N°24/02443
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Cour d'Appel
de Pau
ORDONNANCE
CHAMBRE SPÉCIALE
Contestation Honoraires Avocat du
25 juillet 2024
Dossier N°
N° RG 24/00935 - N° Portalis DBVV-V-B7I-IZWS
Affaire :
[I] [K]
C/
[Y] [G]
Nous, Rémi LE HORS, Premier Président de la cour d'appel de Pau,
Après débats en audience publique le 11 Juillet 2024
Avons prononcé la décision suivante à l'audience du 25 juillet 2024 par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
Avec l'assistance de Madame GABAIX-HIALE, Greffier
ENTRE :
Madame [I] [K]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Demanderesse à la contestation, à l'encontre de l'ordonannce du Bâtonnier de l'ordre des avocats de TARBES, en date du 06 Mars 2024,
Comparante en personne
ET :
Maître [Y] [G]
[Adresse 1]
[Adresse 5]
[Localité 2]
Défendeur à la contestation représenté par Me Isabelle FITAS, avocat au barreau de PAU
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Par acte enregistré au greffe de cette juridiction le 26 mars 2024, [I] [K] conteste auprès du premier président de ce siège la décision du bâtonnier du barreau de Tarbes en date du 6 mars 2024 qui, en rejetant partiellement sa demande en restitution de la somme de 1200 € qu'elle a versée à Me [G] à qui elle avait confié la défense de ses intérêts dans un litige afférent aux vices cachés que présente son immeuble a taxé les honoraires de cet avocat à la somme de 1080 €.
À cet effet, elle expose qu'après avoir bénéficié d'une consultation juridique téléphonique gratuite dispensée par ce professionnel du droit le 28 juin 2023, via le site internet AVOLOI, Me [G] lui a accordé un rendez-vous le 7 juillet 2023, au cours duquel il lui a proposé d'initier un référé et a sollicité le paiement pour ses prestations d'une somme de 1200 € dont elle s'est acquittée ce jour par chèque.
Elle ajoute qu'elle l'a dessaisi de son mandat le 5 octobre 2023.
À l'audience, elle précise que lors du premier entretien, aucune facture ne lui a été remise, aucune convention d'honoraires n'a été soumise à son approbation ; elle affirme qu'elle n'a pas répondu à l'avocat qui lui proposait d'initier un référé eu égard à son état de santé et qu'elle lui a remis le chèque précité par manque d'analyse.
Elle fait valoir encore que le projet d'assignation en référé dont se prévaut l'avocat mentionne une date d'audience antérieure à leur premier entretien, que cet acte a été rédigé postérieurement à son dessaisissement et remis le 11 mars 2024 et qu'il comporte de nombreuses erreurs, plus particulièrement pour être dirigé contre ses voisins alors qu'elle souhaitait diligenter une action contre le vendeur.
Elle conclut à l'infirmation de la décision attaquée et à la taxation des honoraires de Me [G] à la somme de 240 € TTC, eu égard aux diligences accomplies, à savoir le rendez-vous du 7 juillet 2023 de 45 minutes, l'appel téléphonique de l'avocat du 10 août 2023 et l'entretien du 5 octobre 2023 ayant pour objet de mettre fin à son mandat.
Me [G] sollicite la confirmation de l'ordonnance déférée, soulève l'irrecevabilité de l'action de [I] [K] pour contester des honoraires déjà réglés au titre de diligences effectuées ; il ajoute qu'il a reçu la cliente le 7 juillet 2023, rédigé un projet d'assignation en référé expertise, a étudié le dossier, a échangé par voie électronique et téléphonique pour un total de 4h30 à un taux horaire de 200 € hors-taxes.
Il précise lui avoir proposé un remboursement de 240 € et confirme ne pas lui avoir remis de facture.
SUR QUOI
1) Sur la recevabilité du recours
Il ressort des dispositions de l'article 176 du décret numéro 91-1197 du 27 novembre 1991 que la décision du bâtonnier statuant sur le montant et le recouvrement des honoraires d'avocat peut être contestée devant le premier président dans le délai d'un mois par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.
Il sera également rappelé que le point de départ de ce délai se situe au jour de la signature par le destinataire de l'avis de réception de la décision du bâtonnier et au jour où il est émis à l'égard de celui qui forme le recours entre les mains du premier président et ce en application de l'article 668 du code de procédure civile.
Or, en la cause, il sera relevé que l'ordonnance critiquée a été notifiée à [I] [K] le 18 mars 2024, alors que le recours a été émis le 22 mars 2024.
Dès lors, il sera déclaré recevable.
2) Sur la recevabilité de l'action
Il convient de rappeler que l'honoraire accepté et réglé par le client après service rendu ne peut être réduit par le juge de l'honoraire dès lors, d'une part, que le paiement est intervenu librement en toute connaissance de cause et d'autre part que l'avocat ait établi une facture conforme à l'article L. 441-3 du code du commerce.
Or, en la cause, il sera souligné que Me [G] a affirmé à la barre de cette juridiction qu'aucune facture n'a été remise au client.
S'il est produit aux débats néanmoins, une facture numéro 2023/1028 d'un montant de 1200 € TTC établie au nom de [I] [K] datée du 16 août 2023, cet acte ne répond pas aux exigences de la règle susvisée pour avoir été émise postérieurement au règlement intervenu le 7 juillet 2023.
En conséquence, l'action de [I] [K] sera déclarée recevable.
3) Sur le mérite du recours
Il est constant que [I] [K] a sollicité auprès de Me [G] une assistance juridique pour un contentieux afférent aux vices cachés que présenterait un immeuble qu'elle a acquis, aucune convention d'honoraires n'ayant été alors conclue.
S'il est exact que la diligence d'une telle formalité est obligatoire, son défaut d'accomplissement ne prive pas l'avocat du droit de percevoir une rémunération pour ses prestations dès lors que celles-ci sont justifiées, ses honoraires étant alors fixés selon les critères édictés par l'article 10 de la loi numéro 71-1130 du 31 décembre 1971, à savoir les usages, la situation de fortune du client, la difficulté de l'affaire, les frais exposés par l'avocat, sa notoriété et ses diligences.
Or en l'espèce, il sera relevé que Me [G] a accordé un rendez-vous à [I] [K] le 7 juillet 2023, et un second début octobre 2023, des courriers électroniques ont été échangés alors que l'avocat ne justifie pas avoir rédigé et remis au client le projet d'assignation qu'il produit aux débats avant son dessaisissement, sachant que la date d'audience qui est mentionnée, soit le 31 mai 2023 est antérieure au premier rendez-vous.
Bien plus, dans le mail en réponse que la demanderesse a adressé à l'avocat le 20 octobre 2023, celle-ci conteste avoir été informée de la rédaction de cet acte, point non combattu utilement par Me [G], autrement que par une allégation contraire dans un courrier en date du 13 novembre 2023.
Par suite, eu égard au volume et à la nature des diligences accomplies par Me [G], antérieurement à son dessaisissement, ses honoraires seront taxés à la somme de 300 € TTC.
L'ordonnance entreprise sera donc infirmée en ce sens.
PAR CES MOTIFS
Nous, premier président statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Infirmons l'ordonnance du bâtonnier du barreau de Tarbes en date du 6 mars 2024 ayant fixé à la charge de [I] [K] les honoraires de Me [G] à la somme de 1080 € TTC,
Et statuant à nouveau :
Taxons les honoraires de Me [G] à la charge de [I] [K] à la somme de 300 € TTC (trois cents euros toutes taxes comprises),
Condamnons Me [G] aux entiers dépens.
Le Greffier, Le Premier Président,
Sandrine GABAIX-HIALE Rémi LE HORS