ARRÊT N CLM/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 02403.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 27 Août 2010, enregistrée sous le no 09/ 01941
ARRÊT DU 28 Août 2012
APPELANTE :
S. A. S. AXODE 7 rue alexandre Fleming Technopole d'Angers 49000 ANGERS
représentée par Maître Edouard FOURNIER, substituant Maître Didier LARESCHE (cabinet Ernst et Young), avocat au barreau de LYON
INTIMEE :
Madame Stéphanie X... ...49000 ANGERS
présente, assistée de Maître Bertrand CREN (SCP BDH AVOCATS), avocat au barreau d'ANGERS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Mai 2012 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller
Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier
ARRÊT : prononcé le 28 Août 2012, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE :
La société AXODE, dont le dirigeant est M. Nicolas Y..., et qui emploie habituellement au moins 11 salariés, conçoit et fabrique des systèmes de vision industrielle. Son siège social est situé à Lunel (34). Elle dispose également d'un établissement à Angers et d'un établissement à Singapour et il ne fait pas débat qu'elle appartient à un groupe duquel relève également la société AXODE Corporation, implantée à Chicago (USA).
Suivant contrat de travail à durée déterminée du 13 octobre 1999 à effet au 25 octobre suivant, la société AXODE a engagé Mme Stéphanie A..., devenue épouse X..., en qualité de technicien électronique niveau IV, échelon 1, coefficient 255, pour une durée de six mois, soit jusqu'au 24 avril 2000, moyennant un horaire hebdomadaire de 39 heures.
Le 25 avril 2000, les parties ont conclu un nouveau contrat de travail à durée déterminée à effet du même jour, pour une durée de six mois expirant le 24 octobre 2000, aux termes duquel Mme X... était embauchée en qualité de technicien électronique, toujours pour un horaire mensuel de 39 heures, son lieu de travail demeurant à Angers.
Suivant contrat de travail à durée indéterminée du 25 octobre 2000 à effet au même jour, la société AXODE a embauché Mme Stéphanie X... en qualité de technicien électronique avec la même classification que celle stipulée dans le premier contrat de travail à durée déterminée, moyennant un horaire hebdomadaire de 39 heures et un salaire brut mensuel de 9 500 francs, le lieu de travail étant toujours fixé à l'établissement d'Angers.
La convention collective applicable est la convention collective des industries métallurgiques, mécaniques, électriques, électroniques, connexes et similaires de Maine et Loire.
En janvier 2004, Mme Stéphanie X... a été promue " technicienne électronique, responsable qualité, responsable d'affaires ", avec le statut de cadre autonome.
Après avoir été convoquée, par lettre du 10 mars 2008, à un entretien préalable fixé au 25 mars suivant, par courrier recommandé du 22 avril 2008, Mme X... s'est vue notifier un avertissement pour abus de fonction, tenant au fait qu'elle avait demandé à une salariée nouvellement embauchée en qualité de contrôleur de gestion, de " justifier publiquement de son embauche ".
Mme X... a contesté cette sanction et en a sollicité l'annulation par courrier recommandé du 28 avril 2008, demande à laquelle l'employeur a opposé un refus par lettre du 10 mai suivant.
Mme X... a été placée en arrêt de travail pour maladie à compter du 28 avril 2008. A l'issue des deux examens des 20 et 26 mai 2008, seul le second étant qualifié de visite de reprise, le médecin du travail a mentionné : " essai de reprise, à revoir ultérieurement ".
Le 2 juin 2008, elle a saisi le conseil de prud'hommes aux fins d'annulation de l'avertissement du 22 avril 2008 et paiement de dommages et intérêts. Après vaine tentative de conciliation du 25 juin 2008, cette instance a donné lieu à un retrait du rôle le 15 octobre suivant.
Entre le 16 juin et le 26 septembre 2008, Mme X... a bénéficié d'un bilan de compétence quelques heures par mois.
Le 5 novembre 2008, elle a été placée en arrêt de travail. Lors de l'examen de reprise du 21 novembre 2008, le médecin du travail a conclu que la salariée était " inapte à la reprise de tout poste dans l'entreprise " et devait être revue dans un délai de quinze jours. A l'issue du second examen de reprise intervenu le 10 décembre 2008, il a conclu : " Après visite et étude du poste de travail et entretien avec M. Y... le lundi 8/ 12/ 08, inapte définitif à tout poste dans l'entreprise. ".
Après avoir été convoquée, par lettre du 2 janvier 2009, à un entretien préalable fixé au 13 janvier suivant, Mme Stéphanie X... s'est vue notifier son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement, par lettre du 16 janvier 2009.
Le 16 décembre 2009, elle a sollicité du greffe du conseil de prud'hommes d'Angers le rétablissement de l'affaire retirée du rôle le 15 octobre 2008 et, outre l'annulation de l'avertissement, elle a sollicité la requalification du CDD du 13 octobre 1999 en contrat de travail à durée indéterminée, un rappel de salaire pour heures supplémentaires, des dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et retrait des responsabilités, et elle a élevé diverses prétentions à l'appui de sa contestation du licenciement.
Par jugement du 27 août 2010 auquel il est renvoyé pour un ample exposé, le conseil de prud'hommes d'Angers a :- déclaré prescrite la demande de requalification en contrat de travail à durée indéterminée du contrat de travail à durée déterminée du 13 octobre 1999 ;- débouté Mme X... de ses demandes d'annulation de l'avertissement du 22 avril 2008 et de dommages et intérêts pour exercice abusif du pouvoir disciplinaire, de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, de ses demandes indemnitaires pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et travail dissimulé ;- condamné la société AXODE à lui payer la somme de 10 541, 97 € à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires et repos compensateur ;- rappelé que le jugement bénéficie de l'exécution provisoire de plein droit dans les conditions de l'article R. 1454-28 du code du travail et, à cet effet, a fixé la moyenne mensuelle des trois derniers mois de salaire à la somme de 2 710 € ;- condamné la société AXODE à payer à Mme Stéphanie X... une indemnité de procédure de 1 500 € et à supporter les dépens.
Mme X... et la société AXODE ont reçu notification de ce jugement respectivement les 4 et 8 septembre 2010. Cette dernière en a régulièrement relevé appel par lettre recommandée postée le 27 septembre 2010.
Les parties ont été convoquées pour l'audience du 15 novembre 2011 lors de laquelle elles ont sollicité le renvoi de l'affaire qui fut fixé au 14 mai 2012.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Aux termes de ses écritures déposées au greffe le 11 mai 2012, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, la société AXODE demande à la cour :
- d'infirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives au rappel de salaire pour heures supplémentaires et repos compensateur et de débouter Mme X... de ce chef de prétention ;- de confirmer le jugement en toutes ses autres dispositions, notamment en ce qu'il a considéré le licenciement pour inaptitude régulier et fondé ; de débouter Mme X... de l'ensemble de ses prétentions formées sur appel incident ;- de la condamner à lui payer la somme de 3 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.
La société appelante soutient que la demande de requalification du CDD du 13 octobre 1999 est irrecevable comme prescrite pour avoir été formée plus de cinq ans après la conclusion de ce contrat, ce délai de prescription étant, selon elle, déjà en vigueur avant la loi du 17 juin 2008, de sorte qu'aucune mesure transitoire ne trouve à s'appliquer. Elle ajoute qu'en tout état de cause, la relation de travail s'étant poursuivie en CDI à l'arrivée du terme du CDD litigieux, la salariée n'a subi aucun préjudice.
A la demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires, l'employeur oppose qu'il n'a jamais demandé à Mme X... d'en réaliser, qu'il n'est pas justifié de son accord à cet égard et que l'examen des agendas de la salariée ruine sa thèse en ce qu'ils mentionnent des rendez-vous personnels et qu'il n'en ressort pas que des heures supplémentaires aient été accomplies. Il estime que les relevés d'heures produits et les mentions sur les agendas sont fantaisistes et établis pour les besoins de la cause et d'une prétention de pure opportunité. Il soutient faire la preuve des heures de travail effectivement accomplies par la production des " récapitulatifs d'imputation des heures " de Mme X... qu'il verse aux débats, lesquels, selon lui, correspondent aux heures de travail qu'elle a déclarées et effectivement réalisées et excluent toute heure supplémentaire. S'agissant de la demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé, il argue de ce que la preuve de l'élément intentionnel requis par la loi fait défaut.
Il soutient que l'avertissement est parfaitement justifié en ce que la demande faite par Mme X... à Mme B..., nouvellement embauchée comme contrôleur de gestion, de fournir des précisions à l'ensemble de l'entreprise au sujet du contenu de son poste était injustifée, déplacée à l'égard de sa collègue de travail, désobligeante pour l'employeur, et qu'elle caractérise un abus de fonction.
La société AXODE conteste que Mme X... ait été reléguée à des tâches subalternes en mai 2008, que son poste ait été vidé de l'essentiel de ses fonctions, que son emploi sur Angers ait été supprimé et que le site lui-même ait fermé. Elle dénie par conséquent toute gestion déloyale du contrat de travail de sa part et argue de ce que l'intimée ne rapporte pas la preuve des fautes qu'elle allègue.
S'agissant du licenciement, la société appelante oppose qu'il est fondé par une cause réelle et sérieuse liée, et elle soutient avoir rempli son obligation de reclassement, y compris en direction de ses filiales situées à l'étranger. Elle argue à cet égard de ce que Mme X... n'était pas en mesure d'être mutée à l'étranger faute pour elle de parler couramment l'anglais et elle ajoute que, M. Nicolas Y... étant le président du groupe AXODE, il était informé de l'absence de poste disponible aux Etats Unis (2 salariés) et à Singapour (bureau de représentation dépourvu de la personnalité morale où se trouve un seul salarié) sans qu'il soit nécessaire qu'il s'écrive à lui-même. La société AXODE conteste enfin que l'inaptitude de Mme X... trouve son origine dans un comportement fautif de sa part et elle souligne que, dès le mois de mai 2007, cette dernière a rencontré des difficultés pécuniaires qui l'ont conduite à solliciter régulièrement des avances sur salaire substantielles. Enfin, elle estime que l'intimée ne rapporte pas la preuve du préjudice qu'elle invoque.
Aux termes de ses conclusions enregistrées au greffe le 7 mai 2012, soutenues oralement à l'audience devant la cour, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, formant appel incident, Mme Stéphanie X... demande à la cour :
- de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives au principe du rappel de salaire pour heures supplémentaires, et en ce qu'il lui a alloué la somme de 1 500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;- de le réformer pour le surplus ;- d'annuler l'avertissement du 22 avril 2008 en ce qu'il est abusif et injustifié ;- de déclarer son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;- de condamner la société AXODE à lui payer les sommes suivantes : ¤ 2 500 € pour exercice abusif du pouvoir disciplinaire, ¤ 2 710 € d'indemnité de requalification du CDD en CDI, ¤ 4 172, 83 € à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires du chef de la période écoulée du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006, outre 417, 28 € de congés payés afférents, ¤ 16 260 € de dommages et intérêts pour travail dissimulé, ¤ 10 000 € pour exécution déloyale du contrat de travail et retrait des responsabilités, ¤ 8 130 € d'indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés afférents, ¤ 25 000 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;- de condamner la société AXODE à lui payer une indemnité de procédure de 2 500 € en cause d'appel, de la débouter elle-même de ce chef de prétention et de la condamner aux entiers dépens.
Au soutien de la demande de requalification du CDD du 13 octobre 1999, Mme X... argue de ce qu'il ne contient aucune motif de recours. Elle conteste la fin de non-recevoir opposée, soutenant que la prescription applicable était trentenaire jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 et que son action est recevable en vertu des dispositions transitoires accompagnant cette réforme.
A l'appui de sa demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires, elle fait valoir que le forfait/ jours mentionné sur ses bulletins de salaire à compter de janvier 2004 lui est inopposable faute d'avoir donné lieu à un accord écrit de sa part ; qu'elle étaie sa demande par la production d'un décompte, établi semaine par semaine, des heures de travail qu'elle accomplies au cours de la période litigieuse, corroboré par ses agendas ; que les critiques opposées par l'employeur à ces pièces sont aussi inopérantes que mal fondées, et qu'il ne produit aucun justificatif des horaires de travail effectivement réalisés, les " récapitulatifs d'imputation des heures " qu'il verse aux débats n'étant, selon elle, nullement des relevés des heures de travail effectivement réalisées par les salariés mais un document interne permettant à chaque salarié de déclarer le temps qu'il a passé à diverses tâches bien précises. L'intimée admet qu'elle avait, à tort, omis de déduire de sa réclamation les 35 jours de RTT pris entre le 1er janvier 2004 et le 31 décembre 2006 et, compte tenu de ces jours représentant 245 heures de travail, elle ramène sa demande à la somme principale de 4 172, 83 €.
S'agissant des dommages et intérêts pour travail dissimulé, elle soutient que l'intention de l'employeur de se soustraire au paiement des heures supplémentaires est caractérisée, d'une part, par la mention d'un forfait/ jours illicite sur ses bulletins de salaire à compter de 2004, d'autre part, par le non-respect de son obligation d'établir les documents nécessaires au décompte de la durée du travail.
Pour conclure à l'annulation de l'avertissement prononcé à son égard le 22 avril 2008, Mme X... fait valoir que cette sanction est injustifiée, dépourvue de motif sérieux et qu'elle procède d'un abus de l'usage du pouvoir de direction à l'origine pour elle d'un préjudice indemnisable.
A l'appui de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, l'intimée invoque le caractère abusif de l'avertissement prononcé le 22 avril 2008, le retrait de ses responsabilités qui serait intervenu à sa reprise du travail le 26 mai 2008 et sa relégation à des tâches subalternes consistant essentiellement, selon elle, à coller des étiquettes.
Au soutien de ses prétentions formées pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, elle fait valoir, tout d'abord, que son inaptitude et l'impossibilité de son reclassement trouvent leur origine dans une faute de l'employeur tenant au caractère injustifié et abusif de l'avertissement qui lui a été infligé, et au retrait de ses responsabilités entraînant une dégradation de ses conditions de travail et de son état de santé. En second lieu, elle invoque le manquement de l'employeur à son obligation de reclassement arguant de ce qu'elle n'a reçu aucune proposition à cet égard, de ce que l'employeur ne justifie pas de recherches qu'il aurait accomplies, notamment, d'aucune recherche en direction des autres sociétés du groupe situées à l'étranger.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
1) Sur la requalification du CDD du 13 octobre 1999 :
Attendu qu'avant l'entrée en vigueur, le 19 juin 2008, de la loi no 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile publiée au Journal officiel du 18 juin 2008, l'action indemnitaire exercée sur le fondement de l'article L. 122-3-13, alinéa 2, ancien du code du travail, devenu l'article L. 1245-2 du même code était soumise à la prescription trentenaire de l'article 2262 ancien du code civil ;
Attendu que la loi nouvelle, en ses dispositions codifiées à l'article 2224 du code civil, a réduit ce délai de prescription à cinq ans et elle a institué, en son article 26, repris à l'article 2222 du code civil, des dispositions transitoires aux termes desquelles : " En cas de réduction de la durée du délai de prescription ou du délai de forclusion, ce nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure. " ;
Qu'il s'ensuit que les dispositions de la loi nouvelle qui réduisent un délai se sont appliquées à compter du 19 juin 2008 aux prescriptions, pour le temps qu'il leur restait à courir, sans que celui-ci puisse excéder les limites fixées par la loi nouvelle ;
Attendu, le CDD litigieux ayant été conclu le 13 octobre 1999, soit sous l'empire de la loi ancienne, que Mme Stéphanie X... disposait, à compter de cette date, d'un délai de 30 ans, soit jusqu'au 13 octobre 2029, pour agir en requalification et paiement d'une indemnité de requalification, de sorte qu'à la date d'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, il lui restait environ 21, 5 années pour exercer son action ; qu'en vertu des dispositions transitoires ci-dessus rappelées, à compter du 19 juin 2008, date d'entrée en vigueur de la loi nouvelle réduisant son délai de prescription, elle a disposé de cinq ans pour exercer son action ; que, dès lors qu'elle a saisi le conseil de prud'hommes d'Angers de ce chef de prétention par lettre datée du 14 décembre 2009, enregistrée au greffe le 16 décembre suivant, la fin de non-recevoir tirée de la prescription ne peut, par voie d'infirmation du jugement déféré, qu'être rejetée ;
Attendu que tout contrat de travail à durée déterminée doit comporter l'indication précise du motif pour lequel il a été conclu sous peine d'être requalifié en contrat de travail à durée indéterminée en application des dispositions de l'article L. 1245-2 du code du travail ; attendu que Mme X... est bien fondée en sa demande de requalification puisque le contrat de travail à durée déterminée conclu entre elle et la société AXODE le 13 octobre 1999 ne comporte strictement aucun motif de recours à ce type de contrat ;
Et attendu que l'indemnité prévue par l'alinéa 2 de l'article L. 1245-2 en cas de requalification du contrat initial à durée déterminée irrégulier en contrat à durée indéterminée est due au salarié même si la relation de travail s'est poursuivie sous forme d'un contrat à durée indéterminée ;
Attendu que Mme X... est en conséquence bien fondée à solliciter de ce chef la somme de 2 710 €, correspondant au montant de son dernier salaire mensuel, que la société AXODE sera condamnée à lui payer ;
2) Sur la demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires :
Attendu que Mme X... verse aux débats l'ensemble de ses bulletins de salaire du 1er janvier 2003 au 17 avril 2009, date de la fin de la relation de travail ; Attendu qu'il en résulte qu'à la faveur de la réduction de la durée légale du travail, l'horaire hebdomadaire de travail de l'intimée à été ramené à 35 heures, ses bulletins de salaire de l'année 2003 mentionnant un horaire mensuel de 151, 67 heures ;
Attendu qu'à compter du 1er janvier 2004, Mme X... a accédé au statut de cadre, son salaire mensuel brut de base passant de 1 680 € à 1 990 € ; attendu qu'à partir de cette date, ses bulletins de salaire ne mentionnent plus un horaire mensuel de travail de 151, 67 heures, mais un forfait annuel de temps de travail de 217 jours, porté à 218 jours à compter du 1er janvier 2005 pour tenir compte de la journée de solidarité, avec octroi d'un certain nombre de jours par an de réduction du temps de travail ;
Attendu, l'accord exprès de Mme X... pour l'application de ce forfait n'ayant pas été obtenu et formalisé sous forme d'une convention écrite, contrairement aux exigences légales, que le forfait en jours ainsi mis en place lui est, de ce seul fait, inopposable, ce que la société AXODE ne discute d'ailleurs pas, de sorte que la salariée relève des règles du droit commun pour le décompte et la rémunération de ses heures de travail, notamment des heures supplémentaires ;
Attendu que, s'il résulte des dispositions de l'article L 3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties, en cas de litige relatif à l'existence et au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient toutefois au salarié d'étayer sa demande en paiement d'heures supplémentaires par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ;
Attendu qu'à l'appui de sa demande, Mme Stéphanie X... verse aux débats, des tableaux comportant le relevé détaillé du nombre d'heures de travail accomplies, jour par jour, et semaine par semaine, pour toute la période concernée du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006, relevés qui sont corroborés par ses agendas relatifs aux années en cause ; qu'en effet, il ressort du rapprochement de ces pièces que les relevés établis reprennent fidèlement les horaires régulièrement mentionnés par Mme X... sur ses agendas sous forme de traits délimitant le temps de travail de chaque journée, avec l'heure de début de travail et l'heure de fin, et un système de hachures pour délimiter la pause méridienne ; attendu qu'aucun élément objectif ne permet d'accréditer la thèse de l'employeur selon laquelle ces agendas auraient été renseignés pour les besoins de la cause ou falsifiés ; que, si des rendez-vous personnels, notamment médicaux, y sont mentionnés, le rapprochement des agendas et des décomptes établis permet de constater que l'intimée a exclu ces temps de son temps de travail ;
Attendu que ces pièces étayent la demande de Mme X... en ce qu'elles constituent des éléments suffisamment précis auxquels l'employeur peut répondre ;
Attendu, la salariée n'étant pas soumise à un horaire collectif de travail, qu'il incombait à la société AXODE d'établir les documents nécessaires pour le décompte de la durée du travail et ce, conformément aux dispositions de l'article D. 212-21 du code du travail, devenu l'article 3171-8 du même code ; Attendu que cette dernière verse aux débats des documents informatiques qu'elle indique être renseignés par les salariés, qui portent l'indication, dans le chemin informatique : " imputation/ imp chrono. php " et qu'elle " dénomme : " relevés d'imputation des heures " en produisant ceux concernant Mme X... pour la période du 6 janvier 2004 au 20 mars 2006 et ceux concernant trois autres salariés : M. Erwann C...pour la période du 26 janvier au 28 février 2004, M. Martial E...pour la période du 4 janvier au 28 février 2005 et M. Benoît F...pour la période du 2 janvier au 28 février 2006 ; Attendu que ces documents établis en colonnes comportent les rubriques suivantes : " date, jour (lundi, mardi etc...), affaire, commentaire, activité, temps " avec le recours à des codes pour certaines rubriques ; qu'à titre d'exemples, Mme X... a ainsi renseigné le compte la concernant : " date jour affaire commentaire activité temps "- " 24/ 02/ 2005 jeudi C0000 réunion imputation REUN 03 : 00- " 28/ 09/ 2005 mercredi A3157 expédition EMBA 01 : 30 M3136 expédition EMBA 01 : 00 " ;
Que M. Martial E...a quant à lui renseigné les données suivantes :- " 27/ 01/ 2005 jeudi C0000 envoi de fax ACHA 00 : 25- " 21/ 02/ 2005 lundi C0000 rendez-vous Farnell ACHA 01 : 00 C0000 préparationS/ T PREP 01 : 30 " ;
Attendu que pour certains jours, il est mentionné " congés payés " avec le code " CONG " pour une durée de 8 heures (cf M. F...le 2 janvier 2006) ou Mme X... pendant dix jours en août 2005 et cinq jours en décembre 2005 ;
Attendu que, pour certaines journées, le temps relatif aux activités renseignées est de très courte durée ; que la thèse de la société appelante selon laquelle ces relevés correspondraient aux heures de travail journalières effectivement réalisées par les salariés n'apparaît pas plausible en ce qu'y sont mentionnées les périodes de congés et en ce qu'il s'en induirait qu'elle aurait admis de payer très régulièrement ses salariés pour des temps de travail journaliers et mensuels sans rapport avec un temps plein normal ; qu'en outre, les rubriques renseignées sont également sans adéquation avec un prétendu outil informatique destiné à comptabiliser le temps de travail journalier effectif des salariés, à savoir les heures d'entrée et de sortie de l'entreprise, mais apparaissent bien correspondre à l'explication de l'intimée selon laquelle il s'agit d'un outil de gestion interne, destiné à renseigner sur le temps passé par les salariés à l'accomplissement de certaines tâches précises, et utile, notamment, pour la facturation de temps aux clients ;
Attendu que ces : " relevés d'imputation des heures ", seules pièces versées aux débats par la société AXODE, ne sont donc pas de nature à faire la preuve des horaires effectivement réalisés par Mme Stéphanie X... ;
Attendu qu'en cause d'appel, cette dernière établit le décompte de sa créance en déduisant les 35 jours de RTT, représentant 245 heures, dont elle a bénéficié au cours de la période litigieuse ; qu'en considération des 227, 75 heures supplémentaires non récupérées et non rémunérées, justifiant une majoration à 25 %, qu'elle justifie avoir accomplies, et du taux horaire applicable, par voie d'infirmation du jugement entrepris quant au montant de la créance, la société AXODE sera condamnée à payer à Mme Stéphanie X... la somme de 4 172, 83 € à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires outre 417, 28 € de congés payés afférents et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 31 décembre 2009, date à laquelle la société AXODE a accusé réception de la convocation à comparaître devant le conseil de prud'hommes sur remise au rôle de l'instance précédemment introduite par la salariée ;
3) Sur la demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé :
Attendu qu'aux termes de l'article L. 8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé, notamment, le fait pour l'employeur de mentionner, de manière intentionnelle, sur le bulletin de paie, un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail ;
Attendu que l'article L 8223-1 du code du travail, relatif aux droits des salariés en cas de recours par l'employeur au travail dissimulé, dispose qu'" en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire " ;
Attendu, dans la mesure où Mme X... était cadre autonome et jouissait, comme cela résulte des éléments de la cause, notamment de ses agendas, d'une autonomie effective dans l'organisation de son temps, que le fait pour la société AXODE de lui avoir appliqué le système du forfait en jours sans qu'ait été conclue une convention écrite de forfait en jours et d'avoir omis d'établir les documents nécessaires pour le décompte de la durée du travail ne suffit pas à établir le caractère intentionnel de l'absence de mention, sur ses bulletins de salaire, de toutes les heures accomplies au-delà de la durée légale ; qu'en l'absence d'autre élément propre à faire la preuve du caractère intentionnel requis par la loi pour caractériser le travail dissimulé allégué, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté l'intimée de sa demande de dommages et intérêts de ce chef ;
4) Sur la demande d'annulation de l'avertissement :
Attendu qu'en application de l'article L. 1333-1 du code du travail, en cas de litige relatif à une sanction disciplinaire, il appartient au juge prud'homal d'apprécier la régularité de la procédure et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction ; Qu'aux termes de l'article L. 1333-2, le conseil de prud'hommes peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise ;
Attendu qu'il résulte des débats et des pièces produites que le 3 mars 2008, la société AXODE a embauché Mme Emilie B...en qualité de contrôleur de gestion appelé à exercer ses fonctions sur le site de Lunel ; que le 4 mars vers 10h20, Mme Kareen D...-Y..., directeur stratégie au sein de l'entreprise, a adressé un courrier électronique à l'ensemble des salariés de la société afin de les informer de ce recrutement, précisant qu'issue de l'Ecole de commerce de Montpellier et bénéficiant d'une expérience dans l'audit financier au sein du Cabinet Ernst et Young, Mme B...devrait contribuer à l'amélioration du fonctionnement interne et externe de l'entreprise dans le but d'optimiser les coûts et la compétitivité, son travail consistant, dans un premier temps, à faire le point sur les processus internes en vigueur de sorte qu'elle serait amenée à prendre contact avec certains salariés ;
Attendu que le 7 mars 2008 à 13 h 49, Mme B...a elle-même adressé à l'ensemble des salariés de la société AXODE un courrier électronique rappelant qu'elle avait rejoint le site de Lunel le 3 mars précédent et que, dans un premier temps, son travail consistait à prendre connaissance des procédures en vigueur dans l'entreprise dans un objectif d'amélioration et d'optimisation des compétences de chacun ; qu'elle invitait ses collègues à lui faire part de toute doléance, suggestion ou remarque de nature à améliorer le fonctionnement interne et externe ;
Attendu que le 7 mars 2008, Mme Stéphanie X... a pris attache téléphoniquement avec Mme Emilie B...en lui indiquant qu'après réception de son courriel, cinq collègues de travail étaient venues la voir pour lui faire part de leurs interrogations relativement aux chevauchements apparaissant exister entre leurs fonctions respectives, et au risque de suppression de son propre poste que ce recrutement pouvait laisser envisager ; qu'elle lui a donc demandé d'apporter des précisions au sujet de son poste et de sa fonction ;
Attendu que, sans délai, par e-mail intitulé " Précisions ", adressé le 7 mars 2008 à 15h56 à l'ensemble des salariés de l'entreprise, Mme B...a apporté des précisions au sujet du contenu de son poste de contrôleur de gestion en indiquant que sa fonction consistait principalement à donner à la société plus de visibilité sur la rentabilité des projets conduits et elle a détaillé les problématiques auxquelles elle devait faire face en concluant : " J'espère avoir répondu à vos diverses interrogations qu'a suscité mon mail de présentation. Je reste bien sûr, à votre disposition pour toute information, suggestion ou remarque. " ; Attendu que Mme Stéphanie X... a répondu à ce courriel le même jour en ces termes : " merci " ;
Attendu qu'après entretien préalable du 25 mars 2008, par lettre recommandée du 22 avril suivant, la société AXODE a notifié à Mme Stéphanie X... un avertissement, considérant que sa démarche du 7 mars 2008 à l'égard de Mme B..., ayant consisté à demander à cette dernière de justifier publiquement son embauche, était inacceptable et fautive pour procéder d'un abus de fonction, caractériser un comportement déplacé vis à vis de sa collègue de travail, désobligeant à l'égard de la direction qu'elle aurait dû contacter directement, et un manque de discernement en sa qualité de cadre ;
Attendu que, dans le cadre de la présente instance, Mme X... indique que le mail de présentation de Mme Chabannier prêtait à confusion au sujet de leurs fonctions respectives, que certains collègues ont partagé ses interrogations quant à l'avenir de son propre emploi, qu'avant de prendre toute initiative, elle a rencontré son responsable hiérarchique qui " n'a fait aucun commentaire ", qu'il était donc légitime de sa part de demander à Mme B...d'apporter des précisions au sujet de son poste et que c'est submergée par le doute, et afin de lever toute confusion, qu'elle l'a contactée à cette fin, afin aussi de lever toute ambiguïté et polémique au sein de l'entreprise ;
Attendu qu'il résulte des éléments produits que la société AXODE a, par l'intermédiaire de Mme D...-Y..., annoncé sans délai à l'ensemble des salariés le recrutement de Mme Emilie B...en assurant en outre une présentation précise de sa formation, de son expérience passée, de l'intitulé de son poste, et du contenu de ses fonctions générales et plus immédiates ; que Mme B...a elle-même veillé à se présenter en précisant sa mission ;
Attendu qu'il ressort de la fiche de fonctions concernant Mme X..., établie en mars 2004 que ses fonctions de " technicienne électronique, responsable qualité, responsable affaires " recouvraient alors les missions suivantes : " Responsable qualité, responsable normalisations et certifications, responsable des dossiers de fabrication, responsable du design, assurance de la cohérence de gamme, responsable des emballages, validation de la fabrication, contrôle visuel de chaque système, gestion de projets, prise en charge de dossiers produits, support technique téléphonique, responsable du maintien de l'ordre et de la propreté des étagères de test " ;
Attendu que l'on discerne mal à la lecture de cette fiche en quoi ces fonctions, très essentiellement tournées vers les produits, tant au titre de leur fabrication que de leur commercialisation, pouvaient être concurrencées par les fonctions d'un contrôleur de gestion axées sur le contrôle de la gestion financière de l'entreprise, de sa rentabilité, de sa compétitivité ; que, d'ailleurs, pas plus qu'elle ne l'a fait aux termes de l'entretien préalable, dont le procès-verbal signé par elle et le délégué du personnel qui l'assistait, est versé aux débats, Mme X... ne précise dans le cadre de la présente instance, de façon concrète et circonstanciée, en quoi elle pouvait légitimement penser que l'emploi de contrôleur de gestion nouvellement créé à l'issue d'un audit et confié à Mme B...était de nature à faire doublon avec son propre emploi et le menacer ;
Qu'en tout état de cause, à supposer que l'intimée ait pu légitimement nourrir les inquiétudes qu'elle invoque en dépit de l'information générale, complète et précise fournie aux salariés par l'employeur au sujet du recrutement de Mme B..., avec indication de l'objectif dans lequel s'inscrivait cette embauche, et des explications apportées par l'intéressée elle-même, c'est à juste titre que la société AXODE a considéré que le fait pour Mme X... d'interpeller directement sa collègue de travail pour lui demander d'apporter à l'ensemble des salariés des précisions au sujet de son poste afin de dissiper toute ambiguïté et polémique au sein de l'entreprise, caractérisait de sa part un comportement déplacé à l'égard de sa nouvelle collègue de travail et un abus de fonction, autant qu'une attitude désobligeante vis à vis de l'employeur ; qu'à supposer légitimes les inquiétudes invoquées, il appartenait en effet à Mme X... de s'en ouvrir directement auprès de ce dernier en sollicitant ses explications, et non d'amener ainsi la personne nouvellement recrutée à fournir, de façon publique et générale, des précisions sur ses fonctions et, de facto, les raisons de son recrutement, s'agissant d'un emploi nouvellement créé dans l'entreprise ;
Attendu que l'avertissement prononcé le 22 avril 2008 apparaît donc justifié et proportionné à la faute commise ; que le jugement déféré sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté Mme X... de ses demandes d'annulation de cette sanction et de paiement de dommages et intérêts ;
5) Sur la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et retrait des responsabilités :
Attendu qu'il résulte des pièces versées aux débats qu'entre octobre 1999, date de son embauche, et janvier 2009, date de son licenciement, Mme X... a régulièrement évolué au sein de l'entreprise puisque sa rémunération n'a cessé d'augmenter, passant de 7 500 francs au moment de la conclusion du premier CDD à 9 500 francs lors de la conclusion du CDI en octobre 2000, pour passer de 1 680 € en décembre 2003 à 1 990 € en janvier 2004 au moment où la salariée a accédé au statut de cadre, le salaire de base s'établissant à 2 710 € dans le dernier état de la relation de travail fin 2008/ début 2009 ;
Attendu que la société appelante a favorisé cette évolution positive en prenant en charge diverses formations en faveur de Mme X... : en 2002, formation à l'assurance qualité et nouvelle norme ISO 9000 ; au cours de l'année universitaire 2004/ 2005, une formation à l'IUT d'Angers ayant débouché sur l'obtention d'une licence professionnelle " industrie agro-alimentaire, spécialisation qualité ", ainsi qu'une formation initiale à l'audit des systèmes de management qualité, sécurité, environnement ; attendu que la société AXODE l'a inscrite à la session 2004/ 2005 du " Club qualité " géré par la CCI d'Angers ; que le 3 avril 2008, elle a accueilli favorablement sa demande en vue d'effectuer un bilan de compétences ;
Attendu, l'avertissement ayant été jugé justifié et proportionné, que l'intimée est mal fondée à invoquer cet épisode pour asseoir sa demande indemnitaire pour exécution fautive ou déloyale du contrat de travail ;
Attendu que les pièces qu'elle verse aux débats ne font nullement la démonstration de ce qu'elle aurait été reléguée à des fonctions subalternes en mai 2004 et que son poste aurait été vidé de sa substance et n'accréditent en rien cette thèse ; que, notamment, il ressort du tableau constitutif de la pièce no 17 qu'elle était en charge du contrôle qualité de l'essentiel des produits, ce qui correspondait bien à son coeur de métier, et que ce tableau ne renvoie nullement à l'exécution de tâches purement matérielles du type emballage ou collage d'étiquettes, mais au contraire à des fonctions de responsabilité tels le contrôle de l'autorisation de l'expédition, le contrôle de la conformité de la fourniture préparée par rapport à la fiche d'affaires/ mission, le contrôle qualitatif, la signature des bons de livraison, de prêt, d'échange, de location, les transmissions de données, notamment au service commercial etc... ; Attendu qu'il résulte des pièces produites par l'appelante, notamment de mails, que Mme X... est bien restée saisie de ses responsabilités au titre du contrôle qualité au-delà du mois de mai 2008 puisque, par exemple, le 14 novembre 2008, M. G..., responsable du site d'Angers, faisait suite à leur " réunion qualité " du même jour en lui adressant la synthèse des actions qu'elle devrait piloter ; qu'aux termes d'un mail du 6 novembre 2008 adressé à Mme X... et à M. G..., M. Nicolas Y..., le chef d'entreprise, relatait une étude faite par l'intimée au cours de l'été sur les mousses à expansion destinées à permettre l'emballage d'écrans, le feu vert donné à cette dernière pour lancer la commande d'un premier lot de ce type de mousse et il lui demandait d'établir un bilan d'utilisation de ces mousses et de lui fournir une estimation de volume pour procéder à l'achat d'une valise particulière ; que les éléments produits par l'employeur contredisent les allégations de la salariée quant à une prétendue mise à l'écart et relégation à des tâches subalternes ;
Attendu que les deux attestations produites par cette dernière sont également contredites par les pièces objectives desquelles il ressort que Mme X... avait bien conservé ses fonctions, et elles ne sont en outre pas probantes en ce que les deux témoins, anciens salariés de la société AXODE, procèdent en termes généraux et par voie d'affirmation sans circonstancier leurs propos ;
Attendu que, faute pour l'intimée de rapporter la preuve des manquements et de l'exécution déloyale du contrat de travail qu'elle allègue envers l'employeur, et celle de sa mise à l'écart, et d'apporter le moindre élément propre à accréditer cette thèse, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts de ce chef ;
6) Sur le licenciement :
Attendu que la lettre de licenciement adressée à Mme Stéphanie X... le 16 janvier 2009, et qui fixe les termes du litige, est ainsi libellée :
" Madame,... Par la présente nous vous notifions votre licenciement pour les motifs énoncés ci-après. Ces motifs se rapportent à l'impossibilité de vous reclasser, au sein de notre société, suite à l'inaptitude à occuper votre poste déclarée par le médecin du travail. Nous vous rappelons qu'à la suite d'arrêts de travail du 05/ 11/ 08 au 20/ 11/ 08 inclus, et du 24/ 11/ 08 au 15/ 12/ 08 inclus, vous avez bénéficié d'un examen par le médecin du travail afin d'apprécier votre aptitude à reprendre votre emploi. Lors de la première visite de reprise en date du 21 novembre 2008, le médecin du travail a émis l'avis médical suivant : « Inapte à la reprise à tout poste dans l'entreprise, à revoir dans 15 jours. " Dans le cadre de notre obligation de reclassement, nous avons invité le médecin du travail à étudier votre poste de travail, ainsi que les conditions de travail dans l'entreprise. A la suite de ce rendez-vous, qui s'est tenu le 8 décembre 2008, le médecin du travail a émis, lors d'une seconde visite en date du 10 décembre 2008, l'avis médical suivant : « Après visite et étude du poste de travail et entretien avec Monsieur Y... le lundi 8 décembre 2008. Inapte définitif à tout poste dans l'entreprise. » A la suite à ces visites et toujours pour satisfaire au mieux notre obligation de reclassement, nous avons par courrier en date du 18 décembre 2008, sollicité des précisions auprès du médecin du travail, formulées ainsi qu'il suit : « Comme vous le savez, nous devons rechercher, et ce même en cas d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise, s'il est possible de lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités compte tenu de vos conclusions écrites et des indications que vous formulez sur l'aptitude du salarié à exercer une des tâches existant dans l'entreprise et aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en œ uvre de mesures telles que mutation, transformation de poste de travail ou aménagement du temps de travail. L'activité de la société se décompose ainsi qu'il suit :- administratif, comprenant les postes suivants : comptabilité, contrôle de gestion, secrétariat et standard ;- commercial, comprenant les postes suivants : ingénieur Technico-Commercial, responsable de zone export ;- production, comprenant les postes suivants : monteur-câbleur en électronique, 1 responsable qualité (poste actuel de Madame Stéphanie X...), technicien d'installation, responsable de production ;- bureau d'études, comprenant les postes suivants : ingénieur développement logiciels, ingénieur développement électronique ;- SAV réparation, comprenant les postes suivants : technicien support technique téléphonique, technicien réparation électronique. A ce jour, nous ne disposons d'aucun poste disponible, si ce n'est un poste d'ingénieur développement logiciel traitement d'image au sein du bureau d'études, mais la salariée n'a ni la formation ni l'expérience professionnelle pour occuper ce poste. En conséquence, le seul reclassement possible serait d'aménager son poste à son aptitude par éventuellement une réduction de sa durée du travail. Nous sommes ouverts à toutes propositions. Vous vous remercions de nous faire parvenir votre réponse par retour de courrier afin d'informer la salariée au plus vite de sa situation. » Par courrier en date du 24 décembre 2008, le médecin du travail nous a répondu en ces termes : « Je vous confirme qu'elle est inapte définitif à tout poste dans l'entreprise ». En conséquence, cela signifiait qu'il estimait qu'aucun reclassement n'était possible. Aussi, nous avons informé le médecin du travail par lettre recommandée avec avis de réception en date du 31 décembre 2008 que nous étions contraints d'engager une procédure de licenciement, étant dans l'impossibilité de vous reclasser. C'est pour l'ensemble de ces raisons que nous vous notifions votre licenciement. " ;
Attendu que, pour voir juger son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, Mme X... soutient, tout d'abord, que son inaptitude résulterait d'une faute de son employeur à l'origine de la dégradation de son état de santé, et tenant, d'une part, dans le caractère injustifié et abusif de l'avertissement notifié le 22 avril 2008, d'autre part, dans le retrait de ses responsabilités ; Mais attendu, comme la cour l'a précédemment retenu aux termes des motifs qui précèdent, que l'intimée est mal fondée à invoquer de ces chefs des
comportements fautifs de la part de la société AXODE puisque l'avertissement litigieux a été jugé justifié et exclusif de tout abus dans l'exercice du pouvoir disciplinaire, et que la salariée ne produit aucune pièce de nature à accréditer sa thèse d'un retrait de ses responsabilités ou d'une mise à l'écart à compter du mois de mai 2008, pas plus qu'elle ne justifie d'une attitude déloyale de la part de l'employeur dans l'exécution du contrat de travail ; que ce moyen doit donc être écarté ;
Attendu qu'aux termes de l'article L. 1226-2 du code du travail, " Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. " ; Que ce texte ajoute que la proposition doit prendre en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches dans l'entreprise, et que l'emploi proposé doit être aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ;
Attendu qu'il suit de là que, quoique reposant sur une inaptitude physique d'origine non professionnelle régulièrement constatée par le médecin du travail, le licenciement n'est légitime que pour autant que l'employeur aura préalablement satisfait à l'obligation de reclassement mise à sa charge par ce texte, la déclaration d'inaptitude définitive à tous postes de l'entreprise faite par le médecin du travail ne le dispensant pas de son obligation de rechercher par tous moyens le reclassement du salarié concerné ;
Attendu que l'obligation de reclassement des salariés physiquement inaptes mise à la charge de l'employeur s'analyse en une obligation de moyen renforcée, dont le périmètre s'étend à l'ensemble des sociétés du même secteur d'activité avec lesquelles l'entreprise entretient des liens ou compose un groupe, dont la localisation et l'organisation permettent la permutation de tout ou partie du personnel, et il appartient à l'employeur, débiteur de cette obligation, de démontrer par des éléments objectifs qu'il y a satisfait et que le reclassement du salarié par le biais de l'une des mesures prévues par la loi s'est avéré impossible, soit en raison du refus d'acceptation par le salarié d'un poste de reclassement adapté à ses capacités et conforme aux prescriptions du médecin du travail, soit en considération de l'impossibilité de reclassement à laquelle il se serait trouvé confronté ; Attendu qu'il ne fait pas débat que la société AXODE appartient à un groupe ; que ses recherches de reclassement devaient donc s'étendre à la société AXODE corporation implantée à Chicago (USA) et, à supposer même qu'il s'agisse d'un simple établissement dépourvu de la personnalité morale, au bureau de représentation situé à Singapour ;
Attendu que la société AXODE procède par voie d'affirmation pour soutenir qu'elle aurait procédé à des recherches de reclassement, qu'aucun poste n'était disponible en France ou à l'étranger, que le médecin du travail aurait refusé la seule " proposition de reclassement possible " ; Que la circonstance que le médecin du travail lui ait confirmé, par lettre du 24 décembre 2008, que Mme X... était définitivement inapte à tout poste dans l'entreprise n'était pas de nature à la dispenser de procéder à des recherches effectives, sérieuses et loyales dont elle doit être en mesure de justifier ; or attendu que la société AXODE ne produit strictement aucune pièce aux débats pour tenter de justifier d'une quelconque recherche effective, loyale et sérieuse de reclassement de Mme X... ni de l'impossibilité de reclassement à laquelle elle se serait heurtée ; que, notamment, elle ne produit ni le registre d'entrée et de sortie du personnel, ni de justificatif sur l'état des effectifs à Chicago et à Singapour ; et attendu que l'indication qu'elle a formulée le 18 décembre 2008, au mode conditionnel, à l'intention du médecin du travail selon laquelle " le seul reclassement possible serait d'aménager son poste à son inaptitude par éventuellement une réduction de sa durée du travail. " ne constitue pas une proposition de reclassement ; qu'en tout état de cause, il appartenait à l'employeur, indépendamment de la réponse faite par le médecin du travail, de soumettre cette proposition à Mme X..., ce qu'il n'a pas fait ;
Que, faute pour la société AXODE de rapporter la preuve d'une exécution de l'obligation de reclassement à sa charge, le licenciement de Mme Stéphanie X... doit, par voie d'infirmation du jugement déféré, être déclaré dépourvu de cause réelle et sérieuse ; Attendu, la salariée comptant, au moment de son licenciement, plus de deux ans d'ancienneté (9 ans et 3 mois) dans une entreprise employant au moins onze salariés, que trouvent à s'appliquer les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail selon lesquelles l'indemnité à la charge de l'employeur ne peut pas être inférieure aux salaires des six derniers mois, étant précisé que Mme X... ne sollicite pas sa réintégration dans l'entreprise ; Attendu que cette dernière était âgée de 36 ans au moment de la rupture, qu'elle justifie avoir perçu l'allocation de retour à l'emploi à compter du 19 mars 2009, puis l'allocation spécifique de solidarité à compter du 17 février 2011, avant de conclure, le 26 novembre 2011, un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel avec la société Trélazé Drive qui l'a embauchée en qualité d'équipier polyvalent moyennant un salaire mensuel brut de base de 783 € ; Attendu qu'en considération de ces éléments, de la situation particulière de Mme X..., de ses capacités à retrouver un emploi, de son ancienneté dans l'entreprise, la cour dispose des éléments nécessaires pour fixer à 22 500 € l'indemnité que la société AXODE sera condamnée à lui payer à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, cette somme étant au moins égale aux salaires des six derniers mois ;
Attendu, le licenciement étant jugé dépourvu de cause réelle et sérieuse pour manquement de la société AXODE à son obligation de reclassement, que Mme X... peut prétendre au paiement de l'indemnité compensatrice de préavis ; que la durée de ce préavis étant en l'occurrence de trois mois, l'appelante sera condamnée à payer de ce chef à l'intimée la somme de 8 130 € outre 813 € de congés payés afférents qu'elle réclame, et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 31 décembre 2009, date à laquelle la société AXODE a accusé réception de la convocation à comparaître devant le conseil de prud'hommes sur remise au rôle de l'instance précédemment introduite par la salariée ;
Attendu qu'en application des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail, il convient d'ordonner le remboursement, par la société AXODE au Pôle emploi des Pays de Loire, des indemnités de chômage versées à Mme Stéphanie X... du jour de son licenciement au jour du présent arrêt, et ce, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage ;
7) Sur les dépens et frais irrépétibles :
Attendu que, succombant amplement en son recours, la société AXODE sera condamnée aux dépens d'appel et à payer à Mme Stéphanie X..., en cause d'appel, une indemnité de procédure de 1 800 €, le jugement déféré étant confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles ;
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement entrepris en ses dispositions relatives à la demande d'annulation de l'avertissement prononcé le 22 avril 2008, au travail dissimulé, à la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et retrait des responsabilités, aux dépens et aux frais irrépétibles ;
L'infirme pour le surplus et, statuant à nouveau,
Rejette la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande de requalification en contrat de travail à durée indéterminée du contrat de travail à durée déterminée conclu le 13 octobre 1999 ;
Requalifie ce contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée et condamne la société AXODE à payer à Mme Stéphanie X... la somme de 2710 € à titre d'indemnité de requalification avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
La condamne à payer à Mme Stéphanie X... la somme de 4 172, 83 € de rappel de salaire pour heures supplémentaires outre 417, 28 € de congés payés afférents et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 31 décembre 2009 ;
Déclare le licenciement de Mme X... dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamne la société AXODE à lui payer les sommes suivantes :-8 130 € d'indemnité compensatrice de préavis outre 813 € de congés payés afférents et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 31 décembre 2009 ;-22 500 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
Ajoutant au jugement déféré,
Ordonne le remboursement, par la société AXODE au Pôle emploi des Pays de Loire, des indemnités de chômage versées à Mme Stéphanie X... du jour de son licenciement au jour du présent arrêt, et ce, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage ;
Condamne la société AXODE à payer à Mme Stéphanie X... la somme de 1 800 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel et la déboute elle-même de ce chef de prétention ;
La condamne aux dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Sylvie LE GALLCatherine LECAPLAIN-MOREL