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28/04/2022 | FRANCE | N°18/00565

France | France, Cour d'appel d'Angers, Troisième chambre, 28 avril 2022, 18/00565


COUR D'APPEL

d'ANGERS

Chambre Sociale













ARRÊT N°





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/00565 - N° Portalis DBVP-V-B7C-ELZV.





Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LA SARTHE, décision attaquée en date du 11 Juillet 2018, enregistrée sous le n° 26 028





ARRÊT DU 28 Avril 2022





APPELANTE :



Organisme CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SARTHE

[Adresse 1]



[Localité 4]





représenté par Mme [P], munie d'un pouvoir







INTIMEE :



Société SMITH ET NEPHEW

[Adresse 3]

[Localité 5]





représenté par Maître Delphine LIAULT de la SELARL CAPSTAN LMS, avo...

COUR D'APPEL

d'ANGERS

Chambre Sociale

ARRÊT N°

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/00565 - N° Portalis DBVP-V-B7C-ELZV.

Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LA SARTHE, décision attaquée en date du 11 Juillet 2018, enregistrée sous le n° 26 028

ARRÊT DU 28 Avril 2022

APPELANTE :

Organisme CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SARTHE

[Adresse 1]

[Localité 4]

représenté par Mme [P], munie d'un pouvoir

INTIMEE :

Société SMITH ET NEPHEW

[Adresse 3]

[Localité 5]

représenté par Maître Delphine LIAULT de la SELARL CAPSTAN LMS, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Janvier 2022 à 9 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Estelle GENET, magistrat chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Madame Estelle GENET

Conseiller : Madame Marie-Christine DELAUBIER

Conseiller : Mme Nathalie BUJACOUX

Greffier lors des débats : Madame Viviane BODIN

ARRÊT :

prononcé le 28 Avril 2022, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Estelle GENET, conseiller faisant fonction de Président et par Madame Viviane BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

FAITS ET PROCÉDURE

M. [X] [I], salarié de la société par actions simplifiée Smith et Nephew, a souscrit le 17 novembre 2015, auprès de la caisse primaire d'assurance maladie de la Sarthe (la caisse), une déclaration de maladie professionnelle au titre d'un état dépressif à laquelle était joint un certificat médical initial daté du 31 août 2015 mentionnant 'anxiété, troubles du sommeil, état dépressif'.

La caisse a instruit le dossier et a mis en oeuvre une enquête administrative.

Par courrier du 17 juin 2016, la caisse a informé la société Smith et Nephew qu'une décision relative au caractère professionnel de la maladie n'avait pu être arrêtée dans le délai de trois mois prévu par l'article R. 441-10 du code de la sécurité sociale et qu'un délai d'instruction complémentaire ne pouvant excéder trois mois, conformément aux dispositions de l'article R. 441-14, était nécessaire.

Par courrier du 31 août 2016, la caisse a informé la société Smith et Nephew que dans la mesure où la maladie déclarée par M. [I] n'était pas désignée dans un tableau des maladies professionnelles, elle entendait transmettre le dossier au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) pour examen dans le cadre de l'article L. 461-1, alinéa 4, du code de la sécurité sociale mais que préalablement à cette transmission, la société avait la possibilité de venir consulter les pièces constitutives du dossier jusqu'au 15 septembre 2016 et de formuler pendant cette période des observations qui seraient annexées au dossier.

La caisse a informé la société Smith et Nephew par courrier du 16 septembre 2016 qu'elle transmettait le dossier au CRRMP.

Le 13 décembre 2016, le CRRMP des Pays de la Loire a admis l'existence d'un lien direct et essentiel entre la maladie alléguée et les conditions de travail de M. [I].

Le 21 décembre 2016, la caisse a pris en charge la pathologie déclarée par M. [I] au titre de la législation professionnelle.

La société Smith et Nephew a contesté cette décision en saisissant la commission de recours amiable le 17 février 2017.

En l'absence de décision rendue par la commission de recours amiable dans le délai d'un mois ayant suivi sa saisine, M. [I] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Mans le 10 mai 2017.

Par jugement contradictoire du 11 juillet 2018, le tribunal a :

- déclaré inopposable à la société Smith et Nephew la décision par laquelle la caisse primaire d'assurance maladie de la Sarthe a pris en charge, au titre de la législation professionnelle, la maladie pour laquelle M. [I] a souscrit une déclaration le 17 novembre 2015 ;

- rejeté la demande faite par la société Smith et Nephew sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Les premiers juges ont retenu que la caisse avait pris acte de la guérison de M. [I] dès le 21 juin 2016 de sorte qu'au 16 septembre 2016, date de transmission du dossier au CRRMP, il était établi et connu de la caisse que la maladie litigieuse n'entraînait aucune incapacité permanente, ce dont il résultait que la caisse ne pouvait ni saisir le comité ni reconnaître l'origine professionnelle de la maladie.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception envoyée le 13 août 2018, la caisse primaire d'assurance maladie de la Sarthe a relevé appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 19 juillet précédent.

Les parties ont été convoquées pour l'audience tenue devant le conseiller rapporteur le 27 janvier 2020.

Par arrêt contradictoire avant dire droit en date du 29 mai 2020, la cour a :

- désigné le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de Bretagne, [Adresse 2], avec pour mission de donner son avis motivé, en application de l'alinéa 4 de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, sur la question de savoir si la maladie caractérisée dont souffre M. [X] [I], non désignée dans un tableau des maladies professionnelles et ayant entraîné une incapacité permanente d'un taux évalué dans les conditions mentionnées à l'article L. 434-2 et au moins égal à 25 %, a été essentiellement et directement causée par son travail habituel au sein de la société Smith et Nephew ;

- dit que le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de Bretagne prendra connaissance du dossier détenu par la caisse primaire d'assurance maladie de la Sarthe, sollicitera et recueillera des parties toutes pièces, notamment médicales, utiles à l'accomplissement de sa mission et devra transmettre à la présente juridiction son avis motivé dans les quatre mois de sa saisine ;

- renvoyé l'affaire à l'audience de la chambre sociale qui se tiendra devant le conseiller rapporteur le 18 mars 2021 à 9 heures et dit que la notification de l'arrêt aux parties vaudra convocation pour cette audience ;

- sursis à statuer sur la demande en inopposabilité présentée par la société Smith et Nephew ainsi que sur les dépens.

Le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de Bretagne a rendu son avis le 8 octobre 2021.

Le dossier a été convoqué à l'audience du conseiller rapporteur du 11 janvier 2022.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par conclusions n° 3 du 6 janvier 2022, reprises oralement à l'audience et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, la caisse primaire d'assurance maladie de la Sarthe sollicite l'infirmation du jugement et demande que la prise en charge au titre de la législation professionnelle de la maladie déclarée par M. [I] soit déclarée opposable à la société Smith et Nephew.

Elle rappelle qu'une maladie hors tableau ne peut être reconnue comme étant d'origine professionnelle que si elle a entraîné un taux d'incapacité permanente partielle au moins égal à 25 % et est en relation directe avec le travail de l'intéressé, cette reconnaissance ne pouvant intervenir qu'après avis du CRRMP. Elle fait valoir que dans la mesure où le médecin-conseil avait en l'espèce considéré, dans son avis du 30 mai 2016, que le taux serait supérieur à 25 %, elle était tenue de transmettre le dossier au CRRMP. Elle soutient que le taux d'incapacité permanente à retenir est celui évalué par le service du contrôle médical, peu importe le fait que l'état de santé du salarié se soit ensuite amélioré. Elle souligne que le taux d'incapacité fixé à la consolidation indemnise les séquelles de la maladie mais qu'il doit être distingué du taux déterminé au moment où la maladie est constatée puisqu'entre la date de déclaration de la maladie et la date de guérison ou de consolidation, les assurés bénéficient de soins qui permettent l'amélioration de leur état. Elle ajoute que, comme c'est le cas en l'espèce, les troubles psychosociaux sont des pathologies évolutives pour lesquelles l'éloignement du travail permet parfois une amélioration rapide de l'état de santé d'une personne.

En réponse aux autres moyens et arguments soulevés par la société Smith et Nephew pour contester l'inopposabilité de la décision de prise en charge, la caisse fait valoir que :

- l'instruction a été menée dans les délais prévus par les textes et en tout état de cause, l'employeur ne peut se prévaloir du caractère implicite d'une décision de prise en charge pour obtenir l'inopposabilité à son égard ;

- le certificat médical initial lui permettait d'instruire le dossier, peu importe le fait qu'il ait été rédigé par le médecin traitant ;

- le principe du contradictoire a été respecté dès lors que la société Smith et Nephew a reçu un courrier l'invitant à venir consulter les pièces du dossier, que cette information doit être adressée avant l'envoi du dossier au CRRMP et qu'elle n'était pas tenue de procéder à l'envoi des pièces ;

- les éléments de l'enquête relatifs à la matérialité de l'accident qui ont été recueillis tant auprès du salarié que de l'employeur ont été transmis au CRRMP dont l'avis s'impose à elle ;

- cet avis a été confirmé par celui du CRRMP de Bretagne qui précise qu'il existe dans le dossier des éléments documentés de risques psychosociaux (conflit avec la hiérarchie, absence de soutien hiérarchique, désorganisation structurelle, insécurité sur l'emploi, restructuration turn over, surcharge de travail, conflits éthiques) dans l'entreprise ;

- l'appréciation des conditions de travail ne relève pas de sa compétence et les arguments invoqués par l'employeur qui concernent essentiellement le droit du travail ne sauraient être retenus par la cour.

*

Par conclusions régulièrement communiquées et parvenues à la cour le 29 décembre 2021, reprises oralement à l'audience et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, la société Smith et Nephew demande :

- à titre principal, la confirmation du jugement en toutes ses dispositions et sollicite en conséquence que la caisse soit déboutée de l'ensemble de ses demandes ;

- à titre subsidiaire, que soit ordonnée une mesure d'expertise médicale technique aux frais de la caisse afin de réévaluer le taux d'incapacité permanente de M. [I] à la date de la saisine du premier CRRMP, soit le 31 août 2016 ;

- à titre infiniment subsidiaire, de constater l'absence de caractère professionnel de la maladie de M. [I] ;

- en tout état de cause, la condamnation de la caisse à lui verser la somme de 2000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre dépens.

La société Smith et Nephew fait valoir que l'instruction du dossier effectuée par la caisse est nulle au motif qu'elle repose sur un certificat médical initial irrecevable, qui comporte une rectification de date et qui omet de mentionner un lien entre le travail et la pathologie décrite. Elle invoque également le fait que M. [I], qui n'a pas qualité pour poser un diagnostic médical, a lui-même rajouté la mention 'burn out' sur la déclaration de maladie professionnelle. Elle estime que ces irrégularités justifient que la prise en charge de la maladie lui soit déclarée inopposable.

Elle soutient que la décision lui est également inopposable compte tenu:

- d'un taux d'incapacité permanente de M. [I] inférieur à 25 % puisque celui-ci était guéri lors de la saisine du CRRMP du 16 septembre 2016, avec un taux d'incapacité permanente partielle de 0 % ;

- de l'absence de respect par la caisse du principe du contradictoire, celle-ci ayant omis de réitérer la proposition de prendre connaissance du dossier après l'avis du CRRMP et avant la décision de reconnaissance du 21 décembre 2016 ;

- de l'absence de respect par la caisse des délais légaux impartis pour rendre sa décision : le délai de six mois maximum, prolongation comprise, imparti à la caisse pour se prononcer n'étant pas prorogé par la saisine du CRRMP, alors qu'en l'espèce l'avis de celui-ci est intervenu à un moment où les délais étaient expirés et ne pouvaient plus être prorogés ;

- du fait que la décision du 21 décembre 2016 n'est pas motivée et comporte des informations non renseignées ;

- du fait que la motivation du CRRMP est lapidaire et générale, de sorte que son avis doit être considéré comme non motivé.

À titre subsidiaire, la société Smith et Nephew demande la mise en 'uvre d'une expertise médicale technique afin de déterminer si le taux d'incapacité permanente évalué dans le dossier constitué pour la saisine du premier CRRMP était égal ou supérieur à 25 %.

À titre très subsidiaire, la société Smith et Nephew demande que soit constatée l'absence de caractère professionnel de la maladie de M. [I] en soulignant à cet égard que :

- M. [I], qui avait l'obligation de déclarer sa maladie professionnelle dans le délai de 15 jours suivant sa cessation du travail en vertu de l'article R. 461-5 du code de la sécurité sociale ne l'a fait qu'au bout de 9 mois et même 4 mois après son certificat médical initial daté du 30 novembre 2015 ;

- le salarié n'apporte aucune preuve ni précision quant aux troubles invoqués (anxiété, troubles du sommeil, état dépressif) et au fait qu'ils seraient essentiellement et directement causés par son travail habituel ;

- M. [I] n'exerçait pas un emploi exposé à un risque professionnel d'état anxio-dépressif et ses conditions de travail n'ont pu engendrer un état dépressif, alors même qu'il avait connu une bonne progression de carrière dans l'entreprise où il était entré en 1975 comme employé de service administratif jusqu'à devenir directeur comptable, avec le statut cadre, depuis le 1er avril 1998 ;

- des actions de prévention sur les risques psychosociaux avaient été mises en oeuvre au sein de l'entreprise et notamment au sein du service Finance auquel appartenait M. [I].

MOTIVATION

À titre liminaire, il convient de rappeler que dans son arrêt en date du 29 mai 2020, la cour a déjà statué sur les questions suivantes, sans en tirer les conséquences dans la rédaction du dispositif :

- sur le taux prévisible d'incapacité permanente partielle justifiant la transmission du dossier au CRRMP en retenant que la caisse n'a commis aucun manquement et que le moyen soulevé par la société ne pouvait justifier l'inopposabilité de la décision de prise en charge, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges ;

- sur la nullité invoquée de la procédure d'instruction du dossier en rejetant le moyen présenté par la société ;

- sur le respect du principe du contradictoire et du délai d'instruction du dossier en rejetant les moyens invoqués par la société ;

- sur la motivation de l'avis du CRRMP et celle de la décision de prise en charge de la caisse, en rejetant les moyens invoqués par la société et plus généralement l'ensemble des moyens d'inopposabilité soulevés par celle-ci en lien avec le respect de la procédure.

Il y a donc lieu de reprendre dans le dispositif du présent arrêt les solutions dégagées par la cour dans les motifs de son arrêt du 29 mai 2020.

Il ne reste ainsi dans le débat, après l'avis du CRRMP de Bretagne que les questions suivantes :

- la mise en 'uvre d'une expertise médicale technique ;

- le caractère professionnel de la maladie.

Sur la demande de mise en oeuvre d'une expertise médicale technique

La cour, dans son arrêt en date du 29 mai 2020, a retenu qu'il importait peu qu'une guérison soit intervenue entre l'évaluation du médecin conseil dans le colloque administratif du 30 mai 2016, selon laquelle l'incapacité permanente prévisible de M. [I] était égale ou supérieure à 25 %, et la date de transmission du dossier au CRRMP. La cour a d'ailleurs souligné que « le simple fait qu'il ne subsiste pas pour la victime un taux d'incapacité permanente au moins égal à 25 % est révélateur d'une évolution favorable de son état de santé et pas nécessairement d'une erreur dans l'appréciation du taux initial. » Elle en a conclu l'absence de manquement dans l'établissement du taux prévisible d'incapacité permanente partielle.

Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de revenir sur la détermination de ce taux d'incapacité permanente partielle justifiant la transmission du dossier au CRRMP.

D'ailleurs, la société Smith et Nephew n'apporte aux débats aucun élément de nature à justifier la mise en 'uvre d'une expertise médicale technique.

Cette demande doit donc être rejetée.

Sur le caractère professionnel de la maladie

Le caractère professionnel de la maladie déclarée par M. [I] a été reconnu par 2 comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles.

La cour a déjà statué dans son arrêt en date du 29 mai 2020 sur l'avis parfaitement clair, précis, exempte de contradictions et suffisamment motivé du comité régional de reconnaissance des maladies professionnel des Pays de la Loire du 13 décembre 2016.

Le CRRMP de Bretagne, pour établir une relation directe et essentielle entre la maladie et l'activité professionnelle, en l'absence de facteurs extra professionnels, a retenu :

«- l'existence de facteurs documentés de risques psychosociaux (conflits avec la hiérarchie, absence de hiérarchie, désorganisation structurelle, insécurité sur l'emploi, restructuration, turnover, surcharge de travail, conflits éthiques) dans l'entreprise » ;

«- la chronologie des événements rapportés cohérente avec l'histoire de la maladie » ;

«- l'absence d'éléments nouveaux significatifs apportés par l'employeur ne permettant pas d'infirmer l'avis du précédent CRRMP ».

Là également, l'avis du comité régional de Bretagne apparaît parfaitement motivé, clair et précis, et sans aucune ambiguïté sur l'existence d'un lien entre la maladie et l'activité professionnelle.

Force est de constater que l'employeur ne répond pas aux anomalies de management suivantes relevées par le CRRMP de Bretagne : absence de hiérarchie, désorganisation structurelle, insécurité sur l'emploi, restructuration et turnover.

En outre et paradoxalement, les éléments versés aux débats par la société pour contester le caractère professionnel de la maladie de M. [I] font apparaître les difficultés dans l'organisation et le fonctionnement de la société.

La lettre de licenciement du 30 septembre 2016 mentionne que M. [I] a été déclaré inapte à son poste de directeur comptable et aucun des postes disponibles dans le groupe en France ou à l'international n'a été considéré comme compatible avec son état de santé par le médecin du travail.

Par ailleurs, la société évoque le déclenchement d'une enquête interne après l'alerte donnée par un délégué du personnel au cours du mois de juillet 2015, ce qui a conduit la direction des ressources humaines à recevoir chaque salarié du service Finance en entretien individuel, à l'exception de M. [I] placé en arrêt maladie la veille de cet entretien le 9 juillet 2015. Cette démarche de l'employeur démontre bien l'existence de dysfonctionnements.

En outre, le fait de mettre en place des actions de formation ou de promotion des valeurs de l'entreprise ne sont pas de nature à écarter tout conflit éthique ou avec la hiérarchie.

Ainsi, il convient de considérer que l'employeur n'apporte aux débats aucun élément de nature à remettre en cause les avis des comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles.

Le caractère professionnel de la maladie de M. [I] est donc établi.

Par conséquent, il convient de considérer que la décision de prise en charge de la caisse primaire d'assurance maladie de la Sarthe de la maladie déclarée par M. [I] le 17 novembre 2015 est parfaitement opposable à la société Smith et Nephew.

Le jugement est infirmé en toutes ses dispositions à l'exception du rejet de la demande présentée par la SAS Smith et Nephew sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile .

La demande présentée par cette société en cause d'appel sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile doit être rejetée.

La société Smith et Nephew est condamnée au paiement des dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La COUR,

Statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement et par mise à disposition au greffe,

Vu l'arrêt de la cour du 29 mai 2020 ;

Infirme le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale du 11 juillet 2018 en toutes ses dispositions, à l'exception du rejet de la demande présentée par la SAS Smith et Nephew sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant ;

Rejette l'ensemble des moyens d'inopposabilité soulevés par SAS Smith et Nephew en lien avec le respect de la procédure ;

Rejette la demande de mise en 'uvre d'une expertise médicale technique présentée par la SAS Smith et Nephew ;

Dit que le caractère professionnel de la maladie déclarée par M. [X] [I] le 17 novembre 2015 est établi ;

Déclare opposable à la SAS Smith et Nephew la décision de prise en charge de la caisse primaire d'assurance maladie de la Sarthe de la maladie déclarée par M. [X] [I] le 17 novembre 2015, au titre de la législation professionnelle ;

Rejette la demande présentée par la SAS Smith et Nephew sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure ;

Condamne la SAS Smith et Nephew au paiement des dépens d'appel.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,

Viviane BODINEstelle GENET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : 18/00565
Date de la décision : 28/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-28;18.00565 ?
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