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26/01/2023 | FRANCE | N°20/01101

France | France, Cour d'appel de Caen, Chambre sociale section 3, 26 janvier 2023, 20/01101


AFFAIRE : N° RG 20/01101

N° Portalis DBVC-V-B7E-GTOD

 Code Aff. :



ARRET N°



C.P





ORIGINE : Décision du Tribunal Judiciaire de CAEN en date du 14 Mai 2020 - RG n° 19/00396









COUR D'APPEL DE CAEN

Chambre sociale section 3

ARRET DU 26 JANVIER 2023





APPELANTE :



GROUPEMENT D'INTERET PUBLIC [7]

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représentée par Me Jean-Christophe GOURET, substitué par Me ROHOU, avocats au barr

eau de RENNES





INTIMEES :



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU CALVADOS

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représentée par Mme [M], mnadatée



Madame [E] [J] née [F]

[Adresse 5]

[Localité 4]



Compara...

AFFAIRE : N° RG 20/01101

N° Portalis DBVC-V-B7E-GTOD

 Code Aff. :

ARRET N°

C.P

ORIGINE : Décision du Tribunal Judiciaire de CAEN en date du 14 Mai 2020 - RG n° 19/00396

COUR D'APPEL DE CAEN

Chambre sociale section 3

ARRET DU 26 JANVIER 2023

APPELANTE :

GROUPEMENT D'INTERET PUBLIC [7]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Jean-Christophe GOURET, substitué par Me ROHOU, avocats au barreau de RENNES

INTIMEES :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU CALVADOS

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Mme [M], mnadatée

Madame [E] [J] née [F]

[Adresse 5]

[Localité 4]

Comparante en personne, assistée de Me LOYGUE, avocat au barreau de CAEN

DEBATS : A l'audience publique du 03 novembre 2022, tenue par Mme CHAUX, Président de chambre, Magistrat chargé d'instruire l'affaire lequel a, les parties ne s'y étant opposées, siégé seul, pour entendre les plaidoiries et en rendre compte à la Cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme GOULARD

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme CHAUX, Présidente de chambre,

M. LE BOURVELLEC, Conseiller,

M. GANCE, Conseiller,

ARRET prononcé publiquement le 26 janvier 2023 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme CHAUX, présidente, et Mme GOULARD, greffier

La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par le Groupement d'Intérêt Public [7] d'un jugement rendu le 14 mai 2020 par le tribunal judiciaire de Caen dans un litige l'opposant à Mme [J] et la caisse primaire d'assurance maladie du Calvados.

FAITS et PROCEDURE

Mme [J] a été embauchée pour une durée déterminée par le Conseil général du Calvados à compter du 5 mai 2008, en qualité d'adjoint technique, affectée au service laverie chimie du département environnement-alimentation du laboratoire [6].

Suite au regroupement de plusieurs laboratoires départementaux, dont le laboratoire [6], au sein du Groupement d'Intérêt Public (GIP) [7], Mme [J] a été embauchée par le GIP en qualité d'agent de laverie à compter du 1er janvier 2014, suivant contrat à durée déterminée. Les relations contractuelles se sont poursuivies dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à compter du 1er janvier 2015.

Le 20 mai 2015, le GIP a établi une déclaration d'accident du travail dans les termes suivants :

'informations relatives à l'accident :

Date 19.05.215 heure 16h30

Mme [J] a glissé sur le sol mouillé de la laverie et a ressenti une vive douleur à la cheville.

Siège des lésions : cheville gauche'.

Le certificat médical initial du 19 mai 2015 mentionnait 'entorse stade 3 de la cheville gauche'.

L'accident a été pris en charge par la caisse primaire d'assurance maladie du Calvados ('la caisse') au titre de la législation sur les risques professionnels le 26 mai 2015.

L'état de santé de Mme [J] a été déclaré consolidé le 15 juin 2018.

Le 24 juin 2019, la caisse a notifié un taux d'incapacité permanente de 9 % à Mme [J] à compter du 16 juin 2018.

Elle a été licenciée le 11 juillet 2018 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

En l'absence de possibilité de conciliation constatée par la caisse, Mme [J] a saisi le tribunal de grande instance de Caen le 15 mars 2019 d'une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur.

Selon jugement du 14 mai 2020, le tribunal de grande instance, devenu tribunal judiciaire de Caen, a :

- dit que l'accident du travail dont a été victime Mme [J] le 19 mai 2015 a pour cause la faute inexcusable du GIP,

- fixé au maximum légal la majoration de la rente allouée à Mme [J] conformément à l'article L.452-2 du code de sécurité sociale,

- dit que la majoration maximale de la rente suivra le taux d'incapacité permanente partielle en cas d'aggravation de l'état de santé de Mme [J],

Avant-dire-droit,

- ordonné une expertise médicale,

- commis pour y procéder le docteur [R],

- fixé la rémunération de l'expert à la somme de 1 000 euros HT, soit 1 200 euros TTC (TVA incluse)

- dit que les frais d'expertise sont avancés par la caisse qui devra consigner la somme de 1 200 euros pour la rémunération de l'expert auprès du régisseur d'avances et de recettes du tribunal,

- accordé à Mme [J] une provision d'un montant de 2 500 euros à valoir sur la réparation de ses préjudices découlant de l'article L.452-3 du code de sécurité sociale,

- renvoyé Mme [J] devant la caisse pour le paiement de cette provision, ainsi que la majoration au maximum légal de la rente accident du travail,

- déclaré opposable au GIP la prise en charge de l'accident du travail du 19 mai 2015 dont Mme [J] a été victime, ainsi que les conséquences financières de la faute inexcusable reconnue,

- dit que l'action récursoire de la caisse pourra s'exercer contre le GIP,

- dit que le GIP devra s'acquitter auprès de la caisse des conséquences financières de la faute inexcusable reconnue (articles L.452-1 à L.452-3 du code de sécurité sociale) ,

- débouté les parties de leurs autres demandes contraires ou plus amples,

- condamné le GIP à payer à Mme [J] 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les parties seront convoquées par le greffe à la première audience utile après dépôt du rapport d'expertise.

Le GIP a formé appel de ce jugement par déclaration 25 juin 2020.

Aux termes de ses conclusions déposées le 7 octobre 2022 et soutenues oralement à l'audience par son conseil, le GIP demande à la cour de :

- infirmer le jugement déféré dans l'ensemble de ses dispositions,

Statuant à nouveau,

- dire que le GIP n'a commis aucune faute inexcusable à l'encontre de Mme [J],

En conséquence,

- débouter Mme [J] de l'intégralité de ses demandes,

- la condamner à verser au GIP la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens de première instance et d'appel,

A titre subsidiaire,

En cas de confirmation du jugement entrepris,

- décerner acte au GIP de ce qu'il ne s'oppose pas à la majoration de rente allouée à Mme [J] par la caisse,

- confirmer la mesure d'expertise médicale ordonnée et constater que l'expert désigné a achevé sa mission et déposé son rapport définitif,

- renvoyer les parties devant le Pôle social du tribunal judiciaire de Caen s'agissant de la liquidation des préjudices de Mme [J],

- dire n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Suivant conclusions déposées le 2 mai 2022 soutenues oralement à l'audience par son conseil, Mme [J] demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré dans son intégralité,

En conséquence,

- reconnaître la faute inexcusable du GIP à l'égard de Mme [J],

- fixer au maximum la majoration de la rente allouée au titre de l'accident du travail,

- fixer à 2 500 euros la provision à valoir sur l'indemnisation du préjudice de Mme [J] dont l'avance devra être faite par la caisse,

En tout état de cause,

- renvoyer les parties devant le tribunal judiciaire pour statuer sur la liquidation des préjudices de Mme [J],

- déclarer opposable au GIP la décision à intervenir,

- condamner le GIP à payer à Mme [J] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les éventuels dépens.

Selon conclusions déposées le 7 octobre 2022 soutenues oralement à l'audience par son représentant, la caisse demande à la cour de :

- constater qu'elle s'en rapporte à justice sur la reconnaissance de la faute inexcusable

de l'employeur de Mme [J],

Si la faute inexcusable de l'employeur est reconnue :

- dire que la caisse pourra dans l'exercice de son action récursoire recouvrer auprès de l'employeur dont la faute inexcusable aura été reconnue ou de son assureur, l'intégralité des sommes dont elle est tenue de faire l'avance au titre de la faute inexcusable (majoration de capital ou de rente, et préjudices)

- réduire à de plus justes proportions le montant des préjudices sollicités tant au titre des préjudices extra patrimoniaux que des préjudices patrimoniaux.

Pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, il est expressément renvoyé à leurs écritures conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

- Sur la faute inexcusable

Le manquement à l'obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l'employeur est tenu envers le travailleur a le caractère d'une faute inexcusable lorsque l'employeur  avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.

  

Il appartient à la victime de justifier que son employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé son salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour le préserver de ce danger.

La conscience du danger doit être appréciée objectivement par rapport à la connaissance de ses devoirs et obligations que doit avoir un employeur dans son secteur d'activité.

Il convient à titre liminaire de relever que la matérialité de l'accident et sa prise en charge par la caisse au titre de la législation sur les risques professionnels ne sont pas contestées par la société.

En l'espèce, Mme [J] explique que son accident a fait suite à une importante fuite d'eau sur le sol carrelé du laboratoire, dont il est résulté la panne du laveur de marque '[8]' qui équipait le laboratoire à cette époque.

Elle indique avoir fait une glissade sur une flaque d'eau formée en raison de la fuite de l'appareil, avoir heurté violemment un meuble-évier du laboratoire, au niveau de la tête et de la main droite et s'être tordue conséquemment la cheville gauche.

Elle soutient que l'employeur ne l'avait pas équipée de chaussures antidérapantes, et que de surcroît, le sol du laboratoire était usé.

En réplique, le GIP fait valoir que la fuite dont il est fait état avait effectivement été signalée au mois d'avril 2015, mais avait rapidement été réparée les jours suivants, de sorte qu'aucune flaque d'eau ne pouvait être présente le jour de l'accident.

Elle indique que le carrelage de la pièce était en bon état et remplissait sa fonction antidérapante, et qu'en outre Mme [J] disposait de chaussures ('sabots) dotées de semelles antidérapantes, quand bien même leur port n'avait pas fait l'objet de préconisations du médecin du travail pour ce laboratoire.

Aux termes de la déclaration d'accident du travail du 20 mai 2015, remplie par l'employeur, 'Mme [J] a glissé sur le sol mouillé de la laverie et a ressenti une vive douleur à la cheville'.

Dans la rubrique 'objet dont le contact a blessé la victime', l'employeur a mentionné 'sol mouillé'.

Cette déclaration a été transmise à la caisse par le GIP sans réserves de l'employeur.

Mme [J] s'appuie sur cette déclaration et l'absence de réserves du GIP pour étayer la réalité des circonstances de l'accident, à savoir une glissade sur un sol mouillé.

Elle estime que l'absence de témoins directs de l'accident est compensée notamment par le fait que la rédactrice de la déclaration d'accident du travail avait constaté elle-même le caractère glissant du sol.

Cependant, la déclaration d'accident du travail a été rédigée par Mme [Y], assistante 'RH' sans qu'aucun élément du dossier ne permette d'affirmer que cette dernière aurait personnellement constaté quoique ce soit de l'accident, étant relevé que la déclaration a été rédigée le lendemain des faits.

Mme [J] indique avoir signalé aux personnes venues l'aider après sa chute, qu'elle s'était violemment cognée la tête, la main et s'être tordue la cheville, et avoir signalé à M. [N], chef de la maintenance du GIP, que sa chute avait été provoquée par la fuite d'eau due au laveur défectueux. Selon Mme [J], Mme [U], chef de service, lui a affirmé que la fuite serait mentionnée sur la déclaration d'accident du travail.

Aucun témoignage n'est produit concernant M. [N] ou Mme [U], qui aurait permis de confirmer les déclarations de l'intimée.

Il est en revanche établi et non contesté qu'une fuite avait été déclarée mi-avril 2015 dans le laboratoire concerné par les faits, et que cette fuite provenait de l'appareil de marque [8].

Il est également établi qu'à la date du 23 avril 2015, cette fuite n'avait pas été réparée.

M. [P], technicien de maintenance, a répondu le 27 avril 2015 à Mme [W] qu'il allait intervenir dans un délai de trois semaines, puis, suite au message l'informant que ce délai était trop long, il a écrit le même jour qu'il allait intervenir au plus vite. A la suite de ce message, toujours le 27 avril 2015, Mme [W] a écrit 'difficile d'avoir une date pour la mise en route du laveur'.

Dans une attestation du 8 octobre 2019, M. [P] écrit qu'il a 'enlevé' le matériel nécessaire à la réparation de la vidange du laveur [8] le 28 avril 2015 chez [9] et qu'il a procédé rapidement à la réparation de cette vidange, 'avant le 19 mai 2015.'

Un 'récapitulatif de bon d'enlèvement emporté' établi par l'entreprise [9] est produit. Contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, le bon d'enlèvement n'a pas été établi le 23 septembre 2019, mais réédité à cette date. Le document mentionne en effet 'bon d'enlèvement n° BL01-429930 du 28/04/2015". De plus, ce bon comporte à la fois des pièces étrangères à la réparation et des pièces nécessaires à celle-ci.

Le fait que ces pièces aient été retirées le 28 avril 2015 n'apporte pas la preuve que la réparation serait intervenue dans les jours qui ont suivi. Le technicien écrivait en effet le 27 avril 2015 qu'il allait intervenir au plus vite, sans plus de précision. Dans son attestation rédigée en octobre 2019, il écrit avoir réparé le laveur avant le 19 mai 2015.

Force est de constater qu'il apparaît en mesure d'affirmer, quatre ans après les faits, qu'il est intervenu avant le 19 mai 2015, mais sans pouvoir préciser la date effective de la réparation, alors même que le 27 avril 2015, Mme [W], chef de service, avait indiqué qu'il était difficile d'avoir une date pour la mise en route du laveur.

En tout état de cause, aucune pièce contemporaine de l'accident, en dehors du bon d'enlèvement des pièces, n'est produite qui permettrait de confirmer que la réparation avait été réalisée avant le jour de l'accident du travail.

C'est par ailleurs à juste titre que la salariée souligne que l'employeur n'a émis aucune réserve sur les circonstances de l'accident, et qu'il n'a donc pas contesté que celui-ci s'était produit en raison d'une 'glissade sur un sol mouillé'.

Dès lors, à supposer que l'intervention du technicien de maintenance se soit produite avant le 19 mai 2015, il en faudrait conclure qu'elle a échoué à réparer le laveur, puisque l'existence d'un sol glissant n'a pas été contestée.

Par cette circonstance, associée à la réalité d'un appareil qui fuyait durant cette même période, ce dont l'employeur avait été informé, et sans que la preuve ne soit rapportée qu'il avait remédié à cette défectuosité avant la survenance de l'accident, Mme [J] apporte la preuve que le GIP avait conscience du danger auquelle elle était exposée.

Mme [J] soutient que l'employeur n'avait pas mis en oeuvre les mesures nécessaires pour la préserver du danger, en particulier qu'il ne lui avait pas fourni de chaussures antidérapantes, alors que le sol n'était lui-même plus antidérapant en raison de son ancienneté et de son usure.

Le GIP répond que le port de 'chaussures de sécurité antiglisse' n'avait été recommandé en mai 2014 que pour les sols glissants et que la laverie du laboratoire étant équipée d'un sol antidérapant, le port de telles chaussures n'y était pas requis.

Il ressort du dossier que la laverie du laboratoire était équipée d'un carrelage correspondant aux spécifications du classement UPEC.

Ainsi que l'expliquent les parties, l'UPEC est un système de classification permettant de catégoriser les carreaux en fonction de leur résistance. Il permet de savoir si le revêtement choisi est adapté à la pièce dans laquelle il sera installé. Le Centre Scientifique et Technique du Bâtiment ou CSTB réalise différents tests à l'issue desquels il attribue à chaque produit son classement NF UPEC. Chaque lettre du classement UPEC correspond à une contrainte :

' U correspond à la résistance au piétinement ou à la marche ;

' P mesure la résistance au poinçonnement provoqué par les talons aiguilles, les chutes d'objets ou les pieds de meubles ;

' E fait référence à la résistance à l'eau ;

' C correspond à la résistance aux produits chimiques.

Il est constant que le sol de la laverie est classé U4P4E3C2.

Mme [J] rappelle que E3 signifie E3 'présence d'eau souvent prolongée' et que la notice UPEC précise que la durabilité estimée du revêtement ne sera pas inférieure à dix ans.

Il est établi que le carrelage du laboratoire a été posé en février 1995, et qu'il avait donc plus de vingt ans au moment de l'accident du travail de Mme [J]. Dans ces conditions, l'employeur ne peut raisonnablement affirmer que les propriétés antidérapantes du sol le dispensaient de fournir des chaussures antidérapantes à ses salariés.

Sur ce point, il doit être constaté qu'alors que le GIP affirme que compte tenu de la nature du sol du laboratoire, le port de chaussures antidérapante n'était pas recommandé, il affirme dans le même temps que l'ensemble des salariés disposait d'un tel équipement de protection individuelle (EPI).

Il produit des attestations de plusieurs salariés, qui indiquent avoir eu à leur disposition des chaussures antidérapantes, et fait état de deux factures d'achats de telles chaussures, l'une datée de 2012, l'autre de 2016. Il présente enfin des photographies montrant des salariées dans le laboratoire, portant selon le GIP des sabots antidérapants.

Les photographies, non datées, ne constituent pas un élément de preuve pertinent.

La circonstance que les salariés qui ont témoigné aient eu à leur disposition des chaussures antidérapantes ne démontre ni que telle aurait été la situation de l'ensemble des salariés, ni que des consignes leur aient été données pour leur demander de porter cet EPI.

L'absence de toute consigne en ce sens est d'ailleurs en conformité avec l'affirmation de l'employeur selon laquelle l'existence d'un sol antidérapant dispensait les salariés du port de chaussures antiglisse.

Une expertise privée a été réalisée le 16 janvier 2020 à la demande du GIP. M. [K], expert honoraire, écrit que dans le cas d'un essai à sec ou sur une flaque d'eau déversée, 'l'adhérence des semelles de chaussures (normale de ville) s'est avérée bonne. Celle-ci doit s'avérer meilleure dans le cas de port de chaussures de travail'.

Cette expertise réalisée non contradictoirement n'a pas pris en compte les circonstances exactes de l'accident. L'expert missionné par le GIP indique ainsi que les circonstances de la chute de l'agent ne lui ont pas été précisées.

Il ne peut dans ces conditions être tiré aucune conséquence de cette expertise privée, compte tenu au surplus de ce que Mme [J] affirme, sans que l'employeur n'apporte la preuve contraire, qu'elle ne portait pas de chaussures antidérapantes le jour de l'accident.

Il est par conséquent établi que le GIP avait conscience du danger auquel était exposé Mme [J] et qu'il n'a pas pris les mesures destinées à l'en préserver.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit que l'accident du travail dont a été victime Mme [J] le 19 mai 2015 a pour cause la faute inexcusable du GIP.

Celui-ci ne fait valoir aucun moyen s'agissant de la majoration de la rente, de l'expertise qui a été ordonnée, ou de la provision allouée à Mme [J].

Il convient dès lors de confirmer le jugement déféré pour l'intégralité de ses dispositions, étant rappelé que, conformément à cette décision, la liquidation des préjudices personnels de Mme [J] sera examinée devant le tribunal judiciaire.

- Sur les dépens et frais irrépétibles

Le jugement étant confirmé sur le principal, il sera aussi confirmé sur les dépens.

Succombant, le GIP sera condamné aux dépens d'appel et débouté de sa demande présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

Il sera en outre condamné sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à payer la somme de 2000 euros à Mme [J].

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement déféré ;

Y ajoutant,

Déboute le Groupement d'Intérêt Public [7] de sa demande au titre des frais irrépétibles ;

Condamne le Groupement d'Intérêt Public [7] à payer à Mme [J] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne le Groupement d'Intérêt Public [7] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

E. GOULARD C. CHAUX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : Chambre sociale section 3
Numéro d'arrêt : 20/01101
Date de la décision : 26/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-26;20.01101 ?
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