RC/SB
Numéro 13/01536
COUR D'APPEL DE PAU
Chambre sociale
ARRÊT DU 11/04/2013
Dossier : 11/01674
Nature affaire :
Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution
Affaire :
SAS TRANSPORTS RAMONJEAN
C/
[R] [I]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 11 Avril 2013, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 21 Février 2013, devant :
Monsieur CHELLE, Président
Madame ROBERT, Conseiller
Madame PAGE, Conseiller
assistés de Madame HAUGUEL, Greffière.
En présence de Mesdames MASANABA et AUBAGNA, greffières stagiaires
Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTE :
SAS TRANSPORTS RAMONJEAN
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par la SCP ARAGNOUET/LAMOURE, avocats au barreau de PAU
INTIME :
Monsieur [R] [I]
[Adresse 3]
[Localité 1]
représenté par la SCP GUEROULT, avocats au barreau de BAYONNE
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2011/003497 du 24/06/2011 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PAU)
sur appel de la décision
en date du 19 AVRIL 2011
rendue par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BAYONNE
FAITS ET PROCÉDURE
Monsieur [R] [I] a été engagé par la société TRANSPORTS RAMONJEAN, société par actions simplifiée dont l'activité consiste dans le transport, la location de bennes avec ou sans chauffeur, en qualité de conducteur routier par contrat à durée indéterminée en date du 1er janvier 2008.
La convention collective applicable est celle des Transports Routiers.
Il apparaît que le 13 mai 2008, Monsieur [I] a été victime d'un accident du travail. Outre l'arrêt initial, il a fait état de la réapparition de douleurs le 22 mars 2010 et un nouvel arrêt de travail a alors été ordonné et prolongé jusqu'en juin 2010.
Monsieur [I] a été convoqué les 2, 8 puis 21 avril 2010 à un entretien préalable qui n'a pu se dérouler, le salarié indiquant n'avoir pu se déplacer.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 3 mai 2010, la société TRANSPORTS RAMONJEAN a notifié à Monsieur [I] son licenciement pour faute grave.
Par requête reçue le 9 juin 2010, Monsieur [I] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Bayonne aux fins de contester son licenciement et obtenir la condamnation de la société TRANSPORTS RAMONJEAN à lui payer des dommages et intérêts et diverses indemnités.
Par jugement en date du 19 avril 2011, auquel il y a lieu de renvoyer pour plus ample exposé des faits et des prétentions initiales des parties, le Conseil de prud'hommes de Bayonne a ainsi statué :
Juge nul le licenciement de Monsieur [R] [I] par la SAS TRANSPORTS RAMONJEAN ;
Juge irrégulière la procédure de licenciement ;
Condamne, en conséquence, la SAS TRANSPORTS RAMONJEAN à verser à Monsieur [R] [I] les sommes de':
800 € à titre d'indemnité pour irrégularité de procédure';
10.200 € à titre d'indemnité pour licenciement nul';
843 € à titre d'indemnité légale de licenciement';
3.400 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis';
340 € à titre d'indemnité de congés payés afférents au préavis';
700 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Condamne la SAS TRANSPORTS RAMONJEAN aux entiers dépens de l'instance et aux éventuels frais d'exécution.
Par déclaration reçue au greffe de la Cour le 4 mai 2011, la société TRANSPORTS RAMONJEAN a interjeté appel de la décision.
L'affaire a été fixée à l'audience du 21 février 2013.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par conclusions écrites déposées le 14 novembre 2012 et reprises oralement, auxquelles il convient de se référer pour le détail de l'argumentation, la société TRANSPORTS RAMONJEAN demande à la Cour :
D'infirmer le jugement rendu par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES de BAYONNE en date du 19/04/2011 ;
Et y ajoutant':
Dire que Monsieur [I] est l'auteur d'un cumul de fautes ;
Constater que ce cumul de fautes est constitutif d'une faute grave ;
Dire en conséquence que le licenciement de Monsieur [I] est parfaitement justifié ;
Rejeter en conséquence l'intégralité des demandes du salarié ;
Condamner Monsieur [I] au paiement de la somme de 1.800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
La société appelante soutient':
Sur l'irrégularité de la procédure de licenciement, que s'il est vrai que les mentions figurant au sein de la correspondance sont pour partie incorrectes, il n'empêche que le salarié ne peut en tirer les conséquences hâtives consistant à solliciter la condamnation de son employeur à une somme équivalent à un mois de salaire'; que tout d'abord, la première remarque consiste à indiquer que dans l'hypothèse où le siège de la société employeur et le domicile du salarié ne se situent pas dans le même département, la compétence territoriale est bien celle du siège de l'employeur ou plus précisément de l'établissement auquel est rattaché le salarié'; qu'il est vrai qu'au lieu de faire état de l'Inspection du Travail, elle a indiqué que la liste des conseillers pouvait se trouver auprès du Tribunal des Prud'hommes'; que l'employeur n'a nullement cherché à violer les droits du salarié, car il est évident qu'en se rendant au Conseil de Prud'hommes, Monsieur [I] aurait été directement renseigné, et aurait pu se rendre auprès de l'Inspection du Travail'; que l'employeur a cherché à quatre reprises, une date qui permettait au salarié de pouvoir assister à son entretien préalable'; que le salarié n'a finalement pas pu se rendre audit entretien puisqu'il ne pouvait, selon ses dires, se déplacer.
Sur le licenciement, qu'il est fondé sur trois reproches':
1- Non-respect des consignes de sécurité': que sur ce point la violation du 8 mars 2010 aurait pu entraîner l'exclusion de la société du site concerné';
2- rotations non effectuées': que le salarié ne conteste pas qu'il n'a effectué que six rotations au lieu des sept prévues les 1er, 5, 8, 12 et 16 mars 2010'; que son affirmation selon laquelle il aurait dû faire des heures supplémentaires non payées est erronée, puisqu'il est payé au nombre d'heures effectuées'; qu'il n'aurait absolument pas été en contravention avec les règles de conduite, puisque celles-ci prévoient que le salarié peut conduire trois fois 9 heures et deux fois 10 heures dans la semaine'; que le 8 mars, il ressort des données sociales de son véhicule qu'il a conduit 6 heures 25, que l'amplitude de sa journée était de 9 heures 57 et qu'il pouvait donc conduire 2 heures'; que'ce n'était pas la première fois que Monsieur [I] était réprimandé pour un non-respect des nombres de rotations à effectuer.
3- consignes non respectées': que le 19 mars 2010, il avait été clairement indiqué à Monsieur [I], qu'en raison de l'usure de ses pneus, il devait se rendre à 17 heures, au sein des établissements EUROMASTER, afin de faire procéder au changement de ses pneus'; qu'il n'a pas respecté cette instruction.
La société soutient que ce comportement, mêlé aux deux autres pour lesquels il avait déjà fait l'objet de sanctions, permet parfaitement de qualifier l'ensemble des faits de « faute grave'» justifiant le licenciement du salarié, et ce dans le cadre d'une suspension de son contrat de travail en raison d'un accident du travail.
Par conclusions écrites déposées le 29 janvier 2013 et reprises oralement, auxquelles il convient de se référer pour le détail de l'argumentation, Monsieur [I] demande à la Cour de :
DIRE ET JUGER NUL le licenciement de Monsieur [I].
CONSTATER l'absence de faute grave.
CONSTATER l'irrégularité de la procédure de licenciement.
CONDAMNER la SAS RAMONJEAN à payer à Monsieur [I] la somme de 1.700 € au titre du préjudice subi pour l'irrégularité de la procédure de licenciement.
CONDAMNER la SAS RAMONJEAN à payer à Monsieur [I] la somme de 25.000 € à titre d'indemnité pour licenciement nul.
CONDAMNER la SAS RAMONJEAN à payer à Monsieur [I] la somme de 843 € d'indemnité légale de licenciement.
CONDAMNER la SAS RAMONJEAN à payer à Monsieur [I] la somme de 3.400 € d'indemnité de préavis.
CONDAMNER la SAS RAMONJEAN à payer à Monsieur [I] la somme de 340 € d'indemnité de congés payés sur préavis.
CONDAMNER la SAS RAMONJEAN à payer à Monsieur [I] la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
CONDAMNER la SAS RAMONJEAN aux entiers dépens.
L'intimé fait valoir que la société RAMONJEAN l'a convoqué le 13 avri1 2010 à un entretien préalable de licenciement devant avoir lieu le 21 avril 2010 à TARBES'; que cette convocation ne comprend pas les mentions obligatoires, à savoir, l'indication des lieux et des adresses où consulter le liste des conseillers extérieurs à l'entreprise'; que la liste peut se consulter à la Mairie et à l'Inspection du Travail, et non auprès lu Conseil de Prud'hommes comme la SAS RAMONJEAN l'a indiqué'; que d'autre part, il s'agit de la Mairie et de l'Inspection du Travail du lieu de domicile du salarié ([Localité 4]), et non du lieu du siège social de l'entreprise (Tarbes)'; qu'enfin, l'adresse exacte doit être indiquée'; qu'en l'espèce, la convocation contient des indications erronées et insuffisantes, l'Inspection du Travail n'est pas mentionnée, et l'adresse de la Mairie n'est pas indiquée'; qu'il n'a pu se renseigner sur ces droits et prendre contact auprès d'un conseiller puisqu'il ignorait où exactement consulter cette liste, sans se rendre à Tarbes'; qu'alors qu'il était en arrêt de travail suite à un accident du travail, la société RAMONJEAN a imaginé le licencier en invoquant une faute grave'; que d'une part, les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont formellement contestés par lui, et d'autre part, ne constituent nullement une faute grave'; qu'en présence d'un licenciement nul, lorsque le salarié ne demande pas sa réintégration, il a droit aux indemnités de rupture et à une indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement et au moins égale à celle prévue par l'article L1235-3.
La Cour se réfère expressément aux conclusions visées ci-dessus pour un plus ample exposé des moyens de fait et de droit développés par les parties.
MOTIFS DE LA DÉCISION
L'appel, interjeté dans les formes et délais prescrits par la loi, est recevable.
Sur la régularité de la procédure de licenciement
Par lettre du 13 avril 2010, la société TRANSPORTS RAMONJEAN a convoqué Monsieur [I] à un entretien préalable prévu pour le 21 avril suivant à Tarbes, siège de la société. Cette convocation indiquait notamment':
«'Pour cet entretien, vous pouvez vous faire accompagner d'une personne de votre choix appartenant à la société, ou d'un conseiller extérieur à l'entreprise. Vous trouverez la liste de ces conseillers à la Mairie de Tarbes ou au Tribunal des Prud'hommes de Tarbes situé [Adresse 2] ».
Aux termes de l'article L.1232-4 du Code du travail, «'Lors de son audition, le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise. Lorsqu'il n'y a pas d'institutions représentatives du personnel dans l'entreprise, le salarié peut se faire assister soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise, soit par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l'autorité administrative. La lettre de convocation à l'entretien préalable adressée au salarié mentionne la possibilité de recourir à un conseiller et précise l'adresse des services où la liste des conseillers est tenue à la disposition des salariés.'»
Les services concernés sont, outre la Mairie, la Direction départementale du Travail et de l'emploi (inspection du travail) et non pas le Conseil de Prud'hommes.
Par ailleurs, si la lettre ne mentionne pas l'adresse de la Mairie ou de la Direction départementale du Travail et de l'emploi (inspection du travail) où la liste peut être consultée, cela entraîne pour le salarié un préjudice devant être indemnisé par l'attribution d'une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire.
Ainsi, la lettre de convocation adressée le 13 avril 2010 par la société TRANSPORTS RAMONJEAN n'est pas conforme à ces exigences, et c'est à bon droit que le Conseil de Prud'hommes en a tiré les conséquences en allouant à Monsieur [I] une indemnité de 800 €. Le jugement sera confirmé sur ce point.
Sur le licenciement lui-même
Monsieur [I] a été licencié pour faute grave.
La faute grave visée à l'article L. 1234-1 du Code du travail, dont la preuve appartient à l'employeur, se définit comme un fait ou un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.
La lettre de licenciement sert de cadre strict au contrôle du juge qui forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, les griefs non énoncés dans la lettre de licenciement ne peuvent être examinés par le juge y compris ceux évoqués postérieurement au licenciement.
En l'espèce, la lettre de licenciement du 3 mai 2010 (pièce 2 de l'employeur) énonce des motifs ainsi rédigés :
1° Non respect des consignes de sécurité':
Le 08/03/2010 vous êtes descendu de la cabine de votre camion qui se trouvait sur l'aire de chargement de la [Localité 3] sans les EPI obligatoires (gilet et casque) fournis et renouvelés par l'entreprise le 25/0l/2010. Notre Client GSM nous a reproché ces faits par courrier écrit (voir pièces jointes / courrier GSM du 11/03/2010).
2° Avertissement': (sic)
Vous n'avez pas réalisé le nombre de rotations prévues sur le chantier Eurovia/Lahontan sur plusieurs journées du mois de mars soit le 1er, le 5, le 8, le 12, le 16 mars 2010. (') Vous avez quitté votre service entre 15h et 16h ces jours là (voir détail relevé l'activité joint) malgré nos multiples recommandations engendrant des pertes financières pour l'entreprise.
3° Avertissement': (sic)
Vous nous avez signalé le 18/03/2010 le mauvais état d'un pneumatique, nous avons pris rendez vous à Euromaster de Bayonne pour le lendemain 19/03/2010 à 17h. Nous vous avons demandé de respecter cet horaire afin de réaliser une journée complète. (') Vous n'avez pas respecté les consignes, vous êtes arrivé à 15h30 chez Euromaster au lieu de 17h et reparti à 16h05 voir fiche d'intervention Euromaster, vous avez amputé la journée de service et engendré des pertes financières pour l'entreprise.'»
Monsieur [I] soutient que les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont formellement contestés par lui, et d'autre part, ne constituent nullement une faute grave.
S'agissant du non respect des consignes de sécurité, le caractère réel des faits est établi par la lettre du 11 mars 2010 adressée par la société GSM à la société TRANSPORTS RAMONJEAN (sa pièce n° 1), lui reprochant le défaut de port des équipements de sécurité par son chauffeur sur leur site d'[Localité 3] le 8 mars 2010.
Monsieur [I] conteste ce grief en soutenant qu'il «'a toujours porté ses équipements de sécurité'». Il produit une attestation de Monsieur [W] (sa pièce 7).
Pour autant, ce document, qui n'est pas conforme aux prescriptions du Code de procédure civile, n'est pas circonstancié et se limite à affirmer, d'une manière générale, que Monsieur [I] «'avait sur lui tous les équipements de sécurité à chaque fois qu'il se trouvait en dehors de son véhicule et sur le site d'[Localité 3]'».
Ainsi, ce document n'est pas de nature à contredire la déclaration précise de la société GSM sur les faits qui se sont déroulés le 8 mars 2010, d'autant plus que l'employeur expose qu'il résulte du rapprochement des disques des camions conduits ce jour-là par ces deux salariés démontre qu'ils ne se sont pas croisés sur le site d'[Localité 3] (sa pièce n° 11).
La société TRANSPORTS RAMONJEAN fait aussi valoir que le salarié aurait «'déjà été réprimandé sur un point similaire'», sans toutefois s'en expliquer davantage. Il ressort de la pièce n° 6 qu'elle produit, une lettre du 10 mars 2010, qu'il s'agirait d'un «'avertissement'» adressé au salarié relativement à des pneus de son camion, jugés «'dans un état catastrophique'». Pour autant, ce courrier non circonstancié en ce que l'imputabilité au salarié n'est pas établie, et dont il n'est pas démontré ni même soutenu qu'il s'agirait d'une sanction disciplinaire au sens du Code du travail, ne constitue pas un précédent au regard des faits relatifs au port des équipements de sécurité.
Ainsi, si le grief reproché à Monsieur [I] est réel, et présente un caractère sérieux s'agissant de sa propre sécurité que son employeur a obligation d'assurer, outre qu'il résulte du courrier de la société GSM que la société TRANSPORTS RAMONJEAN s'exposait à être exclue du site pour ces raisons, il ne présente toutefois pas les caractères de la faute grave telle que définie ci-dessus.
S'agissant des rotations non effectuées les 5, 8, 12 et 16 mars 2010, Monsieur [I] reconnaît n'avoir effectué que 6 rotations au lieu des 7 demandées.
Il fait valoir que cette charge de travail ne pouvait être accomplie dans le temps de travail rémunéré.
Pour autant, la société TRANSPORTS RAMONJEAN objecte à bon droit à cet argument que Monsieur [I] n'est pas rémunéré de manière forfaitaire, mais est payé au disque, comme en atteste l'analyse de ses fiches de paye elles-mêmes'; qu'il est payé au nombre d'heures effectuées'; que si la 7ème rotation avait été effectuée, il n'aurait absolument pas été en contravention avec les règles de conduite, puisque ces dernières prévoient expressément que le salarié peut conduire dans la semaine, trois fois 9 heures, et deux fois 10 heures.
La société TRANSPORTS RAMONJEAN justifie à titre d'exemple que, le 8 mars 2010, le salarié pouvait encore conduire 2 heures, ce qui lui aurait permis d'accomplir la 7ème rotation litigieuse.
Les temps d'attente «'trop longs'» invoqués par le salarié ne sont au contraire pas établis.
Il en résulte que ce grief présente un caractère réel.
L'employeur soutient aussi que ce n'était pas la première fois qu'il avait été réprimandé pour un non respect des nombres de rotations à effectuer, et produit (sa pièce n°7) la photocopie d'une lettre du 24 juin 2009 portant «'avertissement'» en ce sens.
Bien que la société n'établisse pas non plus dans ce cas qu'il s'agirait d'une procédure disciplinaire conforme au Code du travail, le salarié n'apparaît pas contester avoir reçu cet avertissement.
La répétition de ces faits au mois de mars 2010 confère à ce grief un caractère sérieux.
Toutefois, ce grief ne caractérise pas non plus une faute grave au sens de la définition ci-dessus.
S'agissant de la consigne non respectée, Monsieur [I] ne conteste pas qu'il a amené son camion chez le prestataire EUROMASTER pour le changement de pneus à 15h30 le 18 mars 2010 au lieu de 17 heures.
Si le caractère réel de ce grief est établi, il ne présente pour autant pas un caractère sérieux. En effet, alors que l'employeur reproche au salarié d'être ainsi parti prématurément, celui-ci affirme sans être démenti qu'il avait réalisé ce jour-là les 8 rotations qui lui avaient été demandées.
Ainsi, sur les trois griefs imputés à Monsieur [I], deux apparaissent présenter un caractère réel et sérieux, mais ne constituent pas, même rapprochés l'un de l'autre, une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.
Il y a donc lieu de constater que la faute grave n'est pas caractérisée.
Il n'est pas contesté que, au moment de son licenciement, Monsieur [I] se trouvait en arrêt de travail en raison des suites de l'accident du travail survenu le 13 mai 2008. Il en résulte que son contrat de travail était suspendu par application des dispositions de l'article L.1226-7 du Code du travail.
Or, aux termes de l'article L.1226-9 du Code du travail, «'Au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie.'»
C'est donc à bon droit que le Conseil de Prud'hommes a jugé nul le licenciement de Monsieur [I] par application de l'article L.1226-13 du même Code, et le jugement sera confirmé.
Sur les autres demandes
Monsieur [I] présente des demandes financières supérieures à celles fixées par le Conseil de Prud'hommes.
Pour autant, les différentes indemnités allouées, par une application exacte des textes, constituent une juste appréciation des circonstances de fait par les premiers juges.
C'est donc l'ensemble du jugement entrepris qui sera confirmé, et Monsieur [I] sera débouté de ses demandes financières supplémentaires au titre de la nullité du licenciement.
Partie tenue aux dépens d'appel, la société TRANSPORTS RAMONJEAN paiera à Monsieur [I] la somme de 800 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, en compensation de ses frais irrépétibles en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale et en dernier ressort,
Déclare l'appel recevable,
Déboute la société TRANSPORTS RAMONJEAN de ses demandes,
Déboute Monsieur [R] [I] de ses demandes financières plus amples,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu entre les parties par le Conseil de Prud'hommes de Bayonne le 19 avril 2011,
Condamne la société TRANSPORTS RAMONJEAN à payer à Monsieur [R] [I] la somme de 800 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile en cause d'appel,
Condamne la société TRANSPORTS RAMONJEAN aux dépens d'appel.
Arrêt signé par Monsieur CHELLE, Président, et par Madame HAUGUEL, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE,LE PRÉSIDENT,