulée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile sera rejetée.
La demande du même chef de la société 2AE sera accueillie, à hauteur de 1 000 euros.
Mme Marie-José X... sera condamnée aux dépens de l'instance d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
DÉBOUTE Mme Marie-José X... de sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE Mme Marie-José X... à verser à la société 2AE 1 000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel,
CONDAMNE Mme Marie-José X... aux dépens de l'instance d'appel.