SdF/ND
Numéro 24/2186
COUR D'APPEL DE PAU
3ème CH Spéciale
surendettement
ARRÊT DU 02/07/2024
Dossier : N° RG 23/03350 - N° Portalis DBVV-V-B7H-IW6L
Nature affaire :
Contestation des mesures imposées par la commission de surendettement des particuliers
Affaire :
[M] [G], [B] [E]
C/
Société [29], Etablissement Public SIP [Localité 11], S.A. [24], Etablissement [25] SERVICE CLIENT, Société [26] SERVICE RECOUVREMENT, S.A. [37], S.A. CLAIRSIENNE, Société SGC [Localité 34], S.E.L.A.R.L. [36], Société [33]
copie certifiée conforme délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 02 Juillet 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 11 Juin 2024, devant :
Madame Sylvie de FRAMOND, magistrat chargée du rapport,
assistée de Madame Nathalène DENIS, greffière présente à l'appel des causes,
Sylvie de FRAMOND, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame Sylvie DE FRAMOND, Conseillère faisant fonction de Présidente
Madame Alexandra BLANCHARD, Conseillère
Monsieur Dominique ROSSIGNOL, Conseiller
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTS :
Monsieur [M] [G]
né le 09 novembre 1987 à [Localité 32] (82)
de nationalité française
[Adresse 20]
[Localité 14]
comparant en personne
Madame [B] [E]
née le 12 août 1993 à [Localité 31] (40)
de nationalité française
[Adresse 20]
[Localité 14]
comparante en personne
INTIMES :
Société [29]
[Localité 19]
non comparante, ni représentée, bien que régulièrement convoquée par lettre recommandée avec accusé de réception signé et régulièrement avisée de la date de renvoi
Etablissement Public SIP [Localité 11]
[Adresse 2]
[Localité 11]
non comparant, ni représenté, bien que régulièrement convoqué par lettre recommandée avec accusé de réception signé et régulièrement avisé de la date de renvoi
S.A. [24]
[Adresse 35]
[Adresse 16]
[Localité 22]
non comparante, ni représentée, bien que régulièrement convoquée par lettre recommandée avec accusé de réception signé et régulièrement avisée de la date de renvoi
Etablissement [25] SERVICE CLIENT
Chez [30] - Service surendettement
[Adresse 3]
[Localité 10]
non comparant, ni représenté, bien que régulièrement convoqué par lettre recommandée avec accusé de réception signé et régulièrement avisé de la date de renvoi
Société [26] SERVICE RECOUVREMENT
Chez [27]
[Adresse 7]
[Localité 17]
non comparante, ni représentée, bien que régulièrement convoquée par lettre recommandée avec accusé de réception signé et régulièrement avisée de la date de renvoi
S.A. [37]
[Adresse 5]
[Localité 18]
non comparante, ni représentée, bien que régulièrement convoquée par lettre recommandée avec accusé de réception signé et régulièrement avisée de la date de renvoi
S.A. CLAIRSIENNE
[Adresse 6]
[Adresse 23]
[Localité 9]
non comparante, ni représentée, bien que régulièrement convoquée par lettre recommandée avec accusé de réception signé et régulièrement avisée de la date de renvoi
Société SGC [Localité 34]
[Adresse 8]
[Localité 13]
non comparante, ni représentée, bien que régulièrement convoquée par lettre recommandée avec accusé de réception signé et régulièrement avisée de la date de renvoi
S.E.L.A.R.L. [36]
[Adresse 4]
[Localité 12]
non comparante, ni représentée, bien que régulièrement convoquée par lettre recommandée avec accusé de réception signé et régulièrement avisée de la date de renvoi
Société [33]
Chez [28]
[Adresse 15]
[Localité 21]
non comparante, ni représentée, bien que régulièrement convoquée par lettre recommandée avec accusé de réception signé et régulièrement avisée de la date de renvoi
sur appel de la décision
en date du 11 SEPTEMBRE 2023
rendue par le JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE MONT DE MARSAN
RG : 23/783
EXPOSE DU LITIGE
Le 26 janvier 2023 , la Commission de surendettement des particuliers des Landes a déclaré recevable la demande de traitement de leur situation de surendettement présentée par M. [M] [G] et Mme [B] [E] ;
Le 20 avril 2003, la Commission a établi des mesures consistant en un ré-échelonnement des dettes sur une période de 60 mois par mensualités maximum de 504 € avec un taux d'intérêts de 0'%, avec effacement du solde des dettes en fin de plan, l'endettement total s'élevant à la somme de 11'382,42 € . La commission a constaté que leurs ressources s'élevaient à 2863 € et leurs charges à 2252 € dégageant une capacité maximum de remboursement de 611 € et que les débiteurs ayant déjà bénéficié d'une mesure pendant 24 mois, le solde du délai ne pouvait donc excéder 60 mois
M. [G] et Mme [E] ont contesté ces mesures la mensualité étant trop élevée.
Par jugement réputé contradictoire du 13 novembre 2023, le magistrat à titre temporaire exerçant les fonctions de juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Mont-de-Marsan, a rectifié le montant de la créance de la SA HLM Clairsienne, bailleur, à la somme de 1821,95 €, et une de celles du [24] à la somme de 1012 €, et a fixé le ré-échelonnement des dettes sur une période de 33 mois par mensualités maximum de 350€ avec un taux d'intérêts de 0'%, avec effacement partiel du solde des dettes en fin de plan.
Dans sa décision, le juge a retenu que les débiteurs disposaient de la capacité de remboursement de 611 €, qu'ils devaient faire des efforts de maîtrise de leur budget mais qu'il pouvait être tenu compte de leur besoin de disposer d'un peu de marge pour effectuer les remboursements de manière plus sereine.
Par lettre adressée au Greffe de la Cour d'Appel de Pau le 7 décembre 2023, M. [G] et Mme [E] ont interjeté appel de la décision rendue, faisant valoir que la mensualité fixée à 350 € est trop élevée, et contestent le montant de la créance du [24] n° [XXXXXXXXXX01] qu'ils considèrent s'élever en réalité à ce jour, suite à des prélèvements sur leur compte, à la somme de 999,78 €.
Les parties ont été convoquées à l'audience par lettre recommandée avec accusé de réception.
À l'audience, M. [G] et Mme [E] indiquent que leur situation avait changé lors de leur comparution devant le premier juge qui n'a cependant pas tenu compte des pièces qu'ils avaient apportées.
M. [G] est désormais en CDI depuis décembre 2022 mais en accident de travail ; et Mme [E] est au chômage depuis le 6 mars 2023 et n'a pas le permis de conduire. Ils estiment devoir au [24] une somme de 999,78€.
Les créanciers n'ont ni comparu ni écrit pour faire connaître leurs observations, notamment pas le [24] malgré la contestation des débiteurs sur la dette de restructuration que leur banque leur a imposée.
Les autres créanciers n'ont ni comparu ni écrit pour faire connaître leurs observations.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la vérification de créances':
En vertu de l'article L. 733-12 du code de la consommation le juge saisi d'une contestation sur les mesures imposées par la commissionpeut vérifier même d'office la validité des créances et des titres qui les constatent ainsi que le montant des sommes réclamées.
La cour constate que le 9 décembre 2022, soit juste à la fin du moratoire de 24 mois accordés aux débiteurs le 30 novembre 2020, le [24] a transformé le découvert de leur compte de dépôt s'élevant à 1417,56 € figurant dans le passif arrêté par la commission, en un prêt de 1125,10 € comprenant la somme de 1012 € au titre de l'ancien découvert qui avait été réduit par prélèvement sur le compte et 113,10 € au titre de la structuration.
Le [24] adressait ainsi un courrier du 21 décembre 2023 aux débiteurs précisant ceci :
Dans le cadre de la procédure de surendettement dont vous faites l'objet, vous avez bénéficié d'un réaménagement de votre dette envers notre établissement. Nous mettons en place de nouvelles modalités pour un montant global de 1124,16€. Pour cela votre compte a d'abord été débité de l'encours restant dû au titre de prêt mentionné ci-dessous afin qu'il soit annulé. En contrepartie le montant de la restructuration a été crédité sur votre compte.
La commission notait dans l'état du passif du nouveau dossier déposé le 26 décembre 2022 que les créances au profit du [24] comprenaient la nouvelle dette de 1011,06€ outre le crédit de restructuration de 113,10 €.
Toutefois, le [24] ne justifie pas des conditions de remboursement de la dette initiale de 1417,56 € transformée en un crédit de restructuration qui ne pouvait être octroyé par un prélèvement forcé sur le compte des débiteurs en état de surendettement.
Il s'ensuit que la créance du [24] ne peut être comptabilisée que pour la somme de 1011,16 € correspondant au montant restant dû sur la créance initiale s'élevant à 1417,56 € au titre du découvert bancaire du compte de dépôt [XXXXXXXXXX01], M. [G] et Mme [E] ne justifiant pas de leur côté que cette dette ne s'élèverait plus qu'à la somme de 999,78 €.
Le tableau de remboursement ne comportera donc que cette créance au profit du [24] pour la somme de 1011,16 €.
Sur les mesures contestées':
La Cour d'Appel, saisie d'un recours contre un jugement statuant sur les mesures imposées par la Commission de surendettement, doit réexaminer l'ensemble de la situation du débiteur aux fins de prendre les mesures adaptées à sa situation actualisée au jour de l'arrêt et constater qu'il est manifestement en incapacité de faire face à ses créances échues et à échoir.
Si la durée totale des mesures ne peut excéder sept années, par contre, dès lors que les 7 années ne sont pas épuisées, aucun effacement du solde des dettes ne peut être prononcé si les débiteurs ne sont pas dans une situation irrémédiablement compromise et disposent d'une capacité de remboursement.
Le 1er juge ne pouvait donc fixer des mesures de remboursement pendant 33 mois avec effacement du solde des créances en fin de plan alors que les débiteurs disposaient en l'espèce de 60 mois pour apurer leurs dettes et d'une capacité de remboursement.
Dans tous les cas, la part des ressources nécessaires aux dépenses courantes du ménage est mentionnée dans la décision. Si par commodité les charges sont forfaitisées par la commission de surendettement (1472 € pour trois personnes au foyer en 2024 hors loyer), elles peuvent être prises en compte pour leur montant réel si le débiteur en produit les justificatifs.
Ainsi, en l'espèce, les débiteurs justifient que Mme [E] perçoit des allocations retour à l'emploi d'un montant de 1033 € par mois en 2024, et M. [G] un salaire maintenu à hauteur de 1399 € par mois bien qu'il soit en arrêt pour accident du travail son salaire normal étant de 1650 € par mois. Ils ne perçoivent pas de prestations sociales (allocations logement ou familiales).
Le montant total de leurs revenus actuels s'élève donc à 2432 € par mois.
Leur loyer s'élève à 610 € par mois plus les charges.
Le forfait des charges d'habitation (eau, électricité, chauffage, assurance et téléphone) pour 3 personnes est de 409 €. Sur ces postes, ils dépensent en réalité au total 469 € par mois, soit un dépassement du forfait de 60 €.
Par contre sur les dépenses d'alimentation, de mutuelle, de transport, leurs dépenses ne dépassent pas le forfait de base de 1063 € pour 3 personnes.
Le minimum légal devant être laissé à la disposition de M. [G] et Mme [E] s'élève donc à la somme de 610 + 1063 + 469 = 2142 € au titre de leurs charges totales.
Il en résulte une capacité de remboursement de 290€.
La part maximum légale pouvant être consacrée au remboursement est de 519€ selon le barème de la quotité saisissable en 2024.
L'endettement total de M. [G] et Mme [E] s'élève à '11269,32€ après rectification de la créance du [24].
Les mesures de désendettement peuvent donc consister sur 46 mois, en des mensualités de 250€ maximum permettant d'apurer la totalité du passif.
Il convient de prévoir que les créances ne porteront aucun intérêt afin de privilégier le redressement de la situation de surendettement des débiteurs.
Au regard de la situation actualisée de M. [G] et Mme [E], il y a lieu de réformer les mesures prises par le juge des contentieux de la protection et de fixer les mesures selon le tableau annexé à l'arrêt.
PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant publiquement par mise à disposition, par arrêt réputé contradictoire rendu en dernier ressort
Infirme la décision du juge des contentieux de la protection rendue le 13 novembre 2023 en ce qu'il a fixé les mensualités de remboursement à 350 € par mois pendant 33 mois avec effacement du solde des dettes, sur les créances du [24] et sur les modalités de remboursements des créanciers.
Statuant à nouveau et y ajoutant
Dit que le [24] ne dispose que d'une seule créance à l'égard de M. [G] et Mme [E] d'un montant de 1011,06 € au titre d'un découvert bancaire de leur compte [XXXXXXXXXX01] ;
Dit que M. [G] et Mme [E] s'acquitteront de leurs dettes par mensualités de 250 € maximum pendant une durée de 46 mois apurant la totalité de leur passif,
Dit qu'un tableau récapitulatif des mensualités du plan restera annexé au présent arrêt,
Dit que, pendant la durée du plan, les créances ne porteront pas intérêt et que les paiements seront imputés sur le capital,
Dit que le plan entrera en vigueur le premier jour du mois suivant la notification du présent arrêt,
Rappelle que les dispositions du présent arrêt se substituent à tous les accords antérieurs qui ont pu être conclus entre M. [G] et Mme [E] et les créanciers et que ces derniers doivent donc impérativement suspendre tous les prélèvements qui auraient été prévus pour des montants supérieurs à ceux fixés par cet arrêt et ne peuvent exiger le paiement d'aucune autre somme,
Rappelle que les débiteurs devront prendre directement et dans les meilleurs délais contact avec les créanciers figurant dans la procédure pour la mise en place des modalités de paiement des échéances du plan,
Suspend, pendant toute la durée du présent plan, les mesures d'exécution qui auraient pu être engagées à l'encontre de M. [G] et Mme [E] et rappelle aux créanciers qu'ils ne peuvent exercer aucune voie d'exécution pendant ce délai,
Dit que dans l'hypothèse où l'un des créanciers obtiendrait un titre exécutoire pour un montant supérieur à celui retenu, le paiement de la différence constatée serait suspendu sans intérêt jusqu'à l'achèvement du plan-effacée à l'issue de celui-ci,
Dit que M. [G] et Mme [E] seront déchus du bénéfice de la présente procédure s'ils aggravent leur endettement sans l'accord des créanciers ou du juge chargé du surendettement, ou s'ils ne respectent pas les modalités du présent arrêt, 15 jours après une mise en demeure restée infructueuse d'avoir à remplir leurs obligations
Laisse les frais et dépens à la charge de l'État,
Dit que le présent arrêt sera notifié par lettre recommandée avec avis de réception à chacune des parties et par lettre simple à la Commission de surendettement.
Le présent arrêt a été signé par Madame Sylvie DE FRAMOND, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Madame Nathalène DENIS, greffière suivant les dispositions de l'article 456 du Code de Procédure Civile.
La Greffière La Présidente