SG/CD
Numéro 16/01723
COUR D'APPEL DE PAU
Chambre sociale
ARRÊT DU 28/04/2016
Dossiers : 14/02358
14/02386
Nature affaire :
Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution
Affaire :
[Z] [O]
[O]
C/
Association AFSA
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 28 Avril 2016, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 03 Mars 2016, devant :
Monsieur GAUTHIER, magistrat chargé du rapport,
assisté de Madame HAUGUEL, greffière.
Monsieur GAUTHIER, en application des articles 786 et 910 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame THEATE, Présidente
Monsieur GAUTHIER, Conseiller
Madame COQUERELLE, Conseiller
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTE :
Madame [Z] [O]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par la SELARL ACBC, avocat au barreau de PAU
INTIMÉE :
Association FORMATION SUPÉRIEURE ET ADULTE (AFSA)
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Maître PITICO de la SELARL PITICO CHRISTOPHE, avocat au barreau de PAU
sur appel de la décision
en date du 21 MAI 2014
rendue par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DÉPARTAGE DE PAU
RG numéro : F 12/00659
LES FAITS, LA PROCÉDURE :
Mme [O] a été engagée par l'Association Formation Supérieure Adulte - AFSA (l'association) à compter du 6 octobre 2006, à temps partiel, en qualité d'enseignante, par contrat à durée déterminée, puis à compter du 3 septembre 2007 par contrat à durée indéterminée.
Le 3 octobre 2012, la salariée a pris acte de la rupture de son contrat de travail et le 7 novembre 2012, elle a saisi le conseil de prud'hommes de Pau pour, au terme de ses dernières demandes de première instance : qu'il soit dit que les griefs imputés à l'employeur sont sérieux et matériellement vérifiables et en conséquence que la rupture du 3 octobre 2012 s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse avec toutes conséquences de droit ; que l'employeur soit condamné à lui payer : 1 035 euros au titre de l'indemnité de licenciement ; 8 700 euros au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ; 3 450 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ; 345 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés ; 15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail ; 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral ; 173 671,37 euros au titre de rappel de salaire ; 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
À défaut de conciliation le 3 juin 2013, l'affaire a été renvoyée devant le bureau de jugement qui, par décision du 9 décembre 2013, s'est déclaré en partage de voix.
Par jugement du 21 mai 2014, auquel il conviendra de se reporter pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, le conseil de prud'hommes de Pau (section activités diverses), en formation de départage, a ainsi statué :
- dit que la prise d'acte de rupture de son contrat de travail par Mme [O] s'analyse en démission,
- déboute Mme [O] de l'ensemble de ses prétentions,
- condamne Mme [O] à payer à l'AFSA les sommes suivantes :
* 1 669,65 euros au titre de l'indemnité de préavis,
* 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- déboute l'AFSA du surplus de ses prétentions,
- condamne Mme [O] aux entiers dépens.
Mme [O], représentée par son conseil, a interjeté appel du jugement le 19 juin 2014 par RPVA, enregistré sous le RG numéro 14/02358, régularisé par lettre recommandée avec avis de réception du 20 juin 2014, enregistré sous le RG numéro 14/02386.
La jonction des 2 procédures sera ordonnée sous le numéro 14/02358.
DEMANDES ET MOYENS DES PARTIES :
Mme [O], par conclusions écrites, déposées le 20 janvier 2016, auxquelles il convient de se référer, demande à la cour de :
- infirmer en toutes ses dispositions le jugement du 21 mai 2014 rendu par le conseil de prud'hommes de Pau,
- dire que les griefs imputés à l'employeur sont sérieux et matériellement vérifiables,
- en conséquence, dire que la rupture en date du 3 octobre 2012 s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse avec toutes conséquences de droit,
- condamner l'employeur au versement des sommes suivantes :
* 1 035 euros au titre de l'indemnité de licenciement ;
* 8 700 euros au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
* 3 450 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;
* 345 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés ;
* 15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail ;
* 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral ;
* 173 671,37 euros au titre de rappel de salaire ;
* 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme [O] expose que le 3 octobre 2012 elle a pris acte de la rupture de son contrat de travail pour les motifs suivants :
- absence de cours,
- absence de plannings à 24 heures de la rentrée scolaire,
- diminution du volume horaire sans notification préalable,
- non-paiement de l'intégralité des modules réalisés arrêtés à 55 minutes de temps de travail effectif,
- suppression de cours d'enseignement dont le BTS notariat pour le compte duquel elle réalisait 11 heures hebdomadaires,
- comportement déloyal de l'employeur vis-à-vis des enseignants et étudiants,
- communication tardive des bulletins de paie.
Elle soutient que :
1 - sur le mode de fonctionnement défaillant de l'employeur dans la communication des plannings aux enseignants :
- en violation des articles 11 et 11.1 de la convention collective nationale de l'enseignement privé hors contrat du 27 novembre 2007, applicable, l'association communiquait les plannings non pas au mois de juin ou juillet précédant la rentrée scolaire, mais en octobre voire novembre de l'année scolaire en cours, soit au moment de la rentrée effective, voire après ; les enseignants étaient totalement dépendants de la seule et unique volonté du directeur de l'établissement et ce fonctionnement les plaçait dans une insécurité financière et juridique, contraire à la convention collective ; elle a dû attendre le 4 octobre 2012, soit 24 heures avant le début supposé de son enseignement, pour recevoir par courriel de l'employeur le fait qu'elle aurait à assurer du 5 au 26 octobre 2012 quelques heures de cours aux DCG, DEES ARH et master 1 et 2 ; confrontée à la fermeture brutale du module notariat, qui lui a fait perdre 11 heures hebdomadaires, elle devra attendre 24 heures avant le début de ses cours pour découvrir son volume horaire sur 20 jours, et non sur le premier trimestre, et pour connaître les classes au sein desquelles elle allait enseigner.
Recevant ses plannings en novembre, alors qu'elle commençait ses cours en octobre, elle était dans l'incapacité de connaître par avance ses disponibilités.
Elle ne pouvait effectuer les 200 heures proposées qui correspondaient à des matières jamais enseignées, pour lesquelles elle n'avait pas l'habilitation du rectorat, et qui étaient irréalisables matériellement dans la mesure où elle assurait déjà des heures de cours pendant les plages horaires proposées.
Au titre des griefs imputables à l'employeur figurent : la réduction unilatérale des heures et du taux horaire entraînant une modification de son contrat de travail, sans son accord préalable et express, l'horaire passant de 16 heures par semaine à 5 heures, supprimant des heures de cours sans avertissement ; l'absence de paiement d'heures de cours et la communication tardive des bulletins de salaire, comme ce fut le cas pour les mois d'avril, mai et juin 2012 ; le non-paiement complet des modules horaires ; l'employeur ne payait le salaire que sur la base de 55 minutes, alors que les 5 minutes de battement sont du temps de travail effectif pendant lequel elle restait à la disposition et sous les ordres de l'employeur ; l'employeur a toujours refusé de prendre acte de son refus d'être filmée pendant les heures de cours en « e-learning », sans déclaration préalable auprès de la CNIL, ce qui constitue un manquement de loyauté de l'employeur vis-à-vis de sa salariée et porte atteinte à son image et à sa vie privée ;
2 - sur la requalification du temps partiel en temps complet : la salariée soutient que son contrat à temps partiel doit être requalifié à temps complet à compter de l'année 2008 aux motifs que : on ne lui a jamais proposé la régularisation de son contrat à durée indéterminée en bonne et due forme avec un contenu précis de ses fonctions, de sa mission, de ses horaires et de sa rémunération ; elle était informée le jour pour le lendemain de son planning ou des modifications apportées ; aucune base d'heures ou de volume d'horaires n'était fixée de sorte qu'elle se trouvait dans une totale incapacité de pouvoir s'organiser ; elle n'a jamais eu connaissance de la durée exacte de son travail en l'absence de tout planning communiqué et se trouvait dans l'impossibilité de connaître son rythme de travail, alors qu'elle a toujours produit ses disponibilités 45 jours avant le début théorique de ses cours.
3 - sur la rupture abusive du contrat de travail :
La salariée prétend qu'elle a toujours fait preuve de la plus grande loyauté et respect vis-à-vis de la direction de l'établissement ;
Les conditions de rupture ne reposant sur aucun grief matériellement vérifiable et sérieux, il est constant que la rupture ainsi intervenue est abusive.
Sur le préjudice moral :
Elle fait valoir qu'il ressort des attestations des étudiants qu'elle a été victime des agissements de l'association : fermeture des salles dans un but de surveillance ; victime de man'uvre et agissements négatifs de la part du personnel administratif ; agissements du personnel négatif à son encontre ; victime de harcèlement de la part du personnel administratif ; appel téléphonique du secrétariat pour vérifier l'heure de ses cours, etc.
L'association, par conclusions écrites, déposées le 26 février 2016, auxquelles il convient de se référer, demande à la cour de :
Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [O] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, et condamné à payer à l'association la somme de 1 669,65 euros à titre d'indemnité de préavis,
Le réformer pour le surplus :
- condamner Mme [O] à payer à l'association la somme de 3 500 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et 3 500 euros au titre des frais irrépétibles,
- condamner la salariée aux entiers dépens de première instance et d'appel.
L'association conclut à ce qu'il soit dit que la prise d'acte s'analyse en une démission et à la condamnation de la salariée à lui payer l'équivalent de 2 mois de salaire à titre d'indemnité de préavis.
Elle soutient que les dispositions conventionnelles visées par la salariée (les articles 11 et 11.1), sont issues d'un accord collectif signé le 23 juin 2014, étendu par arrêté du 13 novembre 2014, et n'existaient donc pas à l'époque de la relation contractuelle entre la salariée et l'association, de sorte qu'elle ne peut pas justifier le 3 octobre 2012 d'une prise d'acte de la rupture de son contrat pour non-respect par l'employeur de dispositions conventionnelles entrées en vigueur le 28 novembre 2014.
L'association soutient que les dispositions applicables (articles 3.3.4 et 4.3.3 de la convention collective) ont été respectées.
Elle fait valoir qu'après avoir recueilli au préalable les dispositions des salariés, l'association communique chaque année aux enseignants les emplois du temps au début du mois de septembre ; les emplois du temps sont ajustés pour tenir compte des effectifs inscrits, des formations assurées et des contraintes de chaque enseignant ; des emplois du temps définitifs sont ensuite édités et communiqués aux enseignants au début du mois de novembre ; en réalité, les emplois du temps sont quasiment les mêmes chaque année, sauf si le référentiel a évolué et sont connus des enseignants dès la réunion de sortie qui a lieu à la fin de l'année scolaire précédente ; pour l'année scolaire 2012/2013, la salariée a communiqué ses disponibilités le 12 septembre 2012, soit largement en retard par rapport à la procédure appliquée au sein de l'école.
Sur la prétendue insuffisance d'heures de cours attribuées à la salariée :
L'association fait valoir que le contrat de travail prévoyait un volume horaire annuel de 139,33 heures ; les volumes horaires effectués chaque année par la salariée étaient supérieurs ; pour l'année scolaire 2012/2013, si elle avait accepté les heures de Monsieur [X], elle aurait bénéficié de 400 heures de cours environ ; elle a finalement accepté ces heures de cours le 3 octobre 2012 et le 4 octobre elle a pris acte de la rupture de son contrat.
Sur la communication tardive des emplois du temps :
La salariée ne s'est jamais plainte du processus mis en 'uvre par l'association pour l'établissement des emplois du temps, lié à la prise en compte des contraintes de chaque enseignant ; ce processus n'était pas contraire aux dispositions conventionnelles en vigueur à l'époque de la relation contractuelle litigieuse.
Sur la variation des heures de cours d'une année scolaire à l'autre : l'article 4 du contrat de travail de la salariée prévoit expressément cette variation du volume horaire de l'enseignante en fonction des années ; cette variation ne constitue pas un manquement aux obligations contractuelles ; l'association lui a toujours assuré un volume horaire régulier et conforme à ses engagements contractuels et elle n'a jamais formulé la moindre réclamation à cet égard.
Sur l'absence de bulletins de paie : l'association a toujours délivré à la salariée ses bulletins de paie, dans des conditions normales ; les bulletins des enseignants sont systématiquement déposés dans leurs casiers, sauf lors des vacances d'été où ils leur sont envoyés par courrier ; les bulletins sont édités au plus tard à la fin de la première semaine de chaque mois ; en tout état de cause, le fait d'avoir délivré, une fois, un bulletin de salaire avec un mois de retard ne saurait constituer un motif grave de prise d'acte par la salariée de la rupture de son contrat.
Sur les prétendues sanctions financières prohibées : la salariée a été engagée pour effectuer des modules de 55 minutes ; les temps d'interruption entre 2 cours sont des temps de pause ; durant les temps de pause entre 2 cours les enseignants de l'association vaquent à leurs occupations personnelles et ne sont pas à la disposition de l'école : ces temps de pause ne correspondent pas à du travail effectif et n'ont pas à être rémunérés.
Sur le reproche d'avoir filmé la salariée pendant les cours : cette méthode permettait à des étudiants qui ne pouvaient pas se déplacer de suivre les cours en direct ou, plus rarement, en léger différé ; l'association n'a jamais imposé à la salariée d'être filmée pendant ses cours, sans son consentement ; elle était non seulement consentante mais ravie de ses prestations télévisuelles ; lors de l'année scolaire 2011-2012 elle a refusé d'être filmée pour qu'un étudiant blessé puisse suivre son cours en direct sur Internet : l'association ne l'a plus jamais filmée ; l'association ne conserve aucun film et n'avait pas de déclaration à faire à la CNIL.
Sur la demande de requalification du contrat en contrat à durée indéterminée à temps complet : l'association soutient que la salariée connaissait à l'avance ses horaires de travail ; son contrat de travail prévoyait que son volume horaire serait fixé chaque année lors de chaque rentrée scolaire ; l'association a toujours communiqué au début de chaque année scolaire le volume horaire et les jours et heures de cours ; les emplois du temps sont faits en fonction des disponibilités de chaque enseignant ; l'emploi du temps de la salariée était sensiblement le même chaque année, sauf en ce qui concerne l'année scolaire 2010-2011 ; son emploi du temps était organisé en fonction des heures de cours dispensées dans les autres établissements où elle intervenait ; elle a été payée en fonction du nombre d'heures réalisées.
Pour l'enseignement dispensé par la salariée au sein de l'association, un temps complet correspond à 864 heures de cours payés, conformément à l'article 4.4.6 de la convention collective, alors qu'elle n'hésite pas à calculer les rappels de salaire sur la base de 1600 heures de cours par an.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
L'appel, interjeté dans les formes et délais prescrits par la loi, sera déclaré recevable en la forme.
Sur la prise d'acte :
Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués, dont la charge de la preuve repose sur le salarié qui les invoque, suffisamment graves et rendant impossible la poursuite des relations contractuelles, la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission.
Mme [O] a pris acte de la rupture de son contrat de travail par courrier du 3 octobre 2012 pour plusieurs motifs, exposés dans les 4 pages de ce courrier.
1) - En premier lieu, elle fait grief au directeur de l'établissement de n'avoir pas été en mesure de lui préciser lors de la réunion du 7 septembre son emploi du temps à venir, les cours et les sections dans lesquels elle devait intervenir, ni son volume horaire, même approximatif, et, à 24 heures de la rentrée des licences et Masters, de n'avoir toujours rien reçu au 3 octobre alors même qu'elle a fait parvenir ses disponibilités le 13 septembre 2012 faisant état d'un volume horaire libre de 399 heures.
Sur le planning pour la rentrée scolaire 2012/2013 :
La salariée a été invitée à la réunion de pré-rentrée fixée au vendredi 7 septembre (à 10 h 30) par courriel du 31 août 2012, qui mentionnait également que les rentrées des étudiants étaient le lundi 10 septembre, avec un début des cours le mardi 11 septembre pour les BTS 2°, le lundi 24 septembre, avec un début des cours le mardi 25 septembre pour les BTS 1°, et le jeudi 4 octobre, avec un début le cours ce jour-là l'après-midi, pour les FEDE-DCG (pièce 13).
Par courriel du 7 septembre (à 17 h 43) Mme [O], et ses collègues, étaient informés que la direction de l'établissement venait d'apprendre que [P] [B] n'était plus disponible le lundi après-midi, que les emplois du temps distribués étaient caducs et qu'ils seraient remplacés dans la journée de lundi (pièce 11).
Mme [O] a communiqué à l'employeur, par courriel du 13 septembre 2012, ses disponibilités pour les jeudi et vendredi pour l'année scolaire à venir, soit un total de 399 heures (pièce 10).
Puis, en réponse au courriel du directeur du 2 octobre (pièce 9), par courriel du 3 octobre elle a précisé ses disponibilités pour certains lundi et mardi pour le mois d'octobre, novembre et décembre, afin de dispenser certains cours (2 heures de droit) de son collègue [Q] [X], licencié. Elle conclut ce même courriel en ces termes « pour les lundi et mardi de l'année 2013, il me reste aussi des disponibilités soit en demi-journée, soit en journée pleine, dont je pourrais te faire part en temps utiles ». (Pièce 8)
Par courriel du 4 octobre 2012 (16 h 32) l'employeur lui a communiqué son emploi du temps du vendredi 5 octobre au vendredi 26 octobre (pièce 7).
Mais, la salariée a pris acte de la rupture de son contrat de travail par courrier expédié le 3 octobre 2012. L'expédition de ce courrier manifeste la volonté unilatérale de la salariée de rompre les relations contractuelles et cette décision entraîne la cessation immédiate et irrévocable du contrat de travail.
Or, en écrivant à l'employeur quelles étaient ses disponibilités pour les mois d'octobre, novembre et décembre 2012, ainsi que pour l'année 2013, tout en n'étant pas encore en possession de son emploi du temps, c'est que la salariée considérait que l'absence de son emploi du temps ne rendait pas impossible la poursuite du contrat, puisque son information sur ses disponibilités couvrait la totalité de l'année scolaire, de sorte que le fait d'invoquer, dans un autre courrier mais au même moment, cette même absence ne peut caractériser un fait rendant impossible la poursuite du contrat et justifiant sa cessation immédiate.
2) ' à ce premier grief, Mme [O] ajoute qu'elle peut « justifier de plusieurs manquements suffisamment graves de l'IEC, empêchant la poursuite de (son) contrat de travail ».
2- a) - Ainsi, elle fait état de ce que lors de la réunion de pré-rentrée du 5 septembre 2011 les enseignants ont été mis devant le fait accompli qu'il y aurait une diminution du volume horaire, sans information préalable, diminution très importante à l'origine d'une baisse conséquente du salaire ; elle considère qu'il s'agit d'une modification substantielle du contrat de travail qui aurait mérité une information en lettre recommandée avec avis de réception.
Mme [O] fait état d'une diminution du volume horaire des enseignants, mis devant le fait accompli, et considère qu'il s'agit d'une modification substantielle du contrat de travail.
Mais, dans un litige qui l'oppose à son employeur et qui ne peut porter que sur des différends et litiges individuels nés à l'occasion de l'exécution de son contrat de travail, elle n'a pas vocation à plaider dans la présente instance les litiges et intérêts personnels des autres salariés, de sorte que ne doit être examinée que la situation de Mme [O].
Pour l'année scolaire 2012/2013, l'association a fermé des formations de BTS, dont notamment le BTS notariat dans lequel Mme [O] intervenait.
Cette fermeture est intervenue en raison d'effectifs insuffisants.
Mais, alors que la salariée prétend que les enseignants n'ont été informés que lors de la réunion de pré-rentrée du 5 septembre 2011, et ont ainsi été mis devant le fait accompli, il ressort du courrier adressé aux enseignants le 15 juin 2012 (pièce 17 de la salariée) que le directeur de l'établissement, a rappelé que l'année écoulée avait été difficile, notamment sur le plan financier en raison de la chute des effectifs, précisant : « actuellement, nous avons très peu de demandes en BTS tourisme et BTS notariat. Il y a, à 40 km de Pau, 2 établissements gratuits ou quasi gratuits qui offrent les mêmes formations. Nous n'ouvrirons pas ces sections à la rentrée 2012 » (en caractères gras dans le courrier).
Puis, lors de la réunion de sortie du 20 juillet 2012, à laquelle la salariée a été invitée par courriel du 13 juillet auquel elle a répondu qu'elle ne pourrait participer mais souhaitait recevoir le compte rendu, le directeur a notamment indiqué « pour la rentrée prochaine, sauf arrivée massive de dernière minute, nous sommes contraints à ne pas ouvrir les sections AGTL et notariat. La validation définitive de ses décisions sera effective fin août » (compte rendu de la réunion-pièce 12 de la salariée).
Mme [O] ne peut donc pas sérieusement soutenir avoir été mise devant le fait accompli lors de la réunion du 5 septembre 2011, d'autant qu'elle reconnaît dans ses conclusions écrites que la fermeture du module notariat était annoncée depuis juin 2012 (conclusions page 7).
La suppression de ces formations pouvait entraîner pour la salariée une perte de 110 heures au cours de l'année scolaire 2012/2013.
Du fait du licenciement de l'un de ses collègues (M. [X]), il lui a été proposé la totalité des heures de cours que celui-ci assurait, soit un volume de 200 heures pour l'année.
Mme [O] fait valoir que la fermeture du BTS notariat a entraîné pour elle la suppression de 11 heures de cours par semaine, qu'elle n'avait pas les compétences pour réaliser les 200 heures de cours de son collègue, car elle est enseignante en droit et non en marketing, management et économie, n'ayant pas les habilitations et compétences pour ces domaines-là, la partie droit ne représentant que 46 heures de cours.
L'employeur réplique que Mme [O] a dispensé des cours de marketing bancaire pendant 2 ans, ainsi que du marketing au niveau BTS, des cours de management des ressources humaines et des organisations au niveau Master, des cours de management opérationnel au niveau licence et produit, pour en justifier, ses emplois du temps pour l'année scolaire 2010/2011 (pièces 42 et 43).
Mme [O] considère que les pièces produites « sont mensongères car elles correspondent aux matières dispensées pour les diplômes FEDE non reconnus au niveau étatique et ne nécessitant pas d'habilitation par le rectorat comme l'exige le diplôme BTS précisément proposé », sans cependant étayer cette allégation, ni a fortiori la prouver.
Il convient de constater qu'en acceptant les 46 heures de cours de droit, à raison de 2 heures par semaine (sa réponse par courriel du 3 octobre 2012), la diminution de son volume horaire aurait été ramenée à 64 heures (110 - 46).
L'appréciation de la diminution ou non du volume horaire, et les conséquences susceptibles d'en découler sur les relations contractuelles, ne peut se faire que par comparaison au volume horaire contractuel.
La salariée produit 7 tableaux comparatifs pour les années 2006 à 2012, faisant apparaître, pour chaque mois, le montant du salaire payé, le nombre d'heures d'enseignement dispensées dans les différents types d'enseignements (Masters, licences et BTS, mémoires et thèses, autres), le total des heures travaillées, desquels il ressort :
Pour l'année 2006, d'octobre à décembre : un total d'heures travaillées de 78,88 heures pour un total de salaire de 1 295,04 euros.
Année 2007 : 333,84 heures, soit une moyenne de 15,17 heures par semaine, pour un total de salaire de 6 683,72 euros.
Année 2008 : 326,99 heures, soit une moyenne de 14,89 heures par semaine, pour un total de salaire de 6 958,41 euros.
Année 2009 : 326,24 heures, soit une moyenne de 14,82 heures par semaine, pour un total de salaire de 7 105,13 euros.
Année 2010 : 409,66 heures, soit une moyenne de 18,62 heures par semaine, pour un total de salaire de 8 699,45 euros.
Année 2011 : 373,89 heures, soit une moyenne de 16,99 heures par semaine, pour un total de salaire de 8 580,23 euros.
Année 2012 : le tableau est incomplet, renseigné pour le mois de janvier à juillet, sans indication du total des heures travaillées, de la moyenne hebdomadaire et du montant total des salaires payés.
Mais, s'agissant d'enseignements dispensés dans le cadre de la formation initiale ou de la formation continue, dont le cycle est calqué sur l'année scolaire, il paraît plus pertinent d'établir la comparaison non pas entre les années civiles mais entre les années scolaires, soit du mois de septembre à juin inclus, pour le calcul du nombre d'heures travaillées, de septembre à juillet pour le calcul du salaire payé, incluant les congés payés en juillet.
Ainsi :
Année scolaire 2006/2007 : 225,79 heures travaillées pour un salaire total de 4 165,69 euros.
Année scolaire 2007/2008 : 372,42 heures pour un salaire total de 7 977,86 euros.
Année scolaire 2008/2009 : 325,75 heures pour un salaire total de 6 955 euros.
Année scolaire 2009/2010 : 315,48 heures pour un salaire total de 6 995,55 euros.
Année scolaire 2010/2011 : 501,97 heures pour un salaire total de 10 848,95 euros.
Année scolaire 2011/2012 : 326,93 heures pour un salaire total de 7 549,42 euros.
Il peut ainsi être observé une variation du nombre d'heures totales travaillées par année scolaire.
Cette variation horaire est prévue par le contrat de travail qui stipule (article 4 du contrat à durée déterminée, ainsi que du contrat à durée indéterminée du 7 novembre 2007) :
« Mme [O] est engagée pour un horaire hebdomadaire et annuel défini dans la fiche jointe en annexe selon un calendrier également joint en annexe. La fiche et le calendrier sont valables pour l'année scolaire en cours. Il en est édité de nouveaux chaque année en fonction de l'emploi du temps de chaque enseignant ou formateur. Cet emploi du temps peut varier d'une année sur l'autre selon le niveau des effectifs et des créations ou suppression de sections ou de formations. ».
Cette variation horaire, ou plus exactement cette variabilité, est également prévue par la convention collective nationale de l'enseignement privé hors contrat du 27 novembre 2007, qui stipule notamment que pour les contrats à temps partiel à durée indéterminée ou déterminée, la répartition des heures de travail pour les enseignants peut être actualisée chaque année par avenant au contrat (article 3.3.4).
Le principe d'une variation du nombre d'heures selon les années scolaires, est conforme au contrat de travail et à la convention collective.
Enfin, cette variation est également une conséquence des disponibilités de la salariée, qu'elle portait à la connaissance de l'employeur pour l'établissement de ces plannings.
Mais, ce qui importe, c'est les conditions dans lesquelles cette variation est portée à la connaissance de la salariée.
Mme [O] soutient que l'employeur a violé les articles 11 et 11.1 de la convention collective, puisqu'il communiquait les plannings non pas au mois de juin ou juillet précédant la rentrée scolaire, mais en octobre voire novembre de l'année scolaire en cours, soit au moment de la rentrée effective, voire après.
Mais, ainsi que le relève l'employeur, les articles 11 et 11.1 de la convention collective visés par la salariée, sont issus de l'accord du 23 juin 2014, étendu par arrêté du 13 novembre 2014 (JO du 28 novembre) applicable seulement à compter de sa date d'extension, de sorte qu'il ne peut être reproché à l'association de n'avoir pas respecté en 2012 et antérieurement, des textes qui n'existaient pas encore.
Les dispositions de la convention collective applicables au cas d'espèce, stipulent notamment
(article 3.3.1) que tout contrat est écrit et doit indiquer notamment la durée du travail et les plages d'intervention en cas de travail à temps partiel ainsi que les dispositions particulières précisées à l'article 3.3.4, lequel mentionne :
« Le contrat de travail à temps partiel peut être conclu pour une durée indéterminée ou déterminée ; il est obligatoirement écrit et doit comporter outre les mentions prévues ci-dessus :
1° La durée hebdomadaire ou mensuelle prévue ainsi que la durée annuelle de travail et la durée hebdomadaire moyenne s'il y a modulation. Dans ce cas, le contrat doit prévoir les modalités de calcul de la rémunération telles qu'elles sont définies au titre VII par dérogation aux articles L. 143-2 et L. 144-2 du code du travail et préciser si le salarié accepte le lissage de son salaire sur l'année de référence.
2° La répartition des heures de travail :
# pour les enseignants : la répartition des heures d'activité de cours qui peut être actualisée chaque année par avenant au contrat.
(')
A la demande de l'employeur, le salarié doit justifier des obligations suivantes :
# l'activité fixée chez un autre employeur à la même période ;
# une activité professionnelle non salariée.
Dans ces cas, la justification de ses obligations doit être faite 45 jours avant la rentrée scolaire ou universitaire pour permettre la réalisation des emplois du temps. ».
L'article 4.4.3 stipule que, pour les salariés à employeurs multiples, « Avant la rentrée scolaire, l'employeur doit recueillir les voeux de l'enseignant à temps partiel afin de lui faciliter dans la mesure du possible un complément horaire dans une autre entreprise. ».
Enfin, l'article 5 du contrat de travail précise que « lorsque survient l'une des circonstances autorisant une nouvelle répartition, les conditions de cette modification seront établies 7 jours au moins avant la date à laquelle la modification doit prendre effet sauf accord contraire des parties. ».
En l'espèce, il est justifié de l'établissement de l'annexe prévue au contrat de travail pour les années 2006/2007 et 2007/2008, puis, pour les années postérieures de la communication à la salariée, par remise en main propre contre décharge (exemple, pour l'année 2011/2012 - pièce 11 de l'employeur), des exemplaires de son emploi du temps, valant avenant au contrat.
Le fait que l'employeur remettait tardivement les plannings, eu égard à l'article 5 du contrat de travail, doit être rapporté, pour être apprécié, au retard que la salariée mettait elle-même à communiquer ses disponibilités puisqu'il n'est pas établi qu'elle ne le faisait pas dans les délais prévus par la convention collective, soit 45 jours avant la rentrée scolaire, en tout cas pour l'année scolaire 2012/2013 puisqu'elle ne les a communiquées que le 13 septembre 2012 (pièce 10).
En tout état de cause, ces retards n'emportent pas nécessairement, en eux-mêmes et à eux seuls, de conséquences sur les relations contractuelles dès lors que chacune des parties acceptait les modifications apportées.
La comparaison du volume horaire pour l'année scolaire 2012/2013 doit être faite avec l'année scolaire 2011/2012, soit 326,93 heures, de sorte que les heures qui lui auraient été confiées étaient de 262,93 heures (326,93-64).
Mais, s'il s'agit bien d'une diminution des heures de travail qui modifie les conditions contractuelles soumises à l'accord préalable de la salariée, qui n'est donc pas dans l'obligation d'accepter cette modification, la proposition par l'employeur de cette modification ne constitue pas davantage une faute justifiant que la salariée puisse prendre acte de la rupture des relations contractuelles aux torts de l'employeur pour ce motif.
En effet, cette proposition est demeurée au stade de la proposition puisque précisément la salariée a rompu les relations contractuelles, sans avoir été par conséquent dans l'obligation d'effectuer un horaire de travail sans son accord.
2- b) ' Mme [O] invoque également le fait que les enseignants ont été avertis, de manière informelle par les étudiants, que certaines matières n'étaient plus assurées en cours magistraux, mais en « e-learning », d'où une perte « abyssale » des volumes horaires, et elle se demande si le contrat de travail prévoyait une telle modification unilatérale et souveraine.
Aucun élément probant n'est produit à l'appui de ce grief, et en outre, la perte « abyssale » des volumes horaires invoquée n'est pas établie, en tout cas pas au préjudice de Mme [O].
En effet, le fait que le « carnet du professeur » mentionne que « le cours est un face-à-face au cours duquel l'enseignant transmet un savoir. Ce savoir était, jadis, l'objet d'une transmission magistrale. Avec les moyens modernes d'information, cette transmission doit évoluer. Le récepteur ne doit plus être passif mais doit réagir à la nouvelle information. Le travail de l'enseignant doit être plus anticipatif pour approfondir pendant le cours proprement dit à partir de l'information basique. En conséquence, il va devenir rapidement nécessaire de numériser les cours de l'enseignant pour que ceux-ci soient disponibles à l'avance (de préférence sur Internet) et que l'étudiant soit un apprenti réactif et non plus un zombie gratteur », d'une part démontre que cette information n'a pas été donnée de manière informelle par les étudiants, mais est consignée dans le « carnet du professeur », par définition, destiné à celui-ci, et d'autre part, ne démontre pas, ni que le fait de modifier les méthodes d'enseignement supprime tous les cours magistraux, ni que ces nouvelles méthodes se traduiraient par une perte des volumes horaires des enseignants, ni spécifiquement concernant Mme [O].
2- c ) - Elle fait encore état d'une banalisation d'une semaine (du 5 au 9 mars) sans cours.
Ce grief n'est pas davantage étayé, ni a fortiori démontré, en tout état de cause il ne serait pas, en lui-même et à lui seul de nature à justifier la rupture du contrat 8 mois plus tard.
2- d) - Elle considère comme constitutif d'une « escroquerie » le fait de faire établir par les étudiants dès le mois d'octobre 2011 jusqu'à la fin 2012 leurs fiches de présence, en leur faisant changer 3 fois de stylos et dénonce une désorganisation sans précédent et des pratiques illégales : mélange d'étudiants dans un même cours pour des raisons d'économie.
L'établissement de fiches de présence par les étudiants dès le mois d'octobre 2011, pour plusieurs mois, la mauvaise organisation de l'école ou la facturation de cours non assurés, sont étayés par plusieurs attestations d'étudiants versées aux débats dont celles de [K] [M], de [V] [T], de [W] [Q], de [X] [A], de [U] [S], de [B] [C], de [J] [N], de [Y] [Z], de [I] [V].
Mais, il s'agit-là de faits et de comportements qui ne concernent pas directement Mme [O], qui ne sont donc pas pertinents pour juger le litige qui l'oppose à son employeur et dont la qualification, en tout état de cause, n'est pas de la compétence de la Cour saisie, non pas d'une infraction pénale, mais d'un différend élevé à l'occasion des relations contractuelles entre une salariée et son employeur.
2- e) - Mme [O] se plaint du non-paiement à date fixe, des heures systématiquement oubliées et non rémunérées, de la distribution des bulletins de salaire avec un retard considérable.
Elle justifie que par courriels du 31 janvier 2012 elle a réclamé son bulletin de salaire du mois de décembre 2011 et du 7 juin 2012 ses bulletins de salaire des mois d'avril et mai 2012 (pièces 18 et 31), sans qu'il soit cependant prétendu que les salaires eux-mêmes auraient été payés avec retard.
Mais, ces faits ne sont pas suffisamment graves pour justifier, plusieurs mois après, la rupture immédiate et irrévocable du contrat.
3) - Enfin, aux griefs énoncés dans la lettre de prise d'acte de rupture du contrat de travail, la salariée ajoute, par conclusions écrites, le non-paiement de l'intégralité des modules réalisés, arrêtés à 55 minutes de temps de travail effectif.
Mme [O] fait valoir que le « carnet du professeur » indique que « les cours sont constitués de modules de 55 minutes' Les minutes de battements servent à changer de salle ou à préparer les documents pour le module suivant ou à attendre les étudiants en salle de classe' en aucun cas elles ne constituent une pause' ».
Elle en déduit que « c'est bien la preuve écrite que les 5 minutes sont du temps de travail effectif pendant lequel elle restait à la disposition et sous les ordres de son employeur sans pouvoir vaquer à ses obligations personnelles et qu'elles doivent donc être rémunérées », et qu'il s'agit d'une « réduction unilatérale prise par l'employeur au mépris du respect des règles élémentaires applicables par le code du travail au titre des modifications du contrat de travail ».
Aux termes de l'article L. 3121-1 du code du travail, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles.
En outre, la convention collective stipule, concernant l'organisation du travail à temps partiel, que la durée minimale de travail pendant les jours travaillés est fixée à une heure.
Dès lors que les 5 minutes de battements, pour les modules de 55 minutes, servent à changer de salle et à préparer les documents pour le module suivant, cela implique nécessairement que l'enseignant pendant ce laps de temps reste à la disposition de l'employeur, se conforme à ses directives et ne peut vaquer librement à des occupations personnelles, de sorte qu'il s'agit d'un temps de travail effectif qui doit être rémunéré en tant que tel.
Or, il ressort d'une part, des relevés mensuels des heures effectuées par Mme [O], que le total des heures effectuées était calculé sur la base de 55 minutes, et d'autre part, de ses bulletins de salaire qu'elle était payée sur cette même base de 55 minutes, ce qui n'est d'ailleurs pas contesté par l'employeur.
Ainsi, par exemple :
avril 2007 : relevé mensuel = 11,18 ; nombre d'heures payées = 11.
Juin 2007 : relevé mensuel = 20,35 ; nombre d'heures payées = 20,17.
L'employeur fait valoir que les modules de 55 minutes étaient prévus dans la fiche de la salariée du 7 novembre 2007.
Mais, cette prévision n'est pas susceptible de changer la nature des 5 minutes de battement au cours desquelles la salariée restait à la disposition de l'employeur, ni faire obstacle à la reconnaissance de ces 5 minutes comme étant du temps de travail effectif.
Ce manquement de l'employeur à une obligation légale et conventionnelle, de manière constante et pendant plusieurs années, avec notamment pour effet une incidence importante sur la rémunération de la salariée, constitue un fait suffisamment grave justifiant la rupture des relations contractuelles aux torts de l'employeur qui, par conséquent, produira les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
En outre, il convient de faire droit à la demande de rappel de salaire sur ce chef de demande.
L'association fait valoir que la salariée n'a pas repris sa demande de paiement de la somme de la somme de 3 710,65 euros à titre de rappel de salaire dans son dispositif.
Mais, il convient de relever que dans son dispositif, la salariée demande la condamnation de l'employeur à lui payer la somme de 173 671,37 euros à titre de rappel de salaire, et qu'au vu du corps de ses conclusions écrites, cette somme correspond à 169 960,72 euros réclamés au titre de la requalification du temps partiel en temps complet, et à la somme de 3 710,65 euros pour obtenir le total repris dans le dispositif, de sorte que cette demande est régulièrement formulée.
L'association sera donc condamnée à payer à Mme [O] la somme de 3 710,65 euros au titre du rappel de salaire.
Sur la demande de requalification du temps partiel en temps complet :
Mme [O] soutient qu'on ne lui a jamais proposé la régularisation de son contrat à durée indéterminée en bonne et due forme avec un contenu précis de ses fonctions, de sa mission, de ses horaires et de sa rémunération, qu'elle était informée le jour pour le lendemain de son planning ou des modifications apportées, qu'aucune base d'heures ou de volume d'horaires n'était fixée de sorte qu'elle se trouvait dans une totale incapacité de pouvoir s'organiser, qu'elle n'a jamais eu connaissance de la durée exacte de son travail en l'absence de tout planning communiqué et se trouvait dans l'impossibilité de connaître son rythme de travail, alors qu'elle a toujours produit ses disponibilités 45 jours avant le début théorique de ses cours.
Mais, ainsi qu'il a été dit précédemment, le contrat de travail prévoyait, et ce conformément à la convention collective, la variabilité du temps de travail d'une année sur l'autre, selon le niveau des effectifs et les créations ou suppressions de sections ou de formations, que l'emploi du temps était communiqué à la salariée après communication par elle-même de ses disponibilités, qu'en fait elle a bien été destinataire chaque début d'année scolaire d'un planning, conforme à ses disponibilités, plannings que finalement elle a acceptés, à l'exception de la dernière rentrée scolaire où son refus du planning proposé l'a conduite à vouloir rompre le contrat, décision qui, si elle n'a pas été jugée comme justifiant une rupture aux torts de l'employeur, a cependant démontré que la répartition de ses horaires de travail était portée à sa connaissance, de sorte qu'il est établi qu'elle n'était pas dans l'impossibilité de connaître son rythme de travail.
Par conséquent, Mme [O] sera déboutée de sa demande de requalification du contrat à temps partiel en contrat à temps complet.
Sur le préjudice moral :
Mme [O] soutient qu'elle a été victime des agissements de l'association : fermeture des salles dans un but de surveillance ; victime de man'uvre et agissements négatifs de la part du personnel administratif ; agissements du personnel négatif à son encontre ; victime de harcèlement de la part du personnel administratif ; appel téléphonique du secrétariat pour vérifier l'heure de ses cours ; remarques et mots « fielleux mis discrètement dans les casiers, mots non signés et non datés mais dont la teneur est aussi injustifiée que lamentable » ; des fermetures de classes intempestives et injustifiées, des coupures de chauffage en pleine période de froid, la fermeture d'accès des couloirs de façon à contraindre à passer par un local technique afin d'être dans l'axe visuel du secrétariat, fermeture de la cuisine et wc mis à disposition des enseignants.
Elle ne précise ni la qualification, ni le fondement juridique de sa demande au titre du préjudice moral, qu'il convient donc d'interpréter comme la demande de réparation d'un préjudice résultant de la rupture du contrat de travail, mais distinct de celui causé par la rupture et réparé par l'octroi de dommages-intérêts.
À ce titre, Mme [O] produit plusieurs attestations.
Dans son attestation du 26 octobre 2012, M. [K] [M], étudiant, écrit notamment : « un lundi matin, un 13 février 2012, Mme [O] qui était ma professeure de droit notarial n'a pas utilisé une salle du premier étage où nous avions cours tous les lundis matin, sans aucune raison, de façon à ce que nous soyons au 2e étage près du secrétariat. Toujours ce même jour, nous étions en salle d'informatique et nous étions bloqués dans le couloir de cette salle car la porte donnant vers les escaliers pour sortir était fermée. Nous devions passer par un petit local technique de façon à ce que notre sortie soit vue par le secrétariat car ce petit local donnait sur le secrétariat » ; « je souhaite préciser que Mme [O] a été irréprochable durant l'année scolaire 2011/2012 et fait preuve d'un grand professionnalisme ('). Elle est victime de man'uvre et d'agissements négatifs de la part du personnel administratif orchestré par Madame [D] [F], épouse du directeur de l'IEC et secrétaire. Et le directeur ne met rien en place pour y mettre fin. ».
Dans son attestation du 5 novembre 2012, Mme [V] [T], étudiante, écrit notamment : « Le lundi 13 février 2012, mon enseignante de droit notarial, Mme [O], a été victime d'agissements négatifs de la part du personnel administratif de l'IEC. En effet, l'accès à notre salle de cours ce jour-là, au 1er étage nous a été, pour une raison étrangère, interdite, de façon à nous placer au 2e étage, afin que le secrétariat puisse contrôler et surveiller nos pauses d'interclasses ainsi que l'heure du début et de fin de cours. Depuis la première année, nos cours se déroulaient tout à fait normalement en salle 13 au 1er étage et que rien ne justifiait de nous en déloger. »
Mme [W] [Q] écrit (attestation du 19 novembre 2012) : « J'atteste que Mme [O] a été victime d'agissements négatifs de la part du personnel administratif qui pourrait être assimilé à du harcèlement moral ».
Mme [X] [A] écrit (attestation du 20 novembre 2012 : « Mme [O] a été victime au quotidien d'agissements destinés à lui nuire tels que l'interdiction d'accéder à certaines salles de cours, le chauffage au 1er étage était coupé. Tous les vendredis après-midi afin de nous obliger à aller dans une salle à côté du secrétariat nous obligeant à passer devant et permettant aux secrétaires de vérifier nos horaires. ».
M. [U] [S] (attestation du 22 novembre 2012) confirme que des « cours ont pu être donnés dans des salles non chauffées en hiver dans le but de nous faire changer de salle afin de passer à la vue du secrétariat afin de contrôler nos heures d'entrée et de sortie de cours. ».
Plusieurs des auteurs de ces attestations font également état de ce qu'ils ont été appelés par téléphone pour vérifier leurs heures de cours avec Mme [O].
L'association ne produit aucun élément de nature à contredire ou combattre les attestations produites par la salariée, notamment de nature à démontrer que les différents agissements dénoncés, tels que l'impossibilité, voire l'interdiction, d'accéder aux salles de cours habituelles, ou le fait de devoir faire cours dans des salles privées de chauffage, étaient objectivement fondés et indépendants de la personne de la salariée, de sorte qu'il y a lieu de dire établie l'existence d'un préjudice moral distinct de celui causé par la rupture du contrat de travail, qui sera réparé par l'octroi de la somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts.
Sur la réparation de la rupture des relations contractuelles :
Montant de l'indemnité compensatrice de préavis :
Lors de l'année précédant la rupture, la salariée a perçu la somme brute de 9 648,74 euros, au titre de l'année scolaire 2011/2012, sur les 11 mois rémunérés, et selon les bulletins de salaire produits aux débats.
À cette somme, il convient d'ajouter la somme de 804,70 euros au titre du rappel de salaire correspondant aux 5 minutes de battement entre chaque module, temps de travail effectif mais non rémunéré (9 648,74 x 8,34 %), soit 10 453,44 euros, et une moyenne mensuelle sur 11 mois de rémunération de 950,31 euros bruts.
Le montant de l'indemnité compensatrice de préavis sera donc fixé à la somme de 1 900,62 euros, à laquelle il convient d'ajouter la somme de 190,06 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés afférents.
Montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement :
Mme [O], engagée à compter du 6 octobre 2006, comptait à la date de la rupture du contrat le 3 octobre 2012, 6 ans d'ancienneté.
Le montant de son indemnité conventionnelle de licenciement est donc de 1 140,37 euros [(950,31 x 1/5) x 6], qui sera ramenée à la somme de 1 035 euros, réclamée par la salariée, en application des dispositions de l'article 5 du code de procédure civile.
Montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
Compte tenu de l'ancienneté de la salariée au moment de la rupture du contrat de travail (6 ans) de son âge (40 ans) du montant de son salaire mensuel moyen (950 euros), il convient de fixer à la somme de 6 000 euros le montant des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, étant souligné que la salariée ne produit pas d'élément de nature à justifier l'octroi de la somme sollicitée à ce titre.
En outre, Mme [O] sollicite une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et une indemnité pour rupture abusive du contrat de travail, sans expliciter la distinction entre ces 2 types de réparation, alors qu'un licenciement sans cause réelle et sérieuse est nécessairement un licenciement abusif et que le même préjudice ne peut pas être réparé 2 fois.
L'association sera également condamnée à rembourser aux organismes concernés (pôle emploi) les indemnités de chômage versées à Mme [O] du jour de la rupture du contrat de travail à la date de la présente décision, dans la limite de 6 mois d'indemnités, en application des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail.
Sur les articles 696 et 700 du code de procédure civile :
L'association, partie perdante, sera condamnée aux entiers dépens et à payer à Mme [O] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe,
REÇOIT l'appel formé le 20 juin 2014 par Mme [O] à l'encontre du jugement rendu le 21 mai 2014 par le conseil de prud'hommes de Pau (section activités diverses), et l'appel incident formé par l'Association AFSA,
ORDONNE la jonction des procédures RG 14/02358 et 14/02386 sous le numéro RG 14/02358,
CONFIRME le jugement ce qu'il a débouté Mme [O] de sa demande au titre de la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet et de la demande de rappel de salaire afférente,
INFIRME les autres dispositions, statuant à nouveau et y ajoutant,
DIT que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par Mme [O] aux torts de l'employeur produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
CONDAMNE l'Association Formation Supérieure Adulte - AFSA à payer à Mme [O] :
- 3 710,65 euros bruts (trois mille sept cent dix euros soixante-cinq cents) au titre du rappel de salaire.
- 1 900,62 euros bruts (mille neuf cents euros soixante-deux cents) au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
- 190,06 euros bruts (cent quatre-vingt-dix euros six cents) au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés afférents,
- 1 035 euros nets (mille trente-cinq euros) au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,
- 6 000 euros nets (six mille euros) le montant des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 3 000 euros nets (trois mille euros) à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral,
- 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE l'Association Formation Supérieure Adulte - AFSA à rembourser aux organismes concernés (pôle emploi) les indemnités de chômage versées à Mme [O] du jour de la rupture du contrat de travail à la date de la présente décision, dans la limite de 6 mois d'indemnités, en application des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail,
CONDAMNE l'Association Formation Supérieure Adulte - AFSA aux entiers dépens, de première instance et d'appel.
Arrêt signé par Madame THEATE, Présidente, et par Madame HAUGUEL, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE,LA PRÉSIDENTE,