COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT DU 26 Février 2013
ARRÊT N EP/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 01010.
Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'ANGERS, décision attaquée en date du 22 Mars 2011, enregistrée sous le no 08. 511
assuré : Jean-Pierre X...
APPELANTE :
Société ASSA ABLOY AUBE ANJOU venant aux droits de la Société BEZAULT SAS 50, rue de la Paix 10000 TROYES
représentée par Maître Benjamin GEVAERT, substituant Maître Marie-Christine PEROL (SCP d'avocats PRK et Associés), avocat au barreau de PARIS
INTIMEE :
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE MAINE ET LOIRE (C. P. A. M.) 32 rue Louis Gain 49937 ANGERS CEDEX 9
représentée par Monsieur Laurent Y..., muni d'un pouvoir
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Novembre 2012 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant madame Elisabeth PIERRU, vice-président placé chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président Madame Anne DUFAU, conseiller Madame Elisabeth PIERRU, vice-présidente placée
Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier
ARRÊT : prononcé le 26 Février 2013, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE
Le 22 janvier 2008, Monsieur Jean-Pierre X..., salarié de la société BEZAULT SAS, aux droits de laquelle se trouve désormais la société ASSA ABLOY AUBE ANJOU, a adressé à la caisse primaire d'assurance maladie d'Angers, devenue la caisse primaire d'assurance maladie du Maine et Loire, une déclaration de maladie professionnelle dans le même formulaire, pour un " cancer bronchopulmonaire " et une " sclérodermie systémique progressive ". Le présent dossier concerne la sclérodermie systémique progressive.
Le 24 janvier 2008 la caisse primaire d'assurance maladie a transmis une copie de la déclaration de maladie à l'employeur. Par courrier du 13 février 2008, la société BEZAULT SAS a émis des réserves.
Le 21 avril 2008, la caisse primaire d'assurance maladie a informé les parties de la nécessité de recourir au délai complémentaire d'instruction.
Par courrier daté du 27 mai 2008, la caisse primaire d'assurance maladie a informé les parties de la fin de l'instruction et de leur possibilité de consulter les pièces avant le 10 juin 2008, date de la décision, ce courrier précisant que l'employeur devait lui faire parvenir ses observations par fax dans les 48 heures.
Par courrier du 30 mai 2008, la société BEZAULT SAS a sollicité la communication du dossier, n'étant pas en mesure de se déplacer pour le consulter.
Par courrier du 6 juin 2008, la caisse primaire d'assurance maladie a adressé les pièces du dossier, indiquant à l'employeur que ses éventuelles observations devaient intervenir avant le 13 juin 2008.
Par courrier en date du 16 juin 2008, la caisse primaire d'assurance maladie a notifié à la société BEZAULT SAS sa décision de prendre en charge la sclérodermie systémique progressive de Monsieur X... au titre des risques professionnels.
Le 21 juillet 2008, la société BEZAULT SAS a saisi la commission de recours amiable, mais celle-ci a rejeté son recours le 11 septembre 2008.
Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 8 octobre 2008, la société BEZAULT SAS a saisi le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du Maine et Loire en contestation de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie.
Par jugement en date du 22 mars 2011, le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du Maine et Loire a :
- déclaré recevable mais mal fondé le recours de la société ASSA ABLOY AUBE ANJOU venant aux droits de la société BEZAULT SAS,- débouté la société ASSA ABLOY AUBE ANJOU venant aux droits de la société BEZAULT SAS, de l'intégralité de ses demandes,- confirmé en conséquence la décision de la commission de recours amiable du 11 septembre 2008.
Le jugement a été notifié par courriers recommandés avec accusé de réception reçus le 24 mars 2011 par la société ASSA ABLOY AUBE ANJOU et par la Caisse primaire d'assurance maladie du Maine et Loire.
Par courrier recommandé avec accusé de réception posté le 13 avril 2011, la société ASSA ABLOY AUBE ANJOU a interjeté appel du jugement en toutes ses dispositions.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Aux termes de ses conclusions déposées au greffe le 22 novembre 2012, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer en application de l'article 455 du code de procédure civile, la société ASSA ABLOY AUBE ANJOU (ultérieurement la Sté AAAA) demande à la cour :
A TITRE PRINCIPAL-de lui déclarer inopposable la décision prise par la caisse primaire d'assurance maladie de reconnaître le caractère professionnel de la maladie invoquée par Monsieur X... avec toutes les conséquences de droit, A TITRE SUBSIDIAIRE-de constater que les conditions du tableau 25 des maladies professionnelles n'étaient pas réunies, en conséquence,- de dire que la Caisse primaire d'assurance maladie a reconnu à tort le caractère professionnel de la maladie invoquée par Monsieur X... (sclérodermie systémique progressive) et pris en charge les conséquences de celle-ci,- de lui déclarer inopposable la décision prise par la Caisse primaire d'assurance maladie de reconnaître le caractère professionnel de la maladie invoquée par Monsieur X... avec toutes les conséquences de droit, A TITRE PLUS SUBSIDIAIRE sur la demande de la Caisse primaire d'assurance maladie de se voir faire injonction par la cour de saisir le CRRMP,- débouter la Caisse primaire d'assurance maladie de cette demande, Trés subsidiairement si la cour estimait devoir faire droit à cette demande de la Caisse primaire d'assurance maladie,- dire que la Caisse primaire d'assurance maladie devra : * inviter la Sté AAAA à faire valoir ses observations préalablement à la transmission du dossier au CRRMP, *remettre au CRRMP l'ensemble des pièces et conclusions versées par la Sté AAAA aux débats, DANS TOUS LES CAS-débouter la Caisse primaire d'assurance maladie de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions.
Elle fait valoir que la Caisse primaire d'assurance maladie n'a pas respecté le caractère contradictoire de la procédure de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie tant en ce qui concerne le délai laissé à l'employeur pour prendre connaissance du dossier, qu'en ce qui concerne la communication de l'intégralité des pièces de celui-ci.
En effet le courrier du 27 mai 2008, posté le 28 mai 2008, reçu par l'employeur le 29 mai 2008, l'avisait de la fin de l'instruction, de la possibilité de consulter le dossier avant la prise de décision fixée pour les deux affections (sclérodermie et cancer broncho pulmonaire) au 10 juin 2008, et de la possibilité de faire valoir ses observations par fax sous 48 heures.
Ce faisant, la caisse primaire d'assurance maladie laissait à l'employeur un délai tout à fait insuffisant puisque la cour de cassation estime que ce délai doit être de 10 jours.
Elle souligne que par courrier du 30 mai 2008, elle a fait valoir à la caisse primaire d'assurance maladie l'insuffisance du délai accordé, et sollicité la communication du dossier que par courrier du 6 juin 2008 reçu le 9 juin 2008 la caisse lui a adressé les pièces du dossier en lui faisant part de ce que la décision serait rendue le 13 juin 2008, ce qui lui a laissé un délai de 3 jours ouvrables, notoirement insuffisant pour prendre connaissance du dossier.
L'appelante fait valoir que c'est à tort que la commission de recours amiable a décompté les jours ouvrables jusqu'au 16 juin 2008, puisque la décision devait être prise le 13. De même c'est à tort que le premier juge a estimé que l'employeur avait disposé de 10 jours ouvrés, du 29 mai au 13 juin, pour consulter le dossier et faire valoir ses observations, nonobstant la mention relative au délai de 48 heures pour faire parvenir celle-ci.
En ce qui concerne la communication des pièces du dossier, la sté AAAA fait valoir que le bordereau de pièces communiquées ne mentionne pas les pièces annexées par l'enquêteur de la caisse à son rapport d'enquête, et qu'une communication incomplète est sanctionnée par la cour de cassation, puisque le caractère contradictoire de la procédure n'est pas respecté.
Elle souligne que, la caisse primaire d'assurance maladie n'a pas adressé la déclaration de maladie professionnelle au médecin du travail pour avis, alors que Monsieur X... a indiqué avoir été exposé chez plusieurs employeurs, ce qui ne satisfait pas aux obligations des articles L 441-11 et R441-11 et démontre que le dossier n'a pas été régulièrement constitué.
Elle fait valoir que c'est à tort que le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale a considéré que l'avis motivé du médecin du travail n'est obligatoire qu'en cas de saisine du CRRMP alors que cet avis est prévu par l'article D 461-5, D461-7 à D461-24 pour les maladies provoquées notamment par inhalation de poussières d'amiante ou de silice cristalline (tableaux 30 et 25).
De plus, selon l'appelante, l'avis de l'inspecteur du travail n'a pas été sollicité dans le délai prévu par l'article D 461-9, celui qui a été établi le 7 avril 2008 ne concernant en outre que le cancer et pas la sclérodermie systémique.
Selon la Sté AAAA, ces irrégularités doivent conduire la cour à lui déclarer inopposable la décision reconnaissant le caractère professionnel de l'affection de Monsieur X....
A titre subsidiaire, la Sté AAAA fait valoir que Monsieur X... n'a jamais été exposé à la silice, et que c'est donc à tort que la maladie a été retenue par la Caisse primaire d'assurance maladie sur le fondement du tableau 25, la commission de recours amiable ayant retenu le tableau 25A, alors que les conditions ne sont pas satisfaites. En effet, il faut, d'une part, que le malade ait été exposé aux risques, d'autre part, que l'affection soit désignée dans un tableau, et ait été contractée dans les conditions du tableau.
L'appelante fait valoir que seul le certificat médical initial du Docteur Z... mentionne une origine professionnelle sans qu'aucune pièce médicale ne le confirme, l'enquêtrice mentionnant que c'est ce médecin qui a précisé au patient qu'il avait utilisé de la pâte à polir no 7, alors que ce médecin n'est jamais entré dans l'entreprise, étant rappelé qu'aucune recherche médicale n'a établi l'origine exacte de la maladie.
D'autre part, Monsieur X... a été embauché le 28 mai 1977 et non 1976, en qualité de polisseur mécanique (et non de polisseur manuel), secteur où les produits utilisés n'ont jamais contenu de silice. La preuve de l'exposition aux risques n'est donc pas rapportée, le questionnaire rempli par le salarié confirmant l'activité sur machine même s'il a évoqué de façon inexacte et contradictoire l'utilisation de la pâte à polir no7, allégation que l'enquêtrice elle-même a écartée, n'évoquant qu'une exposition passive.
La Sté AAAA rappelle que dès le questionnaire, elle a réfuté la thèse de la caisse, soulignant que les ateliers étaient divisés en trois secteurs, bénéficiant de protections collectives efficaces par le biais de système d'aération et de filtration d'air, les produits utilisés par Monsieur X... étant exempts de silice (Tripoli d'Espagne) les machines utilisées par lui disposant d'aspirateurs avec filtre à manche, des capteurs étant en outre disposés auprès des outils. Elle estime que la caisse est de mauvaise foi en prétendant que puisque la société a mis en place des systèmes efficaces d'aspiration, c'est qu'elle reconnaît implicitement les risques entraînés par le polissage. Elle est encore de mauvaise foi en versant aux débats une partie du rapport d'intervention de la CRAM de 1988 à 1992, puisque ce document fait référence à des poussières d'aluminium.
Enfin elle fait valoir que l'opérateur qui utilisait la pâte no 7 travaillait en local isolé et fermé, ainsi que le relève l'inspectrice de la caisse en 1992, l'analyse du rapport établissant un niveau très bas d'exposition pour les personnes exposées de sorte que celles n'utilisant pas cette pâte ne se sont pas trouvées en situation de risques de fibroses pulmonaires.
La Sté AAAA considère que l'enquête de l'agent de la caisse ne traduit pas la situation de travail de l'assuré, Monsieur X..., étant précisé qu'il a été mentionné une exposition aux risques de 1976 à 1993 alors que la pâte à polir n'a été utilisée qu'à compter de 1985, ce qui confirme que le salarié en cause ne peut satisfaire à la durée d'exposition de 10 ans requise par le tableau 25.
Elle soutient encore que l'enquêtrice a fait un amalgame entre les différentes activités de la société et mal interprété les déclarations du salarié, qui, semble-t-il, a évoqué " l'explosion d'un embout " ce qui confirme qu'il travaillait sur machine, qu'elle évoque le témoignage d'un monsieur Tournade qui n'a jamais été salarié de l'entreprise.
En outre, l'enquêtrice évoque encore un rapport de la CRAM de mars 2008, faisant état d'un risque pour l'ensemble de l'atelier, car les dispositifs d'aspirations de l'époque ne captaient pas les poussières fines, et un rapport de l'inspection du travail du 7 avril 2008 mentionnant à la fois une exposition due aux travaux réalisés par l'assuré et une exposition passive à la silice, alors que ces documents ne sont pas versés aux débats.
L'appelante critique ces éléments en faisant valoir que le rapport de la CRAM est imprécis et non probant en ce qu'il se fonde essentiellement sur le certificat initial déjà critiqué ci-dessus et sur les affirmations de l'ingénieur conseil de la CRAM, dont les prélèvements n'ont jamais permis une analyse quantitative des poussières dans l'atelier. Enfin si un " rapport de l'inspecteur du travail " est versé aux débats, il est établi ou reproduit sur papier à en tête de la caisse primaire d'assurance maladie, il est imprécis, ne mentionne pas les noms des personnes interrogées, ce qui interdit toute vérification.
Elle indique encore qu'un rapport LICO de 1992 confirme que l'assuré travaillait au polissage mécanique secteur tribofinition et qu'il est consternant de voir la caisse primaire d'assurance maladie affirmer l'utilisation dans ce secteur de pâte marron comme la pâte no7, alors que sont utilisés dans ce secteur des " chips " abrasifs exempts de silice, les salariés utilisant des pelles et des balais pour évacuer les résidus des cuves et non leurs mains.
La Sté AAAA soutient encore que, même en admettant que les conditions d'expositions aux risques soient avérées pour Monsieur X..., la Caisse primaire d'assurance maladie retient comme point de départ 1985, et le salarié a fixé sa fin d'exposition aux risques à 1993, soit 8 années, ce qui ne remplit pas la condition de durée prévue par le tableau 25.
A tout le moins donc la caisse primaire d'assurance maladie devait soumettre le dossier au CRRMP, étant rappelé que le juge du fond n'a pas le pouvoir de soumettre le dossier à un premier CRRMP, mais seulement d'en désigner un second, ce pourquoi la Caisse primaire d'assurance maladie est mal fondée à demander cette désignation.
Aux termes de ses conclusions déposées au greffe le 14 mai 2012, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer en application de l'article 455 du code de procédure civile, la Caisse primaire d'assurance maladie de la Sarthe demande à la cour :
- de confirmer le jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'Angers en date du 22 mars 2011 déclarant opposable la maladie professionnelle,- à titre subsidiaire dans l'hypothèse où la cour estimerait que dans les rapports caisse/ employeur, l'une des conditions administratives ne serait pas remplie, d'ordonner la saisine du CRRMP,- de condamner la société appelante à lui payer le somme de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle fait valoir que l'appelante ne peut prétendre au non respect du contradictoire, la cour de cassation ayant à de nombreuses reprises retenu que la mise à disposition du dossier lors de la clôture de l'instruction a pour seule finalité sa consultation et non l'ouverture d'un débat, que la caisse n'a aucune obligation d'adresser la copie du dossier, que le délai laissé à l'employeur doit être suffisant, étant précisé qu'il n'y a pas lieu de computer les délais comme le fait la Sté AAAA en omettant en particulier le jour de réception de l'avis de clôture. Même si c'est à tort que le courrier du 27 mai 2008 reçu le 29 mai 2008 par l'employeur indiquait de façon erronée qu'il devait adresser ses observations sous 48 heures, en l'espèce la société a obtenu un délai supplémentaire lui permettant ainsi de consulter le dossier du 29 mai au 12 juin, la décision étant finalement reportée par la caisse du 10 juin au 13 juin 2008.
La caisse estime que le grief tenant à l'envoi d'un dossier incomplet est tout aussi inopérant, étant précisé que l'arrêt de la cour de cassation sur lequel s'appuie l'appelante concerne une situation particulière où une caisse avait adressé un dossier avec un bordereau mentionnant l'envoi du dossier intégral, ce qui n'est pas le cas ici. Elle rappelle que les pièces annexées au rapport d'enquête émanaient de l'entreprise elle-même, que l'avis du médecin du travail n'est obligatoire que dans l'hypothèse où la saisine du CRRMP est décidée par la caisse, étant précisé que cet avis ne fait pas partie des pièces consultables par l'employeur en application de l'article R 441-13 du code de la sécurité sociale, et qu'enfin l'avis d'un médecin spécialiste est une option laissée à l'appréciation du médecin conseil.
Elle estime que l'éventuelle omission de l'envoi pour information d'un double de la déclaration de maladie professionnelle au médecin du travail ne peut justifier une violation du principe du contradictoire et l'inopposabilité de sa décision, alors même que l'avis de celui-ci n'avait pas à être requis, étant précisé qu'en l'espèce le médecin du travail de l'entreprise a participé à l'enquête.
Elle ajoute qu'aucune irrégularité ne peut être relevée parce que le médecin conseil aurait dû avoir connaissance de l'avis de l'inspecteur du travail, d'autant que l'un statue sur des éléments médicaux et l'autre sur le respect des conditions d'exposition aux risques, et qu'enfin il n'y a aucune discordance dans la décision de prise en charge et celle notifiée à l'employeur visant le tableau no30, alors que les notifications relatives à la sclérodermie visent bien le tableau no25.
En ce qui concerne la pathologie proprement dite de Monsieur X... et son imputabilité la caisse fait valoir que les conditions prévues par le tableau 25 sont parfaitement remplies, les articles L 461-1 et L l461-2 instituant une présomption d'imputabilité, le recours au CRRMP ne s'imposant que dans le cas où une ou plusieurs conditions du tableau ne sont pas remplies ou que la pathologie non inscrite dans un tableau entraîne une incapacité permanente partielle égale ou supérieure à 25 %.
La caisse fait valoir que le diagnostique de sclérodermie systémique progressive, n'est pas remis en cause par l'employeur, cette pathologie figurant bien au tableau 25, lequel prévoit une liste indicative des travaux exposant à l'inhalation de poussières renfermant de la silice cristalline notamment.
La caisse rappelle qu'elle n'a pas, dans ses rapports avec l'employeur, à démontrer l'inhalation réelle et effective de poussières de silice mais simplement à justifier que le salarié a exercé des travaux l'exposant au risque de la silice.
Elle fait valoir que l'enquête, y compris les déclarations de l'employeur, confirment un problème d'évacuation des poussières de silice et l'utilisation de la pâte à polir no 7 dans l'atelier où travaillait Monsieur X.... Si l'employeur conteste l'exposition de ce salarié, il admet que les machines étaient équipées de système d'aspiration ce qui démontre implicitement que le polissage génère des poussières, étant rappelé qu'une inspection de 1988 relevait que le nettoyage du poste se fait " à la soufflette qui ne fait que déplacer la poussière ", alors que si le polissage se faisait en trois secteurs distincts, mais situés dans le même local, l'enquête réalisée par l'inspecteur du travail et notamment l'audition des salariés a confirmé l'utilisation habituelle d'une pâte marron (ce qui correspond à la pâte no 7) également utilisée sur les machines semi-automatiques ACME, dont la direction a admis que l'assuré s'est servi jusqu'en 1999.
La condition d'exposition aux risques est donc remplie selon la caisse. D'autre part, en ce qui concerne la durée d'exposition la caisse estime que l'enquête démontre une exposition de monsieur X... à la silice de 1985 à 2006.
A titre subsidiaire, la caisse fait valoir que si la cour estimait que les conditions de durée d'exposition au risque ou/ et celle liée au délai de prise en charge n'étaient pas remplies, il conviendrait de lui ordonner de saisir le CRRMP.
MOTIFS DE LA DÉCISION
L'appel régularisé dans les formes et délais prévus par la loi est recevable.
Sur l'opposabilité de la décision de prise en charge de la sclérodermie de Monsieur X... au titre de la maladie professionnelle
A réception de la déclaration de maladie professionnelle relative à la sclérodermie adressée par Monsieur X..., la Caisse primaire d'assurance maladie a avisé l'employeur et a, compte tenu de ses réserves, diligenté une enquête dont la régularité n'est pas remise en cause.
L'article R441-11 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à la cause, stipule qu'en matière de prise en charge par la caisse primaire d'assurance maladie de la maladie professionnelle déclarée, celle-ci assure l'information de la victime, de ses ayants-droits et de l'employeur, préalablement à sa décision, sur la procédure d'instruction et sur les points susceptibles de lui faire grief.
Cette disposition oblige la caisse à l'organisation d'un débat contradictoire avec l'employeur qu'elle doit informer de la fin de la procédure d'instruction, de la possibilité de consulter le dossier et de la date à laquelle elle prévoit de prendre sa décision.
Par courrier recommandé en date du 27 mai, posté le 28 mai, reçu par la société BEZAULT le 29 mai 2008, la caisse primaire d'assurance maladie indiquait :
" Je vous informe qu'à ce jour l'instruction du dossier est terminée. En effet, aucun élément nouveau ne paraît plus devoir intervenir. Préalablement à la prise de décision sur le caractère professionnel de la maladie professionnelle qui interviendra le 10/ 06/ 2008 sclérodermie systémique progressive (vos éventuelles observations doivent nous parvenir dans les 48 heures par fax au 02/ 41/ 81/ 77/ 00), vous avez la possibilité de venir consulter les pièces constitutives du dossier. "
Par courrier recommandé daté du 30 mai 2008 posté le 2 juin 2008 et reçu par la caisse primaire d'assurance maladie le 3 juin 2008, la Société BEZAULT écrivait :
" Nous faisons suite à votre correspondance du 27/ 05/ 2008 nous informant de la clôture de l'instruction du dossier de notre salarié, X... Jean-Pierre et de la possibilité de venir consulter son dossier pendant un délai de 15 jours à compter de la date d'établissement de votre courrier. Or, nous vous informons que nous sommes actuellement dans l'impossibilité de nous déplacer dans un si bref délai. Aussi, afin d'assurer notre complète information, nous vous saurions gré de bien vouloir nous transmettre les pièces constitutives du dossier de M. X.... "
Par courrier recommandé daté et posté du 6 juin 2008, reçu le 9 juin 2008, la caisse primaire d'assurance maladie a adressé à la société BEZAULT le certificat médical initial, la déclaration de maladie professionnelle, l'avis du médecin conseil, le questionnaire de l'assuré, le questionnaire de l'employeur, le rapport d'enquête administrative, le rapport de l'inspecteur du travail, le rapport de l'ingénieur conseil de la CRAM des Pays de Loire, ce courrier précisant :
Vos observations éventuelles doivent nous parvenir avant le 13/ 06/ 20008, date à laquelle la décision sera prise. Vous pouvez nous faxer vos observations au 02/ 41/ 81/ 77/ 00.
Comme l'a relevé le premier juge, aussi inopportune que soit la mention " vos éventuelles observations doivent nous parvenir dans les 48 heures ", il résulte de ce courrier que l'employeur a bien été avisé de la possibilité de prendre connaissance du dossier avant la décision qui devait être prise le 10 juin 2008, si bien qu'il disposait jusqu'à cette date du jeudi 29 mai, du vendredi 30 mai, du lundi 2 au vendredi 6 juin (5 jours), et du lundi 9 juin, soit d'un total de 8 jours pour prendre connaissance du dossier.
Compte tenu de sa demande de pièces, la Caisse primaire d'assurance maladie a avisé la société BEZAULT que la décision serait prise le 13 juin, ce qui a laissé 3 jours supplémentaires, soit 11 jours au total à l'employeur pour consulter le dossier et faire valoir ses observations, l'envoi du second courrier ne pouvant avoir pour effet d'annuler le premier.
La société BEZAULT a donc disposé de tout le temps nécessaire et d'un délai suffisant pour faire parvenir à la Caisse primaire d'assurance maladie ses observations, ce qu'elle s'est d'ailleurs abstenue de faire.
D'autre part, ainsi que cela a été rappelé à plusieurs reprises par la cour de cassation, la caisse primaire d'assurance maladie n'a pas l'obligation d'adresser à l'employeur les pièces du dossier, celui-ci étant consultable dans ses locaux, pas plus qu'elle n'a l'obligation d'adresser l'intégralité du dossier, sauf si elle le mentionne dans son courrier, ce qui n'est pas le cas ici.
S'il est exact que l'article R441-11 prévoit que la caisse adresse un double de la déclaration de maladie professionnelle au médecin du travail, l'article R441. 13 ne prévoit pas que cet avis doit faire partie du dossier constitué par la caisse, et il résulte du dossier d'enquête produit que le docteur A..., médecin du travail de l'entreprise, a participé à cette enquête (rapport de l'inspectrice du 22 avril 2008).
C'est tout aussi vainement que la Sté AAAA reproche à la caisse primaire d'assurance maladie de ne pas lui avoir communiqué l'avis du médecin conseil. L'article D 461-29 invoqué par l'appelante définit en effet les pièces devant figurer dans le dossier soumis par la caisse au CRRMP, procédure réglementée par les articles D461-26 à D461-38 et il ne trouve donc pas à s'appliquer à l'espèce.
Cet article précise de plus en son 8 ème alinéa : " L'avis motivé du médecin du travail et le rapport établi par les services du contrôle médical mentionnés au 2ème et 5ème du présent article ne sont communicables à la victime, ses ayants droit et son employeur que par l'intermédiaire d'un praticien désigné à cet effet par la victime ou, à défaut, par ses ayants droits. Ce praticien prend connaissance du contenu de ces documents et ne peut en faire état, avec l'accord de la victime, ou à défaut, de ses ayants droits, que dans le respect des règles de déontologie ".
La cour relève encore, qu'en application de l'article 461-8, le médecin conseil détermine " s'il y a lieu de solliciter l'avis d'un médecin spécialiste " ; la Sté AAAA est mal fondée de reprocher à la caisse le défaut d'avis d'un tel spécialiste, étant précisé qu'elle n'aurait, pas plus que pour l'avis motivé du médecin du travail, pu en prendre personnellement connaissance.
Comme l'a relevé le premier juge, si la Sté AAAA fait état de ce que le médecin conseil n'a pas eu connaissance de l'avis de l'inspecteur du travail, sans verser aucun élément probant à ce sujet, il ne résulte pas de l'article D461-9 du code de la sécurité sociale, une obligation pour le médecin conseil de rendre un avis au vu de celui de l'inspecteur du travail. L'un donne un avis médical, l'autre un avis technique. En tout état de cause ceci ne porte aucunement atteinte au principe de contradiction posé par l'article R411-11 du code de la sécurité sociale.
C'est donc à juste titre que le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du Mans, a considéré que le dossier avait été régulièrement instruit et qu'aucune violation de l'obligation d'information préalable ne pouvait être reprochée à la caisse.
La cour confirme le jugement en ce qu'il a rejeté le moyen tiré du manquement par la caisse à son obligation d'information et de respect du contradictoire à l'égard de l'employeur.
Sur le caractère professionnel de la maladie
En application de l'article L461-1 du code de la sécurité sociale, " est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau ".
Pour bénéficier de la présomption d'origine professionnelle instituée par ce texte la pathologie dont souffre le salarié doit figurer dans le tableau des maladies professionnelles, remplir la conditions d'exposition aux risques au cours de travaux figurant dans la liste de ce tableau, remplir la condition relative au délai de prise en charge prévue par ce tableau.
a) désignation de la maladie
Le certificat médical initial du 7 janvier 2008 et la déclaration de maladie professionnelle adressés à la caisse primaire d'assurance maladie par Monsieur X... mentionnent qu'il est atteint d'une " sclérodermie systémique progressive " et d'un " cancer broncho pulmonaire primitif. "
La sclérodermie systémique progressive est effectivement inscrite dans le tableau 25 (25 A3) relatif " aux affections consécutives à l'inhalation de poussières minérales renfermant de la silice cristalline (quartz, cristobalite, tridymite), des silicates cristallins (kaolin, talc) du graphyte ou de la houille ".
Le diagnostic de la maladie n'est pas remis en cause, la pathologie de Monsieur X... figure bien dans le tableau 25.
b) sur l'exposition aux risques
Monsieur X... a exercé dans l'entreprise des fonctions de polisseur.
Dans la liste indicative des principaux travaux susceptibles de provoquer notamment la sclérodermie systémique progressive figurent la fabrication et la manutention de produits abrasifs, de poudres à nettoyer ou autres produits renfermant de la silice cristalline.
Pour s'opposer à la reconnaissance de la sclérodermie de Monsieur X... au titre de la maladie professionnelle, la Sté AAAA fait valoir qu'il a exclusivement exercé des fonctions de polisseur mécanique, et n'a jamais utilisé de produit contenant de la silice, contrairement à ce qu'il a déclaré.
En effet, tout en reconnaissant l'utilisation en son sein d'une pâte à polir no 7 contenant de la silice de 1985 à 2006, pendant une période où il exerçait ses fonctions, la Sté AAAA soutient que cette pâte était exclusivement utilisée dans le secteur " polissage manuel " de l'atelier, où Monsieur X... n'a jamais travaillé, et elle conteste les conclusions de l'enquête qu'elle estime non probantes.
Elle soutient que Monsieur X... utilisait des pâtes à polir type VORMEX, exemptes de silice, qu'il travaillait sur des machines mécaniques équipées d'aspirateur avec filtres à manche, et que les trois secteurs de polissage étaient bien séparés, aucune exposition passive aux poussières de silice n'étant démontrée.
Il est constant que Monsieur X... a travaillé dans l'entreprise du 28 mai 1977 au 13 mars 2007, soit pendant près de 30 ans. Dans le questionnaire rempli le 30 janvier 2008 à la demande de la caisse, il décrit :- son activité : polissage de poignée de porte divers, réglage de machine, vérification sorties pâte à polir + avivage, changement tampons vérification de la pièce polie contrôle,- décrit les gestes : debout gestes répétés alimentation chaîne, montage des pièces sur appareils et sur charriots réglages changements de carrés,- les outils : polisseuse, tampons pâte à polir-les produits à disposition : pâte à polir marron no7, savon blanc avivage, Zamack, alu.
L'ingénieur conseil Monsieur B... confirme le 31 mars 2008, que les analyses effectuées par son laboratoire en 1992 ont établi une concentration de plus de 90 % de quartz provenant du tripoli présent dans la pâte à polir. Il ajoute " le risque doit être considéré dans l'ensemble de l'atelier du fait du recyclage de l'air dans les dispositifs d'aspiration de l'époque, et la présence de manches filtrantes, ne captant pas les poussières fines, libérées de fait dans l'atmosphère ".
Au cours de l'enquête l'inspectrice de la caisse a entendu outre Monsieur X..., Madame C... responsable des ressources humaines, Monsieur D... responsable Sécurité et environnement, Madame E..., Infirmière et le Docteur A... médecin du travail. Son rapport a été déposé le 22 avril 2008.
Il en résulte qu'au début de sa carrière Monsieur X... a travaillé sur machine individuelle ACME (touret à polir), il étalait à la main la pâte à polir (sous forme de pain) sur le tampon de la meuleuse, puis essuyait les pièces avec une poudre, les morceaux des pains étaient refondus et ré employés. Il a ensuite travaillé sur des machines à polir mécanique où la pâte était étalée par pression d'air au pistolet sur un premier tampon puis les pièces passaient sur deux autres tampons où se trouvait une pâte blanche (savon d'avivage). Il réglait la machine, les changements de tampons, vérifiait les pièces polies, assurait le nettoyage avec une soufflette et en ressortait avec le visage noire. Suivant la charge de travail il a aussi travaillé en tribofinition.
L'enquêtrice relève que les 3 secteurs : ACME, polissage mécanique et tribofinition se trouvaient dans le même atelier, sans séparation. Elle précise " actuellement les machines sont capotées depuis peu ".
Selon Monsieur X..., il ne connaissait pas les noms des produits utilisés, qui ont changé en fin de son activité, c'est son médecin qui lui a donné le nom de " pate no7 ", il n'avait pas de protection individuelle, le système d'aspiration des machines n'était pas toujours efficace.
Monsieur D... a confirmé que Monsieur X... avait pu commencé à travailler sur ACME, suivant le travail il pouvait intervenir en tribofinition. L'enquêtrice a visité l'atelier avec les personnes citées, lequel a évolué dans le temps :
- Le polissage manuel : au début des années 80, il existait 25 à 35 machines à polir manuellement, en 2008 il en reste 4 ou 5, les 3/ 4 de l'atelier était composé de polissage manuel, le reste en polissage mécanique, le pain pour graisser est frotté sur le tampon de feutre servant à polir.
L'inspectrice rapporte une déclaration (sans préciser l'identité du déclarant) selon laquelle Monsieur X... n'a pas travaillé au poste de polissage manuel.
- le polissage mécanique les ACME ont disparu (fin d'utilisation en 1999, il en reste une dans l'entreprise, il s'agit de machines semi automatique, la pâte à polir no 7 a été très faiblement employées sur les ACME. Sur les machines METABO, l'opérateur place les pièces sur un carrousel, passent dans la machine, la pâte à polir puis la pâte d'avivage sont envoyées par pistolet à pression. Il est relevé qu'elles sont maintenant capotées (depuis 2001 et 2002) pour éviter les projections, mais on constate la présence de résidus sur la machine (poussière de pâte et feutre)
- la tribofinition les pièces sont déposées dans un cuve, mélangées à des abrasifs (" chips sans sicile) sous milieu aqueux, Monsieur X... a pu intervenir dans ce secteur suivant la charge de travail.
Quant aux produits utilisés, Monsieur D... a confirmé que la pâte à polir no7 a été fabriquée dans l'entreprise dans un local fermé attenant à l'atelier, jusqu'en 1996. Elle a été achetée de 1996 à 2006. Des relevés ont été fournis par l'employeur pour la période de 1998, 1999 et 2007.
Sont utilisés des pâtes VORNEX, qui ne sont pas en cause en l'espèce.
L'enquêtrice note encore que le Docteur A... lui a déclaré que Monsieur X... a été atteint d'un cancer de la peau en 2007 qui selon lui est à l'origine de la pathologie actuelle, mais la cour retient que cette information n'a pas été relevée par les parties qui n'en tirent aucun argument.
L'inspecteur du travail, Madame F..., a établi le 7 avril 2008 un rapport à la suite de son enquête diligentée sur le site le 26 mars 2008.
Ses constatations sont pratiquement identiques à celles faites par l'enquêtrice de la caisse.
Elle précise que la pâte no 7 a été utilisée dans l'entreprise " pendant une période allant au moins de 1992 à 2006. " Elle ajoute qu'en 1992 un rapport a été établi par le laboratoire interrégional de chimie de l'ouest (LICO) de la CRAM des Pays de Loire, suite à une intervention au sein de l'atelier de polissage le 17 novembre 1992, et qu'il concluait " la préparation de la pâte à polir no7 expose vraisemblablement l'opérateur à un risque de silicose. Ce point mérite d'être reconsidéré. "
Elle relève également que l'atelier comportait 25 à 30 machines à polir manuelles, qu'il reste 3 émeriseuses et 2 tourets à polir, équipés d'un système d'aspirations générées par le polissage.
En ce qui concerne les machines automatiques, les pâtes à polir ne contiennent pas de silice, mais " il n'y a aucune certitude sur l'absence de silice dans les pâtes à polir utilisées dans les années 80-90 que ce soit au polissage manuel ou au polissage mécanique ".
Elle précise cependant :
" On peut relever dans le rapport LICO précité établi en 1992, la présence de quartz aux machines de vibrofinition au polissage mécanique : la présence de quartz est détectée mais la quantité de matière collectée est insuffisante pour permettre une analyse quantitative précise. D'ailleurs le jour des prélèvements du LICO, Monsieur X... était l'un des opérateurs affectés aux cuves de tribofinition ". Selon le salarié il était affecté une semaine par mois à ce poste.
En ce qui concerne la situation du salarié Monsieur X..., l'inspecteur du travail relève que si selon l'employeur, celui-ci a travaillé exclusivement au poste et dans le secteur de polissage mécanique par brossage, cela est contredit par le rapport LICO de 1992 car lors des prélèvements, il était au poste de tribofinition, et par les déclarations de l'intéressé et d'autres salariés.
L'inspectrice rapporte que Monsieur X... reconnaît avoir été essentiellement affecté aux machines à polir mécaniques par brossage, mais il a maintenu qu'au début de son activité professionnelle l'atelier il a été affecté sur tourets à polir, y avoir appliqué de la pâte à polir sur les bandes de feutre, ce qui dégageaient de la poussière à proximité des voies respiratoires, que les machines étaient équipées d'aspiration mais selon lui et deux autres salariés, pas toujours efficace, ils utilisaient une pâte marron, (parfois de la bleue) y compris sur les machines ACME.
D'autre part, il n'est pas contesté que les salariés devaient, à chaque fin de poste, nettoyer les machine, par grattage, à la balayette et à la soufflette, de la poussière se dégageait lors de ces opérations, étant précisé qu'à partir de 2001 ou 2002 ces opérations ont été confiées à une entreprise extérieure.
L'inspectrice relève en fin de son rapport que l'empoussièrement de l'atelier doit être pris en compte.
La cour relève que tout en prétendant que les rapports de 1988 et 1992 ne lui auraient pas été communiquées, la Sté AAAA en dispose cependant puisqu'elle tire argument de certaines des constatations faites à l'époque (ainsi elle indique qu'il est démontré que Monsieur G... travaillait uniquement au polissage mécanique puisqu'il était au poste de tribofinition lorsque des prélèvements ont été effectués en 1992).
L'ensemble de ces éléments démontrent que même s'il a principalement travaillé en qualité de polisseur sur machine, comme le soutient la Sté AAAA, Monsieur X... a aussi accompli une partie de sa tâche sur des machines ACME semi automatiques où était utilisée une pâte à polir marron correspondant à la pâte no7 contenant de la silice.
La cour relève que la Sté AAAA n'a pas contesté que cette pâte ait été régulièrement utilisée sur les machines de polissage manuel jusqu'en 2006, étant rappelé que dans les années 1980 celles-ci occupaient les trois quart de l'atelier. Même si ces machines étaient dotées d'appareil d'aspiration, ce qui confirme l'émission de poussière, la présence de quartz étant d'ailleurs établie en 1988 (il importe peu qu'aucun dosage n'ait été réalisé) et le risque de silicose souligné en 1992, ces installation étaient insuffisantes puisque la réalité de l'" empoussièrement " de l'atelier résulte des éléments de l'enquête, notamment des témoignages des personnes qui ont travaillé dans l'entreprise en même temps que Monsieur X....
Le nettoyage des machines " à la soufflette " qui noircissait le visage des employés confirme le dégagement des poussières, en l'absence de masque de protection. Des capots ont été installés sur les machines seulement à partir de 2001.
Enfin quoique prétendant que l'atelier était divisé en trois secteurs, bien distincts, aucune séparation ou cloison n'a jamais été installée par l'employeur.
La cour constate d'ailleurs que tout en remettant en cause les conclusions de l'enquête, la Sté AAAA procède par voie d'affirmation et ne verse aucune pièce contredisant les éléments détaillés ci-dessus.
Il apparaît ainsi que soit de façon directe, en utilisant lui-même de la pâte à polir no7, soit en étant soumis même de façon passive, à la présence de poussière de silice dans l'atelier où il a travaillé,, Monsieur X... a bien été exposé au risque visé par le tableau 25 du fait de la présence de silice cristalline sur son lieu de travail.
c) quant au délai de prise en charge, le tableau no25 prévoit un délai de 15 ans, sous réserve d'une exposition minimale de 10 ans.
Nonobstant l'affirmation de la Sté AAAA qui admet une utilisation de la pâte no7 de 1985 à 2006, alors que Monsieur X... indique l'avoir utilisée dès le début de son activité professionnelle en 1977, il apparaît que le salarié a été exposé au risque pendant au moins 21 ans, la première constatation médicale de la maladie résultant du certificat médical du 7 janvier 2008, établi moins de deux années après la cessation de l'usage du produit en cause.
C'est donc à juste titre que le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'Angers a considéré que les éléments de l'enquête établissent de façon objective l'exposition au risque de Monsieur X... dans le cadre de ses activités professionnelles pour une durée d'au moins dix ans en ce qui concerne la sclérodermie systémique progressive, et que c'est par une juste application de l'article L461-1 alinéa 1 du code de la sécurité sociale que la Caisse primaire d'assurance maladie du Maine et Loire a reconnu le caractère professionnel de cette maladie.
La demande de renvoi du litige devant le CRRMP est en conséquence sans objet et la demande d'inopposabilité de l'employeur mal fondée.
La cour confirme le jugement en toutes ses dispositions.
Sur l'indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile
La cour dit n'y avoir lieu à application de application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la caisse primaire d'assurance maladie mais fait application de l'article 144-10 alinéa 2 du code de la sécurité sociale à l'encontre de l'appelante.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Déclare la société ASSA ABLOY AUVE ANJOU recevable en son appel ; Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Fixe le droit d'appel prévu par l'article R. 144-10 alinéa 2 du code de la sécurité sociale à la charge de l'appelante qui succombe au 10ème du montant mensuel du plafond prévu à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale et condamne la Société ASSA ABLOY AUVE ANJOU au paiement de ce droit ainsi fixé.