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10/11/2022 | FRANCE | N°20/02361

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre sociale, 10 novembre 2022, 20/02361


PS/EL



Numéro 22/03945





COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale







ARRÊT DU 10/11/2022









Dossier : N° RG 20/02361 - N° Portalis DBVV-V-B7E-HVAL





Nature affaire :



Contestation du motif non économique de la rupture du contrat de travail















Affaire :



S.A.S. CASINO SALIES DE BEARN



C/



[C] [W]












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Grosse délivrée le

à :













RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 10 Novembre 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxièm...

PS/EL

Numéro 22/03945

COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 10/11/2022

Dossier : N° RG 20/02361 - N° Portalis DBVV-V-B7E-HVAL

Nature affaire :

Contestation du motif non économique de la rupture du contrat de travail

Affaire :

S.A.S. CASINO SALIES DE BEARN

C/

[C] [W]

Grosse délivrée le

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 10 Novembre 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 14 Septembre 2022, devant :

Madame CAUTRES-LACHAUD, Président

Madame SORONDO, Conseiller

Mme ESARTE, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

assistées de Madame LAUBIE, Greffière.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

S.A.S. CASINO SALIES DE BEARN

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représenté par Me ETCHEVERRY de la SCP ETCHEVERRY-ETCHEGARAY, avocat au barreau de BAYONNE

INTIME :

Monsieur [C] [W]

né le 11 Juillet 1967 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me DUBOURDIEU, avocat au barreau de PAU

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2021/856 du 12/03/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PAU)

sur appel de la décision

en date du 14 SEPTEMBRE 2020

rendue par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE PAU

RG numéro : 19/00106

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [C] [W] a été embauché le 11 octobre 2004 par la société Casino Salies de Béarn en qualité de sous-chef de cuisine.

À compter du 1er octobre 2005, il a exercé les fonctions de chef de cuisine, en qualité de cadre.

Le 8 janvier 2019, il a été convoqué à un entretien préalable fixé le 18 janvier suivant.

Le 31 janvier 2019, il a été licencié pour faute grave.

Le 18 avril 2019, il a saisi la juridiction prud'homale.

Par jugement du 14 septembre 2020, le conseil de prud'hommes de Pau a notamment':

- dit et jugé abusif le licenciement disciplinaire notifié à M. [W] par la société Casino Salies de Béarn pour être dépourvu de toute cause réelle et sérieuse,

- en conséquence, condamné la société Casino Salies de Béarn à payer a M. [W] les sommes suivantes :

. 7.979.50 € bruts a titre d'indemnité compensatrice de préavis,

. 798 € bruts a titre d'indemnité de congés payés afférentes,

. 9.752.71 € nets a titre d'indemnité légale de licenciement,

- appliqué le barème Macron et condamné la société Casino Salies de Béarn à payer à M. [W] la somme de :

. 29.260 € brute a titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- débouté M. [W], de sa demande a titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article L.4121-1 du code du travail,

- rappelé que l'exécution provisoire en matière prud'homale est de droit pour les remises de documents que l'employeur est tenu de délivrer ainsi que pour les créances salariales ou assimilées dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire (Art R. 1454-28 du code du travail),

- dit qu'il n'y a pas lieu de l'ordonner pour le surplus,

- dit que les sommes allouées à M. [W] porteront intérêt à compter de la date de prononcé du jugement,

- condamné la société Casino Salies de Béarn à rembourser un mois d'indemnité de chômage perçue par M. [W] au titre de Pôle Emploi en application de l'article L. 1235-4 du code du travail,

- condamné la société Casino Salies de Béarn à payer à M. [W] la somme de 800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Le 13 octobre 2020, la société Casino Salies de Béarn a interjeté appel de ce jugement dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas contestées.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par voie électronique le 24 mai 2022, auxquelles il y a lieu de se référer pour l'exposé des faits et des moyens, la société Casino Salies de Béarn demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il :

- a dit que le licenciement de M. [W] était abusif et sans cause réelle et sérieuse,

- l'a condamnée à régler à M. [W] les sommes suivantes :

. 7.979,50 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 798 € bruts au titre des congés payés y afférents,

. 9.752,71 € à titre d'indemnité légale de licenciement,

. 29.260 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- l'a déboutée de sa demande de 3.000 € au titre de l'article 700 code de procédure civile, - l'a condamnée aux entiers dépens de l'instance,

- partant et jugeant à nouveau,

- dire et juger que le licenciement de M. [W] repose bien sur une cause réelle et sérieuse et est fondé en raison de la faute grave commise par le salarié,

- débouter M. [W] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner M. [W] à payer la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [W] aux entiers dépens de l'instance.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par voie électronique le 8 juillet 2022, auxquelles il y a lieu de se référer pour l'exposé des faits et des moyens, M. [C] [W], demande à la cour de':

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a:

. dit et jugé abusif son licenciement disciplinaire pour être dépourvu de toute cause réelle et sérieuse,

. condamné, en conséquence, la société Casino Salies de Béarn à lui payer sommes suivantes':

o 7.979,50 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

o 798 € bruts à titre d'indemnité de congés payes afférentes,

o 9.752,71 € nets à titre d'indemnité légale de licenciement,

o 29.260 € nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur le fondement de l'article L.1235-3 nouveau,

. dit que les sommes qui lui ont été allouées porteront intérêt sous modalités habituelles en la matière,

. condamné la société Casino Salies de Béarn à rembourser un mois d'indemnités de chômage qu'il a perçues au titre de Pôle Emploi en application de l'article L.1235-4 du code du travail,

. condamné la société Casino Salies de Béarn à lui payer la somme de 800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire et juger y avoir lieu à l'application la plus large des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail,

- par voie d'infirmation, condamner la société Casino Salies de Béarn au paiement de la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article L.4121-1 du code du travail,

- condamner la société Casino Salies de Béarn à lui payer la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance y compris les éventuels frais d'exécution forcée.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 16 août 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le licenciement

A) Sur la cause du licenciement

En application de l'article 1235-1 du code du travail, tout licenciement doit être fondé sur une cause réelle, donc établie, objective, exacte et sérieuse, le juge formant sa conviction au vu des éléments soumis par les parties. S'il subsiste un doute, il profite au salarié.

Par ailleurs, le salarié ayant été licencié pour faute grave, il appartient à l'employeur d'établir que la faute commise par le salarié dans l'exécution de son contrat de travail est d'une gravité telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant le préavis.

Par courrier du 31 janvier 2019, qui fixe les limites du litige, le salarié a été licencié aux motifs ci-après': «'(') En qualité de chef de cuisine, vous avez la responsabilité de votre équipe, de sa santé et de sa sécurité. Le 31 décembre vous avez laissé rentrer beaucoup plus tôt que prévu un de vos collaborateurs, à savoir Monsieur [U] à son domicile sans faire remplir la fiche de départ anticipé. Ce alors même que Monsieur [U] venait de consommer de très fortes quantités d'alcool sur le lieu de travail, ce qui est interdit comme le confirme notamment le règlement intérieur de l'entreprise et qu'à l'évidence, il n'était plus en possession de tous ses moyens. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle vous lui avez demandé de rentrer chez lui. Et facteur aggravant, alors même que vous saviez qu'il allait prendre sa voiture. A tel point que faisant l'objet d'un contrôle d'alcoolémie par la gendarmerie nous étions avertis de la situation et qu'à la demande de cette même gendarmerie nous avons dû héberger Monsieur [U] dans notre hôtel afin qu'il puisse retrouver ses esprits. Contrairement à ce que vous avez indiqué au cours de l'entretien, le responsable, Membre du comité de direction en service ce soir-là n'était pas prévenu. Il est irresponsable que vous ayez pris une telle décision qui aurait a mis en cause notre responsabilité et mis en danger la vie d'autrui. Ce d'autant plus que quelques temps auparavant nous vous avions déjà alerté sur ce type de cas. Compte tenu de votre comportement et pour l'ensemble des faits que nous vous reprochons, du trouble occasionné, nous ne pouvons envisager sereinement la poursuite de notre collaboration et n'avons d'autre choix que de procéder à la rupture de votre contrat de travail. Nous sommes par conséquent dans l'obligation de vous notifier par la présente votre licenciement pour faute grave, qui prendra effet dès l'envoi de cette lettre'(...)».

La lecture attentive des pièces du dossier met en évidence que le jour des faits, le 31 décembre 2018, M. [W], qui travaillait dans cette entreprise depuis plus de 13 ans et 12 ans en tant que chef de cuisine, avait en charge de préparer le repas de nouvel an, pour un nombre important de couverts, le salarié évoquant un chiffre, non démenti par l'employeur, de plus de cent couverts.

Pour justifier plus précisément des fonctions du salarié, l'employeur produit une fiche de poste de chef de cuisine, laquelle, contestée par le salarié, n'est pas signée par ce dernier pour être postérieure à son départ. Il s'ensuit que l'employeur ne justifie pas des missions du poste de chef de cuisine. Le salarié s'approprie toutefois dans ses conclusions les missions du chef de cuisine visées dans l'offre d'emploi de l'employeur du 15 février 2019.

Si les pièces au dossier ne permettent pas de connaître le nombre de collègues présents auprès du salarié le soir des faits, les parties s'accordent sur la présence de M. [U], recruté en qualité de second chef de cuisine, à compter du 17 décembre 2018 en contrat à durée indéterminée et en période d'essai de trois mois.

Le salarié justifie qu'il a alerté, dès le mercredi 26 décembre 2018, par mail sa hiérarchie et plus particulièrement Mme [T] [B], directrice du casino, de la consommation d'alcool par M. [U] sur le lieu de travail, laquelle portait en outre atteinte à la qualité de son travail, le salarié de préciser dans son mail': «'et je pense que nous n'avons pas d'autre choix que de mettre un terme à sa période d'essai'».

Par retour de mail, Mme [T] [B] a indiqué qu'elle prendrait la décision de garder ou non M. [U] dans la semaine et contrairement à ce qu'il soutient, l'employeur ne justifie pas avoir sollicité de M. [W] de faire en sorte de se ménager une preuve en cas de nouvelle alcoolisation.

M. [W] soutient sans être contredit s'être rendu en suivant au bureau de cette dernière pour parler expressément de cette situation, entretien qui n'a pas permis au salarié d'obtenir le départ de M. [U].

Le 31 décembre 2018, tant l'employeur que le salarié s'accordent sur l'état d'ébriété avancé de M. [U] pendant son service. Cependant, les parties sont contraires sur la gestion de cette situation tant par le salarié que par l'employeur.

D'une part, le salarié relève avoir, compte tenu de cet état d'ébriété, demandé à M. [U] de quitter uniquement la cuisine, sans pour autant lui demander de quitter l'entreprise. Aux termes de son mail du 6 février 2019 et d'un courrier du 13 février 2019, que l'employeur ne conteste pas avoir reçu, le salarié précise en avoir informé M. [V] [S], membre du comité directeur en poste ce soir là, ainsi que Mme [B], et précise que cette dernière était passée en cuisine, avait constaté l'état d'ébriété de M. [U] et était partie sans avoir pris de mesure. Le salarié précise que pris par la préparation du repas du réveillon, il n'a pas pu constater que M. [U] était de son propre chef parti de l'entreprise.

L'employeur relève quant à lui dans la lettre de licenciement que le salarié a demandé à M. [U] de quitter l'établissement, ce sans lui faire remplir la fiche de départ anticipé.

La seule pièce produite est l'attestation ci-après de M. [S]':

«'Primo, je n'ai jamais reçu aucune remarque du personnel de cuisine concernant un comportement dit «'anormal'» de M. [U] [R], second de cuisine.

Secundo': j'ai remarqué moi-même une lenteur inhabituelle pour un réveillon du 31 décembre concernant M. [U] et en avoir averti la direction.

Tercio': j'ai été surpris d'apprendre le départ de l'établissement de M. [U] par l'appel téléphonique des gendarmes qui l'ont arrêté à [Localité 6] à [Localité 6] lors d'un contrôle. Je n'étais pas au courant de sa mise à l'écart dans le vestiaire, ni de son départ. Je n'ai jamais vu M. [U] consommer de l'alcool.'»

Il est à douter de la sincérité de ce témoin qui dit avoir vu M. [U] et avoir constaté seulement sa lenteur et non son état d'ébriété pourtant avancé. Pour autant, il déclare avoir informé la direction, laquelle, préalablement avisée par M. [W] de l'alcoolisme de M. [U], n'a pris aucune mesure, laissant le salarié gérer cette situation seul. Surtout, ni cette attestation ni aucune autre pièce ne caractérisent que M. [U] a quitté son lieu de travail à la demande de M. [W].

Par ailleurs, l'employeur ne peut reprocher au salarié d'avoir laissé partir M. [U] alcoolisé, en méconnaissance du règlement intérieur, alors que, suivant l'article 7 dudit règlement «'toute personne paraissant en état d'ivresse ou sous l'emprise d'une drogue ne peut être admise à entrer ou séjourner dans l'entreprise (')'» et qu'informé à tout le moins du comportement particulièrement anormal de ce dernier, tenant à sa lenteur un jour d'activité particulièrement dense, et de son intempérance alcoolique, il n'a pris strictement aucune mesure, y compris pour procéder ou faire procéder à un contrôle d'alcoolémie.

Enfin, l'employeur fait état d'autres difficultés dans ses conclusions relativement au comportement du salarié, qui ne sont cependant pas visées dans la lettre de licenciement.

Les faits reprochés au salarié dans la lettre de licenciement n'étant pas établis en leur matérialité, le licenciement de M. [W] sera jugé dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

B) Sur les conséquences du licenciement sans cause réelle et sérieuse

Sur l'indemnité de licenciement

L'article L. 1234-9 du code du travail dispose que': «'Le salarié titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte 8 mois d'ancienneté ininterrompus au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.

Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie réglementaire'».

Selon l'article R.1234-1 du code du travail, «'l'indemnité de licenciement ne peut être inférieure à une somme calculée par année de service dans l'entreprise et tenant compte des mois de service accomplis au-delà des années pleines. En cas d'année incomplète, l'indemnité est calculée proportionnellement au nombre de mois complets'».

Selon l'article R.1234-2 du code du travail :'L'indemnité de licenciement ne peut être inférieure aux montants suivants :

1° Un quart de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années jusqu'à dix ans 2° Un tiers de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années à partir de dix ans.'»

Selon l'article R.1234-4 du code du travail': «'Le salaire à prendre en considération pour le calcul de l'indemnité de licenciement est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié :

1° Soit la moyenne mensuelle des douze derniers mois précédant le licenciement, ou lorsque la durée de service du salarié est inférieure à douze mois, la moyenne mensuelle de la rémunération de l'ensemble des mois précédant le licenciement'; ;

2° Soit le tiers des trois derniers mois. Dans ce cas, toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel, versée au salarié pendant cette période, n'est prise en compte que dans la limite d'un montant calculé à due proportion'».

Ces dispositions, plus favorables que celles de la convention nationale des casinos dont le salarié se prévaut sans être contesté sur ce point par l'employeur, doivent être appliquées.

Le salarié, qui avait 13 ans et 6 mois d'ancienneté, sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il lui a attribué la somme de 9.752,71 €. Il a opéré un calcul de l'indemnité de préavis conforme aux dispositions ci-dessus et non discuté par l'employeur. Il doit être fait droit à sa demande. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents

Selon l'article L.1234-5 du code du travail 'Lorsque le salarié n'exécute pas le préavis, il a droit, sauf s'il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice'».

Selon l'article L.1234-1 du code du travail «'Lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit :

1° S'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus inférieure à six mois, à un préavis dont la durée est déterminée par la loi, la convention ou l'accord collectif de travail ou, à défaut, par les usages pratiqués dans la localité et la profession ;

2° S'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus comprise entre six mois et moins de deux ans, à un préavis d'un mois ;

3° S'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus d'au moins deux ans, à un préavis de deux mois.

Toutefois, les dispositions des 2° et 3° ne sont applicables que si la loi, la convention ou l'accord collectif de travail, le contrat de travail ou les usages ne prévoient pas un préavis ou une condition d'ancienneté de services plus favorable pour le salarié.'».

Selon l'article 25.2 de la convention nationale des casinos du 29 mars 2002': «'Pour les cadres, le préavis réciproque est de 3 mois, sauf faute grave ou lourde.'»

Selon l'article L.3141-24 du code du travail le congé annuel prévu à l'article L.3141-3 ouvre droit à une indemnité égale au dixième de la rémunération brute totale perçue par le salarié au cours de la période de référence.

Le salarié sollicite la somme de 7.979,50 €, correspondant à trois mois de préavis, outre 798 € au titre des congés payés afférents au préavis. Il a opéré un calcul conforme aux dispositions ci-dessus, non discuté par l'employeur. Il doit être fait droit à sa demande. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

En application de l'article L.1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés ci-dessous :

Ancienneté du salarié dans l'entreprise (en années complètes) : 13

Indemnité minimale (en mois de salaire brut) : 3

Indemnité maximale en mois de salaire brut) : 11,5

Le salarié sollicite la confirmation du jugement qui lui a attribué la somme de 29.260 €. L'employeur fait valoir que la somme attribuée, correspondant à 11 mois de salaire, n'est pas justifiée par les éléments du dossier lesquels démontrent notamment que le salarié a retrouvé du travail.

Considérant toutefois l'ancienneté du salarié, son âge, les conséquences psychologiques de la rupture sur l'état de santé du salarié, qui justifie que son médecin traitant lui a prescrit un traitement antidépresseur à compter de mars 2019 et d'un arrêt de travail au mois de mai 2019 pour syndrome anxio-dépressif, ainsi que le caractère abrupt de la rupture, et la justification d'un nouveau travail huit mois suivant le licenciement à des conditions financières et à un niveau de responsabilités nettement moins importants, la somme de 29.260 € allouée par les premiers juges constitue une très juste appréciation du préjudice subi par le salarié. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

Sur le préjudice lié au manquement de l'employeur à son obligation de sécurité

L'employeur est tenu, en application de l'article L.4121-1 du code du travail, d'une obligation de sécurité en ce qui concerne la protection de la santé et de la sécurité de ses salariés.

L'existence d'un préjudice et l'évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond.

Le salarié soutient que compte tenu de la surcharge de travail liée au manque de personnel, il a été dans l'impossibilité de prendre ses congés légaux, a accompli de nombreuses heures supplémentaires, situation ayant engendré une atteinte au principe de la préservation de sa santé physique et mentale, de sa sécurité dans l'entreprise, une aggravation de la pénibilité de l'emploi et une atteinte au droit à la vie de famille. Il fait valoir que cette situation lui génère nécessairement un préjudice indemnisable.

Le salarié établit, au regard du dernier bulletin de salaire, ne pas avoir pris la totalité de ses congés légaux durant les deux années antérieures à celle de son licenciement (solde de 21 jours l'année N, de 30 jours l'année N-1 et de 13 jours l'année N-2) et avoir réalisé un nombre d'heures supplémentaires conséquent (401,83 heures payées), tandis que l'employeur ne fournit aucun élément. Or, la prise de congés payés participe au respect de l'obligation de veiller à la santé et à la sécurité des travailleurs. Ainsi, le manquement de l'employeur est avéré et il est raisonnable d'évaluer le préjudice subi à hauteur de 2.000 €. Le jugement sera infirmé sur ce point.

Sur les autres demandes

L'employeur qui succombe sera condamné aux dépens d'appel et à payer au salarié la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, statuant, publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort :

Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Pau du 14 septembre 2020 hormis concernant la demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,

Statuant de nouveau sur le point infirmé et y ajoutant,

Condamne la société Casino Salies de Béarn à payer à M. [C] [W] une somme de 2.000 € à titre de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de sécurité,

Condamne la société Casino Salies de Béarn aux dépens d'appel,

Condamne la société Casino Salies de Béarn à payer à M. [C] [W] la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Madame CAUTRES-LACHAUD, Présidente, et par Madame LAUBIE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/02361
Date de la décision : 10/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-10;20.02361 ?
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