C O U R D ' A P P E L D E C A E N
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
CONTENTIEUX DES PERSONNES HOSPITALISÉES SANS LEUR CONSENTEMENT
N° RG 24/02017 - N° Portalis DBVC-V-B7I-HPGK
N° MINUTE : 23/2024
AUDIENCE PUBLIQUE DU 13 Août 2024
O R D O N N A N C E
CONTRÔLE DE PLEIN DROIT DE L'HOSPITALISATION
Appel de l'ordonnance rendue le 31 Juillet 2024 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Alençon
APPELANT :
Madame [U] [F]
Née le 21/7/1983 à [Localité 3] (61)
Comparant
Assisté par Maître Me Pauline KERGLONOU , avocat du barreau de CAEN commis d'office.
INTIME :
Le directeur du centre hospitalier CPO d'[Localité 1]
Non comparant
LE MINISTÈRE PUBLIC :
En l'absence du ministère public, auquel l'affaire a été régulièrement communiquée,
Devant Nous, Etienne LESAUX, président de chambre, délégué par ordonnance du premier président, assisté de Sophie EHRHOLD, greffière
A l'audience publique du 13 Août 2024, ont été entendus : Madame [U] [F], son avocate ;
Les parties comparantes ayant été avisées à l'issue des débats que l'ordonnance serait prononcée le même jour et leur serait immédiatement notifiée ;
DÉBATS à l'audience publique du 13 Août 2024;
Les réquisitions de Monsieur le procureur général ont été lues par le président en son rapport.
ORDONNANCE prononcée publiquement le 13 Août 2024 ;
Nous, Etienne LESAUX,
Vu l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Alençon qui a maintenu l'hospitalisation complète de Madame [U] [F], hospitalisée en cas de péril imminent, à l'établissement CPO d'[Localité 1] depuis le 19 mai 2024 (réintégration);
Vu la notification de cette ordonnance le 31 juillet 2024 à Madame [U] [F] ;
Vu l'appel de cette ordonnance interjeté par Madame [U] [F] le 5 juillet 2024, parvenu au greffe le 6 juillet 2024 ;
Vu les avis adressés aux parties et au ministère public les informant de la tenue de l'audience le 13 Août 2024;
Vu les pièces du dossier ;
Vu l'avis écrit de Monsieur le procureur général;
DÉCISION :
Procédure
Vu les articles L. 3211-1 et suivants, R. 3211-1 et suivants du code de la santé publique,
Par décision en date du 24 janvier 2024, le directeur du CPO d'[Localité 1], s'appropriant les termes du certificat médical du docteur [Y], a ordonné l'admission en soins psychiatriques, sous la forme d'une hospitalisation complète, de Madame [U] [F] sur le fondement d'un péril imminent;
Par ordonnance du 31 Juillet 2024, le juge de la liberté et de la détention du tribunal judiciaire de Alençon a ordonné la poursuite de l'hospitalisation complète dont fait l'objet Madame [U] [F] ; cette décision a été notifiée le jour même à Madame [U] [F] , qui en a interjeté appel le 5 août 2024 par voie électronique.
Le docteur [T] [J], praticien consultant du CPO, a établi le 6 août 2024 un certificat médical de situation.
Sur la recevabilité de l'appel
L'appel formé par Madame [U] [F] est recevable pour avoir été interjeté dans le délai et selon les modalités prévues par les articles R 3211-18 et R 3211-19 du code de la santé publique.
Sur la régularité de la procédure
A l'audience du , l'avocat de Madame [U] [F] soulève des irrégularités de procédure.
Maître Me Pauline KERGLONOU soutient que XXXXXXX
La procédure est donc xxxxx.
Sur le fond
Aux termes du I de l'article L. 3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 du même code que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies : 1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ; 2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° de l'article L. 3211-2-1.
Aux termes de l'article L3212-1 II 2° du code de la santé publique, le directeur de l'établissement hospitalier peut prononcer l'admission en soins psychiatriques d'une personne malade lorsqu'il s'avère impossible d'obtenir une demande d'un tiers et qu'il existe, à la date d'admission, un péril imminent pour la santé de la personne dûment constaté par un certificat médical d'un médecin n'exerçant pas dans l'établissement d'accueil.
Par ordonnance du 31 juillet 2024, la juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire d'ALENCON a rejeté la demande de mainlevée de la mesure d'hospitalisation de Mme [U] [F].
Elle retient notamment que le certificat médical mensuel en date du 26 juillet 2024 dressé par le docteur [H] indique que les symptômes constatés chez Madame [U] [F] : déni des passages à l'acte, banalisation, difficultés de concentration, tension psychique, représentent des facteurs de risque de clinique suicide. Il ajoute qu'un nouveau traitement milieu hospitalier est en cours d'instauration et qu'une surveillance rapprochée et continue est nécessaire.
Dès lors, la demande de mainlevée de la mesure d'hospitalisation pour intégrer une clinique à [Localité 2] pour se rapprocher de ses enfants, alors même que Madame [U] [F] déjà fait une tentative de suicide lors d'une hospitalisation en clinique sera rejetée, le médecin ayant en outre motivé la nécessité d'une surveillance clinique rapprochée et continue en milieu hospitalier est nécessaire.
Le docteur [T] [J], praticien consultant du CPO, a établi, le 6 août 2024, un certificat médical de situation.
'Patiente admise en hospitalisation complète sous contrainte, suite à un nouveau passage à l'acte suicidaire ayant nécessité une prise en charge initiale en réanimation (intoxication médicamenteuse). La patiente est connue de nos structures pour des passages à l'acte suicidaire répétés, sur fond de mal être qu'elle dit être liée l'éloignement de ses enfants.
L'évolution récente témoigne d'une stagnation de son état, la patiente réitérant les mêmes demandes de sortie du service, en banalisant complétement les passages à l'acte. Le discours est peu authentique et circonlocutoire, la patiente restant centrée sur ses demandes et ne présentant que très peu d'insight. En effet, les troubles sont minimisées et les propos contradictoires avec la présentation dans le service.
Il semble en effet persister une tension interne importante. La patiente n'apporte aucune explication aux nombreux passages à l'acte suicidaires qu'elle a réalisé l'implication dans les soins reste très médiocre, la patiente ne sollicitant pas d'entretiens, hormis pour demander sa sortie.
Ce jour, les propos restent inchangés et l'état clinique stationnaire. Mme [F] affirme ne plus avoir d'idées suicidaires et souhaiter se rendre du cote d'[Localité 2] pour s'occuper de ses enfants. Cependant, la conscience des démarches à entreprendre reste fragile et est en faveur d'un certain apragmatisme qui perdure. Elle minimise toujours le risque associé de la prise massive de médicament qu'elle a pris. Le discours reste vague quant à la démarche qu'elle souhaite entreprendre.
Les soins sous contrainte restent donc impératifs afin de consolider l'amélioration clinique et d'affiner le travail de réhabilitation psycho sociale pour soutenir la patiente dans son projet de vie
Il résulte donc clairement de ces éléments que la situation relevée par la juge des libertés et de la détention dans son ordonnance querellée perdure, le médecin relevant une stagnation de l'état clinique de la patiente, une banalisation de son état et une faible implication aux soins. Ainsi se trouvent caractérisées l'absence de consentement de la patiente aux soins entrepris et la nécessité de ceux-ci, son état l'ayant conduit à un passage à l'acte engendrant un risque avéré pour sa santé.
Par suite, la mesure d'hospitalisation complète régulièrement ordonnée apparaît nécessaire et proportionnée à la situation de Mme [U] [F] et l'ordonnance en cause sera confirmée.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement par ordonnance,
Déclarons l'appel de Madame [U] [F] recevable ;
Confirmons l'ordonnance entreprise ;
Infirmons l'ordonnance entreprise, et, statuant à nouveau :
Disons que la présente ordonnance sera notifiée à toutes les parties.
Disons que la présente décision sera communiquée au ministère public ;
Laissons les dépens à la charge de l'Etat.
Sophie EHRHOLD Etienne LESAUX