JN/SB
Numéro 23/053
COUR D'APPEL DE PAU
Chambre sociale
ARRÊT DU 05/01/2023
Dossier : N° RG 20/03009 - N° Portalis DBVV-V-B7E-HWXT
Nature affaire :
A.T.M.P. : demande d'un employeur contestant une décision d'une caisse
Affaire :
S.A.S. [5]
C/
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES LANDES
Grosse délivrée le
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 05 Janvier 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 03 Novembre 2022, devant :
Madame NICOLAS, magistrat chargé du rapport,
assistée de Madame LAUBIE, greffière.
Madame NICOLAS, en application de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame NICOLAS, Présidente
Madame SORONDO, Conseiller
Madame PACTEAU, Conseiller
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTE :
S.A.S. [5]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Maître BELLEGARDE, avocat au barreau de PAU
INTIMEE :
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES LANDES
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Maître SERRANO loco Maître BARNABA, avocat au barreau de PAU
sur appel de la décision
en date du 30 NOVEMBRE 2020
rendue par le POLE SOCIAL DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MONT DE MARSAN
RG numéro : 18/00082
FAITS ET PROCÉDURE
Le 28 juin 2017, M. [G] [V] (le salarié), salarié en qualité de maçon de la société [5] (l'employeur), société de travail intérimaire, a adressé à la caisse primaire d'assurance maladie des Landes (la caisse ou l'organisme social) une déclaration de maladie professionnelle , faisant état d'une «tendinite épaule gauche ».
La demande était accompagnée d'un certificat médical initial du 30 mars 2017 établi par le Docteur [Z] indiquant « tendinite épaule gauche ».
Le 17 octobre 2017, la caisse, après instruction, a notifié à l'employeur sa décision de prendre en charge au titre de la législation sur les risques professionnels la maladie déclarée de « rupture de la coiffe des rotateurs de l'épaule gauche », inscrite au tableau 57 des maladies professionnelles : « affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail ».
Il est constant (en l'absence de production des justificatifs en appel) que l'employeur a contesté l'opposabilité à son égard, de la décision de prise en charge ainsi qu'il suit :
- le 19 décembre 2017 devant la commission de recours amiable (CRA) de l'organisme social, laquelle n'a pas répondu,
- le 14 février 2018, devant le tribunal des affaires de sécurité sociale des Landes, devenu le pôle social du tribunal judiciaire de Mont de Marsan.
Par jugement du 30 novembre 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de Mont de Marsan a :
- déclaré opposable à l'employeur la décision de la caisse tendant à la prise en charge au titre de la législation professionnelle, de la maladie déclarée par le salarié le 28 juin 2017 par le salarié,
- dit que la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle de la maladie professionnelle déclarée le 28 juin 2017 par le salarié s'étend à l'ensemble des arrêts de travail, prestations et soins servis à celui-ci du fait de cette maladie,
- débouté l'employeur de l'intégralité de ses demandes,
- condamné l'employeur à verser à la caisse la somme de 800 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné l'employeur à assumer la charge des entiers dépens engagés depuis le 1er janvier 2019.
Cette décision a été notifiée aux parties, par lettre recommandée avec avis de réception, reçue de l'employeur le 4 décembre 2020.
Le 11 décembre 2020, par lettre recommandée avec accusé de réception adressée au greffe de la cour, l'employeur en a régulièrement interjeté appel.
Selon avis de convocation du 14 juin 2022, contenant calendrier de procédure, les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience du 3 novembre 2022, à laquelle elles ont comparu.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Selon conclusions visées par le greffe le 18 août 2022, reprises oralement à l'audience de plaidoirie, et auxquelles il est expressément renvoyé, l'employeur, la société [5], appelant, demande à la cour de :
- réformer le jugement dont appel,
- constater que la pathologie décrite sur le certificat médical initial ne correspond pas à la désignation de la maladie professionnelle du tableau n°57,
- en conséquence, déclarer inopposable la décision de prise en charge de la pathologie déclarée par le salarié.
Selon conclusions visées par le greffe le 26 septembre 2022, reprises oralement à l'audience de plaidoirie, et auxquelles il est expressément renvoyé, l'organisme social, la CPAM des Landes, intimé, conclut à la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions, au débouté de l'employeur de l'intégralité de ses demandes, et y ajoutant, à la condamnation de celui-ci à lui payer 800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles engagés en cause d'appel, ainsi qu'à supporter les entiers dépens exposés depuis le 1er janvier 2019.
SUR QUOI LA COUR
En application des dispositions de l'article L461-1 du code de la sécurité sociale, « est présumée d'origine professionnelle, toute maladie désignée dans un tableau et contractée dans les conditions qui y sont décrites ».
À ce titre, la maladie telle qu'elle est désignée dans les tableaux des maladies professionnelles est celle définie par les éléments de description et les critères d'appréciation fixés par chacun de ces tableaux.
Au cas particulier, la maladie professionnelle retenue par l'organisme social, comme désignée par le tableau numéro 57A relatif aux affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail, consiste en une « rupture partielle ou transfixiante de la coiffe des rotateurs objectivée par IRM » .
Les parties sont en désaccord sur le point de savoir si cette maladie professionnelle est effectivement caractérisée ou non conformément aux exigences du tableau n° 57A, et concomitamment si la décision de prise en charge est opposable à l'employeur, la contestation de l'employeur, consistant exclusivement à soutenir que la condition relative à la désignation de la maladie dans le tableau 57A, n'est pas remplie, dès lors que :
-la pathologie portée sur le certificat médical initial, concerne une « tendinite de l'épaule gauche »,
-une simple tendinite ne correspond pas à une rupture de la coiffe des rotateurs,
-le fait que le médecin-conseil de la caisse, ait validé la maladie, ne permet pas de justifier que la maladie mentionnée dans le certificat médical initial correspond bien à la maladie dont souffre l'assuré et à une maladie désignée dans un tableau.
La caisse, au contraire, conclut à la confirmation du jugement déféré.
Sur ce,
L'employeur conteste exclusivement le fait que la maladie déclarée soit désignée dans le tableau 57 A.
Les dispositions du tableau 57 A en ce qu'elles concernent le présent litige, sont les suivantes :
Affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail
Désignation des maladies
délai de prise en charge
Liste limitative des travaux susceptibles de provoquer ces maladies
A
épaule
Tendinopathie aiguë non rompue non calcifiante avec ou sans enthésopathie de la coiffe des rotateurs.
30 jours
Travaux comportant des mouvements ou le maintien de l'épaule sans soutien en abduction (**) avec un angle supérieur ou égal à 60° pendant au moins 3 h 30 par jour en cumulé.
Tendinopathie chronique non rompue non calcifiante avec ou sans enthésopathie de la coiffe des rotateurs objectivée par IRM (*).
6 mois (sous réserve d'une durée d'exposition de 6 mois)
Travaux comportant des mouvements ou le maintien de l'épaule sans soutien en abduction (**) :
- avec un angle supérieur ou égal à 60° pendant au moins deux heures par jour en cumulé
ou
- avec un angle supérieur ou égal à 90° pendant au moins une heure par jour en cumulé.
Rupture partielle ou transfixiante de la coiffe des rotateurs objectivée par IRM (*).
1 an (sous réserve d'une durée d'exposition d'un an)
Travaux comportant des mouvements ou le maintien de l'épaule sans soutien en abduction (**) :
- avec un angle supérieur ou égal à 60° pendant au moins deux heures par jour en cumulé
ou
- avec un angle supérieur ou égal à 90° pendant au moins une heure par jour en cumulé.
(*) Ou un arthroscanner en cas de contre-indication à l'IRM.
(**) Les mouvements en abduction correspondent aux mouvements entraînant un décollement des bras par rapport au corps.
Conformément à ce que soutient l'employeur, la maladie qui était visée par la déclaration de maladie professionnelle de même que par le certificat médical initial («tendinite épaule gauche »), de même que la pathologie citée par la notification de prise en charge du 17 octobre 2017 (« rupture de la coiffe des rotateurs de l'épaule gauche »), ne coïncident pas avec la désignation par le tableau 57 A de la maladie prise en charge, s'agissant de « la rupture partielle ou transfixiante de la coiffe des rotateurs objectivée par IRM ».
En revanche, elles figurent bien au tableau 57A, sous les libellés de «tendinopathie ».
Or, il n'y a pas lieu de se limiter à une analyse littérale du certificat médical initial, mais il convient au contraire de rechercher si la pathologie qui est visée, est bien celle désignée par le tableau.
A cet égard:
- il va de soi qu'il n'appartient pas au salarié, de qualifier médicalement sa pathologie, si bien que la désignation faite par le salarié est totalement indifférente;
-le médecin-conseil, a notamment pour mission de vérifier que la pathologie indiquée dans le certificat médical initial correspond- au-delà de la dénomination utilisée par le médecin rédacteur de ce certificat- à une maladie désignée par le tableau des maladies professionnelles sur la base duquel l'instruction a été menée par la caisse.
Or, ce médecin-conseil a expressément indiqué dans la fiche du colloque médico administratif en date du 26 septembre 2017, que la maladie était une « rupture partielle et transfixiante de la coiffe des rotateurs de l'épaule gauche objectivée par IRM », en visant l'I.R.M. pratiqué, et sa date (20 mai 2017), de même qu'en indiquant que les conditions médicales réglementaires du tableau étaient remplies.
Il a ainsi nécessairement constaté l'existence d'une «Rupture partielle ou transfixiante de la coiffe des rotateurs objectivée par IRM (*) », telle que désignée au tableau 57 A.
Il en résulte que la pathologie déclarée et prise en charge correspond bien à une maladie désignée par le tableau numéro 57A .
La contestation n'est pas fondée, et le premier juge sera intégralement confirmé.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
L'équité commande d'allouer à la caisse, la somme de 800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
L'employeur, qui succombe, supportera les dépens exposés en cause d'appel, en sus des dépens de première instance, dont la charge est déjà réglée par la confirmation du jugement déféré.
PAR CES MOTIFS :
La cour, après en avoir délibéré, statuant, publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement rendu par le pôle social du tribunal judiciaire de Mont-de-Marsan en date du 30 novembre 2020 (RG 18/0082)
Y ajoutant,
Condamne la société [5], à payer à la caisse primaire d'assurance maladie des Landes, la somme de 800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société [5] aux dépens exposés en cause d'appel.
Arrêt signé par Madame NICOLAS, Présidente, et par Madame LAUBIE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,