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31/03/2015 | FRANCE | N°13/00646

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 31 mars 2015, 13/00646


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N clm/ jc

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 00646.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 31 Janvier 2013, enregistrée sous le no 12/ 00244

ARRÊT DU 31 Mars 2015

APPELANT :

Maître Franklin Y..., mandataire liquidateur de l'Association PROMO JEUNES 49 ...... 49102 ANGERS CEDEX

non comparant-représenté par Maître TORDJMAN, de la SCP ACR, avocats au barreau d'ANGERS
INTIMES :
Monsieur François X...

... 49460 MONTREUIL JUIGNE

comparant-assisté de Maître LUCAS, avocat au barreau D'ANGERS

L'Association...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N clm/ jc

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 00646.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 31 Janvier 2013, enregistrée sous le no 12/ 00244

ARRÊT DU 31 Mars 2015

APPELANT :

Maître Franklin Y..., mandataire liquidateur de l'Association PROMO JEUNES 49 ...... 49102 ANGERS CEDEX

non comparant-représenté par Maître TORDJMAN, de la SCP ACR, avocats au barreau d'ANGERS
INTIMES :
Monsieur François X...... 49460 MONTREUIL JUIGNE

comparant-assisté de Maître LUCAS, avocat au barreau D'ANGERS

L'Association pour la Gestion du Régime de Garantie des Créances des Salariés intervenant par L'UNEDIC CGEA de RENNES Immeuble Magister 4 Cours Raphaël Binet 35069 RENNES CEDEX

non comparante-représentée par Maître TOUZET, avocat substituant Maître CREN de la SCP SULTAN-PEDRON-LUCAS-DE LOGIVIERE-RABUT, avocats au barreau d'ANGERS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Février 2015 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anne JOUANARD, président Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller Madame Anne LEPRIEUR, conseiller Greffier : Madame BODIN, greffier.

ARRÊT : prononcé le 31 Mars 2015, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******
FAITS ET PROCÉDURE :
Le 24 janvier 1997, M. François X... a été embauché par l'association PROMOSERVICES qui gérait à Angers un centre d'hébergement et de réinsertion sociale (un CHRS) et un centre de formation.
Il n'est pas discuté que, le salarié étant alors affecté au CHRS, la relation de travail était soumise à la convention collective nationale de travail des Etablissements et Services pour Personnes Handicapées du 15 mars 1966, mise à jour au 15 septembre 1976.
A compter du 1er janvier 2000, l'association PROMO JEUNES 49 a repris les activités de l'association PROMOSERVICES et M. François X... est devenu son salarié ce qui a donné lieu à la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée le 19 janvier 2000.
L'association PROMO JEUNES 49 a alors engagé M. François X... en qualité de formateur en bâtiment catégorie " technicien qualifié " 2ème degré, niveau hiérarchique D 2, coefficient 220 de la convention collective nationale des Organismes de Formation du 10 juin 1988, le salarié étant affecté au centre de formation et non plus au CHRS.
Ce contrat de travail comportait la clause suivante : " Ce contrat est signé dans le cadre de la Convention Collective Nationale des Organismes de Formation de 1988. Toutefois les avantages sociaux de la convention collective nationale du 15 Mars 1966 vous sont conservés pendant toute la durée du présent contrat. ".
Dans le dernier état de la relation de travail, la rémunération brute mensuelle de M. François X... s'établissait à la somme de 2 362, 05 ¿.
Par courrier du 2 décembre 2004, arguant de la clause ci-dessus, faisant valoir qu'en vertu de son contrat de travail, il devait bénéficier, entre autres, de " la progression de carrière liée à l'ancienneté " et de cinq jours de congés supplémentaires et faisant observer que son salaire était anormalement bloqué depuis l'année 2000, qu'il n'avait pas perçu les revalorisations dues au titre de l'ancienneté en vertu de la convention collective du 15 mars 1966 et qu'il n'avait pas bénéficié des cinq jours de congés supplémentaires, M. François X... a demandé à l'association PROMO JEUNES 49 de procéder au paiement des sommes dues. En janvier 2005, cette dernière lui a payé la somme de 1 928, 61 ¿ à titre de rappel de salaire du chef de la période du 1er juillet 2002 au 31 décembre 2004.
Le 21 décembre 2010, M. François X... a été victime d'un accident du travail qui a nécessité un arrêt de travail jusqu'au 14 janvier 2011 à l'issue duquel il n'a pas bénéficié de visite médicale de reprise auprès de la médecine du travail.
Par lettre recommandée du 10 janvier 2011, l'association PROMO JEUNES 49 lui a fait connaître que, rencontrant " des importantes difficultés ", sans autre précision, elle envisageait de supprimer plusieurs postes de travail dont le sien. Elle ajoutait qu'" avant toute décision et toute démarche complémentaire sur l'avancement de la procédure ", elle l'informait de ce que des recherches de reclassement avaient été effectuées en son sein et auprès des associations partenaires.
Elle lui soumettait les deux seuls postes identifiés, à savoir, un poste de référent socio-culturel pour une durée hebdomadaire de travail de 10 heures et un poste d'animateur en CDD de douze mois représentant " environ 20 % d'un temps complet ", chaque emploi étant rémunéré 518 ¿ bruts par mois. La première proposition devant donner lieu à la conclusion d'un avenant à son contrat de travail, l'employeur demandait au salarié de se prononcer avant le 17 janvier 2011.
Ayant refusé ces emplois, par lettre du 7 février 2011, M. François X... a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour motif économique fixé au 16 février suivant.
A l'occasion de cet entretien, l'association PROMO JEUNES 49 lui a remis en main propre les documents relatifs à la proposition de convention de reclassement personnalisé et un courrier exposant les raisons économiques motivant la procédure de licenciement.
Par courrier du 1er mars 2011, l'association PROMO JEUNES 49 a notifié à M. François X... son licenciement pour motif économique dans les termes suivants constituant la stricte reprise de ceux du courrier remis le 16 février 2011 :
" Monsieur, Nous faisons suite à l'entretien du 16 février dernier. Nous avons été contraints d'engager une procédure de licenciement pour motif économique à votre égard. L'Association Promojeunes 49 rencontre des difficultés qui l'ont obligée à engager une procédure de licenciement économique pour les raisons suivantes. " La réduction des financements publics indispensables, un positionnement nouveau de mise en concurrence dans plusieurs domaines d'activités, autant que l'accroissement des coûts d'exploitation et de gestion aboutissent à une mise en difficulté de nombreuses associations. L'Association Promojeunes 49 est gravement touchée par ces difficultés. Depuis 2000, l'activité formation est en très net déséquilibre. En effet, en quelques années les contraintes externes sur cette activité se sont multipliées. Le recours obligé aux appels d'offre, a entraîné une mise en concurrence accrue entre les structures associatives et Promojeunes 49 n'a pas été en mesure de répondre à certains marchés attribués par appels d'offres publics car les contraintes posées aux candidats étaient au delà de ses capacités de réponse. Cette perte de marchés s'est traduite par une importante baisse d'activité d'autant plus importante que les actions financées par le Conseil régional ont été réduites et que les taux de financement n'ont pas évolué au rythme des dépenses. Par ailleurs des actions à la gestion extrêmement tendues comme l'ADEC, pilotées par le GRETA, et co-réalisées par un ensemble d'organismes associatifs dont Promojeunes 49, sont contraintes de restituer des sommes importantes aux fonds européens et ceci après une clôture d'exercice de plusieurs années. En 10 ans les produits ont diminué de 450. 000 ¿. Dans le même temps les charges ont progressé de façon conséquente. Sur les deux exercices, la perte de produits a été particulièrement brutale. Ainsi, sur 2007/ 2008, le chiffre d'affaires de la formation a été de 754. 590 ¿. Il était de 532. 552 ¿ sur l'exercice 2008/ 2009 et de 488. 596 ¿ sur l'exercice 2009/ 2010.

En 2 exercices, Promojeunes a enregistré une perte de 270. 000 ¿ sur la seule activité formation. Cette situation met en danger l'ensemble de la structure et les emplois de tous les salariés. Les fonds propres de Promojeunes 49 n'existent plus aujourd'hui. Ils étaient négatifs au 31. 12. 08 (-338. 000 ¿) et ont atteint-390. 000 ¿ au 31. 12. 2009. Quant à la situation globale de Promojeunes 49 elle est déficitaire, et les pertes enregistrées sur la formation sont principalement la cause de ce déséquilibre. Les comptes de Promojeunes 49 arrêtés sur la fin de l'exercice 2010, présentent une situation d'exploitation déficitaire globale conséquente. Face à cette situation qui met en danger l'ensemble de la structure et des salariés, le conseil d'administration a pris la décision d'arrêter les prestations du centre de formation pour 2011. Pour 2011, l'association n'envisage pas de perspective satisfaisante de redémarrage de l'activité, et les perspectives macro-économiques (déficit public, compressions budgétaires du Conseil général, retraite) ne permettent pas d'envisager un retour à ta croissance. C'est pourquoi, le conseil d'administration a décidé de procéder à une réorganisation impliquant l'arrêt des prestations de formation et la suppression de 8 postes et ce afin d'assurer la pérennité de l'association. Des recherches de reclassement internes ont été réalisées au sein de Promojeunes 49, auprès des associations partenaires que sont A'Tout Métier et Ménage Service, ou encore d'autres organismes de formation. Malheureusement, aucun poste n'a pu être identifié pour vous être proposé. Les solutions de reclassement partiel qui vous ont été proposées n'ont pas recueilli votre accord. C'est pourquoi nous sommes contraints par la présente de vous notifier votre licenciement pour motif économique.... ".

La lettre de licenciement se poursuit par les mentions relatives à la convention de reclassement personnalisé, au préavis, à la remise des documents de fin de contrat, à la priorité de réembauchage, aux droits acquis en matière de DIF, au délai ouvert pour contester la mesure de licenciement.
Le 3 mars 2011, M. François X... a adhéré à la convention de reclassement personnalisé. Le 10 mars suivant, l'employeur lui a adressé ses documents de fin de contrat.
Le 29 février 2012, M. François X... a saisi la juridiction prud'homale afin de voir déclarer son licenciement nul et d'obtenir le paiement de la somme de 30 000 ¿ à titre de dommages et intérêts de ce chef outre 8 885, 19 ¿ à titre de complément d'indemnité de licenciement.
Par jugement du 29 mars 2012, l'association PROMO JEUNES 49 a été placée en liquidation judiciaire et M. Y... désigné en qualité de liquidateur judiciaire.
Par jugement du 31 janvier 2013 auquel il est renvoyé pour un ample exposé, le conseil de prud'hommes d'Angers a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
- déclaré nul le licenciement de M. François X... ;- fixé sa créance au passif de la liquidation judiciaire de l'association PROMO JEUNES 49 aux sommes suivantes : ¿ 28 000 ¿ " nets de charges " à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul, ¿ 8 885, 19 ¿ " nets de charges " à titre de solde d'indemnité de licenciement, ces sommes, avec " intérêts de droit " ;- condamné M. Y... ès-qualités à payer à M. François X... la somme de 1 200 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;- déclaré le jugement commun au " C. G. E. A de Rennes " et dit que les condamnations lui étaient opposables en tant que gestionnaire de l'AGS dans les limites prévues par l'article L. 3253-8 du code du travail et les plafonds prévus par les articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du même code ;- débouté M. Y... ès qualités de sa demande formée au titre des frais irrépétibles et l'a condamné aux dépens.

M. Y... pris en qualité de liquidateur judiciaire de l'association PROMO JEUNES 49 a régulièrement relevé appel de cette décision par lettre recommandée postée le 1er mars 2013.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Vu les conclusions et observations orales des parties à l'audience des débats du 17 février 2015 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés ;
Vu les conclusions enregistrées au greffe le 4 février 2015, régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience aux termes desquelles M. Y... pris en qualité de liquidateur judiciaire de l'association PROMO JEUNES 49 demande à la cour :
- d'infirmer le jugement entrepris ;- de débouter M. François X... de l'ensemble de ses prétentions ;- de déclarer le présent arrêt opposable à l'Association pour la Gestion du Régime de Garantie des Créances des Salariés-C. G. E. A de Rennes ;- de le condamner à lui payer la somme de 2 000 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.

L'appelant fait valoir en substance que :
s'agissant du licenciement :- l'application d'une règle de droit ne pouvant pas conduire à la négation d'une situation de fait, nonobstant l'absence de visite médicale de reprise, le salarié ne peut pas sérieusement soutenir que son contrat de travail était suspendu au moment du licenciement dans la mesure où il avait alors repris le travail depuis le 14 janvier 2011 ;- l'article L. 1226-9 du code du travail prévoit expressément la possibilité de rompre le contrat de travail lorsqu'il est suspendu à condition de justifier soit d'une faute grave du salarié, soit de l'impossibilité pour l'employeur de maintenir le contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie ;- il appartient aux juges du fond d'apprécier si, dans la réalité des faits, il existait une possibilité sérieuse de maintenir ou non le contrat de travail du salarié ;- au cas d'espèce, il est démontré qu'il n'en existait pas dans la mesure où les difficultés économiques de l'association commandaient d'arrêter toutes les activités du centre de formation ;

s'agissant du rappel d'indemnité de licenciement :- ni le législateur, ni la jurisprudence ne prévoient la possibilité pour l'employeur d'appliquer simultanément deux conventions collectives ;- au sein de l'association PROMO JEUNES 49, la convention collective du 15 mars 1966 s'appliquait aux seuls salariés du CHRS, tandis que les salariés du Centre de formation relevaient de l'application de la convention collective nationale des Organismes de Formation de 1988 ;- dans la mesure où il ne travaillait plus au CHRS, M. François X... ne peut donc pas soutenir que l'ensemble des dispositions plus favorables de la convention collective nationale du 15 mars 1966 devaient lui être appliquées ;- la clause du contrat de travail qu'il invoque, selon laquelle lui étaient " conservés " pendant la durée du contrat de travail les avantages sociaux de la convention collective du 15 mars 1966, fait nécessairement référence à la notion d'avantages individuels acquis et cette clause constituait seulement une clause de maintien des avantages individuels acquis ;- or, aucun droit ne lui était acquis ou ouvert au titre de l'indemnité de licenciement à la date du 19 janvier 2000.

Vu les conclusions enregistrées au greffe le 12 février 2015, régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience aux termes desquelles M. François X... demande à la cour :

- de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;- de condamner en tant que de besoin C. G. E. A de Rennes à garantir le paiement des sommes allouées ;- de condamner M. Y... ès-qualités à lui payer la somme de 2 000 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.

Le salarié fait valoir en substance que :
s'agissant du licenciement :- en l'absence de visite de reprise organisée après son arrêt de travail pour accident du travail, à la date du licenciement, son contrat de travail était suspendu, peu important qu'il ait en fait repris le travail ;- la lettre de licenciement se contentant de faire état d'un motif économique sans mentionner expressément l'impossibilité de maintenir son contrat de travail pour un motif étranger à son accident du travail, le licenciement est nul ;- en outre, l'employeur ne peut pas sérieusement soutenir que le maintien du contrat de travail était impossible puisqu'il lui a soumis deux propositions de reclassement ;- son licenciement est en tout cas dépourvu de cause réelle et sérieuse en ce que l'employeur, qui ne justifie d'aucune recherche loyale, sérieuse et personnalisée de reclassement à son égard, n'a pas satisfait à son obligation de reclassement ;- contrairement à ce que soutient l'AGS, l'adhésion à la convention de reclassement personnalisé ne peut pas être assimilée à une rupture conventionnelle ; il est donc parfaitement fondé à invoquer la nullité de son licenciement pour violation des dispositions d'ordre public de l'article L. 1226-9 du code du travail ;

s'agissant du rappel d'indemnité de licenciement :- à l'appui de cette demande, il n'invoque ni la loi, ni la jurisprudence mais l'engagement contractuel pris par son employeur aux termes du contrat de travail du 19 janvier 2000 d'appliquer cumulativement les deux conventions collectives en cause ;- dans une telle hypothèse, il convient d'appliquer les dispositions les plus favorables ;- il est donc fondé à solliciter l'application de l'article 17 de la convention collective du 15 mars 1966 dont les dispositions sont plus favorables s'agissant de l'indemnité de licenciement.

Vu les conclusions enregistrées au greffe le 8 janvier 2015, régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience aux termes desquelles l'Association pour la Gestion du Régime de Garantie des Créances des Salariés intervenant par l'UNEDIC, association gestionnaire de l'AGS-C. G. E. A de Rennes demande à la cour :
- de lui donner acte de son intervention par C. G. E. A de Rennes ;- d'infirmer le jugement entrepris ;- à titre principal, de débouter M. François X... de l'ensemble de ses prétentions ;- à titre subsidiaire, au cas où une créance serait fixée au profit de M. François X... à l'encontre de la liquidation judiciaire de l'association PROMO JEUNES 49, de juger qu'elle ne sera garantie par l'AGS que dans les limites prévues par l'article L. 3253-8 du code du travail et les plafonds prévus par les articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du même code ;- de condamner M. François X... aux entiers dépens.

L'AGS fait valoir en substance que :
s'agissant du licenciement :- dès lors que M. François X... a adhéré à la convention de reclassement personnalisé, son contrat de travail n'a pas été rompu unilatéralement par l'employeur mais l'a été d'un commun accord ;- il ne peut donc pas se prévaloir des dispositions de l'article L. 1226-9 du code du travail pour poursuivre la nullité de son licenciement ;- à titre subsidiaire, le montant de l'indemnité allouée par les premiers juges apparaît excessif au regard des justificatifs produits ;

s'agissant du rappel d'indemnité de licenciement : les termes de la clause invoquée, notamment le mot " conservés ", commande de considérer que la clause concerne nécessairement des avantages individuels déjà existants et non des droits futurs et hypothétiques.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur le licenciement :
En vertu des dispositions des articles R. 4624-21 et R. 4624-22 alinéa 2 du code du travail dans leurs versions applicables à la cause, dans la mesure où il avait été placé en arrêt de travail et absent de l'entreprise pour cause d'accident du travail pendant au moins huit jours, M. François X... aurait dû bénéficier d'une visite de reprise au plus tard dans les huit jours suivant sa reprise du travail intervenue le 15 janvier 2011.
Il incombe à l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs au sein de l'entreprise, d'assurer l'effectivité de cette visite médicale de reprise auprès de la médecine du travail.
Au cas d'espèce, il ne fait pas débat que le salarié n'a pas bénéficié de cette visite et, en tout cas, M. Y... ès qualités n'en rapporte pas la preuve.
Il s'ensuit qu'en l'absence de visite de reprise, au moment du licenciement, le contrat de travail de M. François X... se trouvait suspendu depuis le 21 décembre 2010 et la circonstance que, dans les faits, il ait repris le travail le 15 janvier 2011 n'a pas été de nature à mettre fin à cette situation juridique.
En application des dispositions de l'article L. 1226-9 du code du travail, dans la mesure où, au moment de la rupture, le contrat de travail de M. François X... se trouvait suspendu depuis le 21 décembre 2010 en raison d'un arrêt de travail justifié par un accident du travail, l'association PROMO JEUNES 49 ne pouvait le licencier que motif pris d'une faute grave ou de l'impossibilité pour elle de maintenir son contrat de travail pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie, la violation de ces dispositions étant, aux termes de l'article L. 1226-13 du code du travail sanctionnée par la nullité du licenciement.
Dans un tel cas, la lettre de licenciement doit préciser les motifs qui rendent impossible le maintien du contrat de travail, l'énoncé d'un motif économique, c'est à dire des raisons économiques motivant le licenciement et de leur conséquence sur l'emploi n'étant pas de nature à satisfaire à cette exigence, de même que l'existence d'un motif économique de licenciement ne caractérise pas, à elle seule, l'impossibilité pour l'employeur de maintenir le contrat de travail du salarié pendant les périodes de protection dont il bénéficiait.
Contrairement à ce que soutient l'Association pour la Gestion du Régime de Garantie des Créances des Salariés, le fait que M. François X... ait adhéré à la convention de reclassement personnalisé qui lui était proposée ne le prive pas de la possibilité de contester soit le motif même de son licenciement, soit le bien fondé du motif économique.
L'assimilation proposée par l'AGS entre rupture conventionnelle et conséquence de l'adhésion à la convention de reclassement personnalisé ne saurait être retenue. En effet, s'il est exact que l'adhésion du salarié à la convention de reclassement personnalisé qui lui est proposée entraîne une rupture réputée intervenir d'un commun accord, il n'en reste pas moins que cette rupture trouve son origine dans une décision unilatérale de l'employeur de rompre le contrat de travail en engageant une procédure de licenciement pour motif économique et non pas, comme tel est le cas de la rupture conventionnelle, dans une décision conjointe du salarié et de l'employeur. En outre, telle qu'elle est organisée par la loi et réglementée, la rupture conventionnelle présente des garanties importantes du consentement contractuel du salarié qui ne se retrouvent pas dans l'adhésion à la convention de reclassement personnalisé. Ce moyen doit donc être écarté.

Au cas d'espèce, si la lettre de licenciement adressée à M. François X... le 1er mars 2011 comporte l'énoncé d'un motif économique de licenciement, à savoir la suppression de l'emploi de ce dernier et l'existence de difficultés économiques importantes de l'association liées au manque de rentabilité de l'activité " formation " et même aux pertes qu'elle générait, le tout constituant, selon l'employeur, une menace pour l'ensemble de la structure et de ses salariés, elle ne mentionne pas de motif, non lié à l'accident du travail, pour lequel l'employeur se serait trouvé dans l'impossibilité de maintenir le contrat de travail du salarié, pas plus qu'elle ne précise en quoi les raisons économiques invoquées l'auraient placé dans cette impossibilité.
En effet, l'indication de l'arrêt de l'activité " formation " et de la suppression de 8 postes dont celui de M. François X... ne suffit pas à caractériser l'impossibilité pour l'employeur de maintenir le contrat de travail de ce dernier.
Il s'ensuit que, la lettre de licenciement adressée à M. François X... n'étant pas motivée conformément aux exigences légales, son licenciement doit être déclaré nul pour avoir été prononcé en violation des dispositions de l'article L. 1226-9 du code du travail.
M. François X..., qui ne réclame pas sa réintégration, a droit à une indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant pour lui du caractère illicite de son licenciement et au moins égale à celle prévue par l'article L. 1235-3 du code du travail, c'est à dire au moins égale aux salaires des six derniers mois dont le montant s'est élevé en l'occurrence à la somme de 14 372, 30 ¿.
En considération de la situation particulière de M. François X..., notamment, de son âge (47 ans) et de son ancienneté (presque 11 ans et 2 mois) au moment du licenciement, de sa formation et de sa capacité à retrouver un emploi, des circonstances de la rupture, les premiers juges ont fait une exacte appréciation du préjudice subi en lui allouant la somme de 28 000 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul.
Sur le rappel d'indemnité de licenciement :
Le contrat de travail conclu le 19 janvier 2000 entre l'association PROMO JEUNES 49 et M. François X... comportait la clause suivante : " Ce contrat est signé dans le cadre de la Convention Collective Nationale des Organismes de Formation de 1988. Toutefois les avantages sociaux de la convention collective nationale du 15 Mars 1966 vous sont conservés pendant toute la durée du présent contrat. ".
Comme l'ont exactement retenu les premiers juges, il résulte des termes de cette clause que l'employeur s'est engagé à appliquer à M. François X... cumulativement la convention collective nationale des Organismes de Formation du 10 juin 1988 et la convention collective nationale de travail des Etablissements et Services pour Personnes Handicapées du 15 mars 1966.
En effet, étant rappelé qu'il ne fait pas débat que, du 24 janvier 1997 au 1er janvier 2000, le contrat de travail du salarié était soumis à cette dernière convention collective en ce qu'il était affecté au CHRS, l'indication selon laquelle le contrat de travail était conclu dans le cadre de la convention collective nationale des Organismes de Formation du 10 juin 1988 mais que les " avantages sociaux " de la convention collective nationale du 15 mars 1966 lui étaient " conservés " signifie bien que l'association PROMO JEUNES 49 s'est engagée à continuer de lui appliquer les dispositions de la convention collective nationale du 15 mars 1966 plus favorables que celles de la convention collective nationale du 10 juin 1988.
C'est d'ailleurs ce qu'elle a mis en oeuvre en lui réglant un rappel de salaire de près de 2 000 ¿ en janvier 2005.
Le terme " avantages sociaux de la convention collective nationale du 15 Mars 1966 " contenu dans la clause litigieuse ne se confond pas ici avec la notion d'" avantages individuels acquis " régie par les articles L. 2261-13 et 2261-14 du code du travail en cas de dénonciation ou de mise en cause d'une convention collective à laquelle en est substituée une autre. C'est en conséquence à juste titre qu'en application de l'article 17 de la convention collective nationale des Etablissements et Services pour Personnes Handicapées du 15 mars 1966, les premiers juges ont alloué à M. François X... la somme de 8 885, 19 ¿ à titre de complément d'indemnité de licenciement, cette somme, dont le montant n'est pas discuté, procédant d'une exacte appréciation des droits du salarié.

Le jugement entrepris sera également confirmé de ce chef.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, en matière sociale, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Condamne M. Y... pris en qualité de liquidateur judiciaire de l'association PROMO JEUNES 49 à payer à M. François X... la somme de 1 500 ¿ au titre de ses frais irrépétibles d'appel et le déboute lui-même de ce chef de prétention ;
Déclare le présent arrêt opposable à l'Association pour la Gestion du Régime de Garantie des Créances des Salariés intervenant par l'UNEDIC-C. G. E. A de Rennes ;
Condamne M. Y... ès-qualités aux entiers dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

V. BODIN Anne JOUANARD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/00646
Date de la décision : 31/03/2015
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2015-03-31;13.00646 ?
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