COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT N AD/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 02302. Jugement Conseil de Prud'hommes d'ANGERS, du 27 Août 2010, enregistrée sous le no 09/ 01100
ARRÊT DU 17 Janvier 2012
APPELANTE :
ASSOCIATION RAYMOND ROINARD Résidence Beau Soleil 1 avenue de Bretagne 49330 MIRE
représentée par Maître Elisabeth POUPEAU, substituant Maître Sandrine GRISILLON (SCP) avocat au barreau d'ANGERS, en présence de Madame Claude Y..., directrice de la Résidence Beausoleil
INTIME et incidemment appelant :
Monsieur Gilles X...... 53960 BONCHAMPS LES LAVAL
présent, assisté de Maître André FOLLEN (SCP BDH AVOCATS), avocat au barreau d'ANGERS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Novembre 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller
Greffier lors des débats : Madame LE GALL,
ARRÊT : prononcé le 17 Janvier 2012, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSE DU LITIGE
L'Association Raymond Roinard, qui gère une Maison de Retraite située à Miré (49), la résidence Beausoleil, a embauché par contrat à durée indéterminée du 25 juin 2009, en qualité de directeur, catégorie cadre, M. Gilles X....
Une rémunération annuelle forfaitaire brute de 51 600 € était prévue, constituant la contrepartie forfaitaire de l'activité du salarié sans référence à une durée de travail compte-tenu de son haut niveau de responsabilité et de son autonomie de décision, notamment dans le cadre de la délégation de pouvoirs qui lui était consentie et de sa totale liberté dans la détermination et l'organisation de ses horaires de travail.
La convention collective applicable était la convention collective rénovée de l'hospitalisation privée à but non lucratif du 31octobre 1951.
L'article 1er du contrat de travail stipulait que M. X... était engagé sous réserve de la période d'essai prévue à l'article 2 et disait aussi " le salarié certifie également que les informations figurant sur son curriculum vitae et la fiche d'embauche qu'il a remplie sont exacts, toute fausse déclaration sur ces points étant susceptible de constituer une faute de nature à entraîner son licenciement. "
L'article 2 du contrat de travail, intitulé " période d'essai et période probatoire ", était ainsi libellé :
" Période d'essai :
Le présent engagement ne deviendra définitif qu'à l'issue d'une période d'essai de trois mois de travail effectif pendant laquelle chacune des parties pourra mettre fin au présent contrat sans indemnité, ni préavis particulier,
Période probatoire :
Compte tenu de la nature et de la spécificité des nouvelles fonctions confiées a M. Gilles X..., les parties conviennent de soumettre cet engagement à une période probatoire au poste de trois mois de travail effectif destinée à permettre une appréciation objective des capacités professionnelles de M. Gilles X... sur une période suffisante et de lui permettre de s'adapter pleinement a ses missions.
Cette Période probatoire débutera a compter de l'expiration de la période d'essai. "
M. X... a commencé à exercer ses fonctions de directeur Ie Ier juillet 2009, conformément à ce qui était prévu par son contrat de travail, et s'est vu remettre à l'issue de cette première journée de travail une lettre signée du vice-Président de l'association, du trésorier et de la secrétaire, mettant fin à la période d'essai, dans ces termes :
" Monsieur X..., Le conseil d'Administration met fin à votre contrat à durée indéterminée, pendant la période d'essai. Le délai de prévenance est de 24 heures, ce dernier s'effectuera le 02/ 07/ 2009, il vous sera rémunéré et donc vous serez dispensé de travailler. "
Il a apposé sa signature sur cet écrit, sous la mention " bon pour remise ".
Ont également été remis à M. X... son certificat de travail, pour la période du 1ER au 2 juillet 2009, et son reçu pour solde de tout compte, pour un montant de 178, 95 €.
M. X... a par courrier du 3 juillet 2009 contesté cette décision, qu'il a qualifiée d'abus de droit, et a proposé à l'association Raymond Roinard que lui soit versée une indemnité transactionnelle de 15000 €.
Il lui a été répondu, par courrier du 17 juillet 2009 du Président de l'association, M. Z..., qu'il avait dissimulé, dans son curriculum vitae des informations de nature à " porter atteinte à la notoriété " de la résidence Beausoleil et qu'aucun accord n'était possible.
M. X... a saisi Ie conseil de prud'hommes d'Angers Ie 21 juillet 2009 pour que celui-ci dise la rupture de la période d'essai équivalente à un licenciement sans cause réelle et sérieuse, qu'il condamne l'association Raymond Roinard à lui payer la somme de 14 899 € à titre d'indemnité de préavis congés payés inclus et la somme de 27090 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif.
Par jugement du 27 août 2010, le conseil de prud'hommes d'Angers a :
- jugé la rupture de la période d'essai prononcée par l'association Raymond Roinard abusive et dit que Ie licenciement de M. X... est sans cause réelle et sérieuse.
- Condamné l'association Raymond Roinard à payer à M. X... la somme de 14 899 € à titre d'indemnité de préavis, congés payés inclus.
- dit que cette somme portera intérêts de retard au taux légal à compter de la convocation de la partie défenderesse devant Ie bureau de conciliation soit Ie 07 Août 2009.
- Ordonné l'exécution provisoire du jugement.
- Condamné l'association Raymond Roinard à payer à M. X... la somme de 1000 € sur Ie fondement de l'Article 700 du code de procédure civile,
- condamné l'association Raymond Roinard aux dépens.
- débouté l'association Raymond Roinard de sa demande à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif. (Il y a là une erreur matérielle, le demandeur en dommages et intérêts étant M. X...).
Le jugement a été notifié le 17 septembre 2009 à M. X... et le 4 septembre 2009 à l'association Raymond Roinard qui en a fait appel par lettre recommandée avec accusé de réception postée le 14 septembre 2009.
OBJET DE L'APPEL ET MOYENS DES PARTIES
L'association Raymond Roinard demande à la cour par observations orales faites à l'audience et reprenant sans ajout ni retrait ses écritures déposées au greffe le 14 décembre 2010, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé, d'infirmer le jugement déféré et statuant à nouveau, de dire et juger que la rupture de la période d'essai prononcée par elle est justifiée par la faute commise par M. X....
L'association Raymond Roinard expose avoir recruté M. X... parce que son curriculum vitae mentionnait qu'il avait été, de juillet 2000 à novembre 2007, directeur d'un E. H. P. A. D. relevant de la fonction publique hospitalière, la maison de retraite de Meslay-du-Maine en Mayenne, et que son expérience professionnelle correspondait donc au poste à occuper ; qu'elle s'était néanmoins renseignée sur son parcours professionnel et a ainsi reçu le 1er juillet 2009, adressé par la D. A. S. S., un arrêté du Ministre de la santé et des solidarités, daté du 3 juillet 2007, suspendant M. X... de ses fonctions de directeur de la maison de retraite de Meslay-du-Maine.
L'association Raymond Roinard a considéré, connaissance prise de cet arrêté, que M. X... lui avait dissimulé des informations sur son curriculum vitae, de nature à remettre en cause toute collaboration basée sur la confiance et constituant un manquement à son obligation de loyauté ; elle ajoute avoir reçu, quelques semaines plus tard, un écrit de Mme D..., responsable du pôle handicap et dépendances de la D. D. A. S. S. de la Mayenne l'informant de ce que M. X..., suspendu de ses fonctions depuis janvier 2007, ne pouvait pas, en tant que fonctionnaire et la suspension étant une position normale d'activité, travailler dans des E. H. P. A. D. du secteur associatif.
L'association Raymond Roinard admet avoir rompu " précipitamment " la période d'essai de M. X..., mais soutient avoir agi ainsi dans l'intérêt de la maison de retraite et sans volonté de nuire à M. X..., ni légèreté blâmable, alors d'une part qu'elle avait appris qu'il faisait l'objet de poursuites pénales pour harcèlement moral et sexuel sur le personnel féminin de la maison de retraite de Meslay-du-Maine, et d'autre part qu'elle l'avait embauché pour exercer des fonctions similaires à celles tenues alors ; que M. X... a depuis, été condamné par le tribunal correctionnel de Laval pour harcèlement moral, et que la cour d'appel d'Angers, chambre correctionnelle, a statué le 8 novembre 2011 sur son appel.
L'association Raymond Roinard soutient que la rupture de la période d'essai a été justifiée par la faute de M. X..., et que cette cause réelle et sérieuse lui a été explicitée dans le courrier du 17 juillet 2009 ; qu'il s'agit d'un motif disciplinaire et que les premiers juges auraient dû rechercher si la faute de M. X... justifiait la rupture ; qu'il appartient désormais à la cour de faire cette recherche.
Elle soutient que la faute a consisté à écrire sur le curriculum vitae qu'il avait exercé les fonctions de directeur de la maison de retraite de Meslay-du-Maine, sise en Mayenne, " de juillet 2000 à novembre 2007 ", alors qu'il se trouvait suspendu de ses fonctions depuis le 3 janvier 2007, et de s'être ainsi abstenu volontairement de dire à l'employeur qu'il faisait l'objet de poursuites pénales pour harcèlement moral et sexuel sur le personnel féminin de l'établissement.
Quant à l'indemnisation de M. X... du fait de la rupture, l'association Raymond Roinard soutient que la seule indemnisation due est celle résultant de ce qu'elle n'a pas respecté la procédure qui aurait dû présider à cette rupture ; à titre subsidiaire, si la cour retenait le caractère fautif de la rupture, elle lui demande d'apprécier le montant des dommages et intérêts à allouer à M. X..., qui ne fait pas la preuve de son préjudice alors qu'il continue de percevoir suspendu, un demi-traitement, son indemnité de résidence, le supplément familial de traitement et les prestations familiales.
Enfin, l'association Raymond Roinard soutient qu'aucune indemnité de préavis n'est due à M. X..., y compris si le caractère fautif de la rupture est retenu par la cour, la requalification d'une rupture de période d'essai en licenciement sans cause réelle et sérieuse n'étant pas conforme aux dispositions de l'article L1231-1 du code du travail qui énonce que les dispositions relatives à la rupture du contrat à durée indéterminée ne sont pas applicables à la période d'essai, sauf si la période d'essai est elle-même illicite.
M. X... demande à la cour par observations orales faites à l'audience reprenant sans ajout ni retrait ses écritures déposées au greffe le 23 septembre 2011et auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé, de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré que la rupture de son contrat de travail était un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et en ce qu'il a condamné l'association Raymond Roinard à lui payer la somme de 14 899 € à titre d'indemnité de préavis, congés payés inclus, avec intérêts de retard au taux légal à compter de la demande en justice ; formant appel incident, de le réformer pour le surplus et de condamner l'association Raymond Roinard à lui payer la somme de 27 090 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif, outre les dépens à payer, la somme de 1000 € accordée en première instance en application de l'article 700 du code de procédure civile et celle de 2500 en cause d'appel.
M. X... soutient que la rupture d'une période d'essai non motivée ne peut être valable que si elle a pour motif l'appréciation des qualités professionnelles du nouveau salarié, et que la rupture a été pour lui nécessairement abusive puisqu'elle a eu lieu sans motif mais après seulement un jour d'activité ; qu'il s'agit donc bien d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et que lui sont dus une indemnité de préavis et des dommages et intérêts pour licenciement abusif.
M. X... observe que les renseignements adressés par Mme D... sur sa situation administrative sont parvenus à l'association Raymond Roinard par un mel du 21 juillet 2009, bien postérieur par conséquent à la rupture ; qu'en outre il n'a commis aucune faute d'une part parce qu'il bénéficie, quant à la procédure pénale en cours, de la présomption d'innocence, et d'autre part parce qu'il est inexact, et contraire à la jurisprudence renouvelée du Conseil d'Etat sur ce point, de dire qu'un fonctionnaire suspendu de ses fonctions ne peut pas travailler dans le privé, l'interdiction du cumul d'activités ne s'appliquant plus en ce cas ; que le tribunal administratif de Nantes lui a par décision du 15 avril 2009 et au travers de sa motivation bien reconnu le droit " d'exercer un autre emploi pendant la durée de sa suspension " ; qu'il a ainsi légitimement travaillé, pendant la période de suspension, à la maison de retraite de Chenillé-Changé, en janvier 2011, puis à l'E. H. P. A. D. de la Désirade de la mi-février à la mi-avril 2011, et a fait à chaque fois l'objet d'appréciations élogieuses.
En tout état de cause, M. X... relève que l'employeur a rompu la période d'essai pour un motif disciplinaire mais sans respecter la procédure disciplinaire, soit sans entretien préalable à la rupture, ni notification de motifs, et que la rupture est par conséquent " ipso facto " abusive.
Sur sa situation, M. X... indique percevoir un demi-traitement de 1900 € par mois ; il a perçu en janvier 2011, 977 € pour un remplacement comme directeur de maison de retraite. Il estime que le contrat de travail, en disant que seule une période de six mois serait suffisante pour apprécier ses compétences professionnelles, lui donnait un droit à exercer ses fonctions pendant six mois avant que l'association Raymond Roinard puisse en tirer des conclusions sur ce plan.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la rupture de la période d'essai
Il résulte des dispositions combinées des articles L1221-19, L1221-20, et L1221-25 du code du travail que le contrat de travail à durée indéterminée peut comporter une période d'essai dont la durée maximale est pour les cadres de quatre mois, que celle-ci permet à l'employeur d'évaluer les compétences du salarié dans son travail et au salarié d'apprécier si les fonctions occupées lui conviennent, et que lorsqu'il est mis fin par l'employeur, au contrat en cours de période d'essai pour les contrats stipulant une période d'essai d'au moins une semaine, le salarié est prévenu dans un délai qui ne peut être inférieur à vingt-quatre heures en deçà de huit jours de présence.
Par application de ces dispositions, l'employeur peut, au cours ou à l'issue de la période d'essai, mettre fin à l'essai de façon discrétionnaire, sans être tenu pour autant de notifier la rupture par écrit, celle-ci pouvant rester verbale, ni devoir alléguer un motif dans une lettre de rupture et se prévaloir d'une cause réelle et sérieuse.
L'employeur peut mettre fin à la période d'essai en invoquant un motif disciplinaire. Dans ce cas, il doit respecter la procédure disciplinaire.
En l'espèce, aux termes de leurs explications et des moyens qu'elles développent, les parties invoquent tout à la fois une rupture discrétionnaire non motivée, et une rupture fondée sur un motif disciplinaire.
Le courrier du 1er juillet 2009 portant notification de la rupture du contrat de travail de M. X... au cours de la période d'essai est ainsi libellé : " Monsieur X..., Le conseil d'Administration met fin à votre contrat à durée indéterminée, pendant la période d'essai. Le délai de prévenance est de 24 heures, ce dernier s'effectuera le 02/ 07/ 2009, il vous sera rémunéré et donc vous serez dispensé de travailler. "
Le contrat de travail de M. X... s'est donc trouvé rompu le 1er juillet 2009, date à laquelle l'association Raymond Roinard a manifesté son intention d'y mettre fin.
Dès lors que l'employeur n'énonce aucun motif de rupture dans le courrier du 1er juillet 2009 et, a fortiori n'invoque aucune faute pour mettre fin à la période d'essai, il a bien fait usage de la faculté qui lui était ouverte par la loi de rompre unilatéralement le contrat de travail de M. X... au cours de cette période, de façon discrétionnaire, et le motif disciplinaire énoncé dans le courrier du 17 juillet 2009 est sans portée juridique, l'employeur ne pouvant plus, une fois la rupture intervenue sans allégation de motifs, tenter de se situer sur le terrain disciplinaire.
Les moyens développés de ce chef par les parties, notamment celui tiré de l'irrégularité de la procédure, sont donc inopérants.
Si les règles qui régissent la rupture unilatérale du contrat de travail ne sont pas applicables pendant la période d'essai, cette rupture ne doit toutefois pas dégénérer en abus de droit.
Il incombe à M. X..., qui soutient que l'association Raymond Roinard aurait commis un abus de droit, d'en rapporter la preuve.
Est abusive la rupture motivée par des considérations non inhérentes à la personne du salarié et, compte tenu de la finalité de la période d'essai qui doit permettre à l'employeur d'évaluer les compétences du salarié dans son travail, la rupture doit reposer sur des motifs en lien avec l'aptitude professionnelle ou personnelle du salarié à assumer ses fonctions, laquelle s'entend de façon plus large que la stricte capacité professionnelle.
L'évaluation, par l'employeur, de l'aptitude professionnelle du salarié et de ses compétences peut procéder d'autres éléments et circonstances que ceux nés de l'observation directe de l'intéressé dans l'exercice de ses fonctions.
En l'espèce, il résulte suffisamment des termes du courrier du 17 juillet 2009 que l'association Raymond Roinard a bien eu, comme elle le soutient, révélation le 1er juillet 2009 de l'arrêté ministériel pris à l'encontre de M. X... le 3 janvier 2007.
Aux termes de cet arrêté du Ministre de la santé et des solidarités M. X..., alors directeur d'établissement sanitaire et social hors classe, directeur de la maison de retraite de Meslay-du-Maine, était immédiatement suspendu de ses fonctions avec maintien du bénéfice de son traitement, de l'indemnité de résidence, du supplément familial de traitement et des prestations familiales obligatoires, aux motifs suivants : " M. X... compromet gravement par sa présence dans l'établissement la sécurité et le fonctionnement de ce dernier ; le climat social et le fonctionnement de la maison de retraite de Meslay sur Maine doivent être restaurés dans les délais les plus brefs. "
Il est exact que cette mesure administrative n'interdisait pas à M. X... d'occuper un emploi dans le secteur privé, et il est tout aussi exact qu'il bénéficiait de la présomption d'innocence s'agissant des faits de harcèlement moral et de harcèlement sexuel qui lui étaient reprochés dans le cadre de la procédure pénale ayant donné lieu à la prise de l'arrêté du 3 juillet 2007. Il n'en demeure pas moins que la révélation à l'employeur, au cours de la première journée de la période d'essai, de l'existence de cet arrêté, emportant suspension du droit de M. X... d'exercer ses fonctions de directeur d'un établissement sanitaire et social comparable à la maison de retraite " Résidence Beausoleil ", et de ses motifs, desquels il découlait que sa présence dans ce type d'établissement était de nature à en compromettre gravement la sécurité et le fonctionnement, et à en dégrader le climat social, ont légitimement permis à l'association Raymond Roinard de considérer, non seulement, que l'intimé ne présentait pas les aptitudes et qualités professionnelles requises pour assurer la direction de la maison de retraite de Meslay-du-Maine, notamment sur le plan des relations humaines et de l'organisation de l'établissement, mais en outre, que sa présence était de nature à représenter un danger pour celui-ci et son fonctionnement. Il suit de là que la rupture prononcée le 1er juillet 2009 est bien motivée par des considérations professionnelles portant sur l'aptitude professionnelle de M. X... à assumer, dans l'intérêt de l'association Raymond Roinard, la direction de la maison de retraite de Miré, " Résidence Beausoleil ".
Si la rupture est certes intervenue brutalement, dès le premier jour de la période d'essai, ces circonstances étaient justifiées par la gravité de la décision administrative elle-même, par la gravité de ses motifs de nature, pour l'employeur, à mettre en oeuvre le principe de précaution, et par la circonstance que M. X... avait caché à l'association Raymond Roinard l'existence de cet arrêté, et avait même menti dans l'élaboration de son curriculum vitae en le rédigeant dans ces termes : " Parcours professionnel : C-Directeur Maison de retraite-E. H. P. A. D. depuis juillet 2000 à novembre 2007 ", alors qu'il était suspendu de ses fonctions depuis janvier 2007, et ne les exerçait donc pas, ce que cette formulation dissimulait ;
Il en résulte que la rupture n'a pas été mise en oeuvre de façon intempestive, avec une légèreté blâmable ou dans l'intention de nuire à M. X....
L'association Raymond Roinard a agi de bonne foi, considérant que M. X... avait manqué à son obligation de loyauté à son égard, alors qu'elle le recrutait comme directeur, avec un statut de cadre et, dans les termes du contrat, un " haut niveau de responsabilité " ainsi qu'une " autonomie de décision, notamment dans le cadre de la délégation de pouvoirs qui lui est consentie ".
Ce comportement déloyal du salarié, qui a sciemment caché sa position administrative à l'association Raymond Roinard et l'arrêté de suspension le concernant, sans pouvoir ignorer qu'ils étaient de nature à compromettre son embauche, a été un élément d'appréciation par l'employeur des qualités professionnelles de M. X..., lequel est en conséquence mal fondé, pour l'ensemble des motifs énoncés, à soutenir que la rupture de son contrat de travail en cours de période d'essai procède d'un abus de droit.
Infirmant le jugement en ce qu'il a dit la rupture de la période d'essai par l'association Raymond Roinard abusive, la cour déboute M. X... de sa demande en dommages et intérêts, et de sa demande à titre d'indemnité de préavis, l'article L1231-1 du code du travail stipulant au surplus que les dispositions légales afférentes à la rupture du contrat de travail à durée indéterminée ne sont pas applicables à la période d'essai, aucune indemnité de préavis n'étant par conséquent due au salarié lors de la rupture en cours d'essai, fût-elle injustifiée, mais de seuls dommages et intérêts. Sur les frais irrépétibles et les dépens
Les dispositions du jugement afférentes au paiement des dépens, et celles portant sur la demande formée par M. X... en application de l'article 700 du code de procédure civile sont infirmées, M. X... étant condamné à payer les dépens de première instance et étant débouté de sa demande au titre des frais irrépétibles de première instance ; succombant à l'instance d'appel, M. X... est condamné à en payer les dépens ; sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile quant à ses frais irrépétibles d'appel, est rejetée.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire
INFIRME en toutes ses dispositions le jugement du conseil de prud'hommes d'Angers du 27 août 2010 ;
statuant à nouveau :
DIT que la rupture par l'association Raymond Roinard de la période d'essai du contrat de travail du 25 juin 2009 signé avec M. X... n'a pas été abusive ;
DEBOUTE M. X... de sa demande en dommages et intérêts et de sa demande à titre d'indemnité de préavis ;
DEBOUTE M. X... de sa demande formée en application de l'article 700 du code de procédure civile quant à ses frais irrépétibles de première instance ;
CONDAMNE M. X... aux entiers dépens de première instance ;
Y ajoutant,
DEBOUTE M. X... de sa demande formée en application de l'article 700 du code de procédure civile quant à ses frais irrépétibles d'appel ;
CONDAMNE M. X... aux entiers dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Sylvie LE GALLCatherine LECAPLAIN-MOREL