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05/05/2022 | FRANCE | N°19/02721

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre sociale, 05 mai 2022, 19/02721


JN/SB



Numéro 22/1797





COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale







ARRÊT DU 05/05/2022







Dossier : N° RG 19/02721 - N° Portalis DBVV-V-B7D-HK33





Nature affaire :



Contestation d'une décision d'un organisme portant sur l'immatriculation, l'affiliation ou un refus de reconnaissance d'un droit









Affaire :



Syndicat INTERCOMMUNAL POUR LA MODERNISATION ET

L' EXPLOITATION DES THERMES DE [Localité 3]>


C/



URSSAF MIDI PYRENEES









Grosse délivrée le

à :





















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au ...

JN/SB

Numéro 22/1797

COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 05/05/2022

Dossier : N° RG 19/02721 - N° Portalis DBVV-V-B7D-HK33

Nature affaire :

Contestation d'une décision d'un organisme portant sur l'immatriculation, l'affiliation ou un refus de reconnaissance d'un droit

Affaire :

Syndicat INTERCOMMUNAL POUR LA MODERNISATION ET

L' EXPLOITATION DES THERMES DE [Localité 3]

C/

URSSAF MIDI PYRENEES

Grosse délivrée le

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 05 Mai 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 17 Mars 2022, devant :

Madame NICOLAS, magistrat chargé du rapport,

assistée de Madame BARRERE, faisant fonction de greffière.

Madame NICOLAS, en application de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame NICOLAS, Présidente

Monsieur LAJOURNADE, Conseiller

Madame SORONDO, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

Syndicat INTERCOMMUNAL POUR LA MODERNISATION ET L' EXPLOITATION DES THERMES DE [Localité 3] représenté par son Président en exercice

[Adresse 4]

[Localité 3]

Comparant en la personne de son directeur assisté de Maître BEAULAC de l'AARPI GARRIGUES BEAULAC ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :

URSSAF MIDI PYRENEES

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Maître CHAMAYOU de la SELARL LAURENCE CHAMAYOU, avocat au barreau de TARBES

sur appel de la décision

en date du 18 JUILLET 2019

rendue par le POLE SOCIAL DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE TARBES

RG numéro : 18/255

FAITS ET PROCÉDURE

Par courrier du 6 mars 2017, réitéré le 30 mars 2017, le Syndicat intercommunal pour la modernisation et l'exploitation des Thermes de [Localité 3], a sollicité l'URSSAF Midi-Pyrénées (l'URSSAF) pour un examen relatif à l'éligibilité de son établissement au bénéfice des « réductions Fillon ».

Par décision du 1er février 2018, après avoir opéré un rappel des éléments fondant sa position, l'URSSAF a rejeté cette demande d'éligibilité au bénéfice de la réduction générale des cotisations et contributions sociales à la charge des employeurs mentionnées à l'article L241-13 du code de la sécurité sociale, considérant notamment que :

- l'établissement était enregistré par l'INSEE, dans la catégorie juridique 7353, en tant qu'établissement public administratif (EPA),

-un tel établissement public administratif, est expressément exclu du bénéfice de cette éligibilité, par la circulaire ministérielle du 1er janvier 2015 (n°DSS/SD5B/2015/99 diffusée par la lettre circulaire n° 2015-00000 26 du 15 juin 2015),

-la catégorie juridique de la structure peut être modifiable, tant au niveau de ses statuts, que du répertoire SIREN ou de l'INSEE .

Le syndicat thermal a contesté cette décision ainsi qu'il suit :

- le 29 mars 2018 devant la commission de recours amiable (CRA) laquelle a, par décision du 4 décembre 2018, rejeté la demande,

- le 12 octobre 2018 devant le tribunal des affaires de sécurité sociale des Hautes-Pyrénées, devenu le pôle social du tribunal de grande instance de Tarbes.

Par jugement du 18 juillet 2019, le pôle social du tribunal de grande instance de Tarbes a :

- débouté le syndicat thermal, de l'ensemble de ses demandes,

- confirmé la décision de la CRA du 4 décembre 2018 et en conséquence la décision de l'URSSAF du 1er février 2018,

- condamné le syndicat thermal :

. aux dépens postérieurs au 1er janvier 2019,

. à verser la somme de 800 € à l'URSSAF Midi-Pyrénées au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappelé les délai et modalités de l'appel.

Cette décision a été notifiée aux parties par lettre recommandée avec accusé de réception. Il n'est pas justifié aux pièces du dossier de la date à laquelle l'établissement en accusé réception.

Le 12 août 2019, par lettre recommandée avec avis de réception adressée au greffe de la cour, le syndicat thermal, par son conseil, en a interjeté appel dans des conditions de régularité qui ne font l'objet d'aucune contestation.

Selon avis de convocation du 3 novembre 2021, contenant calendrier de procédure, les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience du 17 mars 2022, à laquelle elles ont comparu.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon ses dernières conclusions visées par le greffe le 31 juillet 2020, auxquelles il est expressément renvoyé, et reprises oralement à l'audience de plaidoirie, le syndicat intercommunal pour la modernisation et l'exploitation des Thermes de [Localité 3], appelant, conclut à l'infirmation du jugement déféré, et statuant à nouveau, demande à la cour de :

- annuler les décisions de l'URSSAF en date du 1er février 2018 et de la CRA du 4 décembre 2018,

- constater son éligibilité à la réduction générale des cotisations et contributions sociales,

- le juger fondé à faire application de la réduction générale des cotisations et contributions sociales pour les années éligibles et non prescrites,

- ordonner l'exécution provisoire,

- condamner l'URSSAF Midi-Pyrénées à la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Selon ses dernières conclusions visées par le greffe le 17 mars 2022, auxquelles il est expressément renvoyé, et reprises oralement à l'audience de plaidoirie, l'URSSAF Midi-Pyrénées, intimée, conclut à la confirmation du jugement déféré, ainsi qu'à sa condamnation à lui verser la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel.

SUR QUOI LA COUR

L'appelant, au soutien de sa contestation, fait valoir en substance que :

-le premier juge a commis une erreur de droit, et un paralogisme, en le considérant comme un établissement public administratif, au motif qu'il serait répertorié comme tel par l'INSEE, alors même que le premier juge a relevé à bon droit, que le dispositif INSEE et l'inscription au répertoire SIREN, à usage statistique, ne produisaient aucun effet juridique, conformément aux termes de l'article R 123-231 du code de commerce selon lequel : « aucun effet juridique ne s'attache à l'identification ou à la non identification d'une personne inscrite au répertoire. Celle-ci demeure soumise à toute obligation législative, réglementaire ou contractuelle afférente à l'exercice de son activité »,

-l'article L241-13 du code de la sécurité sociale, précise le domaine d'application de la réduction générale des cotisations et contributions sociales, dite « réduction Fillon »,

- sont notamment éligibles à cette réduction, par application combinée des articles L241-13 II et L5424-1, 3) du code de la sécurité sociale, « les salariés relevant des établissements publics à caractère industriel et commercial des collectivités territoriales' »,

- il répond aux 3 critères jurisprudentiels (objet du service, origine des ressources, modalités de fonctionnement du service), permettant de lui attribuer la qualité d'établissement public à caractère industriel et commercial ,

- en cette qualité, il peut prétendre à l'application de la réduction Fillon, telle que le prévoit la combinaison des articles L241-13 II et L5424-1, 3).

L'URSSAF, pour s'y opposer, reprenant pour l'essentiel les termes de son courrier du 1er février 2018, fait valoir en substance que :

- le bénéfice de la réduction Fillon est expréssément exclu pour les EPA,

-or l'appelant est un EPA, dès lors qu'il est inscrit à l'institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) dans la catégorie juridique 7353 correspondant aux EPA, et qu'il a adhéré à titre révocable à l'assurance chômage, alors qu'une telle adhésion, s'agissant des EPIC, ne peut être qu'irrévocable,

-l'éligibilité à la réduction générale est attachée à la qualification juridique de l'établissement public et non à la seule nature de son activité industrielle et commerciale , cette activité industrielle et commerciale n'étant pas contestée.

Sur ce,

Les parties sont contraires, sur le point de savoir si le syndicat thermal appelant, comme il le soutient, est un établissement public industriel et commercial (EPIC), pouvant bénéficier du dispositif dit « Fillon » d'allégement des cotisations sociales patronales, par application des dispositions combinées des articles L241-13 II et L5424-1, 3) du code de la sécurité sociale, ou si au contraire, il s'agit d'un établissement public administratif (EPA), expressément exclu de ce dispositif d'allégement, par le titre Ier du livre VII du code de la sécurité sociale.

Les règles en la matière sont posées ainsi qu'il va être rappelé.

L'article L241-13 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à la cause,(en vigueur du 10 août 2016 au 01 septembre 2018), prévoit notamment :

« I.-Les cotisations à la charge de l'employeur au titre des assurances sociales et des allocations familiales, la contribution mentionnée à l'article L. 834-1 du présent code et la contribution mentionnée au 1° de l'article L. 14-10-4 du code de l'action sociale et des familles ainsi que, dans les conditions mentionnées au VIII du présent article, les cotisations dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles qui sont assises sur les gains et rémunérations inférieurs au salaire minimum de croissance majoré de 60 % font l'objet d'une réduction dégressive.

II.-Cette réduction est appliquée aux gains et rémunérations versés aux salariés au titre desquels l'employeur est soumis à l'obligation édictée par l'article L. 5422-13 du code du travail et aux salariés mentionnés au 3° de l'article L. 5424-1 du même code, à l'exception des gains et rémunérations versés par les particuliers employeurs.

Cette réduction n'est pas applicable aux gains et rémunérations versés par les employeurs relevant des dispositions du titre Ier du livre VII du présent code, à l'exception des employeurs relevant des régimes spéciaux de sécurité sociale des marins, des mines et des clercs et employés de notaires.

(...)»

Les salariés mentionnés au 3° de l'article L. 5424-1 du code du travail, dans sa version applicable à la cause (en vigueur du 1er janvier 2011 au 24 mai 2019) sont notamment « (') les salariés relevant soit des établissements publics à caractère industriel et commercial des collectivités territoriales, (') ».

Par ailleurs, au titre des employeurs relevant des dispositions du titre Ier du livre 7 du code de la sécurité sociale (article R711-1), figurent notamment « les établissements publics de l'État,(...), les établissements publics départementaux et communaux n'ayant pas le caractère industriel ou commercial ».

Il résulte de ces dispositions, conformément à l'analyse des parties, que :

-par l'application de la combinaison des articles L241-13 du code de la sécurité sociale, et L5424-1 du code du travail, les établissements publics à caractère industriel et commercial, peuvent bénéficier des réductions visées par le premier de ces textes,

-par l'application du titre Ier du livre 7 du code de la sécurité sociale, les établissements publics n'ayant pas le caractère industriel ou commercial, ne peuvent pas en bénéficier.

Au cas particulier, les parties s'accordent à reconnaître que la nature juridique du syndicat thermal appelant, s'agissant de sa nature « d'établissement public administratif » (EPA), ou au contraire « d'établissement public à caractère industriel et commercial » (EPIC), n'est définie ni par un texte, ni par ses statuts.

Pour soutenir que le syndicat appelant, serait un établissement public administratif, et ne serait pas un établissement public industriel et commercial, l'URSSAF fait valoir que :

- le répertoire Sirène, répertoire officiel d'immatriculation des entreprises et des établissements, utilise une nomenclature déterminant la catégorie juridique de ceux-ci, définie à partir du texte réglementaire à l'origine de leur création,

-cette nomenclature détermine le statut juridique de la personne morale,

- le syndicat thermal appelant a été enregistré par l'INSEE, dans la catégorie juridique 7353, correspondant à un « établissement public administratif », alors que les établissements publics industriels et commerciaux, sont répertoriés dans les catégories 4110 à 4150,

- en fonction de cette nomenclature, par application et dans les conditions de la lettre circulaire n° 2012-0000063 du 24 mai 2012, les employeurs publics, au titre de leur obligation d'assurer leurs agents contre le risque de privation involontaire d'emploi, peuvent ou non adhérer au régime d'assurance-chômage,

-par application des dispositions de l'article L5424-2 2° du code du travail, les EPIC ne peuvent adhérer au régime d'assurance-chômage qu'à titre irrévocable,

- le syndicat thermal appelant, a bien adhéré au régime d'assurance-chômage, depuis 1994, mais de façon révocable, même si cette adhésion s'est renouvelée par tacite reconduction depuis cette date, alors qu'il aurait dû le faire de façon irrévocable, s'il c'était agi d'un EPIC.

L'analyse de l'URSSAF, ne peut être adoptée par la cour, pour les motifs suivants :

- contrairement à ce qui est soutenu par l'URSSAF, le dispositif INSEE, et l'inscription au répertoire Sirène, à usage statistique, ne produisent aucun effet sur le plan juridique, ainsi qu'il résulte des dispositions de l'article R 123-231 du code de commerce, selon lequel :

« Aucun effet juridique ne s'attache à l'identification ou à la non-identification d'une personne inscrite au répertoire. Celle-ci demeure soumise à toute obligation législative, réglementaire ou contractuelle afférente à l'exercice de son activité. »

D'ailleurs, et en outre :

' il a déjà été rappelé que l'acte fondateur, s'agissant des statuts de l'établissement appelant, ne renvoie nullement à la notion d'établissement public administratif,

'de même, la catégorie juridique 7353, ne correspond pas à un ou « établissement public administratif », mais à un « syndicat intercommunal à vocation unique », défini par l'article L5212-1 du code général des collectivités territoriales, lequel ne renvoie pas davantage à une quelconque nature juridique administrative, par opposition à industrielle et commerciale ,

-l'URSSAF renvoie pour son raisonnement, à l'application de la lettre circulaire n° 2012-0000063 du 24 mai 2012, laquelle n'a aucune valeur réglementaire, et ne s'impose donc pas au juge,

-certes, c'est à juste titre qu'elle soutient que par application des dispositions de l'article L5424-2 2° du code du travail, les EPIC ne peuvent adhérer au régime d'assurance-chômage qu'à titre irrévocable.

De même, l'URSSAF n'est pas contestée, lorsqu'elle soutient que l'appelant a adhéré au régime d'assurance-chômage, en 1994, mais de façon révocable, et renouvelée depuis cette date par tacite reconduction.

En revanche, ce qui est contestable, c'est que l'URSSAF en tire pour conséquence, que l'établissement appelant ne pourrait se prévaloir de la qualité d'EPIC, alors que si tel était son cas, son adhésion au régime d'assurance-chômage devrait être irrévocable.

En effet, il résulte de la lecture de la circulaire ACOSS n° 2012-00000 63 du 24 mai 2012, que l'établissement public adhérant au régime d'assurance-chômage, ne dispose pas de la possibilité de choisir la forme révocable ou irrévocable de son adhésion, puisqu'en effet cette forme est imposée par les dispositions de cette circulaire appliquée par l'organisme de gestion.

En conclusion, il apparaît que:

- la circulaire Acoss impose une adhésion à caractère révocable aux établissements publics administratifs( EPA) adhérant au régime d'assurance-chômage,

- l'établissement appelant, pour cette adhésion, a été considéré par son cocontractant, comme étant un EPA, au seul vu de son identification au répertoire SIREN, pourtant dénuée d'effet juridique, et alors même que ni ses statuts, ni aucun autre élément,ne permet de retenir que l'établissement appelant est un établissement public à caractère administratif,

- dans ces conditions, et par application de la circulaire Acoss par son cocontractant, il ne pouvait lui être proposé de conclure qu'une adhésion à caractère révocable, si bien que dans ces conditions, il n'avait pas la possibilité de conclure une adhésion à caractère irrévocable,

- ainsi, le caractère révocable de cette adhésion, décidé par son cocontractant, découle de l'application de deux paramètres dénués de valeur impérative, à savoir son identification au répertoire SIREN, et l'application par son cocontractant de la circulaire Acoss,

- dans ces conditions, c'est à tort que l'URSSAF soutient que faute d'avoir conclu une adhésion à caractère irrévocable, l'établissement appelant ne pourrait être considéré comme étant un établissement public industriel et commercial (EPIC), alors que c'est l'objet même du rescrit social, par lequel, le 6 mars 2017, l'appelant a demandé à l'URSSAF, le réexamen de sa situation, afin d'éligibilité au bénéfice des réductions décision, étant observé en outre, que nonobstant son caractère révocable, cette adhésion est reconduite de façon tacite, depuis 1994.

Les moyens développés par l'URSSAF, pour conclure à la nature juridique d'EPA et exclure la nature d'EPIC, du syndicat thermal appelant, sont jugés inopérants.

Il convient d'examiner si l'établissement appelant, est comme il le soutient, un établissement à caractère industriel et commercial.

Sur le caractère « industriel et commercial » de l'établissement appelant

Au cas particulier, il a déjà été rappelé que la nature juridique de l'établissement public appelant, n'est définie ni par un texte, ni par ses statuts.

L'appelant n'est pas contesté, puisqu'au contraire l'Urssaf partage son analyse ( page 5 de ses conclusions in fine) lorsqu'il rappelle que par un arrêt du conseil d'État rendu en chambre plénière (CE, 16 novembre 1956, Union syndicale des industries aéronautiques), la nature juridique d'un établissement public, s'apprécie au regard de son objet, de son mode de financement, et de son mode de fonctionnement, et que, pour démontrer sa nature juridique d'établissement public industriel et commercial, il lui appartient de démontrer au titre de ces 3 critères cumulatifs, que :

$gt; son objet correspond à une activité de production et d'échange de biens et de services, susceptible d'être exercée et concurrencée par des entreprises privées (par opposition à un objet visant des opérations d'intérêt général),

$gt;son mode de financement provient principalement des redevances versées par les usagers en contrepartie du service rendu ( au contraire d'un mode de financement abondé majoritairement, par des fonds publics),

$gt;son mode de fonctionnement est comparable à celui d'une entreprise privée (au contraire de modalités de fonctionnement présentant un caractère purement administratif).

1-Sur l'objet du service

Au cas particulier, l'URSSAF ne conteste pas la nature industrielle et commerciale de l'activité exploitée par le syndicat intercommunal des Thermes de [Localité 3], laquelle résulte de même :

- d'un courrier de la Préfecture des Hautes-Pyrénées en date du 1er février 2018, confirmant un courrier antérieur, non produit, mais admis par l'intimée dans ses conclusions,

- d'un courrier du 17 septembre 2013, du directeur départemental des finances publiques, selon lequel « le SIVU des Thermes de [Localité 3] est un établissement public de coopération intercommunal (EPCI) qui exerce une activité commerciale (établissement thermal) », et est assujetti à l'impôt sur les sociétés de plein droit pour l'ensemble de son activité,

- du rapport du 1er août 2018 (cf. paragraphe 3.2 « fiabilité des comptes »), de la chambre régionale des comptes, relatif au contrôle des exercices 2012 et suivants, et qui retient expressément qu'il s'agit d'un « établissement public de coopération intercommunale ayant une activité industrielle et commerciale ».

Il sera rappelé à cet égard que la production de ses statuts, et de ses catalogues de soins et de cures thermales, établissent sans contestation qu'il a pour objet d'assurer la modernisation et l'exploitation des Thermes de [Localité 3], qu'à ce titre, ses prestations n'apparaissent pas différentes de celles d'une entreprise privée de Thermes.

2-Sur le mode de financement et l'origine des ressources

L'appelant soutient que ses ressources proviennent de manière quasi exclusive des redevances payées par les usagers, et renvoie pour en justifier, au rapport d'observations définitives de la chambre régionale des comptes d'Occitanie de 2018, qu'il produit sous sa pièce n° 14, duquel il résulte effectivement (page 32) que :

-les recettes d'exploitation sont essentiellement composées des cures thermales et représentaient en 2016, plus de 80 % du chiffre d'affaires, le reste des recettes comprenant les frais de port facturé, les activités thérapeutiques, et le paiement par les usagers de l'utilisation de la navette mise à la disposition des curistes,

-le subventionnement annuel provenant des communes membres, ne représente que 1,9 % des produits d'exploitation.

3-Sur le mode de fonctionnement

Pour justifier que son mode de fonctionnement est analogue à celui d'une entreprise privée, l'appelant :

-justifie qu'il est soumis aux instructions M 4, s'agissant d'instructions budgétaires applicables aux services publics industriels et commerciaux, par opposition à l'instruction budgétaire et comptable M14, applicable aux communes et aux établissements publics communaux et intercommunaux à caractère administratif,

-n'est pas contesté lorsqu'il soutient, et produit pour en justifier un exemplaire de contrat sous sa pièce n° 16, que l'ensemble du personnel relève de contrats de droit privé, soumis au droit commun du travail, et à l'application de la convention collective nationale du thermalisme du 18 octobre 1999,

-n'est pas davantage contesté, lorsqu'il expose (page 12 de ses écritures) que seul son directeur, lequel incarne juridiquement l'établissement public dissocié de son activité industrielle et commerciale, est un fonctionnaire territorial, soumis à un régime de droit public relevant de la compétence de la juridiction administrative, conformément à la jurisprudence du conseil d'État et du tribunal des conflits relative aux établissements publics industriels et commerciaux, à laquelle il renvoie.

Enfin, il est constant et démontré par les pièces produites, que le SIVU appelant, a la personnalité morale, bénéficie de l'autonomie financière, que son budget est établi sur la base des recettes d'exploitation, qu'il fait l'objet de déclaration TVA et est soumis à l'impôt sur les sociétés.

L'appelant démontre en conséquence qu'il remplit les conditions pour se prévaloir à juste titre de la qualité d'EPIC.

Sa demande d'éligibilité au bénéfice de la réduction générale des cotisations et contributions sociales à la charge des employeurs mentionnées à l'article L241-13 du code de la sécurité sociale est donc fondée et il y sera fait droit, par infirmation du jugement déféré.

Sur les frais irrépétibles et dépens

L'équité commande d'attribuer à l'appelant la somme de 1200 € au titre des frais irrépétibles.

L'URSSAF qui succombe supportera les dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, statuant, publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme le jugement rendu par le pôle social du tribunal de grande instance de Tarbes le 18 juillet 2019,

Et statuant à nouveau,

Annule la décision de l'URSSAF du 1er février 2018,

Juge que le Syndicat Intercommunal pour la modernisation et l'exploitation des Thermes de [Localité 3] est éligible au bénéfice de la réduction générale des cotisations et contributions sociales à la charge des employeurs mentionnées à l'article L241-13 du code de la sécurité sociale,

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne l'URSSAF Midi-Pyrénées à payer au syndicat intercommunal pour la modernisation et l'exploitation des Thermes de [Localité 3], la somme de 1200 €sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et rejette le surplus des demandes à ce titre,

Condamne l'URSSAF Midi-Pyrénées aux dépens postérieurs au 1er janvier 2019.

Arrêt signé par Madame NICOLAS, Présidente, et par Madame LAUBIE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE,LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19/02721
Date de la décision : 05/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-05;19.02721 ?
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