AB/ CD
Numéro 2718/ 11
COUR D'APPEL DE PAU EXPROPRIATIONS
ARRÊT DU 09/ 06/ 2011
Dossier : 10/ 04640
Nature affaire :
Demande de fixation de l'indemnité d'expropriation
Affaire :
Edouard Albert Claude X...
C/
COMMUNE DE BIARRITZ
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
prononcé par Monsieur BILLAUD, Président, en vertu de l'article 452 du Code de Procédure Civile,
assisté de Monsieur LOM, faisant fonction de Greffier,
à l'audience publique du 9 juin 2011 date indiquée à l'issue des débats.
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APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 12 Mai 2011, devant :
Monsieur BILLAUD, Président suppléant de la chambre des expropriations, nommé pour 3 ans par Ordonnance de Monsieur le Premier Président en date du 07 Septembre 2009, chargé du rapport,
Madame MULLER, Juge suppléant de l'expropriation du département des Landes,
Madame LAUVERNIER, Juge titulaire de l'expropriation du département des Hautes Pyrénées,
ces deux derniers désignés conformément aux dispositions des articles R 13-1 et suivants du Code de l'Expropriation,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
En présence de Monsieur DUNY, Commissaire du Gouvernement représentant le Directeur des Services Fiscaux des Pyrénées-Atlantiques.
Assistés de Madame DEBON, faisant fonction de Greffière
dans l'affaire opposant :
APPELANT :
Monsieur Edouard Albert Claude X...Domicile élu : SCP PIAULT et LACRAMPE-CARRAZE ...
représenté par la SCP PIAULT LACRAMPE-CARRAZE, avoués à la Cour et assisté de Maître SEVIN, avocat au barreau de la SEINE SAINT DENIS
INTIMÉE :
COMMUNE DE BIARRITZ représentée par son Maire, domicilié en cette qualité audit siège Hôtel de ville 12 avenue Edouard VII-BP 58 64202 BIARRITZ CEDEX
Représentée par Maître CAMBOT, avocat au barreau de PAU
sur appel de la décision en date du 27 OCTOBRE 2010 rendue par le JUGE DE L'EXPROPRIATION du Tribunal de Grande Instance de PAU
FAITS ET PROCÉDURE :
Par mémoire déposé au greffe du Tribunal de Grande Instance de PAU le 9 juin 2010, la Commune de BIARRITZ représentée par son maire a saisi le juge départemental de l'expropriation des Pyrénées-Atlantiques d'une demande de fixation des indemnités devant revenir à Monsieur Édouard X...en raison de l'expropriation de sa parcelle de terre cadastrée Commune DE BIARRITZ AK 88, no ...d'une superficie de 862 m ² comportant un bâtiment avec deux appartements et un entrepôt.
L'expropriation de cette parcelle est nécessaire dans le cadre de la mise en place d'une ZAC ayant pour objet la création de 300 logements dont 200 logements locatifs conventionnés avec espaces publics, commerces de proximité et activités diverses.
La parcelle se situe dans le secteur Ucc du Plan Local d'Urbanisme de la Commune de BIARRITZ approuvé le 22 décembre 2003 dont la dernière révision est en date du 13 février 2009.
Le 12 octobre 2009, la ville BIARRITZ a offert à l'exproprié une indemnisation de 568. 400 € sur la base d'une estimation faite par le service des domaines des Pyrénées-Atlantiques le 19 mai 2009, soit :- appartement de 55 m ² : 149. 000 €- appartement de 50 m ² : 135. 000 €- entrepôt + terrain d'une surface de 185 m ² : 230. 000 € soit un total de 514. 000 € ainsi qu'une indemnité de remploi de 54. 400 €.
Par jugement en date du 27 octobre 2010, le Juge de l'Expropriation du Tribunal de Grande instance de PAU a constaté l'accord entre la ville de BIARRITZ et l'exproprié, Monsieur Édouard X..., en considérant que la proposition de l'exproprié avait été acceptée par la ville de BIARRITZ le 4 octobre 2010 et qu'il y avait par conséquent accord sur la chose et sur le prix, qu'ainsi la vente du terrain était parfaite.
Suivant déclaration enregistrée au greffe de la Cour le 22 novembre 2010, Monsieur Édouard X...a relevé appel de cette décision.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Dans son mémoire d'appel en date du 12 janvier 2011, Monsieur Édouard X...demande à la Cour d'infirmer la décision du 27 octobre 2010 et de fixer la valeur de la parcelle AK 88 à 1. 258. 460 €, l'indemnité de remploi à 127. 391 €, de fixer l'indemnisation de la parcelle AK 87 à la somme de 318. 900 €, subsidiairement de fixer une indemnité de dépréciation de cette parcelle à hauteur de 159. 450 €.
Il rappelle notamment qu'il n'y a jamais eu accord sur la chose et sur le prix dans la mesure où la ville de BIARRITZ s'appuie sur une correspondance du 22 septembre 2009, intervenue plus d'un an avant le jugement et plusieurs mois avant la saisine du juge de l'expropriation ; qu'en toute hypothèse cette correspondance ne considérait que le prix des parcelles, sans aucune référence à la moindre indemnité notamment de remploi, qu'en outre, la prétendue proposition n'aurait été acceptée qu'après un délai de un an et 12 jours, alors qu'en droit une telle offre, stipulée sans délai, ne vaut que dans la limite d'un délai raisonnable qui doit être apprécié par le juge du fond en fonction des circonstances ;
Il estime que le prix des appartements a été nettement sous-évalué par le Commissaire du Gouvernement, que des ventes voisines sont intervenues sur la base de prix bien supérieurs notamment 1. 911, 76 €/ m ² voire 2. 222, 22 €/ m ² pour les parcelles AK 73 et AK 76 situées à proximité de la parcelle expropriée, qu'en outre la valeur de 1. 000 € le m ² semble un minimum à retenir en ce qui concerne l'entrepôt ;
Enfin il rappelle que cette expropriation entraîne une forte dépréciation de la parcelle AK 87.
Par conclusions déposées au greffe le 1er février 2011, Monsieur le Commissaire du Gouvernement demande à la Cour de fixer l'indemnité principale d'expropriation à 514. 000 €, l'indemnité de remploi à 52. 400 € et de dire qu'il n'y a pas lieu d'indemniser la parcelle AK 87 non concernée par la procédure.
Par conclusions déposées au greffe le 15 février 2011, la Commune de BIARRITZ demande à la Cour de confirmer en toutes ses dispositions le jugement du 27 octobre 2010 qui a donné acte aux parties de leur accord et à titre subsidiaire de fixer l'indemnité due à Monsieur X...pour l'expropriation de sa parcelle AK 88 à la somme de 514. 000 € à titre principal et 52. 400 € à titre de remploi, rejetant ses demandes pour la parcelle AK 87.
L'autorité expropriante rappelle que par courrier du 22 septembre 2009, Monsieur X...avait proposé à la ville de BIARRITZ l'acquisition de ces deux parcelles pour un prix total de 714. 000 €, dans un cadre amiable, et que, par correspondance en date du 4 octobre 2010, la Commune avait accepté cette offre.
Elle précise que le courrier de Monsieur X...n'attendait pas une réponse immédiate, compte tenu notamment des intérêts en jeu, que par ailleurs, Monsieur X...ne s'était pas manifesté auprès du juge de l'expropriation, de telle sorte que son offre acceptée n'a été suivie d'aucun démenti de sa part.
Subsidiairement, elle demande à la Cour de prendre en considération les termes de comparaison mis en évidence par le Commissaire du Gouvernement et rappelle qu'il ne saurait être fait droit à la demande de réquisition d'emprise totale sollicitée par Monsieur X...qui considère que l'ensemble des parcelles AK 87 et 88 constitue une unité foncière. Les conditions fixées par l'article L. 13-10 du Code de l'expropriation ne sont pas réunies, par ailleurs la demande d'emprise totale devait être présentée au juge de l'expropriation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'offre et enfin cette demande formulée pour la première fois en cause d'appel serait irrecevable.
De même aucune indemnité de dépréciation n'est due pour la parcelle AK 87 qui n'est pas enclavée dans la mesure où un accès identique ou équivalent lui est garanti.
SUR QUOI :
Attendu qu'il est constant que le juge départemental de l'expropriation des Pyrénées-Atlantiques a été saisi sur requête présentée le 9 juin 2010 par la ville de BIARRITZ représentée par son sénateur-maire, Monsieur Didier C..., lequel avait, précédemment à cette requête, dans une lettre du 6 avril 2010 adressée à Maître SEVIN, conseil de l'exproprié, constaté le désaccord persistant entre les parties concernant le montant de l'indemnisation susceptible de revenir à Monsieur X...dans le cadre de l'expropriation de sa parcelle AK no 88 ;
Attendu de même qu'il est constant que par ordonnance en date du 8 septembre 2010, le Juge Départemental de l'Expropriation avait prévu un transport sur les lieux le mardi 23 novembre 2010, que ce transport sur les lieux n'a jamais eu lieu compte tenu de l'intervention du jugement du 27 octobre 2010 qui a constaté que la ville de BIARRITZ avait accepté le 4 octobre 2010 la proposition d'indemnisation de Monsieur Édouard X...en date du 22 septembre 2009 et dit dans sa motivation qu'il n'était pas nécessaire de poursuivre la procédure d'expropriation à son terme, donnant acte aux parties de leur accord ;
Attendu qu'il convient de rappeler qu'au terme des dispositions de l'article R. 13-21 du Code de l'expropriation, le juge de l'expropriation est saisi par la partie la plus diligente à défaut d'accord amiable dans le délai d'un mois à partir de la notification des offres faites par l'expropriant ;
Attendu que le jugement déféré en date du 27 octobre 2010 se présente comme un jugement de " donner acte " rendu publiquement et contradictoirement ;
Attendu que dans cette décision les parties apparaissent comme ayant été représentées par leurs conseils respectifs ;
Attendu que la déclaration d'appel enregistrée le 22 novembre 2010, ainsi que les conclusions de Monsieur X...qui ont suivi font état d'une demande d'annulation de la décision du 27 octobre 2010 ;
Et attendu qu'il résulte par ailleurs, des conclusions des deux parties et des débats à l'audience de la Cour qu'aucune audience n'a eu lieu le 27 octobre 2010 en présence des conseils des parties ;
Attendu qu'il est constant que l'appel interjeté par Monsieur X...tend à l'annulation du jugement déféré ;
Attendu qu'il résulte de l'exposé des faits et de la procédure qui précède que le premier juge a statué le 27 octobre 2010 sans qu'aucune audience effective n'ait eu lieu et, dans tous les cas, sans que les parties soient présentes ou représentées ;
Attendu par conséquent qu'il y a lieu de déclarer l'appel-nullité recevable et bien-fondé compte tenu des erreurs et manquements graves ayant affecté la décision du 27 octobre 2010 ;
Attendu que la procédure d'expropriation est une procédure largement dérogatoire à la procédure civile de droit commun ainsi qu'en attestent les dispositions des articles L. 13-1 à L. 13-25 du Code de l'expropriation, ainsi que les articles R. 13-1 à R. 13-6 dudit Code ;
Et attendu qu'il résulte par ailleurs, des dispositions des articles R. 13-26 et R. 13-27 du Code de l'expropriation, que le juge de l'expropriation doit opérer la visite des lieux avant de statuer sur le montant des indemnisations, que son procès-verbal doit être détaillé et précis, qu'il est constant en droit que les énonciations de ce procès-verbal ne sont pas susceptibles d'être remises en cause devant la juridiction du second degré ;
Qu'en l'état, ce transport sur les lieux n'a pas été effectué ;
Et attendu par conséquent, que s'il est vrai qu'au terme des dispositions de l'article 562 du Code de procédure civile relatives à l'effet dévolutif de l'appel, la dévolution s'opère pour le tout lorsque l'appel tant à l'annulation du jugement, il en va différemment lorsque le premier juge a statué en l'absence de convocation régulière de l'une ou l'autre des parties voire des deux parties comme c'est le cas en l'espèce ;
Attendu par conséquent, qu'il convient d'annuler purement et simplement le jugement déféré ;
Attendu qu'en l'espèce, il y a lieu de laisser les frais et dépens à la charge du trésor public ;
Qu'il n'y a pas lieu à application des dispositions des articles 699 et 700 du Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Après en avoir délibéré, statuant publiquement contradictoirement en dernier ressort,
Annule le jugement rendu le 27 octobre 2010 par la Juridiction Départementale de l'Expropriation des Pyrénées-Atlantiques,
Renvoie les parties à se pourvoir ainsi qu'elles aviseront,
Laisse les frais et dépens à la charge du trésor public,
Dit n'y avoir lieu application des dispositions des articles 699 et 700 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Patrick LOM Alain BILLAUD