RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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COUR D'APPEL DE NANCY
CINQUIEME CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT N° /23 DU 03 MAI 2023
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 22/00372 - N° Portalis DBVR-V-B7G-E5SH
Décision déférée à la Cour :
jugement du Tribunal de Commerce de NANCY, R.G. n°2018.011087, en date du 13 décembre 2021,
APPELANTE :
S.A.R.L. SE3I anciennement dénommée SOFRATEL FRANCE, prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social [Adresse 2] exerçant sous l'enseigne SE3I SOFRATEL FRANCE
inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés de Nancy sous le numéro 500 457 189
Représentée par Me Aline POIRSON de la SELARL LYON MILLER POIRSON, avocat au barreau de NANCY
INTIMÉE :
S.A.R.L. SOCIETE FRANCAISE DE TELESURVEILLANCE SOFRATEL, agissant poursuites et diligences de son reprétant légal pour ce domicilié [Adresse 1] inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés de Nancy sous le numéro 333 996 197
Représentée par Me Patrice CARNEL de la SCP GASSE CARNEL GASSE TAESCH, avocat au barreau de NANCY
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 22 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Patrice BOURQUIN, Président de Chambre chargé du rapport et Monsieur Olivier BEAUDIER, conseiller
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Patrice BOURQUIN Président de Chambre,
Monsieur Olivier BEAUDIER, Conseiller,
Monsieur Jean-Louis FIRON Conseiller
Greffier, lors des débats : Monsieur Ali ADJAL.
A l'issue des débats, le Président a annoncé que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 03 Mai 2023, en application du deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
ARRÊT : contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 03 Mai 2023, par Monsieur Ali ADJAL, Greffier, conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;
signé par Monsieur Patrice BOURQUIN, Président de chambre, et par Monsieur Ali ADJAL, Greffier ;
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Copie exécutoire délivrée le à
Copie délivrée le à
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FAITS ET PROCEDURE
Par acte d'huissier du 2 novembre 2018, la société SE3, anciennement dénommée SOFRATEL France, a assigné la société SOFRATEL devant le tribunal de commerce de Nancy aux fins d'obtenir sa condamnation au paiement de diverses créances.
Par jugement rendu le 13 décembre 2021, le tribunal de commerce de Nancy a :
- déclaré la société SOFRATEL mal fondée en sa demande de sursis à statuer,
- déclaré les demandes de la société SE3I relatives au paiement des factures FA 2012120105 et FA2012120106 irrecevables car prescrites,
- déclaré la société SE3I mal fondée en sa demande de paiement des factures émises au titre de la location de véhicules,
- déclaré la société SE3l mal fondée en sa demande de paiement au titre des quatre contrats de prêts de trésorerie conclus en avril et mai 2014, pour un total de 38 670,47 euros,
- déclaré la société SOFRATEL mal fondée en sa demande reconventionnelle pour résistance abusive,
- condamné la société SE3I à payer à la société SOFRATEL la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration en date du 14 février 2022, la société SE3I a interjeté appel du jugement en en demandant l'infirmation en toutes ses dispositions.
Aux termes de ses dernières conclusions transmises le 9 novembre 2022, la société SE3I demande à la cour de :
- condamner la société SOFRATEL à lui payer la somme de 63.691.39 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation ;
- condamner la société SOFRATEL à lui payer la somme de 1.500 euros en principal à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;
- condamner la société SOFRATEL à lui payer la somme de 6.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions transmises le 9 mars 2023, la société SOFRATEL demande à la cour de :
A titre liminaire,
- infirmer le jugement du tribunal de commerce de Nancy en ce qu'il l' a déboutée de sa demande de sursis à statuer ;
Et statuant à nouveau,
- ordonner le sursis à statuer, dans l'attente de la décision de la cour d'appel de Nancy dans le cadre de l'instance pendante sur l'action en concurrence déloyale menée à l'égard notamment de la société SE3I,
- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Nancy, sauf en ce qu'il a rejeté la demande reconventionnelle pour résistance abusive ;
Statuant à nouveau sur ce point infirmé :
- condamner la société SE3I à verser à la société SOFRATEL la somme de 20 000.00 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ;
En tout état de cause
- débouter la société SE3I de ses demandes d'indemnité procédurale et de dommages intérêts pour résistance abusive ;
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société SE3I à verser la somme de 3 000.00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Y ajoutant,
- condamner la société SE3I à lui verser la somme de 5 000.00 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 février 2023.
Par conclusions de rabat et récapitulatives n° 3 du 7 mars 2023, la société SOFRATEL sollicite le rabat de l'ordonnance de clôture, de fixer la date de la nouvelle clôture au 22 mars 2023, date des plaidoiries et reprend des demandes identiques, en versant aux débats un arrêt rendu par la cour d'appel de céans le 22 février 2023 dans une instance en concurrence déloyale opposant les mêmes parties.
MOTIFS DE LA DECISION
1- Sur la révocation de l'ordonnance de clôture
Les conclusions de la société SOFRATEL visaient à ce que soit ordonné un sursis à statuer dans l'atttente de la décision de la cour d'appel de Nancy dans le cadre d'une instance pendante sur l'action en concurrence déloyale menée par cette société à l'égard, notamment, de la société SE3I.
Par ordonnance du 8 février 2023, le magistrat chargé de la mise en état a clôturé l'instruction et fixé l'affaire à l'audience du 22 mars 2023.
La cour a, dans l'intervalle, rendu son arrêt dans l'instance opposant les mêmes parties et a retenu l'existence d'actes de concurrence déloyale commis par la société SE3I au préjudice de la société SOFRATEL.
En application de l'article 783 du code de procédure civile, il y aura donc lieu de révoquer l'ordonnance de clôture, de déclarer recevables les conclusions notifiées le 7 mars 2023 ainsi que la nouvelle pièce communiquée, à savoir l' arrêt du 22 février 2023.
2- Sur la demande de sursis à statuer
Dès lors que la cour a rendu son arrêt, la demande de sursis statuer est à présent sans objet.
2 - Sur la demande au titre des prêts de trésorerie
La société SE3I, anciennement SOFRATEL France se prévaut de quatre actes de prêt, dont elle indique qu'ils ont été signés par la société SOFRATEL :
- un acte de prêt du 28 avril 2014 pour une somme de 11.000,00€,
- un acte de prêt du 5 mai 2014, d'un montant de 5.060,00€,
- un acte de prêt du 30 mai 2014 d'un montant de 10.773,91€,
- un acte de prêt du 30 mai 2014 d'un montant de 11.291,56€.
Pour rejeter les demandes, le premier juge a relevé que si la société SE3l produit des conventions signées, elle ne démontre pas les flux de trésorerie qui caractériseraient l'exécution de cette convention et en particulier ne produit pas d'extrait bancaire ou d'élément démontrant que les sommes figurant dans les conventions ont été versées à la société SOFRATEL.
L'appelante se borne à soutenir la société SOFRATEL se trouve contractuellement engagée.
Or, le prêt d'argent qui n'est pas consenti par un établissement de crédit est un contrat réel qui suppose la remise de la chose.
Par ailleurs, il appartient au demandeur en remboursement de rapporter la preuve de la formation du prêt et donc à la société SE3I, demandeur à la restitution de prouver qu'elle a remis les sommes d'argent, ce qui est contesté par l'intimée.
Faute de rapporter cette preuve, c'est donc à juste titre que le premier juge a rejeté la demande au titre des quatre prêts allégués.
3 - Sur la demande au titre de la location de véhicules
La demande est fondée sur un contrat de location d'un véhicule Renault Kangoo immatriculé CY 497 BP pour un loyer mensuel de 672.15 euros TTC ainsi qu'un contrat de location pour un autre véhicule Kangoo immatriculé DL 148 AV pour un loyer de 674.40 euros TTC.
La société SOFRATEL conteste la validité de ces contrats.
Il résulte effectivement des pièces produites que les contrats ont été établis entre M. [S] [G], qui d'une part n'a pas la qualité de gérant de la société SOFRATEL, mais n'est qu'associé de cette société et d'autre part Mme [H] [M] en qualité de gérante de la société SE3I, par ailleurs salariée de la société SOFRATEL, l'un et l'autre ayant été reconnu responsables d'actes de concurrence déloyale par arrêt de la présente cour en date du 22 février2023.
Par ailleurs, pour justifier de la réalité de la prestation la société SE3I produit uniquement la carte grise d'un des deux véhicules , ainsi qu'un procès-verbal de constat établi le 3 août 2016 à la demande du gérant de la société SOFRATEL, dans le cadre de l'instance en concurrence déloyale, mentionnant que 'un véhicule Kangoo immatriculé CY 497 BP appartenant à la société SOFRATEL a été attribué à un salarié pour les interventions', le numéro d'immatriculation étant celui du véhicule dont la société SE3I justifie de la propriété par la production de la carte d'immatriculation.
Or le procès-verbal ne peut constituer un aveu de l'existence d'un contrat de location au bénéfice de la société SOFRATEL, mais établit au contraire que le gérant de la société SOFRATEL était convaincu que sa propre société en était le propriétaire, étant rappelé que le contrat de location n'a pas été signé par lui.
Enfin, la société SE3I fait valoir que les conventions ont partiellement été exécutées par la société SOFRATEL ainsi qu'il résulte du rapport spécial du gérant au titre de l'exercice clos du 31 décembre 2014 de cette société visant ' montant pris en charge au cours de l'exercice 2014 : 4381€'.
Or l'appelante ne se réfère à aucune pièce sur ce point dans ses conclusions et le seul rapport produit au dossier (pièce n° 32) ne vise qu'une refacturation de location de véhicules au nom d'une société Prosystel.
Au surplus, il résulte du procès-verbal de l'assemblée générale du 29 juin 2015 que l'assemblée générale a rejeté la résolution concernant les conventions réglementées entre les deux sociétés.
Le jugement sera en conséquence également confirmé en ce qu'il a rejeté ce chef de demande.
4 - Sur les factures de prestations de service
Aux termes de l'article L.110-4 du code de commerce les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commercants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises a des prescriptions spéciales plus courtes.
Le premier juge a retenu que les deux parties étant commerçantes et devant se voir appliquer ces dispositions, l'action relative aux factures FA 2012120105 et FA2012120106 datées du 21 décembre 2012 expirait le 21 décembre 2017, soit antérieurement à l'assignation du 2 novembre 2018 et qu'elle étaient donc prescrites.
A hauteur d'appel, la société SE3I n'apporte aucun élément qui remettrait en cause le constat opéré par le premier juge et la décision sera donc confirmée sur ce point.
5 - Sur la demande pour procédure abusive
Le tribunal a retenu qu'il n'était démontré par la société SOFRATEL que la demanderesse ait fait dégénérer en abus son droit d'agir en justice.
A hauteur d'appel, la société SOFRATEL fait valoir que le comportement de la société SE3I, qui excipe de documents manifestement frauduleux aux fins de créer une créance tout aussi fictive à l'égard de la concluante présente ainsi le caractère d'une procédure particulièrement abusive confinant à l'escroquerie au jugement et que cette pratique lui est préjudiciable dès lors que son image et son intégrité ont été ternies.
Toutefois l'intimée ne démontre pas que la présente instance, qui a uniquement trait au paiement de factures ait pu nuire à son image publique.
Par ailleurs, l'absence de prise en compte des factures n'établit pas pour autant qu'elles soient constitutives d'une escroquerie au jugement.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté la demande pour procédure abusive.
6- Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile
Le jugement sera confirmé en ses dispositions sur ce point.
Par ailleurs, la somme de 5000€ sera allouée à la société SOFRATEL au titre de des frais irrépétibles exposés à hauteur d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, contradictoirement par décision mise à disposition au greffe,
ORDONNE le rabat de l'ordonnance de clôture ;
DECLARE recevables les conclusions notifiées par la société SOFRATEL le 7 mars 2023 et la pièce n° 36,
ORDONNE la clôture des débats ;
CONSTATE que la demande de sursis à statuer est devenue sans objet,
CONFIRME le jugement entrepris,
CONDAMNE la société SE3I à payer à la société SOFRATEL la somme de 5.000 € (cinq mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société SE3I aux dépens de la procédure d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrice BOURQUIN Président de Chambre, à la Cour d'Appel de NANCY, et par Monsieur Ali ADJAL, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Minute en sept pages.