COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT N
EP/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 02534
Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du MANS, décision attaquée en date du 15 Septembre 2010, enregistrée sous le no 20 252
ARRÊT DU 05 Février 2013
APPELANTE (dans la procédure RG 10/ 02534 et INTIMEE dans la procédure RG 10/ 02597) :
U R S S A F des Pays de la Loire venant aux droits de l'URSSAF de la Sarthe 3 rue Gaëtan Rondeau 44933 NANTES CEDEX 9
représentée par Monsieur Benoît X..., muni d'un pouvoir spécial
INTIMÉE (dans la procédure RG 10/ 02534 et APPELANTE dans la procédure RG 10/ 02597)
S. A. S. CLASS TRACTOR venant aux droits de la Ste RENAULT AGRICULTURE 7 rue Dewoitine 78140 VELIZY VILLACOUBLAY
représentée par Maître Amel MAJRI substituant Maître David RIGAUD (SCP), avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 27 Septembre 2012 à 14 H 00 en audience publique et collégiale, devant la cour composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président Madame Anne DUFAU, assesseur Madame Elisabeth PIERRU, vice-présidente placée
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Annick TIJOU, adjoint administratif assermenté, faisant fonction de greffier
ARRÊT : du 05 Février 2013, contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par madame LECAPLAIN MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. *******
FAITS ET PROCÉDURE
La société CLAAS TRACTOR SAS, anciennement RENAULT AGRICULTURE SAS (Ultérieurement CLAAS TRACTOIR), a fait l'objet d'un contrôle de l'URSSAF portant sur la période allant du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006.
Le 7 novembre 2007 l'URSSAF de la Sarthe a transmis sa lettre d'observation à la société.
Le 14 décembre 2007 l'URSSAF a mis en demeure CLAAS TRACTOR de régler, pour l'ensemble de ses établissements, un montant de 1 227 510 €.
Par lettre recommandée avec accusé de réception datée du 11 janvier 2008 CLAAS TRACTOR a saisi la commission de recours amiable de la Sarthe afin de contester 12 points de redressement notifiés à la suite du contrôle portant sur les années 2005, 2006 et 2007.
Par décisions du 18 mars 2008 et du 10 juin 2008, la commission de recours amiable a confirmé les points de redressement et les observations contestées mais a accepté le remboursement de la somme de 553 431 € au titre de l'exonération FILLON, et le re calcul d'une partie des avantages en nature, en l'occurrence la qualification de vêtements portés par les salariés.
Le 2 juillet 2008 CLAAS TRACTOR a saisi le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de la Sarthe afin de contester certains points des décisions prises par la commission de recours amiable.
Par jugement en date du 15 septembre 2010 auquel il convient de se référer pour plus ample exposé des motifs, le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de la Sarthe a :
- reçu la société CLAAS TRACTOR SAS, venant aux droits de la société RENAULT AGRICULTURE SAS, en son recours mais l'a dit partiellement fondé,- annulé le redressement de l'URSSAF relatif au rappel des sommes suite à la transaction et ordonné le remboursement de la CSG et de la CRDS réglées à tort,- annulé le redressement de l'URSSAF relatif à l'intéressement 2006,- dit que le calcul des réductions FILLON devra prendre en compte la totalité des heures rémunérées, sans proratisation, et annulé le calcul effectué par l'URSSAF de ce chef,- dit que l'indu résultant de la réduction FILLON doit être calculé à compter du 1er juillet 2004 en faisant application des règles de la prescription prévues à l'article L242-6 du code de la sécurité sociale,- renvoyé la société CLAAS TRACTOR SAS devant l'URSSAF pour recalculer l'indu résultant de la réduction FILLON en conformité avec les termes du présent jugement,- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,- constaté l'absence de dépens.
Le jugement a été notifié aux parties par courrier recommandé avec accusé de réception reçu par l'URSSAF le 17 septembre 2010 et par CLAAS TRACTOR le 20 septembre 2010.
Par courrier recommandé avec accusé de réception posté le 11 octobre 2010 l'URSSAF des Pays de Loire, venant aux droits de l'URSAFF de la Sarthe (ultérieurement l'URSSAF) a interjeté appel de ce jugement, appel limité aux dispositions de la décision du tribunal portant sur le redressement relatifs aux rappels de salaires accordés aux délégués syndicaux (transaction) et sur le calcul des réductions FILLON.
Cette affaire a été inscrite au rôle de la cour sous le numéro 10/ 02534.
Par courrier recommandé avec accusé de réception posté le 14 octobre 2010 CLAAS TRACTOR a interjeté appel de ce jugement, appel cantonné aux dispositions de la décision du tribunal limitant la répétition de l'indu sur les réductions FILLON à la période postérieure au 1er juillet 2004.
Cette affaire a été inscrite au rôle de la cour sous le numéro 10/ 02597.
Moyens et prétentions des parties
-Dossier 10/ 02534 (Appel de l'URSAFF)
Aux termes de ses conclusions déposées au greffe le 6 avril 2012, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer en application de l'article 455 du code de procédure civile, l'URSSAF demande à la cour de :
- la recevoir en son appel,- le dire bien fondé,- de réformer le jugement du 15 septembre 2010 sur le redressement relatif aux indemnités transactionnelles et sur le calcul de la réduction FILLON sur les heures d'astreinte et de douche,- de juger que les indemnités transactionnelles versées par CLAAS TRACTOR doivent être soumises à cotisations,- de juger que le calcul de la réduction FILLON quant aux heures d'astreinte et de douche est conforme à la législation applicable.
L'URSSAF rappelle que plusieurs salariés des établissements RENAULT AGRICULTURE SAS, aux droits desquels se trouve CLAAS TRACTOR, ont fait valoir qu'ils avaient été victimes de discrimination quant à leurs rémunérations et leur évolution de carrière en raison de leur mandat de représentant du personnel. Des négociations ont donc été engagées qui ont abouti à un accord conclu le 14 décembre 2001, aux termes duquel diverses sommes ont été versées aux salariés concernés.
Elle fait valoir que contrairement à ce qu'à retenu le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale, ces sommes ne peuvent être qualifiées d'indemnités alors que toute l'argumentation retenue par l'accord fait référence à la rémunération des salariés concernés, par comparaison avec celles des autres salariés de l'entreprise.
En effet toutes les transactions font référence à cet accord et font état du préjudice au titre de l'évolution de carrière, l'accord de méthode et les transactions qui s'en sont suivies ont bien eu pour objectif d'attribuer aux salariés invoquant une perte de rémunération, un rappel de rémunération, soir le différentiel entre leur salaire de base et la moyenne du salaire de base du panel.
Nonobstant les termes des accords et transactions qui qualifient les sommes versées d'indemnités, l'URSSAF est en droit de remettre en cause la qualification retenue, en recherchant leur nature exacte, ce que le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale n'a pas fait. En effet il a retenu que les sommes allouées avaient le caractère de dommages et intérêts puisqu'elles étaient destinées à réparer un préjudice en application des articles L2141-5 et L 2141-8 du code du travail, qui sont relatifs à la discrimination syndicale, alors que cela n'est pas évoqué dans l'accord de méthode et les transactions individuelles.
L'URSSAF fait valoir que la Société RENAULT (aux droits de laquelle se trouve CLAAS TRACTOR) a, au cours des négociations, toujours refusé d'admettre avoir commis la moindre discrimination à l'égard des salariés concernés, elle ne peut donc prétendre maintenant le contraire et se prévaloir du caractère indemnitaire à ce titre des sommes allouées.
L'URSSAF ajoute encore que toutes les transactions ont concerné des salariés encore présents dans l'entreprise ce qui démontre qu'il s'agissait bien pour eux d'obtenir la compensation d'une perte de rémunération subie au titre de leur évolution de carrière au cours de leur mandat de représentant du personnel. Il appartient donc à la cour de déterminer la nature juridique des sommes en cause, et en l'espèce de les re qualifier en rémunération et non en indemnités.
En conséquence l'URSSAF estime que la cour doit infirmer le jugement sur ce point, et l'annuler en ce qu'il a ordonné le remboursement de la CSG et de la CRDS au motif, sous entendu, que ces contributions ont été réglées à tort compte tenu du caractère indemnitaire des sommes versées.
En effet d'une part le remboursement de la CSG et de la CRDS n'a jamais été sollicité par CLAAS TRACTOR, même au cours des opérations de contrôle, aucune demande de cette nature n'ayant été soumise à la commission de recours amiable, ni même évaluée, alors que CLAAS TRACTOR les a spontanément versées à l'URSSAF. D'autre part en admettant qu'une telle demande ait été formulée devant la commission de recours amiable, elle ne pouvait aboutir puisque seuls les salariés, redevables de ces taxes, auraient pu formuler cette demande.
En ce qui concerne les " réductions Fillon ", deux points sont en litige.
L'analyse des fichiers transmis par la société aux inspecteurs du recouvrement en 2007 a permis de relever que sur le site de l'usine du Mans, CLAAS TRACTOR ne prenait pas en compte, dans le calcul de la réduction générale de cotisations dite réduction Fillon, certaines heures rémunérées (heures d'astreinte, heure de pause, de casse-croûte, de douche, rémunérées à des taux horaires inférieurs au taux normal) et les heures liées au versement des indemnités de congés payés, de formation ou de réduction du temps de travail non pris.
La commission de recours amiable a décidé d'autoriser l'URSSAF à rembourser à CLAAS TRACTOR la somme de 535 431 €, correspondant à un trop versé de cotisations à compter du 1er juillet 2004, eu égard à la demande de remboursement présentée par CLAAS TRACTOR le 27 juillet 2007, compte tenu de la prescription prévue par l'article L243-6 du code de la sécurité sociale, le délai de trois ans étant entré en vigueur le 1er janvier 2004.
D'autre part la commission de recours amiable a confirmé que ne doivent pas être prises en compte les heures d'astreinte et les primes de douche à compter du 1er janvier 2007
L'URSSAF demande l'infirmation du jugement en ce qu'il a jugé que le calcul des réductions devait prendre en compte la totalité des heures rémunérées sans proratisation.
En effet, la circulaire ACOSS no2007-068 a précisé les modalités selon lesquelles les heures rémunérées doivent être prises en compte pour le calcul de la réduction Fillon, dispositions applicables à compter du 1er janvier 2007 pour celles relative à la proratisation des heures rémunérées à un taux inférieur à celui des heures de travail effectif, ce qui est le cas des primes de douches et des astreintes, ces heures ne constituant pas des heures de travail effectif.
Selon l'URSSAF pour ne pas fausser la détermination du salaire horaire servant de base de calcul de la réduction Fillon, elles doivent être prises en compte non pas pour leur durée exacte mais à concurrence du taux auquel elles sont rémunérées par application articulées des articles L241-15 et L241-13 du code de la sécurité sociale.
En effet le montant de la réduction Fillon est fonction de la rémunération horaire du salarié, et comptabiliser pour leur durée exacte des heures rémunérées à un taux inférieur au taux normal conduirait à modifier le rapport " rémunération mensuelle/ nombre d'heures rémunérées et par contre coup à fausser le calcul de la rémunération horaire sur laquelle repose l'ensemble du dispositif. Dans certains cas, cela rendrait ainsi éligible à la réduction des cotisations de salariés dont la rémunération horaire est supérieure à 1, 6 SMIC et qui en sont normalement exclus.
Elle soutient donc qu'à défaut de proratisation ces primes ne peuvent être prises en compte dans le calcul de la réduction Fillon ce qui doit conduire la cour à infirmer le jugement qui a dit que les calculs de réduction devaient prendre en compte la totalité des heures rémunérées sans proratisation.
Dossier no 10/ 02597 (Appel de CLAAS TRACTOR)
Aux termes de ses conclusions déposées au greffe le 6 avril 2012, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer en application de l'article 455 du Code de procédure civile, l'URSAFF demande à la cour :
- de déclarer l'appel de CLAAS TRACTOR recevable,- de l'en débouter,- de confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné la répétition de l'indu à compter du 1er juillet 2004 et écarter la demande de compensation de la société,- de rejeter la demande formée par CLAAS TRACTOR en application de l'article 700 du code de procédure civile.
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Aux termes de ses conclusions récapitulatives déposées au greffe le 19 septembre 2012, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer en application de l'article 455 du code de procédure civile, CLAAS TRACTOR demande à la cour :
- d'ordonner, à titre liminaire, la jonction des instances pendantes, s'agissant des recours No10/ 02597 et 10/ 02534,- de confirmer la décision du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du 15 septembre 2010 en ce qu'il a : *annulé les redressements opérés au titre des rappels de salaire suite à transaction, *ordonné la répétition de la CSG/ CRDS réglée à tort au titre des rappels de salaire suite à transaction, *jugé que le calcul de la réduction Fillon doit prendre en compte la totalité des heures rémunérées, et ce sans proratisation,- d'annuler en conséquence les majorations de retard réclamées par l'Union sur ces points,- d'infirmer la décision du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du 15 septembre 2010 en ce qu'elle limite la répétition de l'indu sur les réductions Fillon à la période postérieure au 1er juillet 2004.- de condamner l'URSSAF des Pays de Loire, venant aux droits de L'URSSAF de la SARTHE à lui payer la somme de 3 450 € en application de l'article 700 du code de procédure civile avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir.
CLAAS TRACTOR fait valoir que si l'article L242-1 du code de la sécurité sociale pose comme principe que, pour le calcul des cotisations sociales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, la cour de cassation retient depuis longtemps que les sommes présentant le caractère de dommages et intérêts sont exclues de l'assiette des cotisations de sécurité sociale, ne s'agissant pas de sommes versées en contrepartie du travail ou à l'occasion du travail.
Elle ajoute que ce raisonnement doit également être retenu s'agissant de la CSG et de la CRDS.
Elle rappelle qu'en application des articles L 2141-5 et L2141-8 du code du travail, il est interdit à l'employeur de prendre en considération l'appartenance syndicale d'un travailleur pour arrêter ses décisions notamment en matière d'embauche, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle et d'avancement.
Or il est de jurisprudence constante que la réparation du préjudice subi par un salarié en présence d'une discrimination syndicale donne lieu au versement de dommages et intérêts sans distinguer selon que la réparation du préjudice est obtenue par le salarié de façon isolée ou sur la base d'un accord collectif, à l'issue d'un contentieux devant une juridiction ou par le biais de négociation avec l'employeur, ainsi que cela a été rappelé par arrêt de la cour de cassation en date du 11 octobre 2007.
CLAAS TRACTOR estime que c'est donc à tort que l'URSSAF qualifie de salaires les sommes versées par transaction à ses salariés, rappelant qu'en matière de discrimination syndicale les demandes ne sont pas soumises à la prescription quinquennale de l'action en paiement de salaire, et ce alors que les dommages et intérêts alloués correspondaient pour partie à la perte de salaire résultant de l'inégalité de traitement constatée.
Dans la mesure où elle a versé à tort la CSG et la CRDS sur des sommes constituant des dommages et intérêts, CLAAS TRACTOR les a réglées par erreur et c'est à juste titre que le Tribunal a annulé le redressement opéré à ce titre.
En ce qui concerne la " réduction Fillon ", CLAAS TRACTOR fait valoir que le contrôle de l'URSSAF a révélé que l'entreprise avait commis des erreurs en sa défaveur lors de l'établissement des déclarations de salaire ouvrant droit à cette réduction. En effet elle n'a pas pris en compte les heures d'astreinte, les heures de pause et de formation, les heures de casse-croûte et les heures liées au versement des indemnités de congés payés.
CLAAS TRACTOR rappelle que par courrier du 27 juillet 2007 elle avait sollicité le remboursement des réductions Fillon non décomptées au titre des salaires concernant la période du 1er juillet 2004 au 20 juin 2007, période non prescrite en applications de l'article L 243-6 du code de la sécurité sociale mais que dans le cadre de la procédure de contrôle l'URSSAF a procédé à un redressement portant sur la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006.
En ce cas, selon CLAAS TRACTOR l'ACOSS admet que des compensations puissent être effectuées au delà de la période prescrite, ce qui a pour effet de porter sa créance sur l'URSSAF à la somme de 710 604 €, outre la somme de 141 031 € pour la période du 1er janvier 2004 au 30 septembre 2007.
La commission de recours amiable a confirmé cette erreur et a acté au bénéfice de l'entreprise un crédit de 535 431 €, d'une part en appliquant une pondération pour le calcul des astreintes et temps de douches à partir de 2007, d'autre part en ne prenant en compte que les réductions dues sur les trois dernières années, soit à compter du 1er juillet 2004.
Le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale a réformé partiellement cette décision en ordonnant la répétition de l'indu au titre des réductions Fillon en prenant en compte la totalité des heures rémunérées, mais l'a limité à la période postérieure au 1er juillet 2004.
CLAAS TRACTOR fait valoir que la position de l'URSSAF revient à modifier unilatéralement les modalités de calcul de la réduction Fillon pourtant clairement fixées par la loi telle qu'elle résulte de l'article L 241-15 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction de la loi de financement de la sécurité sociale de 2006, et qui a écarté la position prise par l'administration selon laquelle la réduction ne devait être appliquée qu'au temps de travail effectif.
Désormais l'URSSAF veut que pour les heures rémunérées à compter du 1er janvier 2007 à un taux inférieur à celui des heures de travail effectif, une proratisation soit effectuée qui a pour effet de minorer la réduction Fillon au titre des heures d'astreinte notamment mais cette position de l'administration ne repose sur aucun texte.
CLAAS TRACTOR estime donc que c'est à juste titre que le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale, ne s'estimant pas lié par la doctrine administrative, a jugé qu'il n'y avait pas lieu à proratisation.
En ce qui concerne la demande de compensation rejetée par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale, CLAAS TRACTOR rappelle les dispositions prévues par les articles 1289 et suivant du code civil et estime que toutes les conditions sont réunis pour qu'une compensation judiciaire soit prononcée entre sa créance sur l'URSSAF et le solde de redressement qu'elle doit.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Les appels régularisés dans les formes et délais prévus par la loi sont recevables.
Sur la jonction
Le jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du Mans en date du 15 septembre 2010 a fait l'objet d'un appel limité par chacune des parties, chacun d'eux ayant fait l'objet d'un enrôlement au greffe de cette cours.
En application de l'article 367 du Code de procédure civile, il y lieu d'ordonner la jonction des instances enrôlés sous les numéros 10/ 02534 et 10/ 02597 du rôle de la cour.
Sur les points ne faisant plus litige
Le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale a annulé le redressement de l'URSSAF relatif à l'intéressement 2006.
Cette disposition n'étant pas remise en cause et la cour n'étant saisie d'aucun moyen de ce chef, il convient de confirmer le jugement sur ce point.
Sur le redressement de cotisations lié à la transaction
Il résulte des pièces produites qu'au début des années 2000 un certain nombre de salariés de l'entreprise RENAULT se sont plaints de discrimination au sein de l'entreprise en raison de leur qualité de représentant du personnel. Des négociations ont été mises en oeuvre entre la société RENAULT et les organisations syndicales CFDT, CFE/ CGC et FO, qui ont abouti à un " Accord de méthode du 14 décembre 2001 relatif au règlement de litiges résultant d'évolutions professionnelles de représentants du personnel "
Le préambule de cet accord précise :
" Des représentants du personnel de RENAULT déclarent avoir subi ou subir un préjudice dans leur évolution de carrière. Renault prend acte de la réalité de cette situation mais considère que les mandats de représentant du personnel n'ont jamais été pris en considération pour décider d'une évolution de carrière.
La direction et les organisations syndicales signataires de l'entreprise ont cependant décidé de définir une méthode permettant de régler la situation passée et présente de ces représentants, dans le but, notamment, d'éviter, le cas échéant, l'aléa judiciaire inhérent à toute procédure contentieuse et ont convenu, à cette fin, des dispositions du présent accord.
Pour autant, les parties reconnaissent que l'accord Renault du 23 juin 2000 relatif à la représentation du personnel et à la concertations sociale, applicable depuis le 1er octobre 2000, définit des règles nouvelles et précises de nature à garantir aux représentants du personnel une évolution professionnelle homogène avec celle des autres salariés de l'entreprise. "
Cet accord prévoit
"-1 champ d'application :
* aux établissements RENAULT en France
-2 bénéficiaires les représentant du personnel et anciens représentants du personnel désignés ou élus encore à l'effectif ou ayant quitté l'entreprise qui présenteraient, dans les conditions prévues à l'article 6-1 du présent accord un différentiel anormal de rémunération ou de classification ne pouvant être justifié par des causes professionnelles et n'ayant pas fait l'objet d'un règlement antérieur de leur situation sur ce point. "
" Il convient de tenir compte des éléments objectifs justifiant que le salarié n'a pu être promu ou n'a pu voir sa rémunération revalorisée (échec aux tests, appréciations portées par la hiérarchie lors de l'entretien annuel, refus de formation).
-3 période prise en compte :
" La période prise en compte pour chacun des salariés concernés débute l'année où les parties conviennent de l'apparition de l'écart anormal de rémunération ou de classification ne pouvant être justifié, appelée année N dans le présent accord, c'est à dire au plus tôt l'année de prise de mandat électif ou syndical, et s'achève à la date convenue entre les parties, sous réserve de l'application de l'article 4-3. Cette période peut concerner des affectations successives dans plusieurs établissements de l'entreprise. "
-4 : détermination de l'écart
4-1 Panel de référence Le groupe de référence est composé des salariés du même établissement que l'intéressé à la fois l'année N et l'année en cours ou convenue entre l'entreprise et l'intéressé, ou, le cas échéant, la dernière année d'activité de celui-ci, qui :- étaient dans la même filière l'année N ;- avaient la même ancienneté dans le coefficient ou la position l'année N ;- avaient le même coefficient ou la même position l'année N, et s'agissant de cadres, appartenaient à la même catégories (école ou dispositif de passage cadre) et ont également changé de catégorie (passage APR à ETAM ou ETAM à cadre), si le salarié a lui-même changé de catégorie.- avaient le même coefficient ou la même position l'année, N, et, s'agissant de cadres, appartenaient à la même catégorie (école ou dispositif de passage cadre), en écartant le salaire de ceux qui ont changé de catégorie, si le salarié n'a pas lui-même changé de catégorie.....
4-2 calcul du différentiel :
Pour chaque année de la période convenue conformément à l'article 3 du présent accord, on calcule le différentiel entre le salaire de base de l'intéressé (auquel s'ajoute le complément de carrière pour les APR ou la prime de performance pour les cadres) et la moyenne du salaire de base du panel (auquel s'ajoute le complément de carrière pour les APR ou la prime de performance pour les cadres...
4-3 coefficient de pondération : L'écart défavorable constaté l'année N entre le salaire de base de l'intéressé et celui des salariés du panel, qui n'a pas de cause liée à l'exercice d'un mandat et qui s'exprime en pourcentage est appelé coefficient de pondération. Ce coefficient est appliqué chaque année aux salaires des salariés du panel de référence. "........
4-5-1 indemnité de mise en retraite
Le différentiel de rémunération défini dans le présent accord ayant pour effet de minorer les sommes versées aux salariés bénéficiant de la CASA ou de l'ARPE, une indemnisation complémentaire de mise à la retraite est versée aux intéressés, sauf si un repositionnement du salaire a eu lieu depuis plus de douze mois lors de leur entrée dans l'un de ces dispositif. Cette indemnité est incluse dans l'indemnité transactionnelle.
L'indemnité transactionnelle est calculée sur la base d'une reconstitution du salaire sur les 12 derniers mois précédent l'entrée dans le dispositif. "
Les accords transactionnels ayant donnés lieux à redressement, dont les calculs et montants ne sont pas contestés en eux-mêmes, ont repris le modèle fixé par cet accord.
Les salariés concernés invoquaient un préjudice au titre de l'évolution de carrière et l'accord précise :
" 4-4 Somme à verser La somme résultant de ces calculs, majorés de 24 %, constitue l'évaluation de l'intégralité des préjudices matériels, professionnels et moraux subis par l'intéressé. Cette somme ayant le caractère de dommages et intérêts, est soumise aux seules CSG et CRDS, à la charge du salarié, conformément aux dispositions légales. "
Cependant l'article L 242-1 du code de la sécurité sociale dispose :
" Pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratification et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire,. La compensation salariale d'une perte de rémunération induite par une mesure de réduction du temps de travail est également considérée comme une rémunération, qu'elle prenne la forme, notamment, d'un complément différentiel de salaire ou d'une hausse du taux de salaire horaire. "
Si comme l'indique le premier juge, il n'est pas tenu par l'interprétation de la transaction donnée par l'administration, il n'est pas non plus tenu par l'interprétation présentée par l'employeur, et il lui appartient de rechercher la commune intention des parties pour qualifier la nature juridique exacte des sommes versées.
Comme le fait à juste titre observer l'URSSAF, les transactions ont eu pour objet de mettre fin à un litige d'ordre salarial (ralentissement dans l'évolution de carrière du fait des mandats des salariés induisant une perte de rémunération), la méthode de calcul des sommes dues étant basée sur un différentiel de salaires.
Pour annuler le redressement de l'URSSAF au titre des sommes versées en vertu des transactions, le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale relève que l'article L2141-5 du code du travail interdit à l'employeur tout comportement discriminatoire et qu'en application de l'article L 2141-8 du même code, toute mesure prise par l'employeur contrairement à cette interdiction est considérée comme abusive et donne lieu à dommages et intérêts, si bien que les sommes versées par CLAAS TRACTOR ont bien été versées aux délégués syndicaux arguant d'une discrimination syndicale.
Or ces dispositions ne sont aucunement visées par l'accord du 14 décembre 2001, l'employeur s'étant au contraire toujours défendu d'avoir commis la moindre discrimination considérant " que les mandats de représentant du personnel n'ont jamais été pris en considération pour décider d'une évolution de carrière. " (Voir le préambule ci dessus).
Contrairement à ce que soutient CLAAS TRACTOR, il ressort des termes mêmes des transactions que la société n'a pas entendu indemniser un préjudice lié à une discrimination syndicale mais que les sommes versées aux salariés étaient bien destinées à assurer un rattrapage de revenus, étant observé que ces sommes ont été versées à des salariés encore présents dans l'entreprise. Ayant la nature de rémunérations, elles doivent être incluses dans l'assiette des cotisations.
La CSG et la CRDS sont dues par les salariés, même si par le biais du prélèvement à la source c'est l'employeur qui les versent à l'administration. CLAAS TRACTOR ne peut donc agir pour autrui en sollicitant la répétition d'un éventuel indu de ce chef.
En conséquence la cour infirme le jugement en ce qu'il a prononcé l'annulation du redressement relatif aux transactions intervenues entre RENAULT AGRICULTURE SAS, aux droits de laquelle se trouvent désormais CLAAS TRACTOR, et les salariés concernés et en ce qu'il a ordonné le remboursement par l'URSSAF de la CSG et de la CRDS versées par l'employeur dans le cadre des transactions.
Sur le redressement lié aux réductions Fillon
L'article 241-15 du code de la sécurité sociale prévoit également :
" Pour la mise en oeuvre des mesures d'exonération ou de réduction de cotisation de sécurité sociale prévues par le présent code ou par toute autre disposition législative ou réglementaire, l'assiette de calcul s'entend des heures rémunérées quelle qu'en soit la nature "
L'article L241-13 du code de la sécurité sociale prévoit :
I-les cotisations à la charge de l'employeur au titre des assurances sociales, des accidents du travail et des maladies professionnelles et des allocations familiales sont assises sur les gains et rémunérations tels que définis à l'article L242-1, versés au cour d'un mois civil aux salariés, font l'objet d'une réduction.
II-cette réduction est appliquée aux gains et rémunérations versés aux salariés au titre desquels l'employeur est soumis à l'obligation édictée par l'article L351-4 du code du travail et aux salariés mentionnés au 3o de l'article L351-12 du même code, à l'exception des gains et rémunérations versés par l'organisme mentionné à l'article 2 de la loi no90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications et par les particuliers employeurs. Cette réduction n'est pas applicable aux gains et rémunérations versés par les employeurs relevant des dispositions du titre Ier du livre VII du présent code, à l'exception des employeurs relevant des régimes spéciaux de sécurité sociale des marins, des mines et des clercs et employés de notaires.
III-le montant de la réduction est calculé chaque mois civil, pour chaque salarié. Il est égal au produit de la rémunération mensuelle, telle que définie à l'article L242-1 par un coefficient. Ce coefficient est déterminé par application de la formule fixée par décret. Il est fonction de la rémunération horaire du salarié concerné calculée en divisant la rémunération mensuelle par le nombre d'heures rémunérées au cours du mois considéré.
Le décret prévu à l'alinéa précédent précise les modalités de calcul de la réduction dans le cas des salariés dont la rémunération ne peut être déterminée selon un nombre d'heures de travail effectué et dans celui des salariés dont le contrat de travail est suspendu avec maintien de tout ou partie du la rémunération.
Pour les gains et rémunérations versé à compter du 1er juillet 2005, le coefficient maximal est de 0. 26. Il est atteint pour une rémunération horaire égale au salaire minimum de croissance. Ce coefficient devient nul pour une rémunération horaire égale au salaire minimum de croissance majoré de 60 %. Pour les gains et rémunérations versés avant cette date, les dispositions du présent article s'appliquent sous réserve de celles de l'article 10 de la loi no2003-47 du 17 janvier 2003 relatives aux salaires, au temps de travail et développement de l'emploi.
Dans les professions dans lesquelles le paiement des congés des salariés et des charges sur les indemnités de congés est mutualisé entre les employeurs affiliés aux caisses de compensation prévues à l'article L223-16 du code du travail, le montant de la réduction déterminé selon les modalités prévues au III est majorée d'un taux fixé par décret. La réduction prévue au présent article n'est pas applicable aux cotisations dues au titre de ces indemnités par lesdites caisses de compensation. "
Les décrets d'application relatifs à cet article, no2004-821 du 18 août 2004 et 2005-948 du 2 août 2005 précisent les modalités de calcul des réductions de la façon suivante :
" La réduction prévue par l'article 1er du présent décret est égale au produit de la rémunération mensuelle brute versée au salarié par le coefficient mentionné au III de l'article L241-13 du code de la sécurité sociale. Ce coefficient est déterminé par l'application de la formule suivante :
Coef = ((0. 260) x 1. 6 x SMIC x Nombre d'heures rémunérées) 0. 6rémunération mensuelle brute
Pour ce calcul
1 le SMIC est le taux horaire du salaire minimum de croissance prévu par l'article L141-2 du code du travail. Il est pris en compte pour sa valeur la plus élevée en vigueur au cours de la période d'emploi rémunérée. 2 le nombre d'heures rémunérées correspond au nombre d'heures de travail auquel se rapporte la rémunération brute versée au cours du mois civil considéré. 3 en cas de suspension du contrat de travail avec maintien total ou partiel de la rémunération mensuelle brute du salarié, le nombre d'heures rémunérées pris en compte au titre de ces périodes de suspension est égal au produit de la durée de travail que le salarié aurait effectué s'il avait continué à travailler par le pourcentage de la rémunération demeuré à la charge de l'employeur et soumis à cotisation. 4 le résultat obtenu par application de la formule de calcul est arrondi à trois décimales, au millième le plus proche. S'il est supérieur à 0. 260, il est pris en compte pour une valeur égale à 0. 260. S'il est négatif, il est pris en compte pour une valeur 0. "
A l'appui de sa demande, l'URSSAF invoque la circulaire ACOSS no2007-068 qui a précisé les modalités selon lesquelles les heures rémunérées doivent être prises en compte pour le calcul de la réduction Fillon, dispositions applicables à compter du 1er janvier 2007 pour les dispositions relatives à la proratisation des heures rémunérées à un taux inférieur à celui des heures de travail effectif, ce qui est le cas des primes de douches et des astreintes, ces heures ne constituant pas des heures de travail effectif.
Toutefois, comme l'a exactement rappelé le tribunal, une circulaire est dépourvue de valeur normative et le juge n'est pas lié par l'appréciation de l'administration selon laquelle les heures rémunérées à un taux inférieur à celui rémunérant le travail effectif devraient être proratisées, à défaut de quoi, les sommes rémunérant ces temps ne correspondant pas à du travail effectif devraient être exclues de l'assiette de calcul de la réduction Fillon.
Cette dernière position de l'URSSAF est mal fondée en ce qu'elle est contraire à la loi puisque l'article L. 241-15 du code de la sécurité sociale énonce de façon claire et expresse que doivent être incluses dans l'assiette de calcul de la réduction Fillon toutes les heures rémunérées quelle qu'en soit la nature.
En second lieu, l'URSSAF ajoute à la loi lorsqu'elle soutient que les heures rémunérées à taux inférieur à celui rémunérant les heures de travail effectif devraient être proratisées en fonction du taux auquel elles sont rémunérées. En effet, cette proratisation n'est prévue ni par l'article L. 241-15, ni par l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, ni même par les décrets d'application qui fournissent la formule permettant de déterminer le coefficient visé au paragraphe III de l'article L. 241-13.
En outre, son raisonnement n'apparaît pas pertinent dans la mesure où, contrairement à ce qu'il revient à considérer, toutes les heures rémunérées ne sont pas, pour le calcul de la réduction Fillon, comptabilisées au taux de rémunération versé en contrepartie du travail effectif. En effet, la " rémunération horaire " visée au paragraphe III de l'article L. 241-13 procède d'une moyenne de tous les taux de rémunération différents appliqués au salarié selon que le poste
rémunéré puisque son montant est obtenu en prenant comme premier terme de la division la " rémunération mensuelle " laquelle correspond à l'addition de toutes les sommes versées au salarié à titre de rémunération quel que soit le taux horaire appliqué. Le résultat obtenu en divisant cette " rémunération mensuelle " par le nombre d'heures rémunérées aboutit donc à un taux qui n'est pas celui de la rémunération du travail effectif, mais qui procède d'une moyenne en considération des différents taux appliqués et du nombre d'heures rémunérées. L'URSSAF apparaît mal fondée à soutenir qu'il faudrait, non seulement, comptabiliser les heures de douche, par exemple, au taux auquel elles sont effectivement rémunérées, ce que prévoit le paragraphe III de l'article L. 241-13, mais en outre, proratiser le temps qu'elles représentent en fonction du taux auquel elles sont rémunérées. Vouloir proratiser les heures rémunérées à un taux inférieur à celui du travail effectif et comptabilisées pour ce taux inférieur dans le cadre du calcul de la réduction Fillon reviendrait à réduire le montant de cette réduction par rapport aux dispositions prévues par la loi.
En conséquence c'est à juste titre que le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale a rejeté cette prétention, et le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a dit que le calcul des réductions Fillon dont peut bénéficier CLAAS TRACTOR doit prendre en compte la totalité des heures rémunérées, sans proratisation, en ce qu'il a annulé le calcul effectué par l'URSAFF relatif à ces réductions et renvoyé CLAAS TRACTOR devant l'URSSAF pour recalculer l'indu résultant de la réduction Fillon en conformité avec les termes du jugement.
Sur la répétition de l'indu
Ayant omis de calculer les réductions " Fillon " applicables à une partie des salaires versés depuis plusieurs années, par courrier du 27 juillet 2007 CLAAS TRACTOR a sollicité le remboursement des cotisations trop versées en précisant : :
" Compte tenu des délais de prescription fixés par l'article L243-6 du code de la sécurité sociale, nous avons l'honneur d'arrêter la prescription au titre des réductions Fillon non décomptées depuis le 1er juillet 2004. ".
L'article L 243-6 du code de la sécurité sociale prévoit en effet : " La demande de remboursement de cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales indûment versées se prescrit par trois ans à compter de la date à laquelle elles ont été acquittées ".
Il est constant que les dernières cotisations litigieuses ont été réglées par CLAAS TRACTOR le 5 août 2004. En application de l'article L243-6 du code de la sécurité sociale, la demande en répétition de l'indu n'est donc recevable qu'à compter du 1er juillet 2004 et non à compter du 1er janvier 2004, peu important que l'URSSAF ait mis en place ultérieurement un contrôle relatif aux cotisations exigibles notamment à compter du 1er janvier 2004.
La cour confirme le jugement de ce chef.
Sur la demande d'annulation de majorations de retard
Outre le fait que CLAAS TRACTOR forme cette demande pour la première fois en appel, et ne verse aucune pièce relative à la réclamation de majorations de retard qu'aurait présenté l'URSSAF, il convient de rappeler que le redevable des cotisations ne peut saisir le juge du contentieux général d'une demande de remise des majorations de retard que par la voie d'un recours régulièrement introduit contre la décision gracieuse rejetant sa demande, conformément à la procédure prévue par l'article R243-20 du code de la sécurité sociale.
La demande de CLAAS TRACTOR est irrecevable.
Sur la compensation
Faisant valoir qu'elle est créancière de l'URSSAF en particulier au titre de l'application des réductions Fillon qu'elle a omis d'appliquer, CLAAS TRACTOR demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a refusé de lui accorder le bénéfice de la compensation entre sa créance et celle dont bénéficie l'Urssaf en raison des redressements qui lui ont été notifiés, ce à quoi l'URSSAF s'oppose en faisant valoir que les créances de CLAAS TRACTOR à son égard ne sont ni certaines, ni liquides ni exigibles.
La lettre d'observations du 7 novembre 2007consécutive aux contrôles réalisés faisait état d'un rappel de cotisations dû par CLAAS TRACTOR pour 1 225 802 €. Cette somme ne tient pas compte du trop perçu par l'URSSAF résultant de l'omission des réductions Fillon dans les calculs de l'employeur.
Le 14 décembre 2007 l'URSSAF a mis en demeure la société CLAAS TRACTOR de régler, pour l'ensemble de ses établissements, un montant de 1 227 510 €.
La commission de recours amiable a déclarée fondé un certain nombre de contestations émises par CLAAS TRACTOR, précisant en fin de décision qu'une somme de 706 332 € était toujours contestée, tandis qu'une somme de 402 559 € n'était pas contestée par CLAAS TRACTOR. (Ce qui représentait une créance de l'URSSAF hors majorations de retard de 1 108 891 €).
La commission de recours amiable fixait à 535 431 € la créance de CLAAS TRACTOR sur l'URSSAF au titre des réductions Fillon, somme que l'URSSAF n'a pas remise en cause en cours d'instance.
Le redressement relatif à l'intéressement de 2006, dont le montant était de 437 000 €, a été définitivement annulé à la suite du jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale non contesté de ce chef ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, ce qui réduit la créance de l'URSSAF, hors majoration de retard toujours, à 671 891 €.
Le jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale, confirmé sur ce point par la cour établit au bénéfice de CLAAS TRACTOR une créance supérieure à 535 431 € puisque ce montant avait été retenu par la commission de recours amiable en faisant application de la proratisation d'heures revendiquée par l'URSSAF.
Il résulte de ces éléments que les deux parties sont titulaires de créances réciproques et connexes, non discutables dans leur principe ; il convient en conséquence de faire droit à la demande de compensation présentée par CLAAS TRACTOR, peut important, s'agissant d'une compensation judiciaire, que les créances ne soient pas liquides et exigibles.
Sur l'indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile
Chacune des parties échouant partiellement en ses demandes, il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de CLAAS TRACTOR qui sera dispensée du droit d'appel prévu par l'article l'article R. 144-10 alinéa 2 du code de la sécurité sociale.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement et contradictoirement,
Ordonne la jonction de l'affaire enrôlée sous le numéro10/ 02597 avec l'affaire inscrite sous le no 10/ 02534, la procédure restant suivie sous ce seul numéro ;
Déclare l'URSSAF des Pays de Loire venant aux droits de l'URSSAF de la Sarthe et la société CLAAS TRACTOR recevables en leurs appels ;
Déclare irrecevable la demande de remise des majorations de retard présentées par la société CLAAS TRACTOR ;
Confirme le jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du Mans en date du 15 septembre 2010, sauf en ce qu'il a annulé le redressement de l'URSSAF relatif au rappel des sommes versées aux salariés en vertu de la transaction conclue et ordonné le remboursement de la CSG et de la CRDS ;
Statuant à nouveau, et ajoutant au jugement,
Valide le redressement de l'URSSAF relatif au rappel de cotisations du chef des sommes versées par la Société CLAAS TRACTOR à des salariés en vertu de la transaction conclue ;
Rejette la demande de remboursement des sommes versées au titre de la CSG et de la CRDS présentée par la société CLAAS TRACTOR ;
Ordonne la compensation des créances réciproques de la société CLAAS TRACTOR et de l'URSSAF ;
Déboute la société CLAAS TRACTOR SAS de sa demande formée en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Dispense les parties du paiement du droit d'appel prévu par l'article R144-10 alinéa 2 du code de la sécurité sociale.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
Sylvie LE GALL Catherine LECAPLAIN-MOREL