RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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COUR D'APPEL DE NANCY
CINQUIEME CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT N° /23 DU 03 MAI 2023
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 22/01462 - N° Portalis DBVR-V-B7G-E76R
Décision déférée à la Cour :
jugement du Tribunal de Commerce de NANCY, R.G. n°2021.004481 , en date du 30 mai 2022,
APPELANTE :
S.A. COFIDIS agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié audit siège, [Adresse 3] inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés de LILLE METROPOLE sous le numéro 325 307 106
Représentée par Me Clarisse MOUTON de la SELARL LEINSTER WISNIEWSKI MOUTON LAGARRIGUE, avocat au barreau de NANCY
INTIMÉS :
Monsieur [U] [N], demeurant [Adresse 1]
Représenté par Me Catherine BOYE-NICOLAS, avocat au barreau de NANCY
Madame [M] [N], demeurant [Adresse 1]
Représentée par Me Catherine BOYE-NICOLAS, avocat au barreau de NANCY
S.E.L.A.R.L. VILLA FLOREK venant aux droits de Maître [K]
ayant son siège [Adresse 2]
ès qualité de liquidateur de la SARL SYSTEMES CONFORT inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés d'Orléans sous le numéro 513 641 803
régulièrement saisie par exploit huissier du 12/10/2022 à l'étude et n'yant pas constitué avocat
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 22 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Patrice BOURQUIN, Président de Chambre et Monsieur Olivier BEAUDIER, conseiller, chargé du rapport ;
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Patrice BOURQUIN Président de Chambre,
Monsieur Olivier BEAUDIER, Conseiller,
Monsieur Jean-Louis FIRON Conseiller
Greffier, lors des débats : Monsieur Ali ADJAL.
A l'issue des débats, le Président a annoncé que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 03 Mai 2023, en application du deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
ARRÊT : défaut , rendu par mise à disposition publique au greffe le 03 Mai 2023, par Monsieur Ali ADJAL, Greffier, conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;
signé par Monsieur Patrice BOURQUIN, Président de chambre, et par Monsieur Ali ADJAL, Greffier ;
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Copie exécutoire délivrée le à
Copie délivrée le à
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FAITS ET PROCEDURE
Conformément à un bon de commande signé le 1er juin 2013, M. [U] [N] a acheté auprès de la société 'Systèmes-Confort' une installation photovoltaïque comprenant des panneaux photovoltaïques, ainsi que divers équipements électriques, moyennant la somme de 19 000 euros. Ce contrat prévoyait notamment la livraison, la pose, ainsi que le raccordement au réseau EDF des équipements acquis.
Cet achat a été financé au moyen d'un crédit-affecté d'un montant de 19 000 euros, remboursable en 108 échéances mensuelles, d'un montant de 235,19 euros chacune, moyennant un taux annuel effectif global de 5,96%, souscrit le 9 juillet 2013 par M. [U] [N] et Mme [M] [G], son épouse, auprès de la société Groupe Sofemo.
Les travaux de pose des panneaux ont été réalisés le 9 août 2013. Suivant courrier en date du 1er septembre 2013 M. [U] [N] a interpellé la société 'Systèmes-Confort' sur le fait que les panneaux photovoltaïques n'avaient pas été reliés au réseau EDF et que divers matériaux qui n'avaient pas été installés restaient encore entreposés sur la toiture.
La société Groupe Sofemo a fait l'objet d'une fusion absorption par la société Cofidis à compter du 1er octobre 2015 en exécution d'un traité en date du même jour.
Par actes en date des 10 et 11 juin 2015, M. [U] [N] et Mme Mme [M] [G], son épouse, ont fait assigner la société Systèmes Confort et la société Groupe Sofemo, aux fins notamment de voir prononcer la résolution judiciaire du contrat conclu le 1er juin 2013, ainsi que celui de crédit-affecté en date du 9 juillet 2013.
Suivant jugement en date du 9 mai 2016, le tribunal de commerce d'Orléans a ouvert une procédure de liquidation judiciaire simplifiée à l'encontre de la société 'Systèmes Confort' et a désigné Me [L] [K], en qualité de mandataire liquidateur.
Par ordonnance en date du 30 janvier 2019, le président du tribunal de commerce d'Orléans a désigné la société Villa Florek en qualité de mandataire liquidateur de la société 'Systèmes Confort' à la place de Me [L] [K].
Le 24 février 2021, la procédure de liquidation judiciaire ouverte à l'encontre de la société 'Systèmes Confort' a été clôturée pour insuffisance d'actif.
Suivant jugement en date du 26 juillet 2021, le tribunal judiciaire de Nancy s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Nancy.
Suivant jugement réputé contradictoire rendu le 30 mai 2022, le tribunal de commerce de Nancy a :
- prononcé la résolution du contrat signé le 1er juin 2013 entre les époux [N] et la société Systèmes-conforts,
- prononcé la caducité du contrat de financement signé par les époux [N] avec la société Groupe Sofemo,
- constaté que l'ensemble des sommes dues au titre du contrat caduc ont été remboursées,
- déclaré que la société Groupe Sofemo a commis diverses fautes de nature à engager sa responsabilité à l'égard de M. [U] [N],
- condamné la société Cofidis, venant aux droits de la société Groupe Sofemo, à payer à M. [U] [N] la somme de 6 780 euros, à titre de dommages intérêts,
- condamné la société Cofidis, venant aux droits de la société Groupe Sofemo, à payer à M. [E] [N] et Mme [M] [G], épouse [N], la somme de 8 000 euros, à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice moral subi,
- condamné la société Cofidis, venant aux droits de la société Groupe Sofemo, aux dépens de l'instance,
- condamné la société Cofidis, venant aux droits de la sociét Groupe sofemo, à payer à M. [U] [N] et Mme [M] [G], épouse [N], la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement.
Par déclaration en date du 24 juin 2022, la société Cofidis a interjeté appel du jugement rendu par le tribunal de commerce de Nancy le 30 mai 2022.
Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 22 septembre 2022, la société Cofidis demande à la cour de :
- infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions.
Statuant à nouveau,
- déclarer M. [U] [N] et Madame [M] [N], née [G], irrecevables et subsidiairement mal fondés en leurs demandes, fins et conclusions et les en débouter,
- déclarer la société Cofidis recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions.
Y faisant droit,
- condamner solidairement M. [U] [N] et Madame [M] [N], née [G], à rembourser à la société Cofidis l'intégralité des sommes perçues dans le cadre de l'exécution provisoire,
- à titre subsidiaire, si la cour venait à confirmer le jugement et prononçait la nullité ou la résolution judiciaire des conventions :
- infirmer le jugement sur les conséquences de l'anéantissement des conventions,
Statuant à nouveau,
- condamner solidairement M. [U] [N] et Madame [M] [N], née [G], à rembourser à la société Cofidis le capital emprunté d'un montant de 19 000 euros, au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir, en l'absence de faute et en toute hypothèse en l'absence de préjudice et de lien de causalité,
En tout état de cause :
- condamner solidairement M. [U] [N] et Mme [M] [N], née [G], à payer à la société Cofidis une indemnité d'un montant de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner solidairement M. [U] [N] et Mme [M] [N], née [G], aux entiers dépens.
M. [U] [N] et Mme [M] [N], née [G], n'ont déposé aucune conclusion dans le délai imparti par les dispositions de l'article 909 du code de procédure civile.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 8 février 2023 ;
MOTIFS :
- Sur la recevabilité des demandes de M. [U] [N] et Mme [M] [N] :
Au soutien de l'irrecevabilité des demandes formées par M. [U] [N] et Mme [M] [N], la société Cofidis fait valoir que la procédure de liquidation judiciaire ouverte à l'encontre de la société 'Systèmes Confort' a été clôturée pour insuffisance d'actif, suivant jugement en date du 24 février 2021. Elle considère qu'à cette date, le mandataire liquidateur qui a été désigné par le tribunal de commerce d'Orléans n'avait pas le pouvoir de représenter la société, et qu'en l'absence de désignation d'un administrateur ad'hoc, les demandes formées en première instance par les intimés sont irrecevables.
Aux termes de l'article L. 622-21 du code de commerce, le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part des créanciers, dont la créance n'est pas mentionnée au 1er de l'article L. 622-17 et qui tendent à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ou à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.
Il résulte de ces dispositions que le principe de suspension des poursuites individuelles en matière de liquidation judiciaire n'interdit pas au créancier d'agir en nullité ou en résolution d'un contrat pour une cause autre que le défaut de paiement d'une somme d'argent contre le mandataire liquidateur, représentant les créanciers de la société faisant l'objet d'une procédure collective. Tel est le cas en l'espèce dans la mesure où l'action des époux [N] tend à la résolution du contrat de prestations de service pour un manquement de la société 'Systèmes-Confort' dans l'exécution de ses prestations, et non pour défaut de paiement d'une somme d'argent.
Il est constant par ailleurs que les époux [N] ont en première instance, suivant acte du 6 février 2019, appelé en intervention forcée Me [L] [K], en qualité de mandataire liquidateur de la société 'Systèmes Confort', afin de poursuivre leur action en résolution du contrat en date du 1er Juin 2013 engagée contre cette dernière. La société 'Systèmes Confort' n'avait pas dans ces conditions à être représentée par un administrateur ad'hoc dans le cadre de cette instance.
Il convient par conséquent de confirmer le jugement entrepris, en ce qu'il a déclaré recevables les demandes formées par M. [U] [N] et Mme [M] [N] contre la société intimée en liquidation judiciaire.
- Sur la demande de résolution du contrat en date du 1er juin 2013 :
Conformément à l'article 1224 du code civil, la résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice.
Au soutien de son appel, la société Cofidis relève à juste titre que le tribunal de commerce de Nancy ne pouvait prononcer la résolution du contrat en date 1er Juin 2013, sur le fondement du dol, lequel constitue en effet un vice du consentement qui est une cause de nullité relative du contrat, en application des dispositions de l'article 1131 du code civil, et non une cause de sa résolution sanctionnant l'une des parties en cas de manquement suffisamment grave à ses obligations contractuelles.
Il convient pour ce motif d'infirmer le jugement entrepris, en ce qu'il a prononcé la résolution du contrat conclu entre les époux [N] et la société 'Systèmes Confort'.
Il résulte de ce qui précède que le tribunal de commerce de Nancy ne pouvait prononcer la caducité du contrat de crédit affecté conclu le 9 juillet 2013 entre la société Cofidis, d'une part, et M. [U] [N] et Mme [M] [N], d'autre part, en raison de l'interdépendance entre celui-ci et le contrat de prestations conclu le 1er juin 2013. Le jugement entrepris est par conséquent infirmé de ce chef.
Par ailleurs, s'agissant de la responsabilité du prêteur, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal de commerce de Nancy, il n'est justifié d'aucune faute de ce dernier dans le déblocage des fonds au profit de la société 'Systèmes Confort'. En effet, il ne peut être reproché à la société Groupe Sofemo d'avoir procédé au décaissement du crédit souscrit par les intimés, sans s'assurer que l'ensemble des travaux commandés (notamment ceux concernant le raccordement de l'installation) aient été entièrement achevés. Il résulte en effet d'une attestation en date du 27 août 2013 que M. [U] [N], signataire du bon de commande litigieux, a lui-même sollicité le déblocage des fonds empruntés, après avoir confirmé que tous les travaux et toutes les prestations avaient été exécutés par la société 'Systèmes Confort'.
Il n'est justifié enfin d'aucune irrégularité de cette attestation qui serait tirée de son absence de signature par Mme [M] [N], co-emprunteur du crédit affecté, étant observé que le contrat principal de fourniture et d'installation a été conclu entre M. [U] [N] seul et la société prestataire sans le concours de son épouse.
Il convient en conséquence d'infirmer le jugement déféré, en ce qu'il a retenu la responsabilité de la société Cofidis, venant aux droits de la société Groupe Sofemo et condamné celle-ci au paiement de la somme de 6 780 euros, correspondant au montant des intérêts et frais perçus par le prêteur, ainsi qu'à celle de 8 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral.
- Sur la demande de remboursement des sommes versées par la société Cofidis aux époux [N] en vertu de l'exécution provisoire :
La société Cofidis demande que soit ordonné la restitution des sommes qu'elle a versées en vertu du jugement du tribunal de commerce de Nancy assorti de l'exécution provisoire, à savoir la somme de 6 780 euros correspondant aux intérêts et frais perçus, ainsi que celle de 8 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral.
Cependant le présent arrêt, infirmatif sur les chefs susvisés, constitue un titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées par l'appelante en exécution du jugement rendu en première instance ( 6 780 euros et 8 000 euros). En conséquence, il n'y a pas lieu à statuer sur la demande de remboursement formée par la société Cofidis.
- Sur les demandes accessoires :
M. [U] [N] et Mme [M] [G], son épouse, sont condamnés in solidum aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel. Il sont également déboutés de leur demande formée au titre des frais irrépétibles de procédure exposés en première instance.
M. [U] [N] et Mme [M] [G], son épouse, sont condamnés in solidum à payer à la société Cofidis la somme de 1 200 euros, au titre des frais irrépétibles de procédure exposés en première instance et en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS :
LA COUR, statuant par arrêt de défaut prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile,
Confirme le jugement entrepris, en ce qu'il a déclaré recevables les demandes formées par M. [U] [N] et Mme [M] [N] contre la société 'Systèmes Confort', en liquidation judiciaire ;
L'infirme pour le surplus ;
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et ajoutant :
Déboute M. [U] [N] et Mme [M] [N] de toutes leurs demandes ;
Dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de restitution des sommes versées par la société Cofidis en vertu de l'exécution provisoire attachée jugement déféré à la cour ;
Condamne in solidum M. [U] [N] et Mme [M] [N] à payer à la société Cofidis la somme de 1 200 euros au titre des frais irrépétibles de procédure exposés en première instance et en cause d'appel ;
Condamne in solidum M. [U] [N] et Mme [M] [N] aux entiers frais et dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrice BOURQUIN Président de Chambre, à la Cour d'Appel de NANCY, et par Monsieur Ali ADJAL, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Minute en six pages.