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09/09/2020 | FRANCE | N°19/00730

France | France, Cour d'appel de Pau, 2ème ch - section 1, 09 septembre 2020, 19/00730


HD/ND



Numéro 20/2187





COUR D'APPEL DE PAU

2ème CH - Section 1







ARRET DU 09/09/2020







Dossier : N° RG 19/00730 - N° Portalis DBVV-V-B7D-HFYZ





Nature affaire :



Demande tendant à obtenir la livraison de la chose ou à faire sanctionner le défaut de livraison















Affaire :



SAS DAX MEUBLES





C/



SAS BESSON CHAUSSURES



























Grosse délivrée le :

à :











RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R E T



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 09 septembre 2020, les parties en ayant été préalablement avisées d...

HD/ND

Numéro 20/2187

COUR D'APPEL DE PAU

2ème CH - Section 1

ARRET DU 09/09/2020

Dossier : N° RG 19/00730 - N° Portalis DBVV-V-B7D-HFYZ

Nature affaire :

Demande tendant à obtenir la livraison de la chose ou à faire sanctionner le défaut de livraison

Affaire :

SAS DAX MEUBLES

C/

SAS BESSON CHAUSSURES

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 09 septembre 2020, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

En application de la loi n°2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19 et de l'article 8 de l'ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale, l'affaire, fixée à l'audience du 30 juin 2020 a été examinée selon la procédure sans audience.

Monsieur Hervé DUPEN, magistrat chargé du rapport, en application de l'article 786 du Code de Procédure Civile et a rendu compte à la Cour composée de :

Madame Valérie SALMERON, Président

Monsieur Hervé DUPEN, Conseiller

Monsieur Marc MAGNON, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTES et INTIMEES :

SAS DAX MEUBLES

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Vincent TORTIGUE de la SELARL TORTIGUE PETIT SORNIQUE, avocat au barreau de BAYONNE

SAS BESSON CHAUSSURES

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Jean Yves RODON de la SCP RODON, avocat au barreau de PAU

Assistée de Me Séverine VALADE, avocat au barreau de PARIS

sur appel de la décision

en date du 20 FEVRIER 2019

rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE DAX

Faits et procédure

La SAS Dax Meubles est propriétaire de locaux commerciaux situés [Adresse 2] qu'elle a donné en location à la SAS Besson Chaussures suivant acte sous seing privé en date du 30 septembre 1994 contenant bail commercial à effet du 1er février 1995 moyennant un loyer annuel de 1'300'000 francs hors taxe et hors charges, indexé chaque année, proportionnellement à la variation de l'indice national du coût de la construction. Par avenant en date du 11 avril 1997, les parties ont convenu d'une modification du loyer ramené à la somme de 1 000 000 francs hors taxe à compter du 1er février 1998, l'indexation par référence à l'indice du coût de la construction étant maintenue à compter de la même date.

Par acte sous seing privé en date du 3 novembre 2004, le bail a été renouvelé rétroactivement au 1er février 2004 pour se terminer le 31 janvier 2013, le loyer étant alors fixé à la somme annuelle de 173'506,56 € hors taxe et hors charges, avec indexation automatique au 1er février de chaque année proportionnellement à la variation de l'indice national du coût de la construction publiée par l'INSEE.

Par exploit extrajudiciaire en date du 22 novembre 2012, la SAS Besson Chaussures a fait signifier à son bailleur une demande de renouvellement de son bail à compter du 1er février 2013 et, le 31 janvier 2013, le conseil de la SAS Dax Meubles lui a indiqué que le renouvellement du bail était accepté moyennant un loyer indexé de 237'885,86 € hors taxe par an.

En réponse, par lettre du 11 février 2013, la SAS Besson Chaussures a offert de régler un loyer annuel de 188'640 € hors taxe, ce qui a été refusé par le bailleur.

Après notification d'un mémoire préalable le 19 janvier 2015, la SAS Besson Chaussures a fait assigner la SAS Dax Meubles devant le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Dax aux fins de faire fixer le montant du loyer du bail renouvelé.

Par jugement du 13 septembre 2017, le juge des loyers commerciaux, après avoir rejeté l'exception d'irrecevabilité soulevée par le bailleur, a ordonné, avant-dire droit sur le montant du loyer renouvelé, une expertise judiciaire confiée à Monsieur [H] [E], avec la mission de décrire les locaux compris dans le bail commercial, leurs caractéristiques, leur superficie et leur état et de fournir tous éléments nécessaires à la détermination de leur valeur locative au 1er février 2013 par référence aux articles R. 145 - 2 et suivants du code de commerce. Le juge a par ailleurs maintenu le loyer provisionnel dû pour la durée de l'instance au montant annuel de 237'687,72 € hors taxe et hors charges à effet du 1er février 2013 jusqu'à la fixation définitive, en réservant les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Après accomplissement de la mesure d'expertise judiciaire et par jugement en date du 20 février 2019, le juge des loyers commerciaux a :

- débouté la SAS Dax Meubles de sa demande en nullité du rapport d'expertise judiciaire,

- fixé le loyer au 1er février 2013 à la somme de 185'061,63 € hors taxe et hors charges,

- dit n'y avoir lieu à condamnation de la SAS Dax Meubles au remboursement du trop-perçu de loyer, avec intérêts au taux légal à compter du 1er février 2013, et des acomptes de chaque échéance trimestrielle,

- condamné la SAS Dax Meubles aux entiers dépens comprenant de droit les frais d'expertise judiciaire ainsi qu'à payer à la SAS Besson Chaussures la somme de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire.

Par déclaration en date du 1er mars 2019, la SAS Dax Meubles a relevé appel du jugement.

Le magistrat chargé de la mise en état, saisi par la SAS Besson Chaussures d'une demande de radiation en application des dispositions de l'article 126 du code de procédure civile au motif que la SAS Dax Meubles n'avait pas exécuté le jugement de première instance dans son intégralité, a rejeté cette demande en condamnant la SAS Besson Chaussures aux dépens de l'incident ainsi qu'au versement d'une indemnité de 1500 €.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 20 mai 2020.

Dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire en application de la loi 2020-290 du 23 mars 2020, la fixation de l'affaire a été maintenue avec procédure de dépôt sans audience au 30 juin 2020 selon les dispositions de l'article 8 de l'ordonnance 2020-304 du 25 mars 2020.

Vu l'acceptation du recours à la procédure sans audience dans le cadre de l'ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020 de Maître Ribeton.en date du 23 juin 2020 et de Maître Rodon en date du 10 juin 2020

Vu la vérification du dépôt des dossiers de plaidoirie par le Premier président de la cour d'appel de Pau pour le dépôt du 30 juin 2020 selon ordonnance d'organisation des services en date du 25 juin 2020 et après communication aux avocats des parties du feuilleton des dossiers retenus et précisant la composition de la cour et la date de délibéré fixée au 9 septembre 2020. 

Prétentions et moyens des parties

Par conclusion d'appel n°3 notifiées le 12 novembre 2019, au contenu desquelles il sera renvoyé pour l'énoncé du détail de l'argumentation, la SAS Dax Meubles formule les demandes suivantes :

- rejeter toutes prétentions de la SAS Besson Chaussures,

- réformer le jugement du 20 février 2019 du juge des loyers commerciaux, en ce qu'il a

$gt; débouté la SAS Dax Meubles de sa demande de nullité du rapport d'expertise judiciaire,

$gt; fixé le loyer au 1er février 2013 à la somme de 185'061,63 € hors taxe et hors charges,

$gt; condamné la SAS Dax Meubles aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise judiciaire,

$gt; condamné la SAS Dax Meubles à payer 3000 € à la SAS Besson Chaussures au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

$gt; débouté la SAS Dax Meubles de sa demande de fixation de la valeur locative des locaux donnés à bail à la SAS Besson Chaussures à compter du 1er février 2013, au loyer plafonné, soit 237'687,72 € hors taxe et hors charges par an,

$gt; débouté la SAS Dax Meubles de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens,

Vu les dispositions des articles 16 et 267 du code de procédure civile,

Vu la violation du principe du contradictoire,

- prononcer la nullité du rapport d'expertise de Monsieur [H] [E]

Subsidiairement, au regard des graves critiques formulées, le rejeter,

- fixer la valeur locative des locaux donnés à bail à la SAS Besson Chaussures à compter du 1er février 2013, au loyer plafonné, soit 237'687,72 € hors taxe et hors charges par an,

Subsidiairement, fixer la valeur locative des locaux donnés à bail à la SAS Besson Chaussures à compter du 1er février 2013 au loyer de 236'721,93 € hors taxe et hors charges par an,

- condamner la SAS Besson Chaussures à payer à la SAS Dax Meubles :

$gt; une indemnité de 15'000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

$gt; les entiers dépens en ce compris les frais d'expertise.

Par conclusions d'intimée contenant appel incident n°2, notifiées le 7 novembre 2019, la SAS Besson Chaussures, au visa des articles L. 145 - 33, L. 145 - 34 et R. 145 - 3 et suivants du code de commerce, ainsi que des articles 276, 699 et 700 du code de procédure civile, formule les demandes suivantes :

- infirmer le jugement du 20 février 2019 en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à condamnation de la SAS Dax Meubles au remboursement du trop-perçu de loyer, avec intérêts au taux légal à compter du 1er février 2013, puis à compter de chaque échéance trimestrielle,

- confirmer le jugement du 20 février 2019 en ce qu'il a :

$gt; débouté la SAS Dax Meubles de sa demande en nullité du rapport d'expertise judiciaire,

$gt; fixé le loyer du bail renouvelé au 1er février 2013 à la somme annuelle de 185'061,63 € hors taxe et hors charges,

$gt; condamné la SAS Dax Meubles aux entiers dépens comprenant de droit les frais d'expertise judiciaire,

Et statuant de nouveau,

- condamner la SAS Dax Meubles au remboursement du trop-perçu de loyer majoré des intérêts au taux légal à compter du 1er février 2013, puis à compter de chaque échéance trimestrielle,

- condamner la SAS Dax Meubles au paiement de la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'appel.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la nullité du rapport d'expertise judiciaire

La SAS Dax Meubles poursuit la nullité du rapport d'expertise judiciaire de Monsieur [H] [E] au motif que celui-ci, après avoir adressé aux parties un pré-rapport le 26 février 2018 leur impartissant un délai jusqu'au mercredi 28 mars 2018 à 10h00 pour la réception des dires, a tenu compte d'observations qui lui ont été adressées par la SAS Besson Chaussures le mardi 27 mars 2018 à 19h39, en lui refusant le délai complémentaire qu'elle avait sollicité pour y répondre, d'une part et, d'autre part, pour obtenir de l'expert qu'il produise une référence invoquée par lui dans son pré-rapport mais non communiquée.

L'article 276 du code de procédure civile dispose que « l'expert doit prendre en considération les observations ou réclamations des parties, et, lorsqu'elles sont écrites, les joindre à son avis si les parties le demandent. Toutefois, lorsque l'expert a fixé aux parties un délai pour formuler leurs observations ou réclamations, il n'est pas tenu de prendre en compte celles qui auraient été faites après l'expiration de ce délai, à moins qu'il n'existe une cause grave et dûment justifiée, auquel cas il en fait rapport au juge ».

En application de ces dispositions, l'inobservation des formalités dont il s'agit, lesquelles ont un caractère substantiel, ne font encourir la nullité des opérations d'expertise qu'à charge pour la partie qui l'invoque de prouver les griefs que lui cause cette irrégularité.

La seule exigence légale qui en résulte est celle du respect du principe de la contradiction au terme duquel l'expert doit mettre chacune des parties en mesure de s'exprimer suffisamment et utilement en réponse à son pré-rapport. Ce faisant, il lui appartient d'impartir des délais raisonnables au-delà desquels les dires peuvent être déclarés irrecevables.

En l'espèce, l'expert a laissé aux parties en présence un mois pour répondre à son pré-rapport diffusé en pièce jointe à un courriel le 26 février 2018 à 9h38, étant observé qu'au cours des opérations d'expertise dont il a été chargé suivant jugement avant-dire droit en date du 13 septembre 2017, celui-ci a été destinataire, sur initiative de la SAS Dax Meubles, de trois dires successivement établis le 23 novembre 2017, le 27 février 2018 ainsi que le 13 mars 2018, d'une part et, d'autre part, sur celle de la SAS Besson Chaussures de deux dires, en date des 6 décembre 2017 et 27 mars 2018. Il a annexé chacun de ses dires à son rapport et il y a répondu de manière précise et circonstanciée.

Par ailleurs, dans son courriel à l'expert en date du jeudi 29 mars 2018 à 12h05, la SAS Besson Chaussures se bornait à solliciter un délai de 15 jours complémentaires pour communiquer sa réponse sur l'incidence invoquée par le preneur sur la prise en charge par lui de la prime d'assurance comme facteur de minoration de la valeur locative et en demandant communication à l'expert des extraits de la Charte de l'Expertise dont il faisait état dans son pré-rapport.

Or, l'expert n'est chargé que d'émettre un avis sur les facteurs permettant de déterminer la valeur locative d'un immeuble, leur incidence sur sa fixation relevant du pouvoir souverain des juges du fond, de sorte que la réponse que la SAS Dax Meubles se proposait d'apporter à une partie du dire de la SAS Besson Chaussures n'exerce pas d'influence déterminante sur l'issue du litige.

Par ailleurs, et s'agissant de la « Charte de l'Expertise Immobilière » encore dénommée « Charte de l'Expertise en Evaluation Immobilière », il s'agit d'un document public et accessible à tous, notamment par une simple recherche sur Internet, et dont l'appelante pouvait directement prendre connaissance sans que l'expert n'ait à lui communiquer l'extrait auquel il se référait dans son pré-rapport.

En tout état de cause, la SAS Dax Meubles n'invoque aucun motif grave et dûment justifié qui nécessitait que l'expert diffère davantage l'achèvement de sa mission et celui-ci n'était pas tenu de répondre au dire communiqué par la SAS Dax Meubles le 5 avril 2018, donc postérieurement au délai qu'il avait fixé aux parties.

En outre, le rapport de Monsieur [E] a été soumis à la libre discussion des parties dans le cadre de la procédure.

En conséquence, le jugement entrepris, en ce qu'il a débouté la SAS Dax Meubles de sa demande en nullité du rapport d'expertise judiciaire, est confirmé.

Sur la fixation du loyer

L'appelant critique le premier juge en ce qu'il s'est fondé sur l'avis émis par l'expert judiciaire, plus particulièrement au titre des surfaces utiles à prendre en considération pour évaluer le loyer du bail renouvelé.

Le bail, dans le cadre de son renouvellement intervenu en 2004 désigne les lieux loués comme consistant en « un local à usage commercial représentant une surface de vente en rez-de-chaussée d'environ 2000 m² », avec la précision que « le preneur reconnaît être informé que la surface de vente autorisée dans les locaux est de 2000 m² », cette mention ayant pour but de mettre le bail en conformité avec la législation fixant un seuil maximal de surface de vente dans les centres commerciaux.

Contrairement à l'affirmation du bailleur, la superficie d'exploitation ainsi mentionnée au bail ne correspond donc pas à la surface réellement consacrée par l'exploitant à ses activités de vente à la clientèle mais inclut nécessairement des parties à vocation administrative ou de réserve.

Dès lors, c'est de manière conforme à la réalité que l'expert judiciaire a déterminé que la surface de vente exploitée est en l'espèce de 1571 m², compte tenu de la transformation en réserve d'une partie antérieurement utilisée en surface de vente. Le rapport établi par un géomètre expert sur l'initiative du bailleur les 19 et 20 juin 2019, au demeurant dans un contexte non contradictoire, n'est pas de nature à remettre en cause l'estimation ainsi faite par l'expert judiciaire puisque le technicien mandaté par l'appelant a déterminé une surface consacrée à la vente de 1576,11 m², donc quasiment identique ou à tout le moins très proche de celle estimée par Monsieur [E]. Enfin, le fait que le rapport d'expertise judiciaire ne contienne pas de photographies détaillées des lieux loués, à la différence de celui établi par le technicien mandaté par la SAS Dax Meubles qui, sur les 29 pages qu'il totalise, présente 21 pages de photographies, n'est pas davantage susceptible de révéler une quelconque carence dans la démonstration objective faite par Monsieur [E].

Par ailleurs, l'expert judiciaire a logiquement pris en compte les préconisations issues de la Charte des Expertises dans son édition de 2012, pour l'application des coefficients de pondération, puisqu'il était saisi d'une question portant sur l'appréciation d'un loyer à compter d'un renouvellement intervenu le 1er février 2013. Il ne pouvait prendre en considération la même charte issue de son édition de mars 2017 comme le soutient à tort le bailleur.

Il ressort de cette charte, dans son édition de 2012 que, pour les surfaces commerciales supérieures à 1500 m², « seules les surfaces de vente sont prises en compte pour leurs mètres carrés réels, les autres surfaces (réserve, locaux techniques, dégagement) étant neutralisées ». La pondération n'a pas vocation à s'appliquer aux surfaces inexploitées contrairement à ce que soutient le bailleur.

Au demeurant, cette analyse menée par l'expert et reprise par le premier juge est conforme aux dispositions de l'article R. 145 - 3 du code de commerce qui prévoit que les caractéristiques des locaux loués doivent s'apprécier par rapport à l'importance des surfaces respectivement affectées à la réception du public, à l'exploitation ou encore à chacune des activités diverses qui sont exercées dans les lieux.

Enfin, l'expert, après avoir noté la modification des facteurs locaux de commercialité qui ne lui a pas paru être notable au sens des articles R. 145 - 2 et suivants du code de commerce, a recherché les loyers commerciaux pratiqués dans le voisinage en adaptant les données ainsi collectées à la surface de vente concernée, supérieure à 1500 m² pour déterminer une valeur locative du local commercial donné à bail par l'appelante à la somme de 197'650 € hors taxe par an, soit 16'467 € mensuellement.

Le loyer du bail renouvelé doit donc être fixé à cette somme.

De celle-ci doit cependant être déduit le montant de l'impôt foncier, en application des dispositions de l'article R. 145 - 8 du code de commerce qui prévoit que « les obligations incombant normalement au bailleur dont celui-ci se serait déchargé sur son locataire sans contrepartie constituent un facteur de diminution de la valeur locative ».

Or, au terme du bail, il appartient au preneur de « rembourser au bailleur... tous les droits, taxes et impôts, de quelque nature qu'ils soient ». Il en résulte que la taxe foncière est bien supportée de manière exorbitante par le preneur qui doit la rembourser au bailleur. Celle-ci doit être déduite du montant du loyer du bail renouvelé à concurrence de la somme de 12'544 €, celle-ci correspondant au montant de la taxe foncière telle qu'elle a été refacturée au preneur par le bailleur en 2013, sans qu'il y ait lieu d'en soustraire la taxe d'enlèvement des ordures ménagères dès lors que la SAS Dax Meubles ne justifie pas du montant de cette taxe spécifique.

En conséquence, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fixé la valeur locative au 1er février 2013 des locaux litigieux à la somme annuelle de 185.061,63 € hors taxe et hors charges, celle-ci étant déterminée après déduction de la taxe foncière.

Sur l'appel incident de la SAS Besson Chaussures

La société intimée a formé un appel incident à l'encontre de la décision déférée en sollicitant la condamnation de la SAS Dax Meubles au remboursement du trop-perçu de loyer qu'elle a réglé sur la base de ce qui lui a été facturé par son bailleur à compter du renouvellement intervenu le 1er février 2013, au regard de la valeur locative estimée à l'issue de l'expertise judiciaire.

Toutefois, c'est à juste titre que le premier juge a rejeté cette demande au motif qu'elle excède la compétence du juge des loyers commerciaux.

En effet, la juridiction de première instance a été saisie sur le fondement de l'article R. 145 - 23 du code de commerce qui donne compétence au président du tribunal de grande instance ou au juge qui le remplace pour statuer sur les contestations relatives à la fixation du prix du bail révisé ou renouvelé. La compétence du juge des loyers commerciaux est donc limitée à la fixation du prix du bail renouvelé sans pouvoir statuer sur une demande en restitution d'un trop-perçu de loyer.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Les entiers dépens de l'instance seront supportés par la SAS Dax Meubles lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

En outre, celle-ci sera condamnée à verser à la partie intimée une indemnité de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, en dernier ressort,

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Dax en date du 20 février 2019,

Condamne la SAS Dax Meubles aux dépens de l'instance et dit que ceux-ci seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

Condamne la SAS Dax Meubles à verser à la SAS Besson Chaussures une indemnité de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Madame Valérie SALMERON, Président, et par Madame Nathalène DENIS, greffière suivant les dispositions de l'article 456 du Code de Procédure Civile.

LA GREFFIÈRE,LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 2ème ch - section 1
Numéro d'arrêt : 19/00730
Date de la décision : 09/09/2020

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-09-09;19.00730 ?
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