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09/03/2023 | FRANCE | N°20/00421

France | France, Cour d'appel de Dijon, Chambre sociale, 09 mars 2023, 20/00421


KG/CH













Société [4]





C/



URSSAF agence pour la Sécurité Sociale Travailleur indépendants













































Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée



le :



à :



































RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE DIJON



CHAMBRE SOCIALE



ARRÊT DU 09 MARS 2023



MINUTE N°



N° RG 20/00421 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FRZJ



Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Pôle social du Tribunal Judiciaire de CHAUMONT, décision attaquée en date du 31 Juillet 2020, enregistrée sous le n° 18/43







APPELANTE :



Société [4...

KG/CH

Société [4]

C/

URSSAF agence pour la Sécurité Sociale Travailleur indépendants

Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE DIJON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 09 MARS 2023

MINUTE N°

N° RG 20/00421 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FRZJ

Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Pôle social du Tribunal Judiciaire de CHAUMONT, décision attaquée en date du 31 Juillet 2020, enregistrée sous le n° 18/43

APPELANTE :

Société [4]

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 2]

représentée par Me Alexandra L'HERMINE, avocat au barreau des HAUTS-DE-SEINE

INTIMÉE :

URSSAF agence pour la Sécurité Sociale Travailleur indépendants

[Adresse 5]

[Localité 1]

représentée par Me Lionel ASSOUS-LEGRAND, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Janvier 2023 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Katherine DIJOUX-GONTHIER, Conseiller chargé d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :

Olivier MANSION, Président de chambre,

Delphine LAVERGNE-PILLOT, Conseiller,

Katherine DIJOUX-GONTHIER, Conseiller,

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Kheira BOURAGBA,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ par Olivier MANSION, Président de chambre, et par Kheira BOURAGBA, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

La société [4] (la société) a réclamé, le 4 mai 2018, auprès de l'union de recouvrement des cotisations de la sécurité sociale et d'allocations familiales (l'URSSAF) Provences Alpes Côte d'Azur, la restitution des sommes qu'elle estime avoir indûment versées au titre de la contribution sociale de solidarité des sociétés ([3]) de l'année 2016 pour un montant de 8 936 euros et pour l'année 2017 pour un montant de 8 467 euros, soit un montant de 17 403 euros, en considérant que le montant des transferts de stocks intracommunautaires ne doit pas rentrer dans l'assiette de la contribution.

Cette demande ayant été rejetée par l'organisme, le 25 mai 2018, la société a, le 30 juillet 2018, saisi d'un recours le pôle social du tribunal judiciaire de Chaumont qui, par décision en date du 31 juillet 2020, a :

- déclaré la société [4] recevable en son recours,

- débouté la société [4] de sa demande de restitution de la contribution sociale de solidarité des sociétés au titre des années 2016 et 2017,

- condamné la société [4] à verser à l'URSSAF Provence Alpes Côte d'Azur venant aux droits de la caisse nationale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société [4] aux dépens.

Par déclaration enregistrée le 12 novembre 2020, la société [4] a relevé appel de cette décision.

Dans le dernier état de ses conclusions reçues à la cour le 18 octobre 2022 et reprises à l'audience sans ajout ni retrait au cours des débats, elle demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Chaumont le 31 juillet 2020 en ce qu'il a rejeté sa demande de remboursement pour un montant de 17 403 euros,

- condamner l'URSSAF PACA au remboursement de la somme de 17 403 euros,

- en tout état de cause, condamner l'URSSAF PACA à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ses dernières écritures à la cour le 5 janvier 2023 et reprises à l'audience, l'URSSAF demande à la cour de :

- constater qu'elle ne s'oppose pas à la déduction de la valeur des biens qui n'auront pas fait l'objet d'une vente ultérieure sous réserve de la présentation par la société [4] d'un justificatif chiffré des biens ayant effectivement fait l'objet d'un réacheminement en France ou d'une destruction,

- constater que la société [4] peut déduire sur le formulaire C3S - ou sur papier libre - les biens ayant effectivement fait l'objet d'un réacheminement en France ou d'une destruction,

- déclarer la société [4] mal fondée en ses demandes de remboursement de la [3] au titre des biens qui ont fait l'objet d'une vente à l'étranger,

- déclarer la société [4] fondée en ses demandes de remboursement de la [3] au titre des seuls biens qui n'auraient pas fait l'objet d'une vente à l'étranger (destruction, réacheminent en France) sous réserve qu'elle fournisse les justificatifs nécessaires,

par conséquent,

- confirmer le jugement rendu le 31 juillet 2020 par le tribunal judiciaire de Chaumont,

- condamner la société [4] à lui verser 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions susvisées.

MOTIFS

- Sur la demande de remboursement

La société fait valoir qu'au moment où les stocks sont physiquement transférés, elle est toujours propriétaire des marchandises et ne les a pas encore cédées à un client, ces opérations purement internes à l'entreprise, en l'absence de vente à un tiers, ne sont pas constitutives d'un chiffre d'affaires. Elle rappelle que les transferts de stocks à destination d'un autre état membre, qui traduisent des opérations internes à l'entreprise, doivent être mentionnés par les assujettis sur leurs déclarations de TVA, et aucune régularisation de cette déclaration n'est prévue si les biens transférés ne font pas ultérieurement l'objet d'une vente. Elle soutient ainsi, que les transferts intracommunautaires de stocks n'entrent pas dans l'assiette de la C3S définie à l'alinéa 1 de l'article L 137-33 du code de la sécurité sociale.

Elle soulève que l'inclusion du montant des transferts de stock intracommunautaires lors de la vente ultérieure alors que cette valeur a déjà été prise en compte dès leur transfert dans l'assiette de la C3S viole les dispositions des articles 28 et 30 du traité portant sur le fonctionnement de l'Union européenne.

Elle argue en conséquence, que pour être conforme, la réglementation française doit prévoir la déduction de la valeur des transferts intracommunautaire de biens de l'assiette de la C3S lorsque ces biens ne sont pas destinés à être vendus dans l'autre Etat membre ou ont été réacheminés dans l'Etat membre d'origine sans avoir été vendus. Elle ajoute que le mécanisme de remboursement prévu par l'article L 243-6 du code de la sécurité sociale ne constitue en aucun cas un droit à déduction, et les critères applicables à ce mécanisme sont inopérants à défaut de règlementation fixant les cas dans lesquels pourrait être demandé le remboursement de la valeur des transferts intracommunautaires de biens déclarés.

En conséquence, elle fait valoir qu'à défaut pour la réglementation française de respecter les conditions posées par la Cour de justice de l'Union européenne, l'inclusion de la valeur des transferts de stocks intracommunautaires dans l'assiette de la C3S porte effectivement une entrave fiscale au principe de libre circulation des marchandises au sein de l'Union Européenne.

A titre subsidiaire, elle soulève que l'inclusion de la valeur des transferts intracommunautaires de stocks dans l'assiette de la C3S porte une atteinte grave et manifeste au droit au respect des biens tel que défini à l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, et au juste équilibre entre l'intérêt général et la sauvegarde de ses droits fondamentaux en imposant un chiffre d'affaires qui n'existe pas.

L'URSSAF PACA fait valoir que les transferts de stocks doivent être inclus dans l'assiette de la C3S, que le transfert qu'opère la société de marchandises destinées à la vente en France vers un autre pays de l'Union européenne ne relève pas des exceptions visées aux a) et b) du III de l'article 256, et que la société doit donc déclarer les opérations en cause, mais non imposable, sur ses déclarations de TVA, que la Cour de cassation et la CJUE ont clairement exposé que les transferts de stocks entrent dans l'assiette de la C3S qui est constituée par le chiffre d'affaires déclaré à l'administration fiscale, qu'il soit imposable à la TVA ou qu'il en soit exonéré.

L'URSSAF PACA soutient que l'inclusion des transferts réalisés dans l'assiette de la C3S n'est pas contraire aux articles 28 et 30 du TFUE, que la société n'apporte aucune preuve permettant de constater qu'elle aurait effectivement déclaré 2 fois les transferts de stocks et qu'il n'existe aucun risque avéré de double imposition. Elle ajoute que la société ne démontre pas que les transferts de stocks n'ont pas été réalisés à titre onéreux ou que les marchandises ont été réacheminées sur le sol français, et par conséquent il n'y a pas lieu de s'interroger sur un éventuel et hypothétique droit à déduction. Elle ajoute qu'elle ne s'oppose pas à la déduction de la valeur des biens qui n'auront pas fait l'objet d'une vente ultérieure telle que visée par la jurisprudence de la CJUE, que la société pourra toujours procéder à cette déduction lors de ses déclarations de C3S, et que toutefois, la société n'apporte aucune preuve de l'absence de vente des biens.

Enfin, l'URSSAF PACA fait valoir qu'aucun droit fondamental n'a été violé.

Selon l'article L. 651-3, alinéa 1er, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction alors en vigueur, la contribution sociale de solidarité, qui est annuelle, est assise sur le chiffre d'affaires défini à l'article L. 651-5 réalisé l'année précédant celle au titre de laquelle elle est due, après application d'un abattement.

Selon l'article L. 651-5 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction alors en vigueur, les sociétés et entreprises assujetties à la contribution sociale de solidarité sont tenues d'indiquer annuellement à l'organisme chargé du recouvrement de cette contribution le montant de leur chiffre d'affaires global déclaré à l'administration fiscale, calculé hors taxes sur le chiffre d'affaires et les taxes assimilées.

L'article 256 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige, soumet à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel, et assimile à ces opérations le transfert par un assujetti d'un bien de son entreprise à destination d'un autre État membre de la Communauté européenne.

Le chiffre d'affaires visé par le premier de ces textes étant celui entrant dans le champ d'application territorial des taxes sur le chiffre d'affaires, il s'ensuit que le montant des transferts de stocks effectués par une société d'un pays de l'Union européenne vers un autre État membre est pris en compte, dès leur réalisation, pour la détermination de l'assiette de la contribution litigieuse (2e Civ., 7 novembre 2013, pourvoi n° 12-25.776 et 2e Civ, 11 février 2016, pourvoi n° 14-26.363). En effet, il est de jurisprudence constante que l'assiette de cette contribution est le chiffre d'affaires ou le chiffre d'affaires global déclaré à l'administration fiscale. Il importe peu, à cet égard, que le chiffre d'affaires n'ait pas donné lieu au recouvrement de la taxe sur la valeur ajoutée, le régime fiscal des sociétés étant sans incidence sur leur obligation au versement de la contribution sociale de solidarité (Soc., 18 juin 1986,pourvoi n° 84-10.254 ; 23 avril 2003, pourvoi n° 01-21.443).

Saisie sur question préjudicielle posée par la Cour de cassation (2e Civ., 19 janvier 2017, n° 15-26.723), la Cour de justice de l'Union européenne (arrêt du 14 juin 2018, C-39/17,4e ch., France SAS c/ Caisse nationale du RSI) a dit pour droit que "les articles 28 et 30 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne doivent être interprétés en ce sens qu'ils ne s'opposent pas à une réglementation d'un État membre prévoyant que l'assiette de contributions perçues sur le chiffre d'affaires annuel des sociétés, pour autant que ce dernier atteint ou dépasse un certain montant, soit calculée en tenant compte de la valeur représentative des biens transférés par un assujetti ou pour son compte, pour les besoins de son entreprise, de cet État membre vers un autre État membre de l'Union européenne, cette valeur étant prise en compte dès ledit transfert, alors que, lorsque les mêmes biens sont transférés par l'assujetti ou pour son compte, pour les besoins de son entreprise, sur le territoire de l'État membre concerné, leur valeur n'est prise en compte dans ladite assiette que lors de leur vente ultérieure, à la condition, premièrement, que la valeur de ces biens ne soit pas, une nouvelle fois, prise en compte dans ladite assiette lors de leur vente ultérieure dans cet État membre ; deuxièmement, que leur valeur soit déduite de ladite assiette lorsque ces biens ne sont pas destinés à être vendus dans l'autre État membre ou ont été réacheminés dans l'État membre d'origine sans avoir été vendus ; troisièmement, que les avantages résultant de l'affectation desdites contributions ne compensent pas intégralement la charge supportée par le produit national commercialisé sur le marché national lors de sa mise sur le marché, ce qu'il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier.

Dès lors, il y a lieu, pour le juge national, d'interpréter les dispositions de l'article L. 651-5 du code de la sécurité sociale conformément à la règle de droit de l'Union européenne, telle qu'elle résulte de l'arrêt susvisé de la Cour de Justice de l'Union européenne, et de dire que la contribution sociale de solidarité des sociétés ne revêt pas le caractère d'une taxe d'effet équivalent à un droit de douane dès lors que les conditions posées par la Cour, qui doivent être appliquées même à des rapports juridiques nés et constitués avant l'arrêt rendu sur renvoi préjudiciel, sont satisfaites."

La CJUE n'a pas invalidé, dans son principe, la règle d'assiette prévue par le texte susvisé et le remboursement de la contribution en cause ne peut intervenir au seul motif que les dispositions législatives nationales qui l'instituent ne prévoient pas les réserves émises par l'arrêt du 14 juin 2018.

Il appartient, dans ce cas, au juge national d'interpréter la loi interne à la lumière de ces dernières, afin d'assurer sa conformité au droit communautaire, dans le respect des principes d'effectivité et d'équivalence.

Pour que l'assiette de la contribution litigieuse puisse inclure la valeur représentative des biens transférés par la société vers un autre État membre de l'Union européenne, dès la mise en oeuvre de ce transfert, il convient de s'assurer d'une part, que la valeur de ces biens ne soit pas, une nouvelle fois, prise en compte dans ladite assiette lors de leur vente ultérieure dans cet État membre, d'autre part, que leur valeur soit déduite de l'assiette en question lorsque ces biens sont invendus, enfin, que les avantages résultant de l'affectation des contributions en cause ne compensent pas intégralement la charge supportée par le produit national commercialisé sur le marché national lors de sa mise sur le marché.

En l'espèce, s'agissant de la première condition, l'examen de la notice C3S applicable au litige révèle que le chiffre d'affaires composant l'assiette de la contribution est reporté sur les lignes 01 (ventes, prestations de services), 04 (exportations), 05 (autres opérations non imposables) et 06 (livraisons intracommunautaires) des déclarations déposées au titre de l'année N-1. Les transferts de stocks intracommunautaires, assimilés à des livraisons intracommunautaires et reportables en tant que tels sur la ligne 06 de la déclaration de TVA, sont intégrés, à ce stade, dans l'assiette de ladite contribution.

Contrairement à ce que prétend la société, la valeur de ces biens n'a pas à être réintégrée dans l'assiette de la contribution lors de leur vente ultérieure dans l'Etat membre où ils sont transférés, et la société n'est pas tenue de les reporter à nouveau sur la ligne 5 de la déclaration. Ainsi, que les biens transférés vers d'autres États membres ne sont pas soumis deux fois, lors du transfert et lors de la vente, par les contributions en cause.

Il doit être constaté que la commercialisation de ces biens ne génère pas, à nouveau, l'imposition critiquée.

La première condition, qui vise à prohiber tout risque de double imposition, est donc remplie.

S'agissant de la deuxième condition, pour que la règle d'assiette de la contribution litigieuse soit conforme au droit communautaire, il suffit que la déduction de la valeur des biens invendus intervienne, soit ab initio, lors de la déclaration elle-même (ce que la société appelle la déduction a priori), soit ultérieurement. En effet, contrairement à ce que soutient la société, les principes dégagés par la CJUE ne s'opposent pas à ce que la déduction soit opérée postérieurement à ladite déclaration, sous la forme d'un remboursement des sommes indûment versées.

Ce point précisé, il convient d'observer que le formulaire C3S dans sa présentation applicable au litige n'interdit pas la prise en compte de la déduction de la valeur des biens invendus, ainsi que l'URSSAF en justifie, puisqu'il est prévu une déclaration des opérations à soustraire (ligne AD5). La société ne saurait se retrancher derrière l'imprécision de la notice éditée en 2016 et 2017 pour en déduire que la réglementation nationale s'opposerait à l'exercice de ce droit. En effet, s'agissant d'une règle d'assiette, posée par la loi, celle-ci ne peut être mise en échec par une simple notice éditée sur la base d'un formulaire Cerfa, par voie d'arrêté. Il doit être souligné que la déduction litigieuse peut tout aussi bien être sollicitée en dehors du formulaire. Enfin, ce mécanisme de déduction ab initio est complété, au besoin, par le recours dont dispose le redevable devant l'organisme de recouvrement et les tribunaux pour récupérer les sommes indûment versées au titre de la C3S et de la contribution additionnelle, concernant les biens restés invendus. La preuve que le redevable est tenu de fournir pour obtenir le remboursement de l'indu, en justifiant que les biens concernés ne sont pas destinés à être vendus dans l'autre État membre de l'Union européenne ou ont été réacheminés en France sans avoir été vendus, n'est pas de nature à priver le droit à remboursement de son caractère effectif, étant précisé que cette preuve peut être apportée par tous moyens.

De plus, il n'est pas allégué par la société qu'une telle preuve serait, en pratique, impossible ou excessivement difficile à rapporter.

La deuxième condition est, dès lors, remplie.

Elle l'est d'autant plus que l'URSSAF ne s'oppose pas au remboursement sollicité, sous réserve que la société établisse que tout ou partie des biens en question n'ont pas été vendus, ne serait-ce que pour déterminer le montant de l'indu.

S'agissant de la troisième condition, il n'est pas contesté que le produit des contributions en cause est exclusivement affecté à la sécurité sociale, puisque la [3] les régimes propres aux travailleurs indépendants, et pour l'excédent, le Fonds de solidarité vieillesse, tandis que depuis 2011, ce Fonds bénéficie de la totalité du rendement de la contribution additionnelle. Les contributions litigieuses ne tendent pas à alimenter des activités qui profitent spécifiquement aux produits nationaux imposés ; elles ne sont pas la contrepartie d'un avantage, dont le montant serait proportionnel au service rendu, procuré aux sociétés redevables de ces contributions. En effet, les prestations fournies par les organismes sociaux ne diffèrent pas selon que les sociétés concernées effectuent des transferts de biens à l'intérieur du territoire français ou à destination des autres États membres.

Cette condition est, ainsi, manifestement remplie.

Il s'ensuit que la [3] et la contribution additionnelle, qui a la même assiette, ne doivent pas être considérées comme des taxes d'effet équivalent et ne portent pas atteinte au principe de libre circulation des marchandises au sein de l'Union européenne.

Enfin, concernant la violation alléguée de l'article 1er du protocole additionnel n° 1 à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il convient de relever que l'obligation de payer la contribution litigieuse entre dans le champ d'application du droit de propriété au titre du « paiement des impôts ou d'autres contributions et amendes » visé par le paragraphe 2 de ce texte (CEDH, 21 févr. 1997, Van Raalte c/ Pays-Bas).

Toutefois, dès lors, d'une part, que la valeur des biens transférés vers un autre État membre n'est pas comptabilisée une nouvelle fois dans l'assiette au moment de leur vente, d'autre part, que la personne assujettie est en mesure de déduire de l'assiette des contributions la valeur des biens transférés qui n'ont pas été vendus, cette obligation ménage un juste équilibre entre l'exigence de l'intérêt général, ladite contribution participant au financement du système de protection sociale, lequel repose sur un mécanisme de solidarité nationale, et la protection de l'intérêt individuel.

Il s'ensuit qu'aucune atteinte substantielle au droit protégé par l'article 1er du protocole additionnel n° 1 à la Convention n'est caractérisée.

La société n'apportant aucun élément sur le sort effectif des transferts de stocks qui ont été inclus dans l'assiette des contributions en cause, sa demande de remboursement ne peut être accueillie.

Le jugement entrepris sera donc confirmé, par substitution de motifs.

- Sur les autres demandes

L'URSSAF demande de prendre acte à ce qu'elle ne s'oppose pas à la déduction de la valeur des biens invendus sous réserve de justificatifs chiffrés des biens.

Il convient d'y faire droit.

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société [4] et la condamne à verser à l'union de recouvrement des cotisations de la sécurité sociale et d'allocations familiales Provences Alpes Côte d'Azur la somme de 2 000 euros.

La société [4] supportera les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par décision contradictoire,

CONFIRME le jugement en date du 31 juillet 2020, par substitution de motifs,

Y ajoutant :

- Rappelle que l'union de recouvrement des cotisations de la sécurité sociale et d'allocations familiales Provences Alpes Côte d'Azur ne s'oppose pas à la déduction de la valeur des biens invendus sous réserve de justificatifs chiffré des biens,

- Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société [4] et la condamne à verser à l'union de recouvrement des cotisations de la sécurité sociale et d'allocations familiales Provences Alpes Côte d'Azur la somme de 2 000 euros,

- Condamne la société [4] aux dépens d'appel.

Le greffier Le président

Kheira BOURAGBA Olivier MANSION


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/00421
Date de la décision : 09/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-09;20.00421 ?
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