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06/04/2023 | FRANCE | N°20/00360

France | France, Cour d'appel de Dijon, Chambre sociale, 06 avril 2023, 20/00360


KG/CH













S.A.S. [5]





C/



Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Haute-Marne























































Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée



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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE DIJON



CHAMBRE SOCIALE



ARRÊT DU 06 AVRIL 2023



MINUTE N°



N° RG 20/00360 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FRKD



Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Pôle social du Tribunal Judiciaire de CHAUMONT, décision attaquée en date du 31 Juillet 2020, enregistrée sous le n° 18/00176







APPELANTE :



S.A.S. [5]...

KG/CH

S.A.S. [5]

C/

Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Haute-Marne

Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE DIJON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 06 AVRIL 2023

MINUTE N°

N° RG 20/00360 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FRKD

Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Pôle social du Tribunal Judiciaire de CHAUMONT, décision attaquée en date du 31 Juillet 2020, enregistrée sous le n° 18/00176

APPELANTE :

S.A.S. [5]

[Adresse 6]

[Localité 2]

représentée par Me Fabien BLONDELOT de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de l'AUBE substitué par Maître Alexandre DIRINGER, avocat au barreau de l'AUBE

INTIMÉE :

Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Haute-Marne

[Adresse 1]

[Adresse 4]

[Localité 3]

représenté par Mme Anne GRIERE (Chargée d'audience) en vertu d'un pouvoir général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Février 2023 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Katherine DIJOUX-GONTHIER, Conseiller chargé d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :

Olivier MANSION, Président de chambre,

Delphine LAVERGNE-PILLOT, Conseiller,

Katherine DIJOUX-GONTHIER, Conseiller,

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Frédérique FLORENTIN,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ par Olivier MANSION, Président de chambre, et par Frédérique FLORENTIN, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [Z] [Y], employé au sein de la société [5] (la société) de 1988 à avril 2016 et à compter d'avril 2007, a souscrit, le 25 avril 2018, auprès de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Haute Marne, une demande de reconnaissance de maladie professionnelle, selon certificat médical initial du 13 mars 2018, mentionnant "un épaississement des parois bronchiques", en l'occurrence un épaississement de la plèvre viscérale, maladie inscrite au tableau n° 30 des maladies professionnelles.

Par décision du 27 août 2018, la CPAM a informé la société de la prise en charge de la maladie de M. [Y] au titre de la législation sur les risques professionnels.

Le 19 septembre 2018, la société a contesté la décision de prise en charge en saisissant la commission de recours amiable (CRA), laquelle a confirmé la décision de la CPAM par décision du 22 novembre 2018.

Par courrier en date du 16 octobre 2018, la caisse d'assurance retraite et de santé au travail (CARSAT) Nord-Est a notifié à la société sa décision de lui imputer le coût de la prise en charge de la maladie de M. [Y] par inscription au compte AT-MP.

Le 12 décembre 2018, la société a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Haute Marne aux fins de contester la décision de la CRA.

Par jugement du 31 juillet 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de Chaumont a :

- déclaré la société [5] recevable en son recours,

- se déclare incompétent à connaître la demande de la société [5] tendant à l'imputation sur le compte spécial de la maladie professionnelle de son salarié, M. [Z] [Y], cette demande relevant de la saisine de la cour d'appel d'Amiens,

- débouté par ailleurs la société [5] de ses différents motifs d'inopposabilité invoqués,

en conséquence,

- confirmé la décision entreprise de la commission de recours amiable de la CPAM de la Haute-Marne en date du 22 novembre 2018,

- déclaré opposable à la société [5] la prise en charge, au titre de la maladie professionnelle, de la présente pathologie affectant M. [Z] [Y],

- débouté les parties de leurs demandes et prétentions plus amples ou contraires.

Par déclaration enregistrée le 15 octobre 2020, la société a relevé appel de cette décision.

Dans le dernier état de ses conclusions reçues à la cour le 4 mars 2022 et reprises à l'audience sans ajout ni retrait au cours des débats, elle demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu le 31 juillet 2020 par le tribunal judiciaire de Chaumont en toutes ses dispositions,

en conséquence,

à titre principal,

- affecter la maladie professionnelle de M. [Z] [Y] reconnue par décision de la CPAM de la Haute-Marne du 27 août 2018 au compte spécial,

à titre subsidiaire,

- lui déclarer inopposable la décision de la commission de recours amiable de la CPAM de la Haute-Marne du 22 novembre 2018 en ce qu'elle lui déclare opposable la décision de la caisse du 27 août 2018 relative à la pathologie de M. [Z] [Y],

en tout état de cause,

- condamner la CPAM à lui verser une somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la CPAM de la Haute-Marne aux entiers dépens.

Par ses dernières écritures reçues à la cour le 18 juillet 2022, la CPAM de la Haute-Marne demande à la cour de :

- confirmer la décision rendue le 22 novembre 2018 par la commission de recours amiable, ainsi que le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Chaumont le 8 octobre 2020,

- dire et juger que la décision de prise en charge de la pathologie déclarée est légalement fondée,

- dire et juger que la décision de prise en charge lui est opposable,

- condamner à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions susvisées.

MOTIFS

- Sur la demande d'inscription au compte spécial

- sur la compétence

La société soutient que les litiges relatifs à l'inscription au compte spécial sont de la compétence des juridictions du contentieux général de sécurité sociale, en l'absence de décision de la CARSAT.

Elle indique qu'à la date de la saisine du tribunal, le taux de cotisation ne lui avait pas été notifié et qu'elle est ainsi recevable à saisir la juridiction de Chaumont.

La CPAM réplique que la juridiction du contentieux général est incompétente dès lors que, par décision de la CARSAT du 16 octobre 2018, la maladie professionnelle a été imputée au compte de la société.

Il est constant que si la contestation des décisions des CARSAT, en matière de tarification d'accident du travail, relève de la compétence exclusive des juridictions du contentieux technique, les litiges relatifs à l'inscription au compte spécial sont de la compétence des juridictions du contentieux général en l'absence de décision de la CARSAT, c'est-à-dire avant la notification de son taux de cotisation à l'employeur.

En l'espèce, la CARSAT Nord-Est a notifié à la société, par courrier du 16 octobre 2018, sa décision de lui imputer le coût de la prise en charge de la maladie professionnelle de M. [Y] par inscription à son compte AT-MP.

Cependant, ce courrier n'a pas eu pour objet de lui notifier un nouveau taux AT-MP, ne faisant mention uniquement de l'intégration de la pathologie de M. [Y] dans le cadre du prochain taux AT-MP de la société, et ne saurait donc valoir notification du taux de cotisation.

En conséquence, le taux de cotisation n'ayant pas été notifié à la société lors de la saisine du tribunal le 14 décembre 2018, la juridiction est compétente pour statuer.

Le jugement sera donc infirmé sur ce chef.

- sur le bien fondé de la demande

La société soutient que M. [Y] a pu être exposé au risque antérieurement chez un autre employeur, avant son entrée au sein de la société et, compte tenu du fait qu'il n'est pas possible de déterminer un responsable unique, les conséquences financières doivent être inscrites au compte spécial des maladies professionnelles.

Selon l'arrêté du 16 octobre 1995 pris pour l'application des articles D.242-6-5 et D.242-6-7 du code de la sécurité sociale relatif à la tarification des risques d'accidents du travail et de maladies professionnelles, en son article 2, applicable au litige, "sont inscrites au compte spécial, conformément aux dispositions de l'article D.242-6-5, les dépenses afférentes à des maladies professionnelles constatées ou contractées dans les conditions suivantes :

(...)

4° la victime de la maladie professionnelle a été exposée au risque successivement dans plusieurs établissements d'entreprises différentes sans qu'il soit possible de déterminer celle dans laquelle l'exposition au risque a provoqué la maladie ;

(...)."

Il est constant que la maladie doit être considérée comme contractée au service du dernier employeur chez lequel la victime a été exposée au risque, avant constatation médicale, sauf à cet employeur à rapporter la preuve contraire.

L'imputabilité de la maladie déclarée par M. [Y] au sein de la société ne peut être démontrer que si les travaux susceptibles de provoquer la maladie sont conformes à ceux énoncés dans le tableau n° 30 des maladies professionnelles.

Ce tableau subordonne la prise en charge de la pathologie déclarée, aux travaux exposant à l'inhalation de poussières d'amiante, notamment la manipulation et l'utilisation de l'amiante brute dans des opérations de fabrication, la confection de produits contenant de l'amiante, l'application, la destruction ou l'élimination de produits à base d'amiante, des travaux dans des locaux contenant des matériaux à base d'amiante, la conduite de four et des travaux nécessitant le port habituel de vêtements contenant de l'amiante.

En l'espèce, il est constant que M. [Y] a été embauché au sein de l'entreprise [B] [Y] de 1974 à 1988, à savoir en tant que tourneur, puis au sein de la société [5] en tant que fraiseur et aleseur de juin 1988 à avril 2007 et en tant que gardien de nuit à compter d'avril 2007 jusqu'au 31 mars 2011.

Il resssort de l'enquête réalisée par la CPAM en date du 25 juin 2018, à partir des questionnaires adressés au salarié et à la société [5] que le salarié déclare : "qu'il était tourneur chez léon [Y] et qu'au sein de la société [5], l'amiante était présente partout dans la fonderie, au niveau des cubilots, de la toiture, que son activité en tant que tourneur était d'effectuer le surfaçage des produits et de réaliser la finition des pièces sur une aleseuse, à une époque il a été amené à couper des joints d'amiante qu'il devait ensuite poser sur des foyers fermés."

L'employeur, quant à lui, indique que : l'"atelier d'usinage où travaillait M. [Y] était en tuile et en brique sans amiante, qu'au niveau des machines où il réalisait l'alésage aucun calorifugeage présent, que les pièces, qu'il utilisait, étaient en fonte et ne contenaient pas d'amiante et que la machine d'alésage ne dégage pas de poussière." Il conteste, pour ces raisons, que le salarié ait pu être exposé au risque.

Il rajoute "qu'un diagnostic amiante se fait tous les quatre ans, le dernier datant de décembre 2014, que le site a présenté de l'amiante, qu'un désamiantage a été réalisé et il reste de l'amiante en bon état qui doit faire l'objet de vérification et conclut que l'atelier où travaillait M. [Y] n' a jamais été recensé comme zone amiantée dans les rapports.."

L'agent enquêteur de la CPAM a repris également le descriptif des tâches occupées par M. [Y], selon ses déclarations, au sein de l'entreprise [B] [Y] de 1974 à 1988 à savoir en tant que tourneur il réalisait des pièces mécaniques en sous-traitance pour les garages et notamment l'usinage régulier des tambours de frein pour les garages et travaillait sur des ponts roulants équipés de frein qui dégageaient de la poussière.

Il ressort également des pièces communiquées dans l'enquête administrative que la structure du site, au vu du rapport [7] (document de mars 2005) présentait de nombreuses zones d'amiante.

Il ressort de la description par le salarié de ces fonctions que son poste occupé au sein de la société consistait en tant que tourneur fraiseur et aléseur à manipuler sur une machine outil des pièces métalliques avec notamment de l'amiante et au sein de locaux en présence de poussières d'amiante et de silice cristalline.

Il résulte de l'enquête de la CPAM ainsi que l'avis de la CARSAT que M.[Y] a subi une exposition d'ambiance aux poussières d'amiante de 1988 à probablement 1997, et une exposition d'ambiance à la silice cristalline de 1988 à 2011 au sein de la société.

Le fait que M. [Y] ai pu être exposé au risque antérieurement chez d'autres employeurs est donc indifférent puisque l'exposition aux risques est prouvée chez son dernier employeur, et que ce dernier ne rapporte aucun élément concret susceptible de démontrer le contraire.

En conséquence, les frais relatifs à cette maladie professionnelle seront imputés au compte du dernier employeur connu, la société [5], et, entreront dans le calcul de son taux de cotisations.

Dès lors, la demande de la société relative à l'inscription de la maladie professionnelle de M. [Y] au compte spécial est rejetée.

- Sur la demande d'inopposabilité de la décision de la prise en charge de la CPAM

La société fait valoir que la décision de la CPAM lui est inopposable dans la mesure où la fiche "colloque médico-administratif" ne comporte aucune signature ni nom du médecin conseil de la caisse alors que l'enquête administrative était close.

Elle soutient également qu'il ne peut y avoir présomption de la maladie professionnelle de M. [Y] puisque la CPAM ne rapporte pas la preuve que les conditions relatives à la liste des travaux susceptibles de provoquer la maladie et la durée d'exposition aux risques dans le tableau n° 30 des maladies professionnelles sont réunies.

La CPAM soutient que le principe de la contradiction a été respecté puisque la fiche "colloque médico-administratif" a été signée par le médecin conseil et le gestionnaire de la CPAM, et, consultée par la société, avant la décision de prise en charge de la maladie professionnelle de M. [Y].

Elle soutient qu'elle apporte la preuve que les conditions d'exposition aux risques du tableau n° 30 des maladies professionnelles sont bien remplies.

En ce qui concerne le moyen tiré de la violation du respect du contradictoire pendant l'instruction de la CPAM :

Aux termes de l'article R. 441-11, III, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009 applicable en l'espèce, en cas de réserves motivées de la part de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la caisse envoie avant décision à l'employeur et à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou de la maladie ou procède à une enquête auprès des intéressés. Une enquête est obligatoire en cas de décès.

Et selon l'article R. 441-14, alinéas 1, 3 et 4, du même code, dans sa rédaction modifiée par le décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009, applicable en l'espèce :

Lorsqu'il y a nécessité d'examen ou d'enquête complémentaire, la caisse doit en informer la victime ou ses ayants droit et l'employeur avant l'expiration du délai prévu au premier alinéa de l'article R. 441-10 par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. A l'expiration d'un nouveau délai qui ne peut excéder deux mois en matière d'accidents du travail ou trois mois en matière de maladies professionnelles à compter de la date de cette notification et en l'absence de décision de la caisse, le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie est reconnu.

Dans les cas prévus au dernier alinéa de l'article R. 441-11, la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article R. 441-13.

Il ressort des pièces produites aux débats que, le 18 mai 2015, la caisse a présenté à l'employeur un courrier l'informant de la demande de reconnaissance d'une maladie professionnelle présentée par son salarié, en joignant une copie de la déclaration de maladie professionnelle du 25 avril 2018, et du certificat médical initial du 13 mars 2018, qu'elle lui a indiqué également qu'une instruction était en cours et a adressé un questionnaire respectivement au salarié et à l'employeur, et qu'elle a, par courrier en date du 23 juillet 2018, informé l'employeur du délai supplémentaire pour instruire le dossier.

Par courrier en date du 27 juillet 2018, la caisse a informé l'employeur de la clôture de l'instruction du dossier et la possibilité de venir consulter les éléments du dossier en lui indiquant la date de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle de M. [Y].

La fiche "colloque médico-administratif", jointe à l'enquête administrative, querellée par l'employeur, comporte le nom et prénom du salarié, la date de la première constatation médicale du 23 mai 2017 et la désignation du syndrome tableau 30.

Puis, cette fiche a été complétée et signée par le médecin conseil de la caisse et le gestionnaire de la caisse, le 20 juillet 2018, avec les mentions du syndrome de la maladie déjà mentionnée dans la fiche initiale susvisée et l'accord de la prise en charge de la CPAM (pièce n° 2).

La société a consulté, le 20 août 2018, le dossier comprenant la déclaration de maladie professionnelle, le certificat médical initial, les questionnaires et enquête et la fiche "colloque médico-administratif", sans formuler aucune observation (pièce n° 3).

La caisse a notifiée la décision de prise en charge de la maladie professionnelle de M. [N], le 27 août 2018 à la société (pièce n° 8).

Des lors , la société ne peut se prévaloir du non respect du contradictoire pendant la phase d'instruction du dossier puisque la fiche "colloque médico-administratif" en date du 20 juillet 2018 a été dressée, avant la clôture de l'enquête, et consultée par l'employeur, avant la décision de prise en charge de la maladie professionnelle par la caisse.

La caisse justifie ainsi qu'elle a respecté ses obligations mises à sa charge afin d'assurer le respect du contradictoire dans la phase d'instruction et donc le moyen soulevé par la société à ce titre sera écarté.

En ce qui concerne les conditions contestées du tableau n° 30 des maladies professionnelles :

Aux termes de l'article L. 461-1, alinéa 2, du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au présent litige, est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.

Pour bénéficier de la présomption d'imputabilité, trois conditions doivent être réunies :

- la maladie doit figurer dans un tableau de maladies professionnelles,

- le délai de prise en charge prévu au tableau doit être respecté,

- l'exposition au risque du tableau doit être démontrée.

Le tableau n° 30 des maladies professionnelles, tel qu'il est annexé à l'article R. 461-3 du code de la sécurité sociale, prévoit notamment l'épaississement de la plèvre viscérale, avec un délai de prise en charge de 35 ans, sous réserve d'une durée d'exposition de 5 ans, aux travaux exposant à l'inhalation de poussières d'amiante, notamment la manipulation et l'utilisation de l'amiante brut dans des opérations de fabrication, la confection de produits contenant de l'amiante, l'application, la destruction ou l'élimination de produits à base d'amiante, des travaux dans des locaux contenant des matériaux à base d'amiante, la conduite de four et des travaux nécessitant le port habituel de vêtements contenant de l'amiante.

En ce qui concerne la première condition tenant à la désignation de la maladie, elle est établie, au vu des éléments médicaux produits aux débats (certificat médical initial du 13 mars 2018, déclaration de la maladie professionnelle du 25 avril 2018, colloque médico-administratif du 20 juillet 2018) et de la notification de la prise en charge par la CPAM en date du 27 août 2018, en tant que "maladie épaississement de la plèvre viscérale inscrite dans la tableau n° 30 : affections professionnelles consécutives à l'inhalation de poussières d'amiante est d'origine professionnelle" et n'est pas discutée.

En ce qui concerne la condition relative à l'exposition aux risques, elle a été précédemment admise et ainsi il a été démontré que M. [Y] a subi une exposition d'ambiance aux poussières d'amiante de 1988 à probablement 1997, et une exposition d'ambiance à la silice cristalline de 1988 à 2011 au sein de la société.

En ce qui concerne la condition relative au délai de prise en charge de la maladie :

M. [Y] a travaillé vingt trois ans au sein de la société et la date de la première constatation médicale est fixée au 23 mai 2017 soit moins de 35 ans après la fin de l'exposition correspondant à la date de fin du contrat de travail, le 31 mars 2011.

Dès lors, la durée d'exposition au risque de cinq ans est démontrée et le délai de prise en charge a été respecté.

Les conditions du tableau n° 30 des maladies professionnelles étant réunies, la demande de la société concernant l'inopposabilité de la prise en charge par la CPAM de la maladie professionnelle de M. [Y] est rejetée.

Le jugement sera donc confirmé sur ce chef.

- Sur les autres demandes

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société et la condamne à verser à la CPAM la somme de 1 500 euros,

La société supportera les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par décision contradictoire,

INFIRME le jugement en date du 31 juillet 2020 en ce qu'il déclare incompétent le tribunal judiciaire de Chaumont concernant la demande de la société [5] tendant à l'imputation sur le compte spécial de la maladie professionnelle de son salarié, M. [Y], cette demande relevant de la saisine à la cour d'appel d'Amiens,

et LE CONFIRME pour le surplus,

Statuant à nouveau :

- Dit que le tribunal judiciaire de Chaumont était compétent pour connaître de la demande de la société [5] tendant à l'imputation sur le compte spécial de la maladie professionnelle de son salarié, M. [Y],

- Rejette la demande d'inscription au compte spécial par la société [5] des dépenses de la maladie professionnelle déclarée par M. [Y] le 25 avril 2018,

Y ajoutant :

- Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société [5] et la condamne à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Haute Marne la somme de 1 500 euros,

- Condamne la société [5] aux dépens d'appel.

Le greffier Le président

Frédérique FLORENTIN Olivier MANSION


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/00360
Date de la décision : 06/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-06;20.00360 ?
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