RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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COUR D'APPEL DE NANCY
CINQUIÈME CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT N° /22 DU 15 JUIN 2022
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 21/01771 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EZZ7
Décision déférée à la Cour : jugement du Tribunal de Commerce de NANCY, R.G. n° 2020002255, en date du 31 mai 2021,
APPELANTE :
S.A.R.L. LA CASSEROLE ayant son siège social sis [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de STRASBOURG sous le numéro 529 402 273
Représentée par Me Anne-lise LE MAITRE, avocat au barreau de NANCY
INTIMÉE :
S.A.S. WHEEL'E, ayant son siège social sis [Adresse 2], prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié audit siège, immatriculée au Registre du commerce et des sociétésde NANCY sous le numéro 792 667 149
Représentée par Me Nicole VILMIN de la SCP VILMIN CANONICA REMY ROLLET, avocat au barreau de NANCY
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 905 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 18 Mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Guillemette MEUNIER, Présidente de Chambre et Monsieur Olivier BEAUDIER, Conseiller, chargé du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Guillemette MEUNIER, Présidente de Chambre,
Monsieur Olivier BEAUDIER, Conseiller,
Monsieur Jean-Louis FIRON, Conseiller,
Greffière placée, lors des débats : Madame Mégane LEGARDINIER;
A l'issue des débats, la Présidente a annoncé que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 15 Juin 2022, en application du deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
ARRÊT : contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
signé par Mme Guillemette MEUNIER, Présidente et par Madame LEGARDINIER, Greffière placée, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Copie exécutoire délivrée le à
Copie délivrée le à
-------------------------------------------------------------------------------------------------------------EXPOSÉ DU LITIGE
La société 'La Casserole' a passé commande d'un 'vélo van' électrique à la société Wheel'e moyennant la somme de 7 200 €.
La Société Wheel'e a livré le vélo le 13 mars 2019 et la société 'La Casserole' a versé un acompte de 6 000 €.
La Société 'La Casserole' a rapidement constaté des défaillances et a appelé en garantie la Société Wheel'e. Suite à des défaillances constatées après la livraison, la société Wheel'e a repris le vélo commandé afin d'effectuer des réparations.
Par lettre recommandée en date du 05 novembre 2019 la société 'La Casserole' a mis en demeure la Société Wheel'e de lui restituer le vélo van ou d'annuler la vente après remboursement de l'acompte de 6 000 €.
Suivant exploit du 28 janvier 2020, la Société 'La Casserole' a assigné la Société Wheel'e devant le tribunal de commerce de Nancy aux fins de constater l'absence de restitution du 'vélo van', de prononcer la résolution du contrat de vente et de condamner la société Wheel'e au paiement de dommages-intérêts.
Suivant jugement contradictoire en date du 31 mai 2021, le Tribunal de commerce de Nancy a :
- condamné la Société 'La Casserole' à payer à la Société Wheel'e les sommes de 1 200 € et 100 €,
- condamné la Société Wheel'e à procéder à la livraison du 'vélo van' détenu par la Société 'La Casserole'.
- déclaré la société 'La Casserole' mal fondée en ses autres demandes.
L'en déboute,
- déclaré la société Wheel'e mal fondée en sa demande de dommages et intérêts,
l'en déboute,
- condamné in solidum la société 'La Casserole' et la Société Wheel'e aux dépens du présent jugement,
- rejeté les demandes faites au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par déclaration transmise par voie électronique au greffe le 09 juillet 2021, la société 'La Casserole' a interjeté appel de ce jugement.
Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 14 mars 2022, la société 'La Casserole' demande à la cour de :
- dire l'appel recevable et bien fondé ;
- infirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Nancy,
Statuant à nouveau :
- prononcer la résolution du contrat liant la société Wheel'e et la société 'La Casserole',
- condamner la société Wheel'e à payer à la société 'La Casserole' la somme de 6 000 € versée à titre d'acompte comme suit : 3 600,00 € avec intérêt au taux légal de 0,88 % à compter du 26 novembre 2018 et 2 400,00 € avec intérêt au taux légal de 0,86 % à compter du 08 janvier 2019,
- condamner la société Wheel'e à payer à la société 'La Casserole' la somme de 1 889,99 € au titre des frais de location engagés pour les livraisons qui auraient été réalisées en 'vélo van',
- condamner la société Wheel'e à à payer à la société 'La Casserole' la somme de 5 500 €, au titre des frais de leasing engagés pour les livraisons qui auraient été réalisées en 'vélo van' à compter de juin 2020,
- condamner la société Wheel'e à payer à la société 'La Casserole' la somme de 1 000 € au titre du préjudice de désagrément,
- débouter la société Wheel'e de son appel incident,
- condamner la société Wheel'e à à payer à la société 'La Casserole' la somme de 3 000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner la société Wheel'e à payer les entiers dépens d'instance.
Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 30 décembre 2021, la société Wheel'e demande à la cour de :
- rejeter l'appel de la société 'La Casserole',
- faire droit à l'appel incident de la Société Wheel'e et infirmer le jugement de première instance en ce qu'il a accordé à cette partie des sommes de 1 200 et 100 euros et l'a condamné à procéder à la livraison du 'vélo van',
- dire et juger n'y avoir lieu pour la société 'La Casserole' à la livraison du vélo détenu,
- condamner la société 'La Casserole' au paiement des sommes suivantes :
- solde du prix : 1 200 euros,
- frais de gardiennage : 10 euros par jour du 3 juin 2019 jusqu'à la date de reprise du véhicule par l'acheteur,
- ventes perdues en tricycles cargo : 9 000 euros par mois à compter du 3 juin 2019 jusqu'à
la date de reprise du véhicule par l'acheteur,
- article 700 du code de procédure civile : 2 500 euros,
- Condamner la société 'La Casserole' aux dépens de l'appel.
Pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions des parties, la cour renvoie expressément à leurs conclusions visées ci-dessus, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
La procédure a été clôturée par ordonnance le 06 avril 2022.
MOTIFS
- Sur la résolution de la vente
L'article 1224 du code civil indique que la résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice.
En l'espèce, selon un devis en date du 10 octobre 2018 dont l'acceptation n'est pas discutée par les parties, la société 'La Casserole' a commandé auprès de la société Wheel'e un 'vélo van', moyennant le prix de 7 200 euros. Aux termes de ce devis, l'acheteur s'est engagé à payer 80% du prix ainsi convenu à la commande et le solde de 20% à la réception. Il est enfin porté l'indication suivante : 'livraison demandée en priorité pour fin novembre'.
Au soutien de sa demande de résolution judiciaire du contrat ainsi conclu entre les parties, la société 'La Casserole' fait valoir que la société Wheel'e a manqué à son obligation de délivrance, d'abord en procédant à la livraison du 'vélo van' commandé le 13 mars 2019, soit avec plus de trois mois de retard. Elle prétend ensuite qu'après avoir effectué les réparations qui lui incombaient, le vendeur n'a pas satisfait encore à cette obligation en refusant de lui restituer ce vélo.
S'agissant du contrat de vente, il résulte des dispositions de l'article 1603 du code civil qu'il y a deux obligations principales à la charge du vendeur, celle de délivrer et celle de garantir la chose qu'il vend.
Il est établi par les mentions du devis susvisé que, contrairement à ce qu'elle soutient, la société Wheel'e s'est engagée à livrer le 'vélo Van' commandé par la société 'La Casserole', avant la fin du mois de novembre 2018.
La mention qui figure expressément au devis litigieux ('livraison demandée en priorité pour fin novembre') atteste en effet de l'engagement du vendeur sur la date de livraison indiquée. La société Wheel'e n'invoque dans ses conclusions d'intimée aucune cause exonératoire tirée du fait d'un tiers ou de la force majeure qui serait de nature à l'exonérer du retard manifeste ainsi pris dans l'exécution de la commande.
Postérieurement à la livraison, conformément à un courriel en date du 26 mars 2019, la société 'La Casserole' a dûment informé la société Wheel'e de plusieurs défaillances constatées après seulement selon elle trois utilisations. Elle note à cet effet que la cale de vitesse est décrochée, le disque du frein arrière cassé, la décoration mal découpée et qu'enfin la finition du module électrique réalisé au moyen d'un 'scotch' est à reprendre.
La société Wheel'e ne conteste pas la nature et la gravité des désordres ainsi relevés par l'acheteur, s'étant en effet engagée aux termes d'un courriel en date du 28 mars 2019 à procéder aux réparations nécessaires, sans émettre de réserves sur les vices constatés et décrits ci-dessus.
Contrairement à ce que retient le tribunal, la société Wheel'e ne peut invoquer a posteriori l'application de l'article VIII 2° des conditions générales de vente ('garantie et réclamations') qui prévoit que l'acheteur doit adresser au vendeur par courriel ses réclamations dans un délai de sept jours à compter de la livraison.
L'intimée ne justifie pas en effet avoir opposé à l'acheteur le délai de garantie ainsi fixé au contrat, ayant spontanément accepté de reprendre le 'vélo van' après sa livraison en vue de procéder aux réparations lui incombant au titre de son obligation de garantie.
Il ressort par ailleurs des dispositions de l'article VIII 2° que dans le cadre de la mise en oeuvre des garanties de conformité ou des vices cachés, les frais de transports sont à la charge exclusive du vendeur. Il s'ensuit qu'après avoir effectué les réparations nécessaires, il appartenait à la société Wheel'e d'expédier à ses frais le 'vélo van' à l'acheteur. Elle ne peut dans ces conditions reprocher à ce dernier de n'être pas venu le rechercher à son siège, comme elle l'avait invité à faire suivant un courriel en date du 03 juin 2019.
Selon l'article 1219 du code civil, une partie peut refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre n'exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.
Pour s'opposer enfin à la restitution du 'vélo van', la société Wheel'e fait enfin grief à la société 'La Casserole' de ne pas avoir acquitté le solde du prix de 1 200 euros dû au jour de la livraison. La société 'La Casserole' justifie cependant avoir informé le vendeur, aux termes d'un courriel en date du 26 mars 2019 qu'elle entendait se prévaloir de l'exception d'inexécution, et ce, en raison du manquement de la société Wheel'e à son obligation de garantie.
Au regard de l'importance des vices relevés au jour de la livraison, tels que décrits ci-dessus, l'exception d'inexécution ainsi opposée par l'acheteur apparaît fondée par un manquement grave du vendeur à son obligation de garantie de la chose livrée. La société 'La Casserole' démontre ainsi que son refus d'acquitter le solde du prix de 1 200 euros à la livraison du véhicule commandé est justifié.
Il résulte en conclusion de ce qui précède que la société 'La Casserole' justifie d'un manquement grave par la la société Wheel'e à ses obligations de délivrance et de garantie. Il convient par conséquent d'infirmer le jugement entrepris et de prononcer la résolution du contrat.
- Sur les dommages-intérêts alloués à la société 'La Casserole'
En vertu de l'article 1228 du code civil, le juge peut, selon les circonstances, constater ou prononcer la résolution ou ordonner l'exécution du contrat, en accordant éventuellement un délai au débiteur ou allouer seulement des dommages-intérêts.
En conséquence de la résolution précédemment prononcée, la société Wheel'e est condamnée à payer à la société 'La Casserole' la somme de 6 000 euros correspondant à la restitution de l'acompte versé sur le prix, majorée des intérêts au taux légal courant au jour de la résolution, soit à compter du présent arrêt.
A l'appui de plusieurs factures produites aux débats et datées du 07 décembre 2018 au 23 septembre 2019, la société 'La Casserole' justifie qu'elle a été contrainte de louer un véhicule de même nature que celui qu'elle avait commandé auprès de la société Wheel'e, afin de procéder à ses livraisons chez ses clients.
Etant privée durant cette période de la jouissance du 'vélo Van' commandé, le vendeur est condamné à lui payer la somme de 1 889,99 euros, au titre des frais de location ainsi justifiés.
En revanche, la société 'La Casserole' fait valoir qu'elle a été contrainte d'acquérir au mois de juin 2020 un véhicule terrestre à moteur de type utilitaire dans le cadre de l'exercice de son activité commerciale. Elle sollicite la condamnation de la société Wheel'e au paiement de la somme de 5 500 euros au titre du remboursement des loyers mis à sa charge depuis cette dernière date.
Cependant, à la différence des précédents frais justifiés de location pour un véhicule de remplacement similaire, la société 'La Casserole' ne rapporte pas la preuve d'un lien de causalité direct et certain entre cette dépense générée par l'acquisition d'un véhicule terrestre à moteur avec le préjudice résultant de la perte de la jouissance du 'vélo van' commandé auprès de la société Wheel'e. Elle sera dans ces conditions déboutée de sa demande de dommage-intérêts formée de ce chef.
Enfin, la société 'La Casserole' ne démontre pas qu'elle aurait subi 'un préjudice de désagrément' qui serait distinct de celui réparé par la condamnation de l'intimée au paiement d'une indemnité d'un montant égale au frais de location d'un véhicule de remplacement. Elle sera en conséquence déboutée de cette dernière demande.
- Sur la demande de la société Wheel'e au titre de son appel incident
La société Wheel'e succombant dans ses prétentions, ses demandes formées au titre de son appel incident ne peuvent prospérer.
- Sur les dépens et les frais irrépétibles de procédure
La société Wheel'e est condamnée aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel. Elle est également déboutée de ses demandes formées au titre des frais irrépétibles de procédure exposés devant le tribunal et la cour.
La société Wheel'e est condamnée à payer à la société 'La Casserole' la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles de procédure exposés en première instance et en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau :
Prononce la résolution du contrat de vente conclu entre la société Wheel'e et la la société 'La Casserole' ;
En conséquence,
Condamne la société Wheel'e à payer à la société 'La Casserole' la somme de 6 000 euros correspondant à la restitution de l'acompte versé sur le prix, majorée des intérêts au taux légal courant à compter du présent arrêt ;
Condamne la société Wheel'e à payer à la société 'La Casserole' la somme de 1 889,99 euros, au titre des frais de location d'un véhicule de remplacement ;
Déboute la société 'La Casserole' de ses demandes formées au titre des frais 'de leasing' et du 'préjudice de désagrément' ;
Déboute la société Wheel'e de ses demandes formées au titre des frais irrépétibles de procédure exposés en première instance et en cause d'appel ;
Condamne la société Wheel'e à payer à la société 'La Casserole' la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles de procédure exposés en première instance et en cause d'appel ;
Condamne la société Wheel'e aux entiers frais et dépens de l'appel.
Le présent arrêt a été signé par Madame Guillemette MEUNIER, Présidente de chambre à la Cour d'Appel de NANCY, et par Madame Mégane LEGARDINIER, Greffière placée à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIERE, LA PRÉSIDENTE,
Minute en six pages.