La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/01/2012 | FRANCE | N°09/01107

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre sociale, 19 janvier 2012, 09/01107


CP/CD



Numéro 265/12





COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale







ARRÊT DU 19/01/2012







Dossier : 09/01107





Nature affaire :



Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution















Affaire :



[Z] [R]



C/



[J] [D]





















>
















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 19 janvier 2012, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure ...

CP/CD

Numéro 265/12

COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 19/01/2012

Dossier : 09/01107

Nature affaire :

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

Affaire :

[Z] [R]

C/

[J] [D]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 19 janvier 2012, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 31 Octobre 2011, devant :

Monsieur PUJO-SAUSSET, Président

Madame PAGE, Conseiller

Monsieur GAUTHIER, Conseiller

assistés de Madame HAUGUEL, Greffière.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

Madame [Z] [R]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par la SCP GABET/ESTRADE, avocats au barreau de PAU

INTIMÉ :

Monsieur [J] [D]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Maître MALTERRE, avocat au barreau de PAU

sur appel de la décision

en date du 09 MARS 2009

rendue par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE PAU

FAITS ET PROCÉDURE

Madame [Z] [R] a été embauchée par Monsieur [J] [D] le 3 février 2004 en qualité de dactylo niveau IV échelon 1 coefficient 205 suivant contrat à durée indéterminée à temps partiel, puis à compter du 1er octobre 2005 à temps plein coefficient 240 de la convention collective du personnel des cabinets d'avocat.

Par courrier du 4 juin 2007, Madame [Z] [R] a pris acte de la rupture du contrat en raison des irrégularités affectant son activité.

Le Conseil de Prud'hommes de PAU, section activités diverses, par jugement contradictoire du 9 mars 2009, auquel il conviendra de se reporter pour plus ample exposé des faits, des moyens et de la procédure a considéré que la rupture devait s'analyser en une démission, il a condamné Monsieur [J] [D] à verser à Madame [Z] [R] les sommes de :

409,39 € à titre de rappel de salaire,

40,93 € des congés payés,

500 € à titre des dommages et intérêts après avoir constaté que les bulletins de salaire n'avaient pas été délivrés conformément à la réglementation,

500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Dit que le bulletin de salaire du mois de février 2007 devra être rectifié conformément à la décision.

Il a débouté les parties du surplus de leurs demandes et a condamné Monsieur [J] [D] aux dépens de l'instance.

Madame [Z] [R] a interjeté appel de ce jugement le 24 mars 2009.

Les parties ont comparu à l'audience par représentation de leur conseil respectif.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions développées à l'audience, Madame [Z] [R] demande à la Cour de déclarer l'appel recevable, de réformer le jugement en toutes ses dispositions,

- de dire qu'il y a lieu d'appliquer le coefficient 250 depuis le début du contrat ;

- d'annuler l'avertissement du 5 février 2007 ;

- de constater que les bulletins de salaire n'ont pas été délivrés conformément à la loi et qu'elle n'a pas été affiliée auprès des caisses de retraite et de prévoyance et que l'attestation ASSEDIC n'est pas conforme ;

- de constater que le salaire n'a pas été maintenu pendant la maladie ;

- de dire que la prise d'acte s'analyse en un licenciement abusif ;

- de condamner Monsieur [J] [D] à payer les sommes de :

4.127,55 € au titre du rappel de salaire,

412,75 € au titre des congés payés,

1.434,59 € au titre du salaire de février,

143,45 € au titre des congés payés,

43,03 € au titre de la prime d'ancienneté,

2.869,18 € au titre de l'indemnité de préavis,

286,91 € au titre des congés payés sur le préavis,

3.007 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

17.215 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

5.000 € à titre des dommages et intérêts pour rupture vexatoire,

2.000 € à titre des dommages et intérêts pour non délivrance des bulletins,

5.000 € à titre des dommages et intérêts pour non affiliation auprès des caisses,

4.000 € à titre des dommages et intérêts pour la privation de ses droits au chômage,

2.000 € à titre des dommages et intérêts pour perte de ses droits au DIF,

3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de condamner Monsieur [J] [D] à lui remettre les bulletins de salaire rectifiés sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt ;

- de condamner Monsieur [J] [D] à lui remettre une attestation Pôle-Emploi sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt ;

- de condamner Monsieur [J] [D] à lui remettre le bulletin de salaire du mois de février rectifié ;

- de condamner Monsieur [J] [D] aux entiers dépens d'appel.

- Sur le non-paiement du salaire conventionnel : Madame [Z] [R] fait valoir qu'elle a été embauchée en qualité de sténodactylo au coefficient 205 qui ne correspond pas à la réalité des fonctions exercées par elle, à savoir des fonctions de secrétaire juridique, qu'il suffit pour s'en convaincre de se reporter au courrier d'avertissement du 5 février 2007 dans lequel l'employeur multiplie les griefs afférents à des tâches nombreuses et diversifiées, que le coefficient 240 est attribué au personnel chargé d'exécuter des travaux nécessitant une « expérience professionnelle confirmée et la capacité de s'auto-contrôler », ce qui n'était pas le cas de Madame [R] mais qui prouve que l'employeur avait bien conscience de ne pas employer la salariée en qualité de dactylo, que le poste de secrétaire juridique n'ayant aucune expérience dans la fonction correspond au coefficient 250, qu'enfin l'employeur a fait application de taux horaires inférieurs aux minima conventionnels.

- Sur la sanction injustifiée : elle indique qu'elle a demandé à plusieurs reprises à suivre une formation professionnelle en dehors de ses heures de travail pour acquérir les connaissances qui lui font défaut, que l'employeur lui a répondu que la meilleure formation était celle qu'il lui donnait, mais il était rarement au cabinet au moment où la salariée avait besoin d'informations urgentes, puisqu'il arrivait aux heures où elle quittait son travail qu'en conséquence, l'avertissement du 5 février 2007 n'est pas justifié.

- Sur le refus de délivrer les bulletins de salaire : elle précise que l'employeur n'a pas respecté ses obligations en ne délivrant pas mensuellement les bulletins de salaire, alors qu'en vertu de l'article R. 3243-6 du code du travail, il est tenu de le faire au moment de chaque versement de la rémunération ; qu'elle s'est heurtée au refus persistant de son employeur de régulariser la situation et a dû adresser un courrier recommandé le 24 janvier 2007, que les premiers bulletins de salaire remis n'étant pas conformes, elle a dû saisir le Conseil de Prud'hommes en référé pour obtenir des bulletins faisant apparaître le détail des charges et cotisations.

- Sur le non-respect de la garantie de maintien du salaire pendant la maladie, elle indique que l'employeur a cru devoir se dispenser de payer le salaire du mois de février 2007 alors que, du fait de son ancienneté dans l'entreprise, elle devait bénéficier de la garantie de son salaire entier pendant deux mois. Le bulletin de salaire de février 2007 fait apparaître qu'elle n'a plus perçu de salaire à compter du 31 janvier 2007, qu'ainsi l'employeur est redevable de la somme de 1.434,59 € en paiement du salaire brut de février 2007 outre les congés payés y afférents et également de la prime d'ancienneté pour la somme de 43,04 € pour avoir acquis le droit de cette prime à compter du 4 février 2007.

- Sur l'atteinte à l'intégrité morale : elle fait valoir que Monsieur [J] [D] l'a prise en grippe au reçu de la demande de délivrance des bulletins de salaire et lui a promis de « sacrées surprises » qui se sont concrétisées par l'envoi de la lettre d'avertissement lui reprochant entre autre la mauvaise qualité de son travail ; que son état de santé a nécessité la prise d'un traitement antidépresseur dès août 2005 et que ce traitement, dû au stress est directement lié aux conditions de travail imposées par Maître [D], elle était épuisée moralement.

- Sur le manquement de l'employeur à son obligation de remettre l'attestation ASSEDIC conforme : elle précise que l'attestation comporte la mention « initiative salarié », que cette présentation équivoque, tendancieuse et inexacte du motif, a conduit les ASSEDIC à refuser les prestations auxquelles elle pouvait légitimement prétendre et que ce n'est que le 29 mai 2007, en conciliation devant le Conseil de Prud'hommes, que l'employeur a daigné remettre l'attestation rectifiée, qu'en se faisant juge de la qualification de la rupture, l'employeur a commis une faute ouvrant droit à des dommages et intérêts et l'a privée depuis le 4 juin 2007 du droit au paiement complet des allocations chômage.

- Elle indique que tous ces griefs justifient la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail qui doit nécessairement produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, qu'elle s'est trouvée dans une situation de précarité manifeste dont seul l'employeur est à l'origine, puisqu'elle a été privée injustement des prestations ASSEDIC et qu'il convient de réparer par des dommages et intérêts spécifiques chacun des manquements de l'employeur au respect de la législation du travail.

*******

Monsieur [J] [D], intimé, par conclusions développées à l'audience demande à la Cour de confirmer le jugement sur la démission de Madame [Z] [R] et de l'infirmer pour le surplus, de débouter Madame [Z] [R] de toutes ses demandes, de la condamner à payer la somme de 1 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Il demande à la Cour de constater qu'il a réglé en sus du salaire conventionnel la somme de 2.448,31 €, que Madame [Z] [R] a donc perçu plus qu'il ne lui était dû à titre de salaire et que si par extraordinaire, la Cour entrait en voie de condamnation, il conviendrait d'ordonner la compensation avec les salaires perçus en trop par la salariée.

- Sur le non-paiement du salaire conventionnel : Monsieur [J] [D] fait valoir que Madame [Z] [R] a été embauchée en qualité de dactylo, coefficient 205 dans la mesure où elle n'avait aucune connaissance juridique lui permettant d'avoir la qualification de secrétaire juridique, le passage au coefficient 240 était justifié par l'expérience que la salariée avait acquise depuis son embauche, lui permettant davantage d'initiatives au niveau de la prise de rendez-vous téléphoniques, de l'accueil téléphonique des clients, du classement des pièces dans les dossiers, de l'accueil des clients au cabinet, il s'agissait d'un travail de secrétariat simple, elle ne peut, en aucun cas, prétendre avoir été employée comme secrétaire juridique car les tâches qui définissent la fonction excédaient son niveau de compétence, elle ne décrit d'ailleurs pas les tâches qui auraient relevé du secrétariat juridique et du coefficient 250 qu'elle aurait été amenée à exécuter.

- Sur la sanction injustifiée : la mise en garde et l'avertissement du 5 février 2007 ne concernent que des faits constatés dans les deux mois précédents, la réponse par lettre du 12 mars 2007, à laquelle est joint un bordereau de pièces non communiquées dont la plupart pose question, certaines semblant avoir été fabriquées, puisqu'elles n'apparaissent pas dans le disque dur des ordinateurs du cabinet, d'autres ne sont pas versées aux débats, d'autres enfin, n'ont pu être que soustraites du cabinet. Compte tenu que ces pièces sont, par nature, soumises à une stricte confidentialité, leur soustraction ne peut être que frauduleuse, cependant, si elle tente quelques justifications, elle ne s'explique aucunement sur les reproches adressés, elle met en avant son peu de qualification et l'absence de formation ; or, les tâches qui lui étaient confiées étaient simples et ne relevaient d'aucune formation particulière hormis celles dont elle a bénéficié pour l'utilisation des logiciels CLIOR et DICTA PLUS. Les retards répétés à l'embauche du matin, l'absence injustifiée le 2 janvier 2007 et son départ avant l'heure le 4 janvier 2007 ne sont pas contestés et ils ont eu des conséquences néfastes sur le fonctionnement du cabinet et trahi la confiance qu'il avait mise en elle, il s'agissait de matérialiser les manquements de la salariée dans la mesure où les mises en garde verbales antérieures avaient été sans effet.

L'employeur avait proposé à Madame [R] un licenciement négocié qui aurait permis à cette dernière de percevoir ses indemnités légales et son préavis sous forme d'indemnité, sans exécution mais elle ne l'a pas accepté.

- Sur l'atteinte à l'intégrité morale de la salariée, Madame [Z] [R] allègue le fait que son employeur l'aurait prise en grippe à compter de 2007 et qu'il lui aurait promis « de sacrées surprises ». Or, le 12 mars 2007, Madame [R] a quitté le cabinet, en arrêt maladie, pour ne plus y revenir et au vu des nombreux arrêts maladie dont elle a bénéficié, du certificat médical versé aux débats, il s'avère que celle-ci prenait des antidépresseurs depuis août 2005 à raison de problèmes familiaux, décès familial, rupture conjugale, elle ne s'est jamais plainte du comportement de son employeur et au contraire trouvait un apaisement dans son travail comme en attestent les témoins, Madame [C] et de Madame [E] qui contredisent les allégations de Madame [R] au sujet de ses conditions de travail.

- Sur le non-respect de la garantie de maintien du salaire pendant la maladie : la convention collective prévoit le maintien du salaire entier pendant deux mois lorsque le salarié a trois ans d'ancienneté, cet avantage qui lui a été consenti avant même les trois ans de présence dans l'entreprise mais s'est trouvé consommé par les différents arrêts maladie dont elle a bénéficié au cours des douze mois précédents, de date à date.

- Sur le salaire de février : elle a été rémunérée pour la dernière fois le 1er mars 2007 pour le salaire de février 2007, le salaire de février a été payé.

- Sur les conséquences de la prise d'acte de la rupture : il ressort de tout ce qui précède que Madame [Z] [R] a voulu se placer de manière délibérée et déloyale dans une situation juridique plus favorable en prenant l'initiative d'une prise d'acte de la rupture du contrat de travail, or, dans le cas d'espèce, les griefs invoqués ne sont pas fondés, en toute hypothèse, ils ne peuvent en aucun cas légitimer sa demande.

- Sur la demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice qu'elle aurait subi : la demande est sans fondement car non seulement Madame [R] ne démontre pas les faits qu'elle allègue, mais il ressort du certificat médical établi par le Docteur [N], qu'elle souffre d'une pathologie ancienne, alors que les attestations versées par Monsieur [D] démontrent que la salariée n'avait aucun grief contre celui-ci et qu'au contraire, elle était très satisfaite tant de son travail que des conditions de travail qui lui étaient offertes.

- Sur la demande de prime d'ancienneté : l'article 13 de la convention collective précise qu'une prime d'ancienneté de 3 % est due aux salariés comptant 3 ans au moins de présence ininterrompue dans l'entreprise. Or, du fait de ses périodes de maladie, Madame [R] totalise moins de trois ans d'ancienneté au cabinet de Monsieur [D].

- Sur la demande de condamnation à remettre les bulletins de salaire et l'attestation ASSEDIC : la demande de condamnation est sans objet puisqu'il ressort que l'attestation ASSEDIC a été remise à la salariée avec les seules mentions qu'elle devait contenir, il n'y a pas lieu de rectifier les bulletins de salaire à l'exception cependant de celui du mois de février 2007 qui, par erreur informatique, comporte un montant 0, alors que le salaire a été payé, par chèque, pour un montant de 1.200,60 €. Si la salariée avait été de bonne foi, elle aurait rectifié cette erreur puisqu'elle avait perçu le salaire correspondant à ce mois de février.

- Sur la demande de dommages et intérêts du fait de l'absence de délivrance conforme des bulletins de salaires : la demande est sans fondement puisque Madame [R] n'établit l'existence d'aucun grief qui en résulterait.

La Cour se réfère expressément aux conclusions visées plus haut pour l'exposé des moyens de fait et de droit.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La Cour examinera successivement les points litigieux au vu du dossier de la procédure, des éléments des débats et des pièces régulièrement produites au dossier.

Sur la recevabilité de l'appel :

L'appel formalisé dans les délais et formes requis est recevable.

Sur les incidents de communication de conclusions :

Après de nombreux renvois, Madame [Z] [R] a notifié ses conclusions le 21 octobre pour l'audience du 31 octobre, la cour a retenu l'affaire et autorisé Monsieur [J] [D] à déposer une note en délibéré, chacune des parties ayant pu largement s'expliquer et répondre dans ce dossier, les conclusions et note en délibéré ne seront pas écartées.

Au fond,

Sur la demande d'application du coefficient 250 et le rappel de salaire :

La qualification professionnelle se détermine par les fonctions réellement exercées dont la preuve incombe au salarié.

Madame [Z] [R] a été embauchée au coefficient 205 de la convention collective qui correspond à l'emploi parmi les exemples donnés de dactylo s'agissant de personnel chargé d'exécuter des travaux à partir de consignes précises détaillées et permanentes, ne nécessitant aucune initiative personnelle et sans expérience professionnelle, ce qui était le cas de Madame [Z] [R], s'agissant de son premier poste dans un cabinet d'avocat pour lequel elle n'avait pas reçu de formation particulière.

Le coefficient 240 correspond au personnel niveau BEP ou baccalauréat avec une expérience en cabinet préalable minimale d'un an ce qui était le cas de Madame [Z] [R] et qu'elle a obtenu le 1er octobre 2005.

Elle met elle-même en avant son peu de qualification et l'absence de formation, en même temps qu'elle affirme qu'elle exerçait les fonctions d'une secrétaire juridique et accomplissait des actes relevant de la fonction.

Le fait qu'elle ait bénéficié d'une formation pour l'utilisation des logiciels CLIOR et DICTA PLUS ne lui permet pas d'affirmer qu'elle exerçait les fonctions d'une secrétaire juridique car la bible déroulante CLIOR contient tous les actes juridiques types avec toutes les mentions légales et les correspondances d'accompagnement, le fait de les préparer en remplissant l'état civil, les adresses, les dates, la liste des pièces pour un bordereau de communication ne fait pas d'elle une secrétaire juridique, par ailleurs, la gestion des appels téléphoniques n'implique pas de réponse à caractère juridique qui ne relève aucunement du rôle d'une quelconque secrétaire quelle que soit son niveau de compétence.

Par ailleurs, la tenue du standard, de l'agenda, le classement des éléments des dossiers, l'archivage, relèvent des fonctions listées dans le coefficient 205.

Madame [Z] [R] qui ne justifie pas exécuter les travaux correspondants au coefficient qu'elle revendique ne peut qu'être déboutée de sa demande.

Sur l'application incorrecte des taux horaires conventionnels :

Le contrat de travail prévoit que le taux horaire servant de base au salaire brut inclura l'incidence du 13ème mois et, au vu des avenants, il apparaît que pour l'année 2004, le salaire devait être calculé avec un taux horaire de 8,04 €, 8,48 € pour les mois de janvier à septembre 2005 et 9,39 € pour les mois d'octobre à décembre 2005 (puisque l'indice de base est passé de 205 à 240), 9,58 € pour l'année 2006 et 9,83 € pour les mois de janvier et février 2007.

L'analyse des bulletins de salaire fait apparaître que ces taux horaires n'ont pas été correctement appliqués, sauf en 2004, en conséquence, Madame [Z] [R] peut prétendre à un rappel de salaire de 409,39 €, outre l'indemnité de congés payés pour un montant de 40,93 € car ainsi que l'ont vérifié les premiers juges 549 € ont été versés en moins entre janvier et septembre 2005, 109,19 € ont été trop versés entre octobre et décembre 2005, 91,08 € ont été trop versés en 2006, 60,66 € ont été versés en moins pour janvier et février 2007.

Sur l'avertissement du 5 février 2007 :

La lettre d'avertissement rappelle les reproches anciens qui ont été faits verbalement durant l'année 2006 et qui ne peuvent pas servir de fondement à la sanction pour n'être pas démontrés et être en tout état de cause prescrits.

Il lui reproche ensuite de n'avoir signalé que le 22 décembre 2006 qu'une attestation d'hébergement était arrivée le 8 décembre pour lui permettre de demander la remise en liberté d'un client avant Noël ce qu'il n'a pu obtenir que le 28 décembre ; il lui reproche ensuite des retards à l'embauche du matin et ses absences sans autorisation des 2, 25, 26 janvier 2007, d'être partie le 4 janvier avant l'heure alors qu'un client devait passer à 18 heures ; d'avoir oublié de reporter une date de plaidoirie et d'avoir dû déposer le dossier et d'avoir ressorti le dossier pour plaider une semaine plus tard alors que l'audience était déjà passée ; d'avoir donné des pièces à un client sans son accord et sans se souvenir de qui il s'agissait, d'avoir appelé un client non concerné qui inquiet était venu demander des explications et d'avoir le 17 janvier, lors de la régularisation d'un acte d'appel, directement appelé un client pour demander la date de la signification du jugement à personne autant de choses ce qui ne pouvaient donner qu'une mauvaise image du cabinet.

Madame [Z] [R] répond à l'avertissement dans une lettre de 5 pages où elle rappelle d'une façon générale les méthodes de travail dont ils sont convenus, sans répondre précisément aux griefs ainsi formulés, elle invoque sur les retards (absence de pointeuse). Les absences non autorisées ne sont pas contestées et la remise de pièces à un client non identifié justifient à eux seuls la lettre d'avertissement sans qu'elle puisse se retrancher derrière l'absence de formation, la demande sera rejetée.

Sur le salaire du mois de février 2007 :

L'employeur affirme mais ne démontre pas que le salaire de février ait été effectivement payé, il convient en conséquence de le condamner à payer la somme de 1.434,59 € outre les congés payés.

Sur le comportement de l'employeur :

Madame [Z] [R] fait valoir que son employeur a porté atteinte à son intégrité morale en expliquant qu'épuisée moralement, elle a dû prendre un traitement antidépresseur depuis le mois d'août 2005.

Or, d'une part, comme l'indique l'employeur, si elle avait dû se voir prescrire un traitement antidépresseur du fait des conditions de travail auxquelles elle était soumise, elle n'aurait pas accepté de passer, en octobre 2005, de 138 heures de travail mensuelles à 151 heures et elle n'aurait pas non plus sollicité son employeur pour l'aider dans des procédures de succession ou de pensions alimentaires si leurs relations avaient été détériorées, par ailleurs, les attestations de Mesdames [C] et [E] font état de conversations avec Madame [R] durant l'année 2006, dont il résulte que la salariée traversait une période extrêmement difficile et n'arrivait pas à retrouver de sérénité dans sa vie privée et être réellement ravie de son emploi et tenir grâce à son emploi où elle trouvait du réconfort, enfin après réception de l'avertissement, celle-ci s'est trouvée en arrêt maladie et ne peut donc pas se plaindre de ses conditions de travail ou de l'attitude de Monsieur [J] [D], l'attestation émanant de Madame [Y] [P] ancienne collaboratrice du cabinet en procès avec Monsieur [J] [D] dont l'objectivité est sujette à caution dans la mesure où Madame [Z] [R] a elle-même fourni une attestation à cette dernière et celle de son ancien compagnon ne peuvent qu'être écartées.

Si l'état de santé de la salariée a nécessité un traitement médical à compter du mois d'août 2005, il apparaît que les causes sont ailleurs que dans sa situation au sein du cabinet, en conséquence, elle ne peut se prévaloir de ce grief contre son employeur qui sera rejeté.

Sur la rupture du contrat de travail :

La lettre de prise d'acte de la rupture du 4 juin 2007 est libellée comme suit : « je suis au regret de prendre acte de la rupture de mon contrat de travail en raison des irrégularités affectant mon activité. Je rappelle de façon non exhaustive la distorsion entre les tâches confiées et ma qualification dans la convention collective, les irrégularités dans le règlement de mes salaires ».

Il revient à celui qui invoque la rupture du contrat de travail de rapporter la preuve de faits suffisamment graves qu'il reproche son employeur et il appartient au juge d'examiner les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués le justifient soit d'une démission dans le cas contraire.

Madame [Z] [R] invoque :

- le non-paiement du salaire au coefficient 250 correspondant aux tâches d'une secrétaire juridique qui n'a pas été retenu ainsi qu'il a été développé ci-dessus ;

- le non-paiement du salaire au taux conventionnel qui sera retenu pour certaines périodes avec un rappel de salaire de 409,39 € sur la durée du contrat ;

- la sanction disciplinaire du 5 février 2007, qui même si elle avait été injustifiée, ne saurait sous tendre une prise d'acte de rupture aux torts de l'employeur qui n'est que le légitime exercice de son pouvoir disciplinaire ;

- la non délivrance des bulletins de salaire ne peut être justifiée par le fait que celle-ci aurait pu les éditer elle-même ou qu'elle ne les aurait pas demandés s'agissant d'une obligation résultant des articles L. 3243-2 et R. 3243-6 du code du travail qui oblige l'employeur à délivrer un bulletin de salaire en même temps que le paiement du salaire. Monsieur [J] [D] ne peut tout à la fois soutenir qu'ils étaient à sa disposition dans l'ordinateur et reprocher à la salariée de n'avoir pas fait le nécessaire avec la personne de l'URSSAF qui était disposée à se déplacer au cabinet pour mettre en place l'établissement des bulletins de salaire, elle a été obligée de saisir l'inspection du travail et le juge des référés pour obtenir la délivrance de bulletins de salaire conformes ;

- la non affiliation auprès des caisses de retraite et de prévoyance est justifiée et n'est pas contestée, Madame [Z] [R] n'a été inscrite par son employeur qu'à compter du 25 avril 2006 alors qu'elle est employée depuis le 3 février 2004, Monsieur [J] [D] ne justifie pas avoir régularisé la situation de la salariée pour la période antérieure ;

- le non-respect de la garantie du maintien du salaire pendant la maladie : la convention collective prévoit le maintien du salaire entier pendant deux mois lorsque le salarié a plus de trois ans d'ancienneté, Madame [Z] [R] prétend qu'elle n'a pas bénéficié de cette disposition, alors qu'elle a atteint une ancienneté de trois ans chez son employeur le 3 février 2007, mais il ressort de l'analyse des bulletins de salaire qu'elle a bénéficié du maintien de son salaire durant 46 jours d'arrêts maladie pendant l'année 2006, ainsi que 6 jours en janvier 2007 et Monsieur [J] [D] indique qu'il a maintenu cette garantie jusqu'à fin février 2007 en réglant le salaire de février 2007, il apparaît ainsi que la salariée a bénéficié des dispositions conventionnelles concernant le maintien du salaire pendant la maladie bien avant de remplir les conditions pour y prétendre, elle ne réclame rien pour la période postérieure au mois de février, en conséquence, elle ne peut se prévaloir de ce grief contre son employeur ;

- le non-paiement de la prime d'ancienneté : le droit à paiement de la prime d'ancienneté est acquis à compter de trois ans d'ancienneté soit à compter du 3 février 2007 de 3 %, il lui sera alloué la somme réclamée de 43,03 € au titre cette prime.

- l'atteinte à l'intégrité morale de la salariée : il est apparu que les causes de sa dépression sont externes au cabinet, en conséquence, elle ne peut se prévaloir de ce grief contre son employeur qui sera rejeté.

En conséquence, la non délivrance des bulletins de salaire et la non affiliation aux caisses de retraite et de prévoyance justifient à eux seuls la rupture au tort de l'employeur qui s'analyse en un licenciement sans cause réelle ni sérieuse.

Sur les dommages et intérêts sur le fondement de l'article L. 1235-5 du code du travail :

Madame [Z] [R] qui a plus de deux ans d'ancienneté dans une entreprise qui emploie moins de 11 salariés peut prétendre à une indemnité calculée en fonction du préjudice subi par application de l'article L. 1235-5 du code du travail dont il lui appartient de rapporter la preuve.

Madame [Z] [R] a trois ans d'ancienneté, elle est âgée de 54 ans au moment de son licenciement, elle justifie de sa situation difficile postérieurement au licenciement, elle sera indemnisée par l'allocation d'une somme de 5.000 €.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis :

La convention collective prévoit que les salariés classés à un coefficient inférieur à 385 ont droit à deux mois de préavis après deux ans d'ancienneté dans l'entreprise, il sera alloué à Madame [Z] [R] la somme de 2.869,18 €.

Sur l'indemnité conventionnelle de licenciement :

Aux termes de l'article 20 de la convention collective, Madame [Z] [R] a droit au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement à un mois de salaire compte tenu de son ancienneté augmentée d'un mois pour les salariés qui sont âgés entre 52 et 65 ans, c'est le cas de Madame [Z] [R] pour être née en 1951, il lui est dû à ce titre 2.869,18 €.

Sur les dommages et intérêts pour non délivrance des bulletins :

Madame [Z] [R] n'explique pas en quoi la non délivrance des bulletins de salaire lui a causé un préjudice particulier, la demande de dommages et intérêts sera rejetée.

Sur les dommages et intérêts pour non affiliation auprès des caisses :

Monsieur [J] [D] ne justifie pas avoir régularisé la situation de la salariée pour la période antérieure au 25 avril 2006 alors qu'elle est employée depuis le 3 février 2004, ce qui lui cause nécessairement un dommage né de l'absence de paiement des cotisations et des droits en résultant qu'il y a lieu de réparer par l'allocation de la somme de 5.000 €.

Sur les dommages et intérêts pour la privation de ses droits au chômage :

L'employeur doit faire figurer sur l'attestation Pôle-Emploi le motif exact de la rupture, en l'espèce, prise d'acte de la rupture du contrat par la salariée, or, le motif inexact indiqué par l'employeur de rupture à l'initiative de la salariée a été interprété par Pôle-Emploi comme une démission, il a privé la salariée du droit à un examen complet de sa situation au regard de ses droits à prestation et n'a pas permis à Madame [Z] [R] de bénéficier des allocations chômage dès la rupture du contrat, l'attestation Pôle-Emploi n'a été rectifiée que le 15 mai 2008 après que cette dernière ait saisi le juge des référés à cet effet, ce qui lui a causé un préjudice important qu'il y a lieu de réparer par l'octroi de la somme de 4.000 €.

Sur les dommages et intérêts pour perte de ses droits au DIF :

La salariée dont la prise d'acte produit les effets d'un licenciement peut prétendre à la réparation de son préjudice lié à l'impossibilité d'exercer son droit individuel à la formation, il lui sera alloué la somme de 500 €.

Sur la remise des pièces :

Il convient de condamner Monsieur [J] [D] à remettre les bulletins de salaire rectifiés ainsi qu'une attestation Pôle-Emploi et le bulletin de salaire du mois de février rectifiés conformément à la présente décision sous astreinte de 10 € par jour de retard passé le délai de 15 jours à compter de la notification du présent arrêt.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Il serait inéquitable de laisser à la charge de Madame [Z] [R] les frais par elle exposés et non compris dans les dépens, la Cour lui alloue à ce titre la somme de 1.000 €.

Monsieur [J] [D] qui succombe en ses prétentions sera condamné aux entiers dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, rendu en matière sociale et en dernier ressort,

Déclare l'appel recevable,

Confirme le jugement sur le rejet de l'application du coefficient 250, sur le rejet de l'annulation de l'avertissement, le rejet de la réparation du préjudice moral,

L'infirme pour le surplus et statuant à nouveau,

Dit que la prise d'acte s'analyse en un licenciement sans cause réelle ni sérieuse, en conséquence, condamne Monsieur [J] [D] à payer à Madame [Z] [R] les sommes de :

1.434,59 € au titre du salaire de février 2007,

143,45 € au titre des congés payés,

43,03 € au titre de la prime d'ancienneté,

2.869,18 € au titre de l'indemnité de préavis,

286,91 € au titre des congés payés sur le préavis,

2.869,18 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

5.000 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

5.000 € à titre des dommages et intérêts pour non affiliation auprès des caisses,

4.000 € à titre des dommages et intérêts pour la privation de ses droits au chômage,

500 € à titre des dommages et intérêts pour perte de ses droits au DIF,

Condamne Monsieur [J] [D] à remettre les bulletins de salaire rectifiés ainsi qu'une attestation Pôle-Emploi et le bulletin de salaire du mois de février rectifiés conformément à la présente décision sous astreinte de 10 € par jour de retard passé le délai de 15 jours à compter de la notification du présent arrêt,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Y ajoutant,

Condamne Monsieur [J] [D] à payer à Madame [Z] [R] la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne Monsieur [J] [D] aux entiers dépens d'appel.

Arrêt signé par Monsieur PUJO-SAUSSET, Président, et par Madame HAUGUEL, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE,LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09/01107
Date de la décision : 19/01/2012

Références :

Cour d'appel de Pau 3S, arrêt n°09/01107 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-01-19;09.01107 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award