LA COUR ;
Sur le moyen unique, pris de la violation des articles 4, 15, 16 de la loi du 22 frimaire an 7, 2 de la loi du 22 avril 1905, 42 de la loi du 13 juillet 1925, 30 de la loi du 3 avril 1926, 1314, 1341, 1347, 1353 c. civ. et 7 de la loi du 20 avril 1810 :
Attendu que la Mutuelle générale française-Vie s'étant rendue propriétaire d'un immeuble constituant tout l'actif de la Société immobilière du Miroir, en achetant successivement, par actes notariés distincts, toutes les actions de cette société, et le tribunal (Tribunal civil de Dijon, 19 novembre 1930) ayant validé la contrainte en payement des droits de vente d'immeuble et de taxe exceptionnelle sur la première mutation, calculés sur le total des prix des cessions augmenté des charges et s'élevant à 537.314 F 70 centimes, le pourvoi, sans méconnaître que la société acheteuse ait eu recours à ces cessions successives d'actions en vue de payer des droits moins élevés que si elle avait acheté directement l'immeuble, soutient qu'il n'y a, dans ces agissements, que l'exercice du droit appartenant à tout redevable de choisir le procédé juridique le moins imposé pour atteindre le but qu'il se propose ;
Mais attendu que s'il n'est interdit par aucune loi, pour se rendre propriétaire d'un immeuble constituant le seul actif d'une société, de procéder à des achats successifs de la totalité des actions de cette société, ce qui évite le payement des droits exigibles sur une vente d'immeuble, c'est la condition que l'opération ainsi faite n'ait pas un caractère fictif et frauduleux ; qu'il appartient à l'Administration de l'enregistrement d'établir, par tous les moyens de preuve compatibles avec la loi fiscale, la véritable nature d'un contrat, sans s'arrêter à la forme extérieure ou à la qualification que lui ont donnée les parties ;
Or, attendu que, en la cause, il résulte de nombreux faits et circonstances, régulièrement parvenus à la connaissance de l'Administration et énumérés par le tribunal, qu'il existe des présomptions graves, précises et concordantes que les achats successifs d'actions sont fictifs ; qu'en effet, les différentes cessions ont été réalisées à des intervalles très rapprochés ; qu'elles ont été les seules opérations effectuées par la Société du Miroir, laquelle n'ayant établi ni titres d'actions, ni registres sociaux, ne se présentait pas comme une société destinée à durer ; qu'il y avait, en réalité, avant ces cessions, accord entre les deux sociétés sur le transfert de la propriété de l'immeuble, et qu'elles ont été concertées en vue de masquer la vente à l'Administration et d'éluder le payement de l'impôt ; d'où il suit que le jugement attaqué a pu statuer comme il l'a fait, sans violer aucun des textes visés au moyen ;
Par ces motifs, rejette.