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08/12/2022 | FRANCE | N°18/02047

France | France, Cour d'appel de Caen, Chambre sociale section 3, 08 décembre 2022, 18/02047


AFFAIRE : N° RG 18/02047

N° Portalis DBVC-V-B7C-GDXI

 Code Aff. :



ARRET N°



C.P





ORIGINE : Décision du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'EVREUX en date du 26 Novembre 2015 - RG n° 21300755











COUR D'APPEL DE CAEN

Chambre sociale section 3

ARRÊT DU 08 DECEMBRE 2022





APPELANTE :



URSSAF DE HAUTE NORMANDIE

[Adresse 2]

[Adresse 5]

[Localité 3]



Représentée par Me François L

EGENDRE, avocat au barreau de ROUEN







INTIMEE :



Société [6]

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représentée par Me Salima EPIFANIE-NAHAL, avocat au barreau de PARIS







COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉL...

AFFAIRE : N° RG 18/02047

N° Portalis DBVC-V-B7C-GDXI

 Code Aff. :

ARRET N°

C.P

ORIGINE : Décision du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'EVREUX en date du 26 Novembre 2015 - RG n° 21300755

COUR D'APPEL DE CAEN

Chambre sociale section 3

ARRÊT DU 08 DECEMBRE 2022

APPELANTE :

URSSAF DE HAUTE NORMANDIE

[Adresse 2]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentée par Me François LEGENDRE, avocat au barreau de ROUEN

INTIMEE :

Société [6]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Salima EPIFANIE-NAHAL, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme CHAUX, Présidente de chambre,

M. LE BOURVELLEC, Conseiller,

M. GANCE, Conseiller,

DEBATS : A l'audience publique du 06 octobre 2022

GREFFIER : Mme GOULARD

ARRÊT prononcé publiquement le 08 décembre 2022 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme CHAUX, présidente, et Mme GOULARD, greffier

La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par l'Urssaf de Haute-Normandie venant aux droits de l'Urssaf de l'Eure d'un jugement rendu le 26 novembre 2015 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Eure dans un litige l'opposant à la société [6], après cassation par arrêt du 21 juin 2018 de la Cour de cassation, de l'arrêt rendu le 5 avril 2017 par la cour d'appel de Rouen.

FAITS ET PROCEDURE

En 2009, dans le cadre d'un plan de restructuration, la société [6] (la société) a procédé au licenciement économique de 103 salariés.

Un plan de sauvegarde de l'emploi a été mis en oeuvre prévoyant le paiement de différentes indemnités aux salariés licenciés.

En outre, ces derniers ont signé avec la société des protocoles transactionnels courant 2009 leur allouant des indemnités supplémentaires.

Dans le cadre d'un contrôle de vérification de l'application de la législation de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires, portant sur la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011, l'Urssaf de l'Eure a adressé à la société une lettre d'observations du 4 février 2013 concluant à un rappel de cotisations et contributions de sécurité sociale, d'assurance chômage et d'AGS d'un montant global de 414 516 euros se décomposant comme suit :

- 20 577 euros se rapportant à la réduction Fillon, à la CSG et CRDS sur les revenus de remplacement, aux primes versées à l'occasion de la remise de la médaille d'honneur du travail, aux primes de médaille du travail 'corporative', aux primes diverses, aux frais professionnels ( chefs de redressement 1 à 7)

- 393 939 euros au titre des 'cotisations - rupture forcée du contrat de travail avec limites d'exonération' pour les années 2010 et 2011, c'est à dire des cotisations et contributions appliquées aux sommes versées en exécution des protocoles transactionnels (chef de redressement n° 8).

Par courrier du 4 mars 2013, la société a contesté le point 8, c'est à dire le redressement afférent aux cotisations et contributions appliquées aux sommes versées en exécution des protocoles transactionnels, d'un montant de 393 939 euros.

Aux termes d'un courrier du 4 avril 2013, l'Urssaf de l'Eure a constaté l'absence de contestation des points 1 à 7, et maintenu sa position concernant le point 8 'cotisations - rupture forcée du contrat de travail avec limites d'exonération'.

Le 6 juin 2013, l'Urssaf de l'Eure a adressé à la société une mise en demeure d'un montant de 474 716 euros (414 514 euros de cotisations au titre des années 2010 et 2011 outre 60 202 euros de majorations de retard).

Par lettre du 5 juillet 2013, la société a saisi la commission de recours amiable de l'Urssaf d'une contestation à l'encontre de ce chef de redressement.

Par requête expédiée le 3 octobre 2013, la société a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Eure d'un recours à l'encontre de la décision implicite de rejet de la commission.

Le 25 novembre 2013, la commission de recours amiable a rejeté explicitement le recours de la société.

Par jugement du 26 novembre 2015, le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Eure a :

- annulé le chef de redressement contesté

- condamné la société [6] à payer à l'Urssaf de Haute- Normandie la somme de 20 575 euros au titre des cotisations résultant des sept chefs de redressement non contestés

- dit n'y avoir lieu à condamner l'Urssaf de Haute Normandie au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- rejeté le surplus des demandes.

L'Urssaf de Haute Normandie a formé appel de ce jugement par déclaration du 23 décembre 2015.

Suivant arrêt du 5 avril 2017, la cour d'appel de Rouen a confirmé le jugement en toutes ses dispositions.

L'Urssaf de Haute Normandie a formé un pourvoi contre cette décision.

Par arrêt du 21 juin 2018, la Cour de cassation a cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 5 avril 2017 entre les parties par la cour d'appel de Rouen, remis en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et pour être fait droit, les a renvoyées devant la cour d'appel de Caen, aux motifs suivants:

' Vu les articles L 242-1 du code de la sécurité sociale et 80 dudodecies du code général des impôts dans leur version applicable à la date d'exigibilité des cotisations litigieuses;

Attendu que les sommes accordées à titre transactionnel, en complément des indemnités de licenciement ou de départ volontaire versées dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi au sens des articles L 1233-32 et L 1233-61 à L 1233-64 du code du travail, ne sont pas au nombre de celles limitativement énumérées par le second de ces textes; qu'elles sont soumises aux cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales en application du premier, à moins que l'employeur n'apporte la preuve qu'elles concourent pour tout ou partie de leur montant à l'indemnisation d'un préjudice;

(...)

Attendu que pour accueillir le recours de la société, la cour d'appel retient par motifs propres et adoptés, qu'il ressort des pièces versées aux débats et notamment du modèle de protocole transactionnel que les ruptures du contrat de travail en cause relèvent de la procédure de licenciement collectif pour motif économique engagée par la société courant 2009; que la société a mis en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi; que les sommes litigieuses ont été versées aux salariés en complément de celles dues au titre de ce plan, dont ils ont renoncé à poursuivre l'annulation et dans le cadre, si ce n'est en application, de celui-ci et qu'elles n'ont pas un caractère salarial;

Qu'en statuant ainsi par des motifs impropres à caractériser le caractère exclusivement indemnitaire des sommes versées en exécution des transactions, la cour d'appel a violé les textes susvisés;'.

Par déclaration du 21 juin 2018, l'Urssaf de Haute Normandie ( l'Urssaf ) a saisi la cour d'appel de Caen en tant que juridiction de renvoi.

Par conclusions reçues au greffe le 20 juillet 2020 soutenues oralement à l'audience par son conseil , l'Urssaf demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Eure le 26 novembre 2015

- valider le redressement chiffré relatif aux limites d'exonérations des indemnités transactionnelles sur la période du 1er janvier 2010 au 31 janvier 2011 pour un montant de 393 939 euros en cotisations et 57 214 euros en majorations de retard

- condamner la société à lui payer la somme de 414 514 euros en cotisations et 60 202 euros en majorations de retard au titre des chefs de redressement contestés et non contestés

- condamner la société à lui payer 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- réitérer la condamnation de la société au paiement de la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile prononcée par la Cour de cassation dans son arrêt du 21 juin 2018

- débouté la société de toutes ses demandes.

Par conclusions reçues au greffe le 18 novembre 2020 soutenues oralement à l'audience par son conseil , la société demande à la cour de :

à titre principal,

- confirmer le jugement du 26 novembre 2015

- dire qu'elle rapporte la preuve du caractère indemnitaire des sommes versées en exécution des transactions litigieuses en cause, dont l'objet est de compenser les préjudices subis par les salariés dont le contrat de travail a été rompu pour motif économique dans le cadre du PSE mis en place par la société courant 2009

et par conséquent,

- dire que le chef de redressement opéré au titre des indemnités transactionnelles en cause ne repose sur aucun fondement

- prononcer l'annulation du redressement opéré sur ce point pour un montant total de 393 939 euros

à titre subsidiaire,

- limiter le montant du redressement opéré au titre des indemnités transactionnelles à la somme de 132 930 euros.

Pour l'exposé complet des prétentions et des moyens des parties, il est expressément renvoyé à leurs écritures.

MOTIFS

- Sur le chef de redressement n° 8

L'article L 242-1 du code de la sécurité sociale dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2018-474 du 12 juin 2018 dispose que:

'Pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire.'

L'alinéa 10 de l'article L 242-1 dans sa version en vigueur du 19 décembre 2008 jusqu'au 21 décembre 2010 dispose que :

'Sont aussi prises en compte les indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail (...) à hauteur de la fraction de ces indemnités qui est assujettie à l'impôt sur le revenu en application de l'article 80 duodecies du même code. Toutefois, les indemnités d'un montant supérieur à trente fois le plafond annuel défini par l'article L 241-3 du présent code sont intégralement assimilées à des rémunérations pour le calcul des cotisations visées au premier alinéa du présent article. Pour l'application du présent alinéa, il est fait masse des indemnités liées à la rupture du contrat de travail.'

L'alinéa 10 de l'article L 242-1 dans sa version en vigueur du 22 décembre 2011 au 18 mars 2012 dispose que :

'Est exclue de l'assiette des cotisations mentionnées au premier alinéa dans la limite d'un montant fixé à deux fois la valeur annuelle du plafond mentionné à l'article L 241-3, la part des indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail (...) qui n'est pas imposable en application de l'article 80 duodecies du même code. Toutefois, les indemnités d'un montant supérieur à trente fois le plafond annuel défini par l'article L 241-3 du présent code sont intégralement assimilées à des rémunérations pour le calcul des cotisations visées au premier alinéa du présent article. Pour l'application du présent alinéa, il est fait masse des indemnités liées à la rupture du contrat de travail.'

L'alinéa 10 de l'article L 242-1 dans sa version en vigueur à compter du 19 mars 2012 dispose que :

'Est exclue de l'assiette des cotisations mentionnées au premier alinéa dans la limite d'un montant fixé à trois fois la valeur annuelle du plafond mentionné à l'article L 241-3, la part des indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail (...) qui n'est pas imposable en application de l'article 80 duodecies du même code. Toutefois, les indemnités d'un montant supérieur à trente fois le plafond annuel défini par l'article L 241-3 du présent code sont intégralement assimilées à des rémunérations pour le calcul des cotisations visées au premier alinéa du présent article. Pour l'application du présent alinéa, il est fait masse des indemnités liées à la rupture du contrat de travail.

L'article 80 duodecies dans ses versions applicables au litige dispose que 'toute indemnité versée à l'occasion de la rupture du contrat de travail constitue une rémunération imposable sous réserves des dispositions suivantes.

Ne constituent pas une rémunération imposable :

1 ° les indemnités mentionnées aux articles L 1235-2, L 1235-3 et L 1235-11 à L 1235-13 du code du travail;

2 ° les indemnités de licenciement ou de départ volontaire versées dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi au sens des articles L 1233-32 et L 1233-61 à 1233-64 du code du travail;

3 ° la fraction des indemnités de licenciement versées en dehors du cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi au sens des articles L 1233-32 et L 1233-61 à 1233-64 du code du travail qui n'excède pas :

a ) soit deux fois le montant de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l'année civile précédant la rupture de son contrat de travail ou 50 % du montant de l'indemnité si ce seuil est supérieur;

b ) soit le montant de l'indemnité de licenciement prévue par la convention collective de branche, par l'accord professionnel ou interprofessionnel ou à défaut par la loi;

(..)'.

Les sommes accordées, à titre transactionnel, en complément des indemnités de licenciement ou de départ volontaire versées dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi au sens des articles L. 1233-32 et L. 1233-61 à L. 1233-64 du code du travail, ne sont pas au nombre de celles limitativement énumérées par l'article 80 duodecies du code général des impôts.

Elles sont soumises aux cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales en application de l'article L 242-1, à moins que l'employeur ne rapporte la preuve qu'elles concourent, pour tout ou partie de leur montant, à l'indemnisation d'un préjudice.

Il appartient au juge de rechercher si, quelque soit la qualification retenue par les parties, l'indemnité transactionnelle forfaitaire comprend des éléments de rémunération soumis à cotisations.

En l'espèce, la société prétend que les indemnités versées en exécution des protocoles signés par les salariés ont un caractère indemnitaire qui ressort des termes clairs, précis et dépourvus d'ambiguïté des protocoles transactionnels et de la volonté des parties qui y est clairement exprimée.

Les protocoles transactionnels produits sont rédigés sur un même modèle (pièces n° 6, 14 à 64).

Ils rappellent d'abord que dès la notification de son licenciement pour motif économique, chaque salarié a manifesté immédiatement son opposition à cette mesure et 'indiqué qu'à défaut d'une juste indemnisation financière supplémentaire du préjudice qu'il estimait subir, il saisirait le conseil de prud'hommes compétent de cette demande.'

Les arguments du salarié puis ceux de la société sont ensuite présentés succinctement. Ils se rapportent notamment à l'existence de motifs économiques et aux propositions de reclassement.

L'article 1 de chaque protocole comporte la liste des indemnités que chaque salarié percevra en dehors du protocole transactionnel. Il s'agit de :

- l'indemnité conventionnelle de licenciement

- l'indemnité compensatrice de congés payés au titre tant du congé non pris de la période antérieure que de la période en cours

- la fraction de salaire due pour la période antérieure à la notification de son licenciement sur le mois considéré

- le reliquat éventuel au titre des jours et des heures octroyés au titre de la réduction du temps de travail non pris

- l'indemnité de préavis.

Il est précisé que le salarié sera susceptible de percevoir dans le cadre de diverses mesures du plan qui lui sont applicables, d'autres sommes y correspondant mais non encore connues au jour de signature des présentes.

L'article 2 ajoute qu'en plus de ces sommes et 'sans que cela vaille reconnaissance du bien fondé des revendications du salarié', la société accepte de lui verser 'à titre transactionnel, forfaitaire et définitif' une somme déterminée.

L'article 3 précise que 'le versement de cette somme et sous la réserve de la due exécution de l'ensemble des termes du présent accord, compense l'ensemble des préjudices que [le salarié] estime subir de quelque nature qu'il soit, notamment matériel, professionnel et moral du fait tant des conditions, directes ou indirectes, d'exécution que de rupture de son contrat de travail et de ses conséquences. [Le salarié] déclare qu'il est totalement rempli de ses droits, s'agissant de tous éléments de salaires, primes, avantages en argent ou avantages en nature, cotisations, contributions et prestations de protection sociale, remboursements de frais, récupérations de jours, d'heures de travail ou indemnités de toutes natures prévus ou non par son contrat de travail, relatifs tant à l'exécution qu'à la rupture de son contrat de travail.'

L'article 4 stipule que le salarié renonce à toute action trouvant son fondement, son objet ou sa cause dans la conclusion, l'exécution et la rupture de son contrat de travail à l'exception des actions en reconnaissance de maladies professionnelles inscrites au tableau au jour de la signature du protocole. Plus particulièrement, il est indiqué qu'il renonce à contester son licenciement pour motif économique ainsi que le plan de sauvegarde.

Enfin, l'article 6 indique que la concession du salarié réside dans les renonciations à toutes contestations telles qu'elles sont exposées (c'est à dire les contestations relatives à la régularité de son licenciement et au plan de sauvegarde de l'emploi), et que celle de l'employeur consiste à verser l'indemnité transactionnelle en sus de l'indemnité conventionnelle et des indemnités prévues dans le plan de sauvegarde de l'emploi et des sommes non constitutives d'indemnités engagées dans les autres mesures du plan bénéficiant au salarié.

Il résulte de ces observations que :

- les protocoles transactionnels ont tous pour objet de régler un différend se rapportant uniquement à la régularité et au bien fondé du licenciement économique de chaque salarié et à la validité du plan de sauvegarde à l'exclusion de tout litige relatif à leur rémunération

- l'indemnité due par l'employeur ne comprend aucun élément se rapportant à l'indemnité conventionnelle de licenciement, à l'indemnité de préavis, à l'indemnité de congé payé dont il est clairement précisé qu'elles sont payées distinctement

- l'indemnité transactionnelle est définie par les parties comme ayant pour objet d'indemniser les préjudices notamment matériel, moral et professionnel subis par le salarié du fait de son licenciement économique.

En conclusion, la société rapporte la preuve que les indemnités versées aux salariés en exécution des protocoles transactionnels ont pour objet de les indemniser de leurs préjudices en lien avec leur licenciement économique qu'ils renoncent à contester. Ces indemnités ont donc une nature indemnitaire et non pas salariale.

La société affirme, à titre principal,que compte tenu de leur nature, les indemnités transactionnelles doivent être exonérées de toute cotisation sans application d'un plafond, alors que l'Urssaf soutient au contraire que l'indemnité transactionnelle ne peut être totalement exonérée qu'à la condition que le montant cumulé des indemnités, perçues par le salarié concerné dans le cadre et hors PSE, n'excède pas soit le montant prévu par la convention collective de branche, l'accord professionnel ou interprofessionnel ou à défaut la loi, soit le double de la rémunération annuelle perçue par le salarié au cours de l'année civile précédant la rupture de son contrat de travail ou 50 % de l'indemnité totale si ce seuil est supérieur, sans excéder 6 fois (puis 3 fois à compter de 2011) le Pass en vigueur à la date du versement des indemnités.

Le raisonnement de l'Urssaf repose sur l'application du double plafond visé au 3° de l'article 80 duodecies aux indemnités transactionnelles versées en complément du PSE.

Or, comme rappelé précédemment, les indemnités versées en exécution des protocoles transactionnels en complément du PSE ne relèvent pas de celles qui sont expressément visés à l'article 80 duodecies. Les plafonds prévus dans cet article ne lui sont donc pas applicables.

En outre, dans la présente affaire, les indemnités transactionnelles ont une nature exclusivement indemnitaire. Elles doivent donc être exonérées de l'assiette des cotisations sociales pour la totalité de leur montant.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a annulé le chef de redressement n° 8 et en ce qu'il a débouté l'Urssaf de sa demande en paiement des sommes correspondant à ce chef de redressement, en principal et majorations de retard.

- Sur les chefs de redressement n° 1 à 7

Les chefs de redressement n° 1 à 7 ne sont pas contestés.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a condamné la société à payer à l'Urssaf la somme de 20 575 euros au titre des cotisations afférentes à ces 7 chefs de redressement.

En revanche, le jugement a débouté l'Urssaf de sa demande de paiement des majorations de retard se rapportant à ces cotisations au motif qu'elle n'en avait pas fait le décompte.

L'Urssaf précise désormais que le montant des majorations se rapportant aux seuls chefs de redressement non contestés s'élève à 2 988 euros, ce qui n'est pas contesté par la société.

En conséquence, le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté l'Urssaf de sa demande en paiement des majorations de retard afférentes aux chefs de redressement non contestés.

Statuant à nouveau, il convient de condamner la société à lui payer 2 988 euros à ce titre.

- Sur les dépens et frais irrépétibles

Succombant, l'Urssaf sera condamnée aux dépens d'appel et déboutée de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Vu l'arrêt de la Cour de cassation du 21 juin 2018 ;

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté l'Urssaf de Haute Normandie de sa demande au titre des majorations de retard afférentes aux chefs de redressement n° 1 à 7 ;

L'infirme de ce chef ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la société [6] à payer à l'Urssaf de Haute-Normandie la somme de 2 988 euros au titre des majorations de retard afférentes aux chefs de redressement n° 1à 7 ;

Condamne l'Urssaf de Haute-Normandie à payer les dépens d'appel ;

Déboute l'Urssaf de Haute-Normandie de ses demandes au titre des frais irrépétibles.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

E. GOULARD C. CHAUX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : Chambre sociale section 3
Numéro d'arrêt : 18/02047
Date de la décision : 08/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-08;18.02047 ?
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